Tribunal de grande instance de Melun, Juge de l'expropriation, 11 juillet 2013, n° 12/00016

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
TGI Melun, juge de l'expropriation, 11 juill. 2013, n° 12/00016
Juridiction : Tribunal de grande instance de Melun
Numéro(s) : 12/00016

Texte intégral

TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE

DE MELUN

SERVICE DES EXPROPRIATIONS

EXPRO 12/00016

Opération: Aire d’accueil intercommunale des gens du voyages à Mitry mory

parcelle cadastrée BH 27 d’une superdficie de […]

JUGEMENT DU 11 Juillet 2013

Minute 2013/

DEMANDEUR:

SYNDICAT MIXTE D’ETUDES,DE PROGRAMMATION ET DE REV ISION DU SCHEMA DIRECTEUR DE MARNE NORD

[…]

[…]

[…]

assisté de la SCP ARENTS TRENNEC, avocats au barreau de MEAUX

DÉFENDEURS :

G H épouse A I

[…]

[…]

I AF AG A

[…]

[…]

J X

[…]

[…]

K L épouse X

[…]

[…]

R AH N X épouse Y

[…]

[…]

M X épouse Z

[…]

[…]

AA AB AC veuf de Mme H N

[…],63

[…]

AD AB AC

[…]

[…]

S.N.C. X

[…]

[…]

représentés par la SCP LACHAUD MANDEVILLE COUTADEUR & ASSOCIES, avocats au barreau de PARIS

ET EN PRÉSENCE DU COMMISSAIRE DU GOUVERNEMENT

représenté par Jérôme BOURDET

adresse : TRESORERIE GENERALE DE SEINE ET MARNE

[…]

Service des évaluations Domaniales- […]

[…]

JUGE DE L’EXPROPRIATION :

O P

Vice-Président au Tribunal de Grande Instance de Melun (77), désignée Juge de l’expropriation par ordonnance de Monsieur le Premier Président de la Cour d’Appel de PARIS par ordonnance du 4 janvier 2010.

GREFFIER:

Myriam AE

A l’audience publique tenue le 20 Juin 2013 les avocats des parties ont été entendus en leurs plaidoiries et Monsieur le commissaire du gouvernement en ses conclusions. Puis l’affaire mise en délibéré au 11 Juillet 2013. A la date indiquée, l’audience tenue par le même magistrat assisté du même greffier, le jugement suivant a été rendu :

Par arrêté en date du 23 août 2010, le préfet de la SEINE-ET-MARNE a déclaré d’utilité publique les acquisitions foncières par le Syndicat Mixte Intercommunal d’Etudes, de programmation et de Révision du Schéma Directeur de Marne Nord en vue de la réalisation d’une aire d’accueil intercommunale des gens du voyage sur le territoire de la commune de […].

Par arrêté en date du 12 avril 2011, le Préfet de la SEINE-ET-MARNE a déclaré cessibles au profit du Syndicat Mixte Intercommunal, les parcelles de terrains situées sur la commune de […] nécessaires à l’opération ci-dessus dont celle cadastrée […] appartenant à Monsieur I A, Madame G H épouse A, Monsieur J X, Madame K L épouse X, Madame R X épouse Y, Madame S X épouse Z, Monsieur AA AB AC et Monsieur AD AB AC et exploitée par la SNC X.

Par ordonnance en date du 26 mai 2011, le juge de l’expropriation a déclaré expropriée au profit du Syndicat Mixte Intercommunal la parcelle visée par la procédure.

Monsieur I A, Madame G H épouse A, Monsieur J X, Madame K L épouse X, Madame R X épouse Y, Madame S X épouse Z, Monsieur AA AB AC et Monsieur AD AB AC ayant rejeté son offre d’indemnisation, le Syndicat Mixte Intercommunal d’Etudes, de programmation et de Révision du Schéma Directeur de Marne Nord a saisi le juge de l’expropriation par requête parvenue au secrétariat-greffe le 5 avril 2012.

Le transport sur les lieux a été effectué le 3 décembre 2012.

Monsieur le Commissaire du Gouvernement a conclu le 21 novembre 2012 et le 13 février 2013. Il a communiqué une note en délibéré le 21 mars 2013.

Le Syndicat Mixte Intercommunal a déposé un mémoire complémentaire le 18 février 2013 et des conclusions le 10 et le 17 juin 2013.

Monsieur I A, Madame G H épouse A, Monsieur J X, Madame K L épouse X, Madame R X épouse Y, Madame S X épouse Z, Monsieur AA AB AC, Monsieur AD AB AC et la SNC X ont déposé leur mémoire en réponse le 26 novembre 2012 et un mémoire complémentaire le 13 février 2013 et le 11 juin 2013.

L’affaire a été examinée et plaidée à l’audience du 21 février 2013 et a été mise en délibéré au 29 mars 2013.

Par note en délibéré en date du 26 mars 2013, l’expropriant a déclaré se désister. En réponse, et par note du 28 mars 2013, l’avocat des expropriés a fait savoir que ce désistement était tardif et que ces derniers maintenaient leurs prétentions. Une réouverture des débats a alors été ordonnée.

A l’audience du 20 juin 2013, l’affaire a été plaidée et mise en délibéré au 11 juillet 2013.

Au terme de la procédure, les prétentions et moyens des parties s’établissent respectivement comme suit :

PRETENTIONS ET MOYENS DU Syndicat Mixte Intercommunal d’Etudes, de programmation et de Révision du Schéma Directeur de Marne Nord

Avant son désistement, le syndicat Mixte demandait au juge de l’expropriation de fixer l’indemnité comme suit :

Indemnité principale

Surface en m²

[…]

Montant

[…]

10000

15

150 000,00 €

Indemnité de remploi

Base de calcul

Taux

Montant

20 % jusqu’à 5 000

5 000,00 €

0,20

1 000,00 €

15 % de 5 000 à 15 000

10 000,00 €

0,15

1 500,00 €

10 % sur le surplus

135 000,00 €

0,10

13 500,00 €

[…]

16 000,00 €

Indemnité totale

166 000,00 €

Il proposait à la SNC X une indemnité d’éviction agricole d’un montant total de 81 000 euros.

Au soutien, le Syndicat Mixte Intercommunal fait valoir que le territoire de la commune de […] est situé en zone périurbaine de nature à valoriser le prix des terrains agricoles.

Dans son second mémoire, il fait valoir que lors de la séance du 25 mars 2010, le conseil municipal de la commune de MITRY-MORY a approuvé la modification du PLU classant en zone Ngv l’aire d’accueil pour les gens du voyage, la dernière modification ayant été approuvée le 26 mai 2011 sans que le classement ne soit modifié. Il estime que c’est cette dernière date qui doit donc être prise en considération au regard de l’article L13-15-1 du code de l’expropriation pour un terrain réservé.

