Tribunal administratif de Toulouse, 26 avril 2016, n° 1600198

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Sur la décision

Référence :
TA Toulouse, 26 avr. 2016, n° 1600198
Juridiction : Tribunal administratif de Toulouse
Numéro : 1600198

Sur les parties

Texte intégral

TRIBUNAL ADMINISTRATIF jmt

DE TOULOUSE

N°1600198

______________

Mme Y X

______________ RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

M. A B

Juge des référés AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

______________

Ordonnance du 26 avril 2016 Le tribunal administratif de Toulouse,

______________

Le président, juge des référés

54-03-011

C

Vu la procédure suivante :

Par une requête et un mémoire complémentaire, enregistrés le 15 janvier 2016 et le 28 janvier 2016, Mme Y X, représentée par Me Guettard, demande au juge des référés :

1°) d’ordonner, en application des dispositions de l’article R. 532-1 du code de justice administrative, une expertise aux fins de déterminer et d’évaluer le préjudice corporel qu’elle a subi à l’occasion d’une manifestation organisée le 21 février 2015 à Toulouse (31000) ;

2°) de mettre hors de cause le préfet de police de Paris qu’elle avait initialement appelé dans la cause en qualité de représentant de l’Etat et d’y attraire le préfet de la Haute-Garonne, représentant compétent de l’Etat sur le territoire de la commune de Toulouse ;

Elle soutient que :

— alors qu’elle se trouvait le samedi 21 février 2015 au niveau du Monument aux Morts sur les allées G H I à Toulouse et alors qu’elle tentait de s’éloigner d’un attroupement d’individus opposés à la construction du barrage de Sivens qui arrivaient du boulevard Carnot et prenaient la direction de la rue de Metz, elle a été atteinte par un projectile qui l’a blessée à la jambe droite, pensant dans un premier temps qu’il s’agissait d’un projectile lancé par les manifestants puis, dans un second temps qu’il s’agissait plutôt d’une bombe lacrymogène lancée par les forces de l’ordre ;

— elle a porté plainte le lendemain auprès du commissariat de police du Rempart Saint Etienne et s’est rendue auprès de l’unité de médecine légale de Rangueil où le médecin légiste a établi un compte rendu médical qui ne lui jamais été remis mais seulement versé au dossier d’enquête pénale à laquelle elle n’a pas eu accès, l’affaire n’étant toujours pas enregistrée auprès des services du Parquet ;

— la responsabilité de l’Etat étant susceptible d’être engagée sur le fondement de l’article L. 211-10 du code de la sécurité intérieure, elle est fondée à solliciter la mise en œuvre d’une expertise judiciaire afin de déterminer le préjudice subi à l’occasion du rassemblement des opposants au projet de barrage de Sivens au centre-ville de Toulouse.

Par un mémoire en défense, enregistré le 6 février 2016, la caisse primaire d’assurance maladie de la Haute-Garonne, représentée par la Selarl Thevenot & Associés, sollicite qu’il soit statué ce que de droit sur la mesure d’expertise sollicitée et que ses droits soient réservés dans l’attente du dépôt du rapport d’expertise ;

Par un mémoire en défense, enregistré le 11 février 2016, le préfet de police sollicite sa mise hors de cause dès lors qu’aucun service placé sous son autorité n’est intervenu à Toulouse pour les faits dont s’agit ;

Par un mémoire en défense, enregistré le 18 février 2016, le préfet de la Haute-Garonne conclut au rejet de la requête ou au prononcé d’un sursis à statuer dans l’attente de la communication du compte rendu médical du médecin légiste qui a examiné la requérante ;

Il soutient que :

— la responsabilité pour faute de l’Etat ne peut être engagée dès lors que la requérante ne démontre nullement l’existence d’une faute des services de police, aucune preuve attestant que le projectile à l’origine de la blessure de l’intéressée était bien une grenade lacrymogène ;

— la responsabilité de l’Etat n’est pas davantage susceptible d’être recherchée sur le fondement de l’article L. 211-10 du code de sécurité intérieure dès lors qu’il ressort des pièces jointes au dossier et des rapports de police que les violences commises lors de cette manifestation ont été le fait de « casseurs » ;

— en tout état de cause, l’utilité de la mesure d’expertise sollicitée n’est pas démontrée dès lors que le compte rendu médical du médecin légiste n’a pas été communiqué alors qu’il s’agit d’une pièce essentielle de la procédure dont il convient d’attendre la communication.

