Tribunal de grande instance de Melun, Juge de l'exécution, 10 décembre 2013, n° 13/03545

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
TGI Melun, JEX, 10 déc. 2013, n° 13/03545
Juridiction : Tribunal de grande instance de Melun
Numéro(s) : 13/03545

Sur les parties

Texte intégral

TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE

DE MELUN

Juge de l’Exécution

Affaire n° : 13/03545

Jugement n° : 13/00295

JUGEMENT DU DIX DECEMBRE DEUX MIL TREIZE

Le 12 Novembre 2013,

Et par-devant B C, Juge chargé des fonctions de Juge de l’exécution, statuant à Juge Unique assisté de D E, greffier.

[…] :

PARTIE DEMANDERESSE :

Société HDW, demeurant […]

assistée de Me Hervé OLIEL, avocat au barreau de PARIS

PARTIE DÉFENDERESSE :

DIRECTION GENERALE DES FINANCES PUBLIQUES,

[…]

assistée de Me Guillaume MEAR, avocat au barreau de MELUN

Après l’appel de l’affaire, celle-ci a été mise en délibéré et renvoyée pour jugement à l’audience du 10 Décembre 2013.

A la date indiquée, le jugement suivant a été rendu :

FAITS ET PROCEDURE

Par exploit d’huissier en date du 5 novembre 2013, et suite à une ordonnance l’autorisant à assigner à jour fixe en date du 30 octobre 2013, la société HDW a fait assigner Madame la Comptable des Finances Publiques du services des impôts des entreprises de MELUN VILLE devant le Juge de l’Exécution du tribunal de grande instance de MELUN en rétractation d’ordonnances autorisant des mesures conservatoires.

L’affaire a été appelée à l’audience du 12 novembre 2013.

A cette date, l’affaire a été plaidée et mise en délibéré au 10 décembre 2013.

PRETENTIONS ET MOYENS DU DEMANDEUR

La société HDW demande :

— de rétracter les ordonnances sur requête rendues les 17 septembre et 3 octobre 2013

— d’annuler les procès-verbaux de saisies conservatoires pratiquées les 26 septembre 2013 et les 16 et 17 octobre 2013

— de condamner Madame la Comptable des Finances Publiques du services des impôts des entreprises de MELUN VILLE à lui payer la somme de 50 000 euros à titre de dommages-intérêts

— de la condamner à lui payer la somme de 4000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile et aux dépens

Au soutien de sa demande, elle expose que les requêtes présentées les 17 septembre et 3 octobre 2013 ne comportaient pas l’indication, en violation de l’article 494 du code de procédure civile, des pièces produites. Elle considère donc que ces requêtes auraient dû être déclarées irrecevables car ne respectant pas le principe du contradictoire. Elle ajoute que l’administration fiscale n’a, en outre, pas indiqué dans ses requêtes que la société avait contesté les rappels de TVA et n’a pas produit à l’appui de ses requêtes la réponse de la société du 13 septembre 2013 à la proposition de rectification. Elle estime donc que l’administration n’a pas permis au juge d’apprécier en pleine connaissance de cause la nature du litige, sa portée et son fondement.

Elle fait ensuite valoir que la créance dont se prévaut la comptable des finances publiques est purement éventuelle et ne paraît pas fondée en son principe et, qu’en toute hypothèse, les circonstances ne caractérisent aucune menace sur son recouvrement. Elle indique par ailleurs que l’administration fiscale a abandonné dans l’intervalle une partie très significative de sa réclamation, ramenant sa créance alléguée à la somme de 2 009 836 euros, ce qui démontre, selon elle, la fragilité de la position des services fiscaux. Elle considère que la simple existence d’une proposition de rectification ne saurait suffire à justifier la mise en œuvre d’une mesure conservatoire lorsque les redressements opérés n’ont pas été acceptés par le contribuable. Elle ajoute que l’administration a refusé la garantie de substitution consistant à consentir une hypothèque légale sur un bien immobilier dont elle est propriétaire et estimé à une valeur de 2 100 000 à 2 300 000 euros. Elle estime que sa situation financière à la date d’intervention des saisies était florissante avec une progression constante du chiffre d’affaires, une augmentation de son capital social et l’accroissement de sa rentabilité. Elle ajoute, qu’à supposer que la créance devienne exigible, elle sera en mesure de s’organiser pour engager son patrimoine, étant par ailleurs à jour de ses obligations déclaratives en matière de TVA et de cotisations sociales.