Il ajoute que le classement en zone Ngv des terrains destinés à l’accueil des gens du voyage est régulièrement utilisé sur le territoire national, les espaces situés dans ces zones étant avant tout des espaces naturels dans lesquels la réalisation d’équipement est limitée au maximum.

Il ajoute que la parcelle BH 79 n’est pas dépréciée car elle est toujours accessible par l’avenue des martyrs de Chateaubriand et elle dispose d’une façade sur rue de 140 mètres. Il confirme qu’il s’engage à réaliser une clôture.

Dans ses dernières écritures, il fait valoir que, par arrêté en date du 25 mars 2013, le Préfet de Seine et Marne a abrogé l’arrêté portant déclaration d’utilité publique des travaux et acquisitions nécessaires à la réalisation de l’aire d’accueil des gens du voyage. Il précise que l’ordonnance d’expropriation se trouvant ainsi privée de base légale, il se désiste de son instance et de son action. Il ajoute que suite à cette abrogation, le juge de l’expropriation se trouve en situation de compétence liée pour constater le manque de base légale de l’ordonnance d’expropriation et déclarer les expropriés rétablis dans leurs droits de propriété sur les parcelles.

PRETENTIONS ET MOYENS DE Monsieur I A, Madame G H épouse A, Monsieur J X, Madame K L épouse X, Madame R X épouse Y, Madame S X épouse Z, Monsieur AA AB AC et Monsieur AD AB AC

Monsieur I A, Madame G H épouse A, Monsieur J X, Madame K L épouse X, Madame R X épouse Y, Madame S X épouse Z, Monsieur AA AB AC et Monsieur AD AB AC demandent au juge de l’expropriation de fixer l’indemnité leur revenant comme suit :

Indemnité principale

Surface en m²

[…]

Montant

[…]

10150

100

1 015 000,00 €

Indemnité de remploi

Base de calcul

Taux

Montant

20 % jusqu’à 5 000

5 000,00 €

0,20

1 000,00 €

15 % de 5 000 à 15 000

10 000,00 €

0,15

1 500,00 €

10 % sur le surplus

1 000 000,00 €

0,10

100 000,00 €

[…]

102 500,00 €

Dépréciation du surplus

Base de calcul

Taux

1 015 000,00 €

20,00%

200 000,00 €

Indemnité totale

1 117 500,00 €

outre la somme de 10 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

Au soutien, ils exposent que la situation de la parcelle est particulièrement privilégiée, la ville de […] étant située aux portes de l’agglomération parisienne et de l’aéroport Charles de Gaulle et au centre d’un nœud de communication très important. Ils estiment que sa situation géographique et les infrastructures ferroviaires lui confèrent un caractère très attractif, notamment pour le développement des activités. Ils ajoutent que la parcelle dispose d’une double façade sur des voies et des réseaux en capacité suffisante pour l’aménager et que, s’agissant d’une superficie de 10.150 m2 relativement limitée, le terrain peut être qualifié de terrain en situation hautement privilégiée.

Sur le montant de l’indemnité, ils font valoir qu’ils ont recherché des éléments de comparaison dans le marché immobilier local, ajoutant qu’il est particulièrement difficile sur la commune de […] même de disposer d’éléments de comparaison dans le marché libre pour des terrains en situation privilégiée du fait de leur situation et de leur ouverture à l’urbanisation, les terrains en zone d’urbanisation future sur lesquels est envisagée une opération d’aménagement faisant quasiment tous l’objet de procédures d’expropriation.

Ils produisent ainsi deux termes de comparaison situés sur […] et des éléments de comparaison situés à TREMBLAY EN FRANCE, MESNIL AMELOT et DAMMARTIN EN GOELE.

Ils concluent que les valeurs oscillent pour des terrains en situation privilégiée et en zone d’urbanisation future dans le marché local entre 23 euros le m2 et 50 € allant même jusqu’à 100 € en 2005 pour des petits terrains situés […] à […]. Les expropriés retiennent en conséquence une valeur de 100 € le m2, correspondant à 25 % de la valeur retenue par la présente juridiction en 2010 pour un terrain situé en zone AU, […], au titre de la situation hautement privilégiée de leur parcelle.

Ils font ensuite valoir que la parcelle […] se trouve amputée par l’emprise expropriée des deux tiers environ de sa façade sur l’avenue des Martyrs de Chateaubriand et de celle dont elle disposait sur la rue de La Villette aux Aulnes. Ils considèrent donc que cette circonstance justifie une demande au titre de la dépréciation du surplus arrêtée forfaitairement à 200.000 € correspondant à 20 % de la valeur de l’emprise expropriée.

Enfin, ils font valoir que l’emprise entraîne la scission d’une parcelle de grande superficie et d’un ensemble cultural. Eu égard au projet envisagé, ils demandent à l’expropriant de bien vouloir s’engager à réaliser une clôture suffisante entre l’emprise et les terres actuellement cultivées de manière à ce que les propriétaires ne soient pas inquiétés par les éventuels troubles de voisinage.

Dans leurs dernières écritures, ils font valoir que le commissaire du gouvernement indique que la dernière modification du POS de la Commune de […] a été approuvée le 26 mai 2011, que la date de référence se situerait donc, selon lui, à cette date et que la parcelle serait classée en zone N du PLU et notamment dans un sous-secteur Ngv destiné à accueillir le terrain intercommunal d’accueil des gens du voyage. Ils font alors remarquer qu’in’est pas contestable que le terrain exproprié est frappé d’un emplacement réservé n°1 dont l’objet est la création d’une aire d’accueil des gens du voyage dont le bénéficiaire est le SIEP MARNE NORD mais que, toutefois, cet emplacement réservé a été créé lors de l’approbation du PLU par délibération du Conseil Municipal du 30 juin 2005 et était, à cette date, classé en zone AU2 du PLU. Ils estiment que sl’on s’en tient à la lettre du texte de l’article L.13-15 II 4° du Code de l’expropriation, on doit tenir compte, pour l’appréciation de la date de référence, de la date d’approbation du PLU ayant institué l’emplacement réservé. Ils demandent donc qu’elle soit fixée à la date à laquelle est devenue opposable aux tiers la révision du PLU intervenue par délibération du Conseil Municipal du 30 juin 2005, et à l’occasion duquel un emplacement réservé pour la réalisation d’une aire des gens du voyage a été créée. Ils estiment qu’en tout état de cause, le Commissaire du Gouvernement se méprend sur la date de référence puisque ce n’est pas par la délibération du 26 mai 2011 que le secteur Ngv a été créé mais bien par la délibération du 25 mars 2010.

A titre subsidiaire, ils èrent que le classement du terrain exproprié en zone Ngv résulte d’une dolosive. Ils expliquent que 'emplacement réservé n°1 existait lorsque le PLU a été approuvé par délibération du Conseil Municipal du 30 juin 2005, le terrain étant alors classé en zone AU2 et que c’est ultérieurement, par une modification du PLU intervenue par délibération du 25 mars 2010 que la parcelle a fait l’objet d’un changement de zonage pour être classée en zone Ngv alors que le sous secteur Ngv pour l’aire d’accueil des gens du voyage ne recèle aucune particularité et qu’il aurait pu tout aussi bien être créé un sous secteur dans la zone AU. Ils estiment que le terrain exproprié ne justifie pas d’un classement en zone N au regard de l’article R.123-8 du Code de l’urbanisme. Ils considèrent donc que ce déclassement de l’emplacement réservé intervient de manière opportune juste avant que la procédure d’expropriation ne soit entamée en vue d’appréhender ce terrain à moindre prix puisque c’est le 2 juin 2010, soit deux mois après qu’ait été opéré le déclassement, que le préfet a prescrit l’ouverture des enquêtes conjointes préalables à la Déclaration d’Utilité Publique et parcellaire, qui donnera lieu à un arrêté préfectoral de Déclaration d’Utilité Publique du 23 août 2010.

Ils ajoutent que ce déclassement du bien exproprié de la zone AU en zone N conduit bien à une sous-évaluation en vue de léser les expropriés et que l’intention dolosive peut également être retenue en cas de collusion frauduleuse entre l’expropriant et la commune sous la responsabilité de laquelle a été établi le plan d’urbanisme, SYNDICAT MIXTE ayant manifestement un intérêt commun avec la Commune de MITRY-MORY, qui en est membre, à la réalisation de l’aire des gens du voyage. expropriés demandent donc qu’il soit fait droit à leur demande d’indemnisation à hauteur de 100 € du m² si l’intention dolosive de l’expropriant était retenue.

S’agissant des termes de comparaison produits par le Commissaire du Gouvernement, ils estiment que les neuf éléments de comparaison sont difficilement exploitables dès lors que pour les deux premiers sont produites des fiches sur lesquelles ne figurent pas les conditions de la vente, que pour les sept autres suivants, la copie des actes n’est que partielle de sorte que l’on ne connaît pas les conditions complètes de la vente et que le dixième n’est pas communiqué alors qu’il s’agit d’un jugement. Ils ajoutent que les éléments de comparaison sur la commune de Mitry Mory sont situés en zone A, non en zone N, et ne sont pas probants, que les élément 1,3 et 4 ne concernent pas des biens comparables, que le cinquième correspond à l’élément de comparaison n°1 des expropriés, que les autres éléments de comparaison sont plus difficilement utilisables ne se trouvant pas dans la même commune, que les références sur B sont très difficilement exploitables et sont des terrains ne disposant pas de façades sur voie ni de la présence de réseaux à proximité et que la parcelle située à MOUSSY LE NEUF est éloignée de toute urbanisation sans réseau et en bordure de l’emprise TGV.

Suite à la réouverture des débats, ils font valoir que l’ordonnance d’expropriation est intervenue le 26 mai 2011 et a ainsi opéré définitivement le transfert de propriété. Ils ajoutent que seul l’exproprié peut faire constater que l’ordonnance d’expropriation est dépourvue de base légale, sans que l’expropriant ne puisse s’en prévaloir, et seulement en cas d’annulation par le juge administratif de la DUP ou de l’arrêté de cessibilité. Ils précisent, qu’en l’espèce, la DUP et l’arrêté de cessibilité sont définitifs.

Ils ajoutent que la clôture des débats étant intervenue à l’issue de l’audience de plaidoirie du 21 février 2013, la demande de désistement est donc tardive et irrecevable.

PRETENTIONS ET MOYENS DE LA SNC X

La SNC X demande au juge de l’expropriation de fixer l’indemnité lui revenant comme suit :

— A titre principal :10.150 m² x 2 € = 20.300,00 €

— A titre subsidiaire : 10.150 m² x 1,6232 € = 16.475,48 €

Elle demande en outre :

— à l’expropriant de s’engager à indemniser la récolte en cours dans le cas où la prise de possession interviendrait avant que celle-ci ne soit levée, et ce conformément au barème de la Chambre d’Agriculture de Seine-et-Marne sur les dégâts causés aux cultures

— au Syndicat Mixte Intercommunal de bien vouloir prendre l’engagement de réaliser une clôture entre l’emprise expropriée et le surplus de la parcelle […] et, subsidiairement, de bien vouloir lui allouer une somme de 20.000 € forfaitairement pour la réalisation d’une telle clôture

— la condamnation du Syndicat Mixte Intercommunal à lui payer une somme de 3.000 € au titre de l’article 700 du CPC.

Au soutien, elle fait valoir que le protocole conclu le 1er janvier 2007 a expiré et, qu’à ce jour, il n’a pas été reconduit et un nouveau protocole n’a pas été signé.

Elle précise que l’application du protocole d’accord n’est qu’une des méthodes susceptibles d’être utilisée pour déterminer le préjudice matériel, direct et certain que subissent les exploitants expropriés en application des dispositions de l’article L.13-13 du Code de l’expropriation et, qu’en outre, le juge de l’expropriation est libre de choisir la méthode qui lui paraît la plus adaptée et n’est pas obligé de tenir compte de ces protocoles notamment lorsque ceux-ci sont caducs. Elle demande donc, à titre principal, que son indemnité d’éviction soit calculée par référence à des éléments de comparaison qu’elle produit.

Elle précise que les terres expropriées sont situées en Seine-et-Marne, département soumis à une pression foncière de plus en plus importante rendant difficile la possibilité pour un exploitant évincé de trouver des terres agricoles libres susceptibles de lui être louées pour se remettre en même et semblable état, les exploitants évincés se voyant dans l’impossibilité de pouvoir reconstituer leur unité d’exploitation, les charges de leur exploitation étant réparties durablement sur des surfaces réduites et donc beaucoup plus difficiles à supporter. Elle ajoute que les développements urbains entraînent des difficultés croissantes pour le fonctionnement des exploitations en termes de difficulté de circulation entre les différentes exploitations et des problèmes de maintien des réseaux de drainage et d’irrigation. Elle estime donc que l’indemnité d’éviction doit tenir compte de ces circonstances en particulier dans cette partie de la Seine et Marne, proche de la Seine Saint Denis, département en quasi-totalité urbanisé, raison pour laquelle, à titre principal, l’exploitant sollicite une indemnité toutes causes de préjudice confondues de 2 € du m², se prévalant de deux éléments de comparaison.

A titre subsidiaire, l’exploitant revendique la méthode retenue par le protocole à ce jour caduc mais en le réactualisant et en retenant la marge brute dégagée à l’hectare à partir du compte-type 2011 soit 1.319,56 €/ha. Elle ajoute qu’il faut appliquer à cette marge brute un coefficient multiplicateur qui, en l’état du protocole caduc, était de 6, considérant que c’était le temps nécessaire pour que l’exploitant évincé retrouve une terre et qu’il la travaille pour atteindre un même niveau de rentabilité que celui dont il disposait au moment de son éviction. Elle propose de retenir un coefficient multiplicateur de 10 années pour tenir compte de la difficulté qu’ont les exploitants évincés en Seine-et-Marne, compte tenu de la pression foncière qui s’applique à ce département, à reprendre des terres libres en proximité de leur exploitation et qu’il y a lieu ensuite d’ajouter les fumures et arrières fumures pour 579,26 € l’hectare et le forfait végétaux pour 457,34 €. Selon la SNC, l’indemnité d’éviction réactualisée et hors pression foncière résultant du protocole ressort donc à :(1.319,56 € x 10) + 579,26 + 457,34 = 14.232,20 €, soit 1,4232 € le m².

Elle ajoute que le protocole prévoit un supplément pour pression foncière liée à la proximité des terres évincées de la zone agglomérée et l’expropriée propose de le fixer à 0,20 € le m², ce qui conduit l’indemnité à 1,6232 le m².

Elle fait ensuite valoir que l’emprise expropriée est partielle, la parcelle cadastrée section […] se trouvant ainsi réduite à 55.570 m², la contenance d’origine étant de 65.720 m². Elle ajoute que précédemment à l’expropriation, la parcelle […] était exploitée en totalité comme terre agricole et que la partie expropriée, d’une superficie de 10.150 m², est détachée du reste de la parcelle pour qu’y soit aménagé une aire d’accueil des gens du voyage. Elle estime que, compte tenu du changement de destination qui va être ainsi opéré sur une partie dont le surplus va rester exploité le temps que l’Etablissement Public Foncier d’Ile-de-France l’exproprie, il est nécessaire qu’une séparation matérielle soit réalisée entre l’emprise expropriée et le surplus de la parcelle. Elle sollicite donc, à ce titre, que l’expropriant s’engage à la mise en place d’une clôture, à défaut de quoi la SNC X demande à être indemnisée forfaitairement du coût de mise en place d’une telle clôture qu’elle évalue forfaitairement à 20.000 €.

Dans ses dernières écritures, elle explique également que demande de désistement de l’expropriant est tardive et donc irrecevable.

PROPOSITIONS DU COMMISSAIRE DU GOUVERNEMENT

Monsieur le Commissaire du Gouvernement propose de fixer l’indemnité de dépossession selon le détail suivant :

Indemnité principale

Surface en m²

[…]

Montant

[…]

10150

18

182 700,00 €

Indemnité de remploi

Base de calcul

Taux

Montant

20 % jusqu’à 5 000

5 000,00 €

0,20

1 000,00 €

15 % de 5 000 à 15 000

10 000,00 €

0,15

1 500,00 €

10 % sur le surplus

167 700,00 €

0,10

16 770,00 €

[…]

19 270,00 €

Indemnité totale

201 970,00 €

Il expose dans ses premières conclusions que cinq termes de comparaison situés à […] peuvent être retenus ainsi que cinq termes situés à CHELLES, B, MOUSSY LE NEUF et MEAUX et, qu’au regard des dernières mutations sur la commune de Mitry Mory et des jugements rendus par le tribunal de Grande Instance de Melun, la valeur unitaire de 15 €/m2 peut être retenue.

S’agissant de l’indemnité d’éviction agricole, il propose la somme de 8221,50 euros sur la base du protocole en vigueur en SEINE ET MARNE prévoyant une valeur unitaire de 0,81 euros/m2.

Dans ses dernières écritures, il fait valoir que la date de référence à retenir se trouve être la date prévue à l’article L13 15 I 4° du code de l’expropriation, la parcelle étant un emplacement réservé depuis l’approbation du POS de la commune de Mitry Mory le 30 juin 2005, date de référence.

S’agissant des termes de comparaison produits par la partie expropriée, il indique que les termes 3 et 4 correspondent à des promesses de vente, aucun acte publié n’ayant été trouvé, et qu’ils ne peuvent donc pas être considérés comme des mutations pouvant être prises en compte. Il ajoute que les termes situés à Tremblay en France sont intégrés dans une zone à plus forte pression foncière empêchant une comparaison fiable. Il ajoute, qu’au regard des termes de comparaison retenus, à savoir les dernières mutations sur la commune de Mitry Mory, les ventes sur la commune de B et les jugements rendus par le tribunal en 2009 et 2010 lors la création des ZAC à Meaux et Dammartin en Goele, la valeur unitaire de 18 €/m2 peut être au final retenue.

Il fait ensuite valoir que l’expropriation de la parcelle BH 78 n’entraîne pas d’indemnité pour dépréciation du surplus de la parcelle BH 79 car la parcelle est toujours accessible par l’avenue des martyrs de Chateaubriand et la façade restante mesure environ 140 mètres. Il ajoute que la configuration de la parcelle BH 79 n’appelle pas d’observations particulières quant à des problèmes d’exploitation.

S’agissant de l’indemnité d’éviction, il précise qu’un nouveau protocole est en discussion entre les services du Domaines de Seine et Marne et la chambre d’agriculture, ce protocole devant être signé avant la ̄dn du mois de mars 2013.

En ce qui concerne la demande d’indemnité forfaitaire de 20 000 € afin de créer une clôture, il estime que le remboursement au vu d’un devis de la dépense à engager peut être envisagé.

Par note en délibéré, il indique que le nouveau protocole, applicable aux instances en cours, prévoit une base unitaire de 1,17 euros/m2. Il propose donc que soit attribuée à la SNC X une indemnité de 11 875,50 euros.

MOTIFS DE LA DÉCISION

I-SUR LES EFFETS DE L’ABROGATION DE LA DECLARATION D’UTILITE PUBLIQUE

Attendu que l’article L. 12-5 du Code de l’expropriation dispose : "en cas d’annulation par une décision définitive du juge administratif de la déclaration d’utilité publique ou de l’arrêté de cessibilité, tout exproprié peut faire constater par le juge de l’expropriation que l’ordonnance portant transfert de propriété est dépourvue de base légale" ;

Qu’il ne s’agit pas d’une véritable annulation de l’ordonnance au sens strict, comme dans le cas d’un pourvoi en cassation, la loi prévoyant seulement que le juge constate « que l’ordonnance portant transfert de propriété est dépourvue de base légale », ce qui produit des effets équivalents sur le plan pratique ;

Que l’article R. 12-5-1 précise que l’exproprié qui entend faire constater par le juge le manque de base légale de l’ordonnance portant transfert de sa propriété, ne peut saisir le juge que dans le délai de deux mois à compter de la notification de la décision du juge administratif annulant la déclaration d’utilité publique ou l’arrêté de cessibilité ;

Qu’au-delà du délai de deux mois toute demande visant à faire constater le défaut de base légale est irrecevable et l’ordonnance d’expropriation ne peut plus être remise en cause;

Qu’il s’ensuit donc que l’ordonnance d’expropriation n’est pas annulée de plein droit ; Qu’elle demeure tant que l’exproprié n’a pas saisi le juge de l’expropriation pour en faire constater son défaut de base légale dans les conditions fixées par l’article L12-5 ; Qu’il en va de même a fortiori si, comme en l’espèce, l’arrêté portant la DUP a été abrogé ;

Que, de plus, une personne publique bénéficiaire d’une expropriation ne peut, en tout état de cause, utilement exciper des dispositions du deuxième alinéa de l’article L. 12-5 du code de l’expropriation dès lors que la procédure ainsi instituée ne peut être engagée qu’à l’initiative de la personne expropriée ; Que par voie de conséquence, si l’exproprié ne met pas en œuvre l’article L. 12-5, une commune expropriante devra conserver la propriété du bien exproprié, bien que sans base légale, et devra verser l’indemnité d’expropriation ;

II-SUR LE DESISTEMENT

Attendu que l’article 394 du code de procédure civile dispose que « Le demandeur peut, en toute matière, se désister de sa demande en vue de mettre fin à l’instance » ;

Que l’article 395 du même code dispose que « Le désistement n’est parfait que par l’acceptation du défendeur.

Toutefois, l’acceptation n’est pas nécessaire si le défendeur n’a présenté aucune défense au fond ou fin de non-recevoir au moment où le demandeur se désiste. » ;

Que l’article 396 dispose que « Le juge déclare le désistement parfait si la non-acceptation du défendeur ne se fonde sur aucun motif légitime » ;

Que le désistement ne peut intervenir après la clôture des débats ;

Que le désistement d’action n’a pas à être accepté si la partie adverse ne justifie pas d’un intérêt ;

Attendu qu’en l’espèce les expropriés ayant présenté une défense au fond au moment où le demandeur s’est désisté, leur acceptation est nécessaire ; Que la clôture des débats étant intervenue le 21 février 2013, le désistement en cours de délibéré ne pouvait légalement intervenir ; Qu’en outre, au regard de ce qui précède, les expropriés justifient d’un intérêt à leur refus d’acceptation de ce désistement ;

Qu’en conséquence, le désistement n’étant pas parfait, il y a lieu de statuer sur les demandes ;

III-SUR LA NATURE DE L’OPERATION POURSUIVIE

Attendu que l’opération poursuivie tend à la réalisation d’une aire d’accueil intercommunale des gens du voyage sur le territoire de la commune de […].

IV-SUR LA DATE DE TRANSFERT DE PROPRIETE

Attendu que, suite à l’ordonnance d’expropriation, le transfert de propriété est intervenu le 26 mai 2011 ;

V-SUR LE BIEN EXPROPRIE

Attendu que le bien dont s’agit est une parcelle en nature de terre agricole cadastrée […] sur le territoire de la commune de […] ; Qu’elle est détenue en indivision et est exploitée par la SNC X, titulaire d’un bail rural ;

Qu’il s’agit, en réalité, d’une emprise partielle prélevée sur la parcelle cadastrée section […] d’une superficie totale de 55.570 m2 ;

Qu’elle forme un triangle aux trois côtés identiques situés à l’angle de la route Départementale n°9 desservant le Hameau de la Villette aux Aulnes et de l’avenue des Martyrs de Châteaubriand ; Qu’elle dispose d’une large façade, essentiellement sur l’avenue des Martyrs de Châteaubriand ;

Que la visite sur les lieux a permis de mettre en évidence qu’elle était située non loin d’une zone d’activité et urbanisée ;

VI-SUR LES INDEMNITES

Attendu que l’article L.13-13 du code de l’expropriation dispose que « Les indemnités allouées doivent couvrir l’intégralité du préjudice direct, matériel et certain, causé par l’expropriation. » ;

Que l’article l’article R.13-35 précise que : «Le juge statue dans la limite des conclusions des parties, telles qu’elles résultent de leurs mémoires et de celles du commissaire du Gouvernement si celui-ci propose une évaluation inférieure à celle de l’expropriant. Si le défendeur n’a pas notifié son mémoire en réponse au demandeur dans le délai de six semaines prévu à l’article R. 13-23, il est réputé s’en tenir à ses offres, s’il s’agit de l’expropriant, et à sa réponse aux offres, s’il s’agit de l’exproprié. Si l’exproprié s’est abstenu de répondre aux offres de l’administration et de produire un mémoire en réponse, le juge fixe l’indemnité d’après les éléments dont il dispose. » ;

1-Sur la date de référence et sur la nature de la parcelle

A- Sur la date de référence

Attendu que l’article L.13-15 du même code dispose que :

« I-Les biens sont estimés à la date de la décision de première instance ; toutefois, et sous réserve de l’application des dispositions du II du présent article, sera seul pris en considération l’usage effectif des immeubles et droits réels immobiliers un an avant l’ouverture de l’enquête prévue à l’article L.11-1 (…) » ;

Attendu que la date de droit commun se situe donc un an avant l’ouverture de l’enquête préalable à la déclaration d’utilité publique (D.U.P.) ;

Qu’il existe cependant des dates dérogatoires pour les biens situés en emplacement réservé d’un plan d’urbanisme (Article L 123-9 du code de l’Urbanisme antérieur à la loi SRU et article L.123-2 et L.123-17 issus de la loi SRU), la date de référence étant alors celle à laquelle est devenu opposable aux tiers le plus récent des actes rendant public, approuvant, révisant ou modifiant le plan d’urbanisme – P.O.S. ou P.L.U. – et délimitant la zone dans laquelle est situé l’emplacement réservé (Article L.13-15-II-4° du Code de l’Expropriation) ;

Qu’en l’espèce, il y a donc lieu de tenir compte, pour l’appréciation de la date de référence, de la date d’approbation du PLU ayant institué l’emplacement réservé ; Qu’elle sera donc fixée à la date à laquelle est devenue opposable aux tiers la révision du PLU intervenue par délibération du Conseil Municipal et à l’occasion de laquelle un emplacement réservé pour la réalisation d’une aire des gens du voyage a été créée, soit le 30 juin 2005 ;

B- Sur la nature de la parcelle

Attendu que l’article L.13-15 du même code dispose que :

(…) II-1°La qualification de terrains à bâtir, au sens du présent code, est réservée aux terrains qui, un an avant l’ouverture de l’enquête prévue à l’article L. 11-1 ou, dans le cas visé à l’article L. 11-3, un an avant la déclaration d’utilité publique sont, quelle que soit leur utilisation, tout à la fois :

a) Effectivement desservis par une voie d’accès, un réseau électrique, un réseau d’eau potable et, dans la mesure où les règles relatives à l’urbanisme et à la santé publique l’exigent pour construire sur ces terrains, un réseau d’assainissement, à condition que ces divers réseaux soient situés à proximité immédiate des terrains en cause et soient de dimensions adaptées à la capacité de construction de ces terrains. Lorsqu’il s’agit de terrains situés dans une zone désignée par un plan d’occupation des sols rendu public ou approuvé comme devant faire l’objet d’une opération d’aménagement d’ensemble, la dimension de ces réseaux est appréciée au regard de l’ensemble de la zone ;

b) Situés dans un secteur désigné comme constructible par un plan d’occupation des sols rendu public ou approuvé ou par un document d’urbanisme en tenant lieu, ou bien, en l’absence d’un tel document, situés soit dans une partie actuellement urbanisée d’une commune, soit dans une partie de commune désignée conjointement comme constructible par le conseil municipal et le représentant de l’Etat dans le département en application de l’article L.111-1-3 du code de l’urbanisme. Les terrains qui, à l’une des dates indiquées ci-dessus, ne répondent pas à ces conditions sont évalués en fonction de leur seul usage effectif, conformément au paragraphe I du présent article.

2° Les possibilités de construction à retenir pour l’évaluation des terrains à bâtir ainsi qualifiés conformément au 1° ci-dessus ne peuvent excéder celles qui résultent du plafond légal de densité. L’évaluation des terrains à bâtir tient compte des possibilités légales et effectives de construction qui existaient à l’une ou l’autre des dates de référence prévues au 1° ci-dessus, de la capacité des équipements susvisés, des servitudes affectant l’utilisation des sols et notamment des servitudes d’utilité publique, y compris les restrictions administratives au droit de construire, sauf si leur institution révèle, de la part de l’expropriant, une intention dolosive ;

Attendu qu’il existe une double condition posée par la loi pour qu’un terrain bénéficie de la qualification de « terrain à bâtir » :

• desserte par les voies et réseaux (y compris les réseaux d’assainissement si ceux-ci sont rendus obligatoires par le POS), de dimensions adaptées

• situation en zone reconnue constructible par un POS (PLU) ou le document d’urbanisme en tenant lieu ;

Que s’agissant des voies d’accès, la desserte doit être effective et de dimensions suffisantes ; Qu’une desserte par un simple chemin de terre n’est pas suffisante, les terrains devant posséder une façade sur une voie asphaltée et viabilisée ;

Que s’agissant des réseaux , ceux-ci doivent se trouver à proximité immédiate ;

Attendu qu’à la date de référence, le plan d’urbanisme en vigueur était le PLU de la commune de […] classant la parcelle en zone AU 2, secteur naturel destiné à l’urbanisation future mais insuffisamment équipé pour que les constructions nouvelles y soient autorisées ;

Que la parcelle ne peut en conséquence recevoir la qualification de terrain à bâtir ;

Attendu cependant que s’agissant des terrains en «situation privilégiée», ces terrains, lorsqu’ils ne sont pas susceptibles de recevoir la qualification de « terrain à bâtir », peuvent néanmoins être évalués à un prix très sensiblement supérieur à celui de terrains agricoles, en fonction de plus-value tenant à leur situation (notamment dans des zones péri-urbaines où s’exerce une forte pression sur le marché) ; Que l’estimation doit alors être faite au regard du marché par des constatations suffisantes ; Qu’il en est ainsi des terrains caractérisés par la proximité d’une zone habitée, la présence d’équipement scolaires, sportifs, de loisirs et commerciaux, l’existence de réseaux de viabilité ou de voie de circulation ;

Qu’en l’espèce, il peut valablement être considéré que bien qu’ayant à l’époque une nature agricole en soi, la parcelle à exproprier présente toutes les caractéristiques requises pour recevoir la qualification de terrain en situation privilégiée ; Qu’en effet, il est établi qu’elle est en façade d’une voie asphaltée et équipée ; Qu’elle se situe à proximité d’une zone d’activité et urbanisée ;

Que la parcelle en cause bénéficie donc d’une situation privilégiée ;

2-Sur l’indemnité de dépossession

Attendu que le prix d’un bien immobilier est nécessairement déterminé par la valeur du marché concernant des terrains de même nature situés dans la même zone géographique ; Que la méthode de comparaison sera donc préférée à une appréciation purement économique faite à partir de données brutes non forcément transposables aux biens en cause;

Que la valeur d’un terrain varie en fonction de sa dimension, sa configuration, sa situation, son accessibilité et, en cas de boisement, son peuplement ;

Que seules des mutations effectivement réalisées peuvent servir de termes de comparaison utiles ; Qu’ainsi, les seules promesses de vente n’ayant pas donné lieu à une vente publiée ne peuvent être retenues ;

Attendu qu’en l’espèce, les termes de comparaison suivants apparaissent comme étant relativement pertinents en raison de leur situation géographique et de la nature des terrains :

— vente du 11 juillet 2011 sur la commune de Mitry Mory de la parcelle ZN 46 (zone A du PLU de la commune) d’une contenance de 600 m2 pour 9000 € soit 15 €/m2

— vente du 4 mai 2011 sur la commune de Mitry Mory de la parcelle AH 35 (zone A au PLU) de 957 m2 pour 12 000 € soit 12,54 €/m2

— vente du 4 octobre 2010 sur la commune de Mitry Mory d’une parcelle de 450 m2 (ZD 17) pour 4500 € soit 10 €/m2 (zone A du PLU)

— vente du 2 avril 2010 de la parcelle ZD 21 d’une contenance de 250 m2 pour 4000 €, soit 16 €/m2. (zone A du PLU)

— acquisitions de parcelles dans le cadre de la création de la ZAC de la Reneuse à Mitry Mory, au prix de 12,31 euros/m2 (parcelle BE 211 de 4660 m2 vendue 57 386 €) et 12 09 €/m2 (parcelle BE 145 de 129 580 m2 vendue le 22 décembre 2005 pour un total de 1 746 238 € avec une indemnité principale de 1 586 580 €)

— vente à B du 13 juillet 2011 des parcelles BA 25, BA26, C, D, E, F et ZC1 en zone 1Aux d’une contenance totale de 95 681 m2 pour 1 132 083 € soit 11,83 euros/m2

— vente à Coutry de la parcelle B3735 (19 967m2), zone 1AUx, au prix de 300 000 € soit 15,03 €/m2

— jugement du 10/12/2009 concernant une parcelle AE 658 située à Meaux (31 836 m2) au prix de 10 €/m2

— vente intervenue le 31 janvier 2012 entre l’indivision X et l’AFTRP de parcelles cadastrées section B196, B206 et C644, d’une superficie totale de 18.120 m2 au prix de 392.660,40 €, soit 21,67 € libre en Zone AU

— vente de diverses parcelles à la SCI DE L’IMPRIMERIE DU NORD par l’indivision W et par Monsieur T U les 29 avril 2008 et 30 avril 2008 de terrains situés en zone d’urbanisation future, près du Vieux Pays de Tremblay, des parcelles cadastrées section AB n°146 pour 2.565 m2 et AB n°170 pour 533 m2, au prix de 23 €/m2 libre d’occupation

— vente par Monsieur V W à la commune du MESNIL AMELOT du 7 décembre 2011 des parcelles cadastrées section AI 111, 115, 171, 175, 176 et 178 au lieu dit «L’Orme de la Soulte», d’une superficie de 11.446 m2, au prix de 35 €/m2 occupé en zone Ne destinée aux équipements publics et emplacement réservé

— jugement du Tribunal de Grande Instance de MELUN du 21 octobre 2010 (Ville de DAMMARTIN EN GOELE C/ Société CARREFOUR PROPERTY) d’une parcelle cadastrée section A0 n°17, d’une superficie de 10.270 m2, zone IAUx au prix de 50 € le m2

— jugement du tribunal de Grande Instance de MELUN du 2 décembre 2010 (Consorts LATESSA C/ Commune de DAMMARTIN EN GOELE) pour la parcelle A n°547 au prix de 30 €/m2

Qu’il résulte donc de l’ensemble de ces termes de comparaison que le prix moyen d’une parcelle en nature de culture est de 19,60 euros ; Que, cependant, en cas de situation privilégiée, la valeur unitaire peut être de 23 à 50 euros ;

Que néanmoins, le terme basé sur le jugement du tribunal de grande instance de MELUN du 15 avril 2010 pour une parcelle cadastrée section […] d’une superficie de 172 m2 en zone 1AU du PLU au prix de 400 €/m2 concerne, certes, un terrain situé à proximité immédiate du terrain exproprié, cependant il ressort du procès verbal de transport du 12 octobre 2009 que ce terrain était situé au cœur d’une zone pavillonnaire et était le seul terrain non bâti de la zone ;

Qu’il s’agissait donc d’un terrain qui pouvait être en réalité considéré comme étant à bâtir et qui ne peut être totalement comparé avec la parcelle de l’espèce ;

Qu’il y a lieu néanmoins de prendre en compte la pression foncière existante sur ce territoire ; Qu’en effet, il peut être valablement constaté que la commune de […] se situe dans un territoire à forte expansion, la forte pression sur l’immobilier s’expliquant en partie par la proximité de pôles dynamiques accessibles (Roissy et Paris) mais surtout par le souhait d’accéder à la propriété de familles originaires de la première couronne parisienne qui trouvent sur ce territoire des opportunités foncières à la portée de leurs revenus dans un environnement plus rural ;

Qu’ainsi le jugement du Tribunal de Grande Instance de MELUN du 21 octobre 2010 concernant la parcelle cadastrée section A0 n°17, d’une superficie de 10.270 m2 en zone IAUx au prix de 50 € le m2 peut effectivement servir de base pour évaluer la parcelle de l’espèce ;

Qu’au regard de l’ensemble de ces éléments, l’indemnité de dépossession sera donc fixée ainsi :

Indemnité principale

Surface en m²

[…]

Montant

[…]

10150

40

406 000,00 €

3-Sur l’indemnité d’éviction

Attendu que les agriculteurs reçoivent une indemnité d’exploitation, sur la base de protocoles locaux négociés entre l’administration fiscale et les représentants des organisations professionnelles ainsi que les techniciens des chambres d’agriculture ; Que ces protocoles, qui sont négociés par branches d’activités (polyculture, exploitations maraîchères ou viticoles etc.), ne s’imposent pas aux parties et au juge, mais constituent des sources de renseignement importantes dans un domaine techniquement difficile, de sorte qu’ils servent le plus souvent de base aux offres de l’expropriant et de base d’indemnisation, sauf à l’exploitant à apporter la preuve d’un préjudice supérieur à l’aide, notamment, d’éléments comptables ;

Attendu qu’en l’espèce, un protocole d’accord a été signé le 21 décembre 2006 entre les représentants des organisations professionnelles agricoles et la Direction des services fiscaux de Seine et Marne ayant pour objet de constater les accords intervenus entre les signataires sur le montant des indemnités destinées à réparer les préjudice directs, matériels et certains subis par les exploitants agricoles pour la réalisation de l’ensemble des opérations immobilières poursuivies pour cause d’utilité publique dans le cadre notamment de procédures d’expropriation ;

Que l’article 4 dispose que les préjudices sont constitués par :

1-l’indemnité d’éviction qui comprend :

— la perte de revenu subie pendant la période nécessaire au rétablissement d’une situation économique équivalente à celle qui précédait l’éviction, réparée par une « indemnité d’exploitation »

— les pertes de fumures, arrières fumures, amendements et façons culturales

2- le supplément pour réduction d’un bail à long terme

3- le supplément pour déséquilibre d’exploitation

4- la perte pour privation de jouissance résultant d’une prise de possession anticipée

Que l’article 6 régissant les modalités de calcul des indemnités stipule que les éléments retenus sont ceux des comptes d’exploitation types que l’administration a établi au titre des trois dernières années connues au moment des discussions, soit pour l’année 2006, les revenus des années 2003, 2004 et 2005 ; Qu’il est précisé que l’indemnité d’éviction est calculée sur la base de la moyenne des trois années de référence ; Qu’enfin, il est indiqué que pour la période du 1er janvier 2009 au 31 décembre 2011, l’indemnité pourra être recalculée, à la demande d’une partie des signataires, suivant les mêmes modalités, à partir des éléments extraits des comptes types établis par l’administration pour les années 2006, 2007, 2008 en cas de changements significatifs ;

Que l’article 8 fixe à 0,66 euros par m2 l’indemnité d’éviction avec une majoration pour pression foncière de 0,15 euros soit au total une indemnité de 0,81 euros ;

Attendu qu’il est constant que la révision de ce protocole a été initiée ; Que le montant de l’indemnité a été modifiée, des négociations ayant eu lieu ; Qu’ainsi, selon le nouveau protocole signé le 16 avril 2013, l’indemnité prévue sur la commune concernée par le projet s’établit dorénavant à 1,17 euros ;

Que l’indemnité d’éviction devant revenir à la SNC X sera donc calculée ainsi :

Indemnité principale

Surface en m²

[…]

Montant

[…]

10150

1,17

11 875,50 €

4-Sur l’indemnité de remploi

Attendu qu’il résulte de l’article R.13-46 du code de l’expropriation que l’indemnité de remploi, destinée à compenser les frais de tous ordres exposés par l’exproprié pour l’acquisition de biens de même nature, se calcule à partir de la seule indemnité principale versée au titre de la dépossession foncière ;

Qu’elle est calculée forfaitairement en proportion du montant de l’indemnité principale et elle représente le montant des frais et droits (droits de mutation, frais d’acte et honoraires de négociation) que devrait supporter l’exproprié pour reconstituer en nature patrimoine ; Qu’elle est due en principe même si le remploi s’effectue sous d’autres formes, ou même si le remploi n’est pas envisageable (impossible) ;

Que les taux s’établissent comme suit :

• 20% jusqu’à 5000 €

• 15% pour la tranche de 5000 à 15000 €

• 10% au-delà de 15000 €

Qu’en cas d’indivision, l’indemnité principale étant attribuée à l’indivision en tant que telle, l’indemnité de remploi ne saurait être calculée séparément sur la part de l’indemnité principale revenant à chaque indivisaire ;

Qu’il sera donc alloué l’indemnité de remploi suivante :

Indemnité de remploi

Base de calcul

Taux

Montant

20 % jusqu’à 5 000

5 000,00 €

0,20

1 000,00 €

15 % de 5 000 à 15 000

10 000,00 €

0,15

1 500,00 €

10 % sur le surplus

391 000,00 €

0,10

39 100,00 €

[…]

41 600,00 €

5-Sur la dépréciation du surplus

Attendu qu’en matière de dépréciation du surplus, le préjudice n’est indemnisable par les juridictions de l’expropriation que s’il découle notamment de la mauvaise configuration par suite du prélèvement, ou de la perte d’un accessoire important ;

Qu’en l’espèce, la parcelle laissée hors de l’emprise expropriée perd une partie de sa façade sur l’avenue des Martyrs de Chateaubriand et de celle dont elle disposait sur la rue de La Villette aux Aulnes ; Que, cependant, il n’apparaît pas en l’état des éléments fournis que cette nouvelle configuration soit de nature à causer un préjudice particulier, la parcelle conservant une façade sur rue de 140 mètres ;

Que la demande des expropriés à ce titre sera donc rejetée ;

6-Sur l’indemnisation des récoltes

Attendu qu’il y a lieu de prendre acte de ce que l’expropriant ne s’oppose pas à indemniser la SNC X de la récolte en cours dans le cas où la prise de possession interviendrait avant que celle-ci ne soit levée, et ce conformément au barème de la Chambre d’Agriculture de Seine-et-Marne sur les dégâts causés aux cultures ;

7-Sur la réalisation d’une clôture

Qu’il y a lieu de prendre acte de ce que le Syndicat Mixte Intercommunal s’engage à réaliser une clôture entre l’emprise expropriée et le surplus de la parcelle […] ;

VII-SUR L’ARTICLE 700 DU CODE DE PROCEDURE CIVILE ET LES DEPENS

Attendu que conformément aux dispositions de l’article L.13-5 du code de l’expropriation, les dépens seront laissés à la charge de l’autorité expropriante ;

Que l’article 700 du code de procédure civile énonce que, dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens à verser à l’autre partie une certaine somme au titre des frais exposés non compris dans les dépens ;

Qu’en application de ce texte, le Syndicat Mixte Intercommunal d’Etudes, de programmation et de Révision du Schéma Directeur de Marne Nord devra verser à Monsieur I A, Madame G H épouse A, Monsieur J X, Madame K L épouse X, Madame R X épouse Y, Madame S X épouse Z, Monsieur AA AB AC et Monsieur AD AB AC la somme de 1500 euros ;

Qu’en application de ce texte, le Syndicat Mixte Intercommunal d’Etudes, de programmation et de Révision du Schéma Directeur de Marne Nord devra également verser à la SNC X la somme de 1500 euros ;

PAR CES MOTIFS

Statuant publiquement, contradictoirement et en premier ressort,

DIT que le juge de l’expropriation ne peut constater que l’ordonnance d’expropriation est dépourvue de base légale en dehors de l’hypothèse prévue par l’article L. 12-5 du Code de l’expropriation ;

CONSTATE que le désistement d’action et d’instance du Syndicat Mixte Intercommunal d’Etudes, de programmation et de Révision du Schéma Directeur de Marne Nord est tardif et n’a pas été accepté par Monsieur I A, Madame G H épouse A, Monsieur J X, Madame K L épouse X, Madame R X épouse Y, Madame S X épouse Z, Monsieur AA AB AC, Monsieur AD AB AC et la SNC X ;

FIXE à 447 600 euros (QUATRE CENT QUARANTE SEPT MILLE SIX CENTS EUROS), toutes causes confondues, l’indemnité à payer par le Syndicat Mixte Intercommunal d’Etudes, de programmation et de Révision du Schéma Directeur de Marne Nord à Monsieur I A, Madame G H épouse A, Monsieur J X, Madame K L épouse X, Madame R X épouse Y, Madame S X épouse Z, Monsieur AA AB AC et Monsieur AD AB AC pour la dépossession de la parcelle située sur la commune de […], cadastrée […], d’une surface de 10 150 m² ;

FIXE à 11 875,50 € (ONZE MILLE HUIT CENT SOIXANTE QUINZE EUROS ET CINQUANTE CENTIMES) l’indemnité à payer par le Syndicat Mixte Intercommunal d’Etudes, de programmation et de Révision du Schéma Directeur de Marne Nord à la SNC X, pour l’éviction de la parcelle située sur la commune de […], cadastrée […] et d’une surface de 10 150 m² ;

PREND ACTE de ce que l’expropriant ne s’oppose pas à indemniser la SNC X de la récolte en cours dans le cas où la prise de possession interviendrait avant que celle-ci ne soit levée, et ce conformément au barème de la Chambre d’Agriculture de Seine-et-Marne sur les dégâts causés aux cultures ;

DONNE ACTE au Syndicat Mixte Intercommunal qu’il s’engage à réaliser une clôture entre l’emprise expropriée et le surplus de la parcelle […] ;

DEBOUTE Monsieur I A, Madame G H épouse A, Monsieur J X, Madame K L épouse X, Madame R X épouse Y, Madame S X épouse Z, Monsieur AA AB AC, Monsieur AD AB AC et la SNC X de toutes leurs autres demandes indemnitaires ;

CONDAMNE le Syndicat Mixte Intercommunal d’Etudes, de programmation et de Révision du Schéma Directeur de Marne Nord à verser à Monsieur I A, Madame G H épouse A, Monsieur J X, Madame K L épouse X, Madame R X épouse Y, Madame S X épouse Z, Monsieur AA AB AC et Monsieur AD AB AC la somme de 1500 (MILLE CINQ CENTS) euros en application de l’article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNE le Syndicat Mixte Intercommunal d’Etudes, de programmation et de Révision du Schéma Directeur de Marne Nord à verser à la SNC X la somme de 1500 (MILLE CINQ CENTS) euros en application de l’article 700 du code de procédure civile ;

DIT que les dépens seront laissés à la charge de l’autorité expropriante en application des dispositions de l’article L13-5 du code de l’expropriation.

Jugement prononcé publiquement par O P Juge de l’expropriation pour le département de Seine et Marne, qui a signé la minute avec Myriam AE, Greffier au Tribunal de Grande Instance de Melun le 11 juillet 2013.

LE GREFFIER LE JUGE DE L’EXPROPRIATION

Myriam AE O P

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Tribunal de grande instance de Melun, Juge de l'expropriation, 11 juillet 2013, n° 12/00016