Mme X a été admise au bénéfice de l’aide juridictionnelle totale par décision du 2 décembre 2015.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de justice administrative ;

Sur la demande de mise hors de cause au stade de l’expertise du préfet de police :

1. Considérant qu’il ressort des termes mêmes de la requête et qu’il n’est pas contesté qu’aucun service placé sous l’autorité du préfet de police n’est intervenu à Toulouse le 21 février 2015 pour les faits dont s’agit ; que, par suite, il n’apparaît pas utile de l’attraire à la procédure d’expertise ;

Sur la demande d’expertise :

2. Considérant qu’aux termes de l’article R. 532-1 du code de justice administrative : « Le juge des référés peut, sur simple requête et même en l’absence de décision administrative préalable, prescrire toute mesure utile d’expertise ou d’instruction. Il peut notamment charger un expert de procéder, lors de l’exécution de travaux publics, à toutes constatations relatives à l’état des immeubles susceptibles d’être affectés par des dommages ainsi qu’aux causes et à l’étendue des dommages qui surviendraient effectivement pendant la durée de sa mission. Les demandes présentées en application du présent chapitre sont dispensées du ministère d’avocat si elles se rattachent à des litiges dispensés de ce ministère. » ;

3. Considérant que Mme X a été victime d’un projectile le 21 février 2015 à Toulouse à l’occasion d’une manifestation ; qu’elle sollicite une mesure d’expertise aux fins d’évaluer l’étendue des préjudices résultant de la blessure occasionnée par ce projectile ; qu’il n’est pas établi de façon certaine que la responsabilité de l’Etat est insusceptible d’être engagée devant le juge administratif ; que, dans la perspective du recours en responsabilité susceptible d’être engagé par la requérante, la mesure tendant à la détermination des préjudices subis par l’intéressée du fait du projectile lancé le 21 février 2015 entre dans le champ d’application des dispositions précitées de l’article R. 532-1 du code de justice administrative et présente un caractère utile ; qu’il y a lieu, par suite, de faire droit à cette demande et de fixer la mission de l’expert comme il est dit à l’article 3 ci-après de la présente ordonnance ;

O R D O N N E :

Article 1er : Le préfet de police est déclaré hors de cause.

Article 2 : Il sera procédé à une expertise contradictoire entre Mme Y X, d’une part et le préfet de la Haute-Garonne, d’autre part, en présence de la caisse primaire d’assurance maladie de la Haute-Garonne et d’Harmonie Mutuelle.

Article 3 : L’expert aura pour mission :

— d’examiner Mme Y X et prendre connaissance de son entier dossier médical ;

— de décrire l’état de santé de Mme Y X antérieurement à la blessure qui lui a été occasionnée par le projectile qui l’a atteinte le 21 février 2015 à Toulouse ;

— d’apprécier, en tous ses éléments, le préjudice corporel qui a résulté pour lui de l’accident dont elle a été victime le 21 février 2015 ;

— de fixer le taux d’invalidité permanente partielle dont elle reste atteinte et déterminer la répercussion de cette invalidité sur l’activité professionnelle de l’intéressée et sur ses conditions d’existence, donner toute précision quant à la durée des éventuelles incapacités temporaires (totale et/ou partielle), d’évaluer l’importance des souffrances subies, du préjudice esthétique et d’agrément de la victime, de donner, plus généralement, toute indication utile à la détermination des différents éléments de son préjudice corporel ;

— de retracer l’évolution de son état de santé et de faire connaître si, et le cas échéant, à quelle date, son état de santé peut être regardé comme consolidé ;

— d’indiquer, dans l’hypothèse où son état ne serait pas consolidé, s’il est susceptible d’évoluer en aggravation ou en amélioration ; dans l’affirmative, fournir toutes précisions utiles sur cette évolution, sur son degré de probabilité et, dans le cas où un nouvel examen serait nécessaire, mentionner dans quel délai ;

— de fournir, plus généralement, tous éléments susceptibles de permettre d’éclairer le juge du fond éventuellement saisi du litige ;

Article 4 : Le docteur J K-L, domicilié à XXX, est désigné pour procéder à l’expertise.

Article 5 : L’expert, qui pourra déposer un pré-rapport s’il le juge utile, accomplira sa mission dans les conditions prévues par les articles R. 621-2 à R. 621-14 du code de justice administrative.

Article 6 : L’expert notifiera son rapport aux parties dans les conditions prévues par l’article R. 621-9 du code de justice administrative et déposera son rapport en deux exemplaires au greffe du Tribunal dans le délai de quatre mois à compter de la notification de la présente ordonnance.

Article 7 : Les frais et honoraires dus à l’expert seront taxés ultérieurement par ordonnance du président du Tribunal qui désignera la ou les parties qui en assumeront la charge conformément à l’article R. 621-11 du code susvisé.

Article 8 : La présente ordonnance sera notifiée à Mme Y X, au préfet de la Haute-Garonne, au préfet de police, à la caisse primaire d’assurance maladie de la Haute-Garonne, à Harmonie Mutuelle et au docteur J K-L, expert.

Fait à Toulouse, le 26 avril 2016

Le président, juge des référés,

A B

La République mande et ordonne au préfet de la Haute-Garonne en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente ordonnance.

Pour expédition conforme :

Le greffier,

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