Elle fait également valoir que ces saisies pratiquées de manière intempestive et abusive lui ont d’ores et déjà causé un important préjudice, étant précipitée vers une inéluctable cessation des paiements à raison des saisies pratiquées. Elle explique que les trois banques ont dénoncé les lignes de crédit jusqu’alors consenties provoquant l’arrêt de la chaine d’achat sur le mois d’octobre qui correspond à une période où les besoins de trésorerie sont importants. Elle ajoute que son dirigeant a de nouveau proposé des garanties le 28 octobre 2013 qui ont été refusées par les services fiscaux en violation des dispositions de l’article R277-1 du livre des procédures fiscales qui ne leur permet pas de choisir la garantie de substitution.

PRETENTIONS ET MOYENS DU DEFENDEUR

Madame la Comptable des Finances Publiques du services des impôts des entreprises de MELUN VILLE demande de :

— confirmer les ordonnances du 17 septembre et du 3 octobre 2013

— condamner la société HDW à lui payer la somme de 4000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile et aux dépens

Au soutien, elle expose que, conformément à l’article 494 du code de procédure civile, les requêtes ayant donné lieu aux deux ordonnances ont bien été motivées et accompagnées d’un bordereau listant l’ensemble des pièces invoquées. Elle ajoute, en outre, que les dénonciations des saisies conservatoires ont été faites dans les délais.

Sur le fond, elle indique que, bien qu’actuellement contestée, il n’est pas nécessaire de justifier d’une créance certaine, liquide et exigible et que le seul moyen tiré de la contestation des rectifications ne permet pas de remettre en cause les mesures conservatoires. Elle ajoute que, néanmoins, tenant compte des observations de la SAS HDW, les services de vérification ont le 24 octobre 2013 réajusté la proposition de rectification initiale ramenée à 2 009 836 euros, somme inférieure au montant appréhendé par les saisies conservatoires. Elle indique que ces rectifications maintenues concernent la branche « carrouseliste » sur laquelle le service vérificateur a démontré que la société savait ou ne pouvait ignorer qu’elle participait à un schéma frauduleux.

S’agissant des menaces de recouvrement, elle fait valoir que l’activité de la SAS HDW ne s’inscrit pas dans une logique économique et que la proposition de rectification met en avant un système de fraude caractérisée à la TVA dans laquelle cette société joue un rôle principal. Elle considère donc que cette fraude justifie en tant que telle l’existence d’une menace de recouvrement, l’absence de patrimoine étayant également cet élément. Elle ajoute, sur ce point, que le bien immobilier offert en garantie de substitution est totalement grevé par un privilège de prêteur de deniers et est la propriété de la SCI HDW et non de la SAS HDW. Elle indique que cette dernière est propriétaire d’un local situé à PEZARCHES qui se trouve également grevé d’un privilège de prêteur de deniers.

S’agissant de la demande de dommages-intérêts, elle fait valoir que les dispositions invoquées de l’article R277-1 du livre des procédures fiscales applicables en cas de sursis légal de paiement ne peuvent être appliquées au cas d’espèce. Elle considère que la société ne peut justifier d’un quelconque préjudice.

MOTIFS

Sur la demande de rétractation des ordonnances sur requête du 17 septembre 2013 et du 3 octobre 2013

Attendu que l’article R121-23 du code des procédures civiles d’exécution dispose que «Le juge de l’exécution statue par ordonnance sur requête dans les cas spécifiés par la loi ou lorsque les circonstances exigent qu’une mesure urgente ne soit pas prise contradictoirement. » ;

Que l’article 496 alinéa 2 du code de procédure civile dispose que « s’il est fait droit à la requête, tout intéressé peut en référer au juge qui a rendu l’ordonnance » ; Que l’article 497 du même code énonce que « le juge a la faculté de modifier ou de rétracter son ordonnance, même si le juge du fond est saisi de l’affaire » ;

Que le recours en rétractation relève donc de la compétence exclusive du juge qui a rendu l’ordonnance ; Que le juge saisi d’une demande de rétractation d’une ordonnance sur requête est investi des attributions du juge qui l’a rendue et doit, après débat contradictoire, statuer sur les mérites de la requête ;

Qu’il appartient au requérant de justifier de ce que sa requête était fondée, et non au demandeur à la rétractation de rapporter la preuve qu’elle ne l’est pas ; Que le juge de la rétractation doit se placer au jour où il statue, en considérant la situation qui existe à cet instant et non à la date où le premier juge s’est prononcé ;

Attendu que l’alinéa 1 de l’article 494 du code de procédure civile dispose que «La requête est présentée en double exemplaire. Elle doit être motivée. Elle doit comporter l’indication précise des pièces invoquées. » ;

Que le défaut d’indication des pièces invoquées dans la requête constitue une violation du principe du contradictoire, cette indication précise constituant une condition de la recevabilité de la requête ;

Attendu qu’en l’espèce, par requête en date du 17 septembre 2013, déposée au greffe le même jour, Madame la Comptable des Finances Publiques du services des impôts des entreprises de MELUN VILLE a sollicité à ce qu’elle soit autorisée à pratiquer une saisie conservatoire sur certaines sommes inscrites sur les comptes bancaires appartenant à la SAS HDW et sur les sommes dues par ses clients en garantie de la somme de 4 141 461 euros ; Que cette requête ne contient pas dans son corps l’indication des pièces invoquées, la requête ayant seulement été accompagnée de documents joints listés dans un bordereau séparé ;

Qu’une ordonnance en date du 17 septembre 2013 a été rendue autorisant la saisie conservatoire des sommes inscrites sur les comptes bancaires de la SAS HDW auprès de LA BRED BANQUE POPULAIRE, HSBC FRANCE, CRCAM BRIE PICARDIE, BANQUE CIC EST et des sommes dues par les clients de la SAS HDW à savoir X Y, CDISCOUNT SA et THE PHONE HOUSE ;

Que par requête en date du 3 octobre 2013, déposée au greffe le même jour, Madame la Comptable des Finances Publiques du services des impôts des entreprises de MELUN VILLE a sollicité à ce qu’elle soit autorisée à pratiquer une saisie conservatoire sur certaines sommes susceptibles d’être payées à la SAS HDW par ses clients en garantie de la somme de 4 141 461 euros ; Que cette requête ne contient également pas dans son corps l’indication des pièces invoquées, la requête ayant seulement été accompagnée de documents joints ;

Qu’une ordonnance en date du 3 octobre 2013 a été rendue autorisant la saisie conservatoire sur certaines sommes susceptibles d’être payées à la SAS HDW par ses clients à savoir BTLEC EST WITRY CAUREL, BTLEC OUEST LECLERS, LA CENTRALE FOTOVISTA, PIXMANIA et Z A ;

Attendu qu’il résulte donc de ses éléments que si les requêtes étaient bien accompagnées des différents documents justificatifs, qui ont pas ailleurs été visés dans chacune des ordonnances, néanmoins, force est de constater que dans le corps même des requêtes la liste des pièces produites n’est pas mentionnée ; Qu’il n’est également pas établi que l’administration fiscale a communiqué à la société HDW lors de la notification de ces requêtes et des ordonnances la liste précise des documents ou le bordereau des pièces ;

Qu’ainsi, sans remettre en cause à ce stade le bien fondé des deux ordonnances quant à l’existence de l’apparence d’une créance et d’un péril dans son recouvrement, ces deux ordonnances ayant été prises au regard des documents effectivement produits par le requérant, il y a lieu néanmoins de constater que les deux requêtes sont en réalité irrecevables, le principe du contradictoire, auquel la société HDW n’entend pas renoncer, n’ayant au final pas été respecté ; Qu’il y a donc lieu de rétracter les deux ordonnances précitées ;

Sur les dommages intérêts

Attendu que le Juge de l’Exécution est notamment compétent, en application de l’article L213-6 du code de l’organisation judiciaire, s’agissant des contestations qui s’élèvent à l’occasion de l’exécution forcée et des demandes en réparation fondées sur l’exécution ou l’inexécution dommageable des mesures d’exécution forcée ou des mesures conservatoires ;

Que l’article L512-2 alinéa 2 du code des procédures civiles d’exécution, applicable aux mesures conservatoires, dispose que «Lorsque la mainlevée a été ordonnée par le juge, le créancier peut être condamné à réparer le préjudice causé par la mesure conservatoire » ; Que dans ce cas, ce texte n’exige pas, pour son application, la constatation d’une faute du créancier ;

Qu’il est néanmoins nécessaire de constater un préjudice subi et un lien de causalité, conformément au droit commun ;

Attendu qu’en l’espèce, il y a lieu de constater que la mainlevée des deux ordonnances a été ordonnée en raison d’une nullité de forme des deux requêtes ; Que cette rétractation n’est pas intervenue suite à la constatation de l’absence d’apparence de créance ou de risque de recouvrement ;

Qu’en outre, aucune pièce ne vient établir le fait que les trois banques de la société HDW ont dénoncé les lignes de crédit ; Que le fait allégué d’une mauvaise image données à la société HDW envers ses clients n’est également pas étayé ;

Qu’en conséquence le préjudice allégué n’est pas suffisamment prouvé ;

Que l’article R277-1 du livre des procédures fiscales qui dispose notamment que «Le comptable compétent invite le contribuable qui a demandé à différer le paiement des impositions à constituer les garanties prévues à l’article L. 277. Le contribuable dispose d’un délai de quinze jours à compter de la réception de l’invitation formulée par le comptable pour faire connaître les garanties qu’il s’engage à constituer. » n’est pas applicable au cas d’espèce s’agissant de proposition de redressement et non du paiement effectif de l’impôt;

Que la demande de dommages-intérêts sera donc rejetée ;

Sur l’article 700 du code de procédure civile

Attendu qu’il serait inéquitable de laisser à la charge de la SAS HDW les frais irrépétibles par elle exposés ; Qu’il convient de lui accorder la somme de 1500 euros à ce titre ;

Sur les dépens

Attendu que la partie qui succombe doit supporter les dépens ;

PAR CES MOTIFS

Le Juge de l’Exécution, statuant publiquement, par jugement contradictoire et en premier ressort,

RETRACTE l’ordonnance en date du 17 septembre 2013 autorisant Madame la Comptable des Finances Publiques du services des impôts des entreprises de MELUN VILLE à procéder à la saisie conservatoire des sommes inscrites sur les comptes bancaires de la SAS HDW auprès de LA BRED BANQUE POPULAIRE, de HSBC FRANCE, du CRCAM BRIE PICARDIE, de la BANQUE CIC EST et des sommes dues par les clients de la SAS HDW à savoir X Y, CDISCOUNT SA et THE PHONE HOUSE ;

RETRACTE l’ordonnance en date du 3 octobre 2013 autorisant Madame la Comptable des Finances Publiques du services des impôts des entreprises de MELUN VILLE à procéder à la saisie conservatoire de certaines sommes susceptibles d’être payées à la SAS HDW par ses clients BTLEC EST WITRY CAUREL, BTLEC OUEST LECLERS, LA CENTRALE FOTOVISTA, PIXMANIA et Z A ;

ORDONNE la mainlevée de toutes les saisies conservatoires opérées sur la bases de ces deux ordonnances ;

DÉBOUTE la SAS HDW de sa demande de dommages-intérêts ;

CONDAMNE Madame la Comptable des Finances Publiques du services des impôts des entreprises de MELUN VILLE à payer à la SAS HDW la somme de 1500 euros au titre de l’article 700 du Code de Procédure Civile;

DEBOUTE Madame la Comptable des Finances Publiques du services des impôts des entreprises de MELUN VILLE de sa demande fondée sur l’article 700 du Code de Procédure Civile ;

CONDAