Tribunal de grande instance de Marseille, 1re chambre civile, 28 mai 2015, n° 12/04309

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
TGI Marseille, 1re ch. civ., 28 mai 2015, n° 12/04309
Juridiction : Tribunal de grande instance de Marseille
Numéro(s) : 12/04309

Texte intégral

TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE

DE MARSEILLE

PREMIERE CHAMBRE CIVILE

JUGEMENT N°15/ DU 28 Mai 2015

Enrôlement n° : 12/04309

AFFAIRE : M. A Y( Maître B C de la SCP C/C & ASSOCIES)

C/ M. D X (Maître E F de la SCP SCP F- LE LANDAIS)

DÉBATS : A l’audience Publique du 26 Mars 2015

COMPOSITION DU TRIBUNAL lors des débats :

Président : CALLOCH Pierre, Vice-Président

G H, Juge (juge rédacteur)

I J, Juge

Greffier lors des débats : ALLIONE Bernadette

Vu le rapport fait à l’audience

A l’issue de laquelle, les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le : 28 Mai 2015

Jugement signé par CALLOCH Pierre, Vice-Président et par SANCHEZ Céline, Greffier à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

[…]

réputée contradictoire et en premier ressort

NOM DES PARTIES

DEMANDEUR

Monsieur A Y

né le […] à NANCY

de nationalité Française,

[…]

Profession : Médecin chirurgien ophtalmologue

représenté par Maître B C de la SCP C/C & ASSOCIES, avocats au barreau de MARSEILLE,

C O N T R E

DEFENDEURS

Monsieur D X

né le […] à […]

[…]

Profession : Médecin chirurgien ophtalmologue

représenté par Maître E F de la SCP F- LE LANDAIS, avocat postulant au barreau de MARSEILLE, et Me Isabelle LUCAS-BALOUP, avocat plaidant au barreau de PARIS,

S.A. CEGEC,

prise en la personne de ses représentants légaux

dont le […]

représentée par Me Philippe VAQUIER, avocat au barreau de MARSEILLE,

Monsieur K L,

[…]

Profession : expert comptable, Commissaire aux comptes

représenté par Me Philippe VAQUIER, avocat au barreau de MARSEILLE,

Société de fait X Y

prise en la personne de ses associés

dont le […]

défaillant

FAITS, MOYENS ET PROCEDURE

M. D X et M. A Y, chirurgiens spécialisés en ophtalmologie, ont conclu une convention en date du 27 juillet 2001, dénommée “ contrat d’exercice à frais communs”, comprenant un article 6 intitulé “ dépenses communes”.

Par acte en date du 6 mars 2012, M. A Y a fait assigner M. D X devant le tribunal de grande instance de Marseille afin de l’entendre condamné à lui payer une somme de 120ྭ959 € à titre de remboursement de l’économie réalisée procédant selon lui “ de la réduction corrélative de ces contributions” et une somme de 20ྭ000 € à titre de dommages et intérêts en raison de fautes commises (procédure n° 12/ 4309).

Il fait valoir qu’il a acquis une partie de la clientèle de M. D X, ce dernier prenant l’obligation de ne plus exercer un certain nombre d’actes médicaux et qu’ils ont conclu en ce sens le “contrat d’exercice à frais communs”. Il précise que les difficultés sont apparues lorsque M. D X a décidé d’étendre sa pratique médicale et donc d’empiéter sur l’exercice qui lui était jusqu’alors réservé et qu’il a dû s’y opposer. Il soutient que M. D X a pour riposter donné l’ordre à leur expert-comptable, la société CEGEC, opérant par l’intermédiaire de M. K L, expert-comptable et commissaire aux comptes, de rétablir les comptes sociaux de la société de fait X/Y pour les années 2003, 2004, 2005, 2006 et 2007, notamment des contributions dues, en appliquant une répartition des charges en fonction du nombre de consultations assurées par chacun d’eux et non pas au prorata des honoraires respectivement réalisés par chacun d’eux, alors qu’ils avaient renoncé tous les deux à l’application de cette répartition prévue à l’article 6 de la convention.

Par actes en dates des 27 février et 1er mars 2013, M. A Y a fait assigner la société CEGEC et M. K L, sollicitant la jonction des deux procédures et la condamnation des défendeurs à lui payer la somme de 130ྭ000 € en réparation du préjudice subi. Il leur reproche d’avoir commis une faute en rétablissant les comptes sociaux de la société de fait X/Y pour les années 2003, 2004, 2005, 2006 et 2007 sur la seule demande de M. D X et d’avoir appliqué une répartition des charges en fonction du nombre de consultations assurées par chacun d’eux, alors que les deux médecins avaient renoncé à telle répartition et que d’ailleurs elle n’était pas opérée depuis 2003, comme elle aurait du l’être s’ils avaient entendu respecter l’article 6 de la convention (procédure n° 13/3077).

Par ordonnance d’incident du 12 novembre 2013 le juge de la mise en état a ordonné la jonction de la procédure 13/3077 à la procédure 12/4309.

Aux termes de ses dernières conclusions déposées par le RPVA le 7 avril 2014, M. A Y demande au tribunal à titre principal, de juger que les parties ont renoncé au bénéfice de la répartition des charges en fonction des consultations réalisées par chacun d’elles, de juger qu’il n’est pas débiteur des contributions reposant sur une telle répartition et de juger qu’il a supporté une contribution excédant celle à laquelle il était tenu s’établissant à un montant de 120ྭ959 € sauf à parfaire. Il demande au tribunal de juger que M. D X doit le remboursement de cette somme et de le condamner à lui payer la somme de 120 959 €, sauf à parfaire avec intérêts de droit courants à compter de chaque 31 décembre de chaque exercice selon décompte à parfaire. Il sollicite la condamnation in solidum de la société CEGEC et de M. K L à lui verser la somme de 130ྭ000 € sauf à parfaire en réparation du préjudice subi procédant du montant des sommes qui lui sont réclamées par M. D X et d’un trouble moral, professionnel et déontologique et pour avoir de leur seule autorité, et en tout état sans avoir obtenu l’accord de tous les associés, effectué au cours de l’année 2008 une restauration des comptes de répartition opérée selon la clé reposant sur le nombre de consultations réalisées à laquelle les associés avaient renoncée et de condamner M. D X à lui payer la somme de 20ྭ000 € en réparation des fautes commises. À titre subsidiaire, il demande au tribunal de juger que la répartition des charges reposant sur les consultations réalisées par les praticiens impose de retenir dans les différents actes ceux du praticien et ceux de son collaborateur et de juger que l’établissement des comptes selon cette répartition rend M. D X débiteur d’une somme de 127ྭ777 €, sauf à parfaire. Il sollicite la condamnation de celui-ci à lui payer cette somme avec intérêts. Il sollicite la condamnation in solidum de la société CEGEC et de M. K L à le garantir de toute éventuelle condamnation qui serait prononcée à son encontre et à lui verser la somme de 130ྭ000 € à titre de dommages et intérêts pour la faute professionnelle qu’ils ont commise dans l’établissement des comptes. En tout état de cause, il demande au tribunal de désigner un expert judiciaire pour faire le compte entre les parties selon la méthode de répartition que le juge déterminera et conclut au rejet de la demande reconventionnelle en paiement de M. D X et de toutes demandes formées à son encontre. Il sollicite une somme de 5000 € en application de l’article 700 du code de procédure civile ainsi que l’exécution provisoire.

Suivant conclusions déposées par le RPVA le 21 mars 2014, M. D X demande au tribunal de constater que les termes de l’article 6 du contrat d’exercice signé entre les parties le 27 juillet 2001 ne sont pas équivoques et de débouter en conséquence M. A Y de l’intégralité de ses demandes. Il fait valoir d’une part que les deux praticiens n’ont jamais entendu renoncer à l’application de cet article qui prévoyait à compter du 1 er septembre 2003 une répartition des charges en fonction des consultations réalisées et que d’autre part malgré de nombreux rappels et mises en demeure M. A Y n’a pas respecté ses obligations contractuelles. Il s’oppose à une expertise. À titre reconventionnel, il sollicite la condamnation de M. A Y au paiement de sa quote-part à hauteur de 113ྭ127 €, au paiement d’une somme de 20ྭ000 € en réparation du préjudice moral et professionnel subi et 15ྭ000 € en application de l’article 700 du code de procédure civile, avec exécution provisoire.

Selon conclusions enregistrées par le greffe le 6 décembre 2013, la société CEGEC et M. K L concluent au débouté. Ils font valoir qu’ils n’ont commis aucune faute dans leur mission comptable. Ils précisent qu’ils n’ont fait qu’appliquer strictement aux comptes sociaux et aux déclarations fiscales la clé de répartition contractuellement convenue entre les deux chirurgiens. Ils arguent en outre que le demandeur n’a jamais allégué que les comptes sociaux étaient faux et qu’il s’est d’ailleurs vigoureusement opposé en 2010 à une expertise judiciaire des comptes sollicitée par M. D X, ce qui est manifestement la preuve qu’il ne suspectait aucune erreur de leur part. Ils exposent que M. A Y a abusé de son droit d’agir en justice, les assignant après que M. D X ait formulé ses demandes reconventionnelles, pour tenter de leur faire supporter les prétendues conséquences d’une erreur pour l’utilisation prorogée de la clé de répartition reposant sur les honoraires des praticiens au-delà de l’année 2003, ce qui est selon eux parfaitement fantaisiste. Ils sollicitent en conséquence sa condamnation à leur payer à chacun une somme de 5000 € à titre de dommages et intérêts outre une somme de 2000 € en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

L’ordonnance de clôture a été rendue le 27 mai 2014.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur la demande en paiement à l’encontre de M. D X

Il résulte des dispositions de l’article 1134 du Code civil que les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites et de celles de l’article 9 du code de procédure civile qu’il incombe à chaque partie de prouver conformément à la loi les faits nécessaires au succès de sa prétention.

En l’espèce, M. A Y demande la condamnation de M. D X à lui payer la somme de 120ྭ959 € correspondant à l’économie que celui-ci aurait réalisée suite à la réduction de ses contributions du fait de l’application de la mauvaise clé de répartition des dépenses.

Il convient d’observer que le 27 juillet 2001, M. A Y et M. D X ont conclu “un contrat d’exercice à frais communs” versé aux débats dont l’article 6 intitulé“ dépenses communes” stipule que:

“ La répartition des frais communs ci-dessus énoncés et les charges de la SCM “ centre d’ophtalmologie Monticelli” s’effectuera entre les associés de la manière suivante:

- pendant les deux premières années de l’association (21 août 2001- 1er septembre 2003): au prorata des honoraires respectivement réalisés par chacun d’eux en ce compris les rétrocessions éventuellement réglées au titre de la garantie d’honoraires due par le docteur X au docteur Y.

Toutefois, pendant ses deux premières années (21 août 2001- 1er septembre 2003), le partage de l’appel des provisions pour les frais communs et l’alimentation du compte bancaire commun se feront à hauteur de deux tiers par le docteur Z et d’un tiers par le docteur Y.

La régularisation des comptes de chacun de ces deux exercices sera effectuée respectivement au 1er septembre 2002 et au 1er septembre 2003, en application du principe de répartition des frais prévus ci-dessus (article six alinéa 1).

- Pour les années suivantes, à compter du 2 septembre 2003, les frais seront répartis en fonction du nombre de consultations assurées par chacun des praticiens au cours de l’exercice précédent, avec régularisation annuelle au 1er septembre de chaque année.”

En application de cette convention, qui fait la loi des parties, il appartient à M. A Y, pour pouvoir voir valablement prospérer ses demandes, de rapporter la preuve de ce que M. D X et lui-même auraient renoncé à la méthode de répartition des frais en fonction du nombre de consultations pour poursuivre délibérément une répartition des dépenses au prorata des honoraires réalisés par chacun d’eux, au-delà du 1er septembre 2003; or, il sera constaté qu’il ne ressort d’aucune des pièces versées aux débats aucun avenant au contrat d’exercice à frais communs du 27 juillet 2001, ni même aucun échange de correspondances ou de mails établissant un accord entre les deux praticiens modifiant l’article 6 de ladite convention; au contraire, il résulte de ces éléments, notamment de nombreux mails à compter du 11 mai 2006, que M. A Y était manifestement en désaccord avec M. D X sur la clé de répartition qui devait être adoptée à compter de 2003 et que ce dernier n’a eu de cesse de réclamer son exécution, ce qui ne saurait bien évidemment constituer une faute de sa part.

Au regard de ces éléments, M. A Y, à qui incombe la charge de la preuve, n’établit pas que l’article 6 de la Convention du 27 juillet 2001 aurait été modifiée d’un commun accord avec M. D X pour poursuivre au-delà du 1er septembre 2003 la répartition des dépenses au prorata des honoraires respectivement réalisés par chacun d’eux, alors qu’il s’agit là d’une condition déterminante pour l’autoriser à réclamer la condamnation en paiement de M. D X de la somme de 120 959 euros. En conséquence, M. A Y sera débouté de ses demandes en paiement à son encontre.

Sur la demande d’expertise comptable

M. A Y n’établit pas, même que très partiellement, que les comptes établis par M. K L sont faux et que son analyse financière du 22 mars 2012 par lequel il le reconnaît débiteur d’une somme de 113ྭ127 € est entachée d’erreurs; il convient de rappeler qu’une mesure d’instruction ne peut pas être ordonnée en vue de suppléer la carence de la partie dans l’administration de la preuve; en conséquence il n’apparaît pas nécessaire, ni justifié de faire droit à la demande en désignation d’un expert judiciaire pour faire les comptes entre les parties.

Sur les demandes formées à l’encontre de la société CEGEC et de M. K L

Il y a lieu de relever, en premier lieu, que M. A Y, lors de la signature de la convention du 27 juillet 2001 était parfaitement informé de ce que la clé de répartition des dépenses devait changer à compter du 1er septembre 2003 pour être réparties non plus en fonction des honoraires mais en fonction du nombre de consultations, en second lieu, qu’il ne saurait être reproché à la société CEGEC et à M. K L d’avoir maintenu par erreur une clé de répartition en fonction des honoraires à compter du 1er septembre 2003 et d’avoir effectué au cours de l’année 2008 une restauration des comptes de répartition selon le nombre de consultations réalisées dès lors que M. A Y avait connaissance de la bonne clé de répartition applicable dès le 1er septembre 2003, qu’il ne pouvait déroger au règlement de ses charges selon cette clé de répartition, malgré ses objections tout défaut de paiement relevant de sa seule responsabilité et qu’en troisième lieu il ne caractérise aucun préjudice qui aurait un lien de causalité directe avec les fautes reprochées à la société CEGEC et à M. K L. Dans ces conditions, M. A Y sera débouté de toute ses demandes à leur encontre.

Sur la demande reconventionnelle de M. D X

Il résulte de l’état comptable produit aux débats que M. A Y est débiteur en exécution de la convention du 27 juillet 2001 de la somme de 113 127 €; aucun élément comptable produit par M. A Y permet de douter de l’exactitude de ce montant clairement calculé par l’expert comptable et rien ne justifie de détailler parmi les actes, ceux du praticien et ceux de son collaborateur, la convention ne faisant expressément référence qu’au nombre de consultations effectuées par chacun des praticiens, de sorte que M. D X ne saurait être reconnu débiteur d’une somme de 127ྭ777 € pour une répartition des charges effectuées en fonction de des consultations réalisées, ce chiffre avancé par le demandeur n’étant au demeurant nullement justifié. En conséquence, M. A Y sera condamné à payer la somme globale de 113 127 € à M. D X et sera débouté de sa demande en paiement à son encontre d’une somme de 127ྭ777 €.

Sur les autres demandes

M. D X ne caractérise ni l’étendue ni la nature du préjudice moral et professionnel dont il demande réparation; il sera débouté de sa demande en dommages et intérêts.

L’intention de nuire ou la mauvaise foi de M. A Y n’étant pas rapportée, son action en justice ne saurait être regardée comme ayant dégénéré en abus de droit; la société CEGEC et M. K L seront déboutés de leur demande en dommages et intérêts.

M. A Y succombant à la procédure sera condamné à payer à M. D X à la société CEGEC et à M. K L, chacun, la somme de 1000 € en application de l’article 700 du code de procédure civile et supportera les dépens.

Compte tenu de l’ancienneté du litige l’exécution provisoire sera ordonnée.

PAR CES MOTIFS

Le tribunal, statuant par jugement contradictoire et en premier ressort,

Déboute M. A Y de l’intégralité de ses demandes dirigées tant à l’encontre de M. D X que de la société CEGEC et de M. K L.

Déboute M. A Y de sa demande d’expertise.

Condamne M. A Y à payer à M. D X la somme de 113ྭ127 €.

Dit que cette somme de 113ྭ127 € portera intérêts au taux légal depuis la sommation de payer du 5 mai 2009 avec anatocisme ainsi qu’il est prévu à l’article 1154 du Code civil.

Déboute M. D X de sa demande de dommages et intérêts au titre du préjudice moral et professionnel.

Déboute la société CEGEC et M. K L de leur demande de dommages et intérêts pour procédure abusive.

Condamne M. A Y à payer à M. D X, à la société CEGEC et à M. K L, chacun, la somme de 1000 € en application de l’article 700 du code de procédure civile

Condamne M. A Y aux dépens.

Ordonne l’exécution provisoire.

AINSI JUGE ET PRONONCE PAR MISE A DISPOSITION AU GREFFE DE LA PREMIERE CHAMBRE CIVILE DU TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE MARSEILLE LE 28 Mai 2015

LE GREFFIER LE PRESIDENT

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Textes cités dans la décision

  1. Code de procédure civile
  2. Code civil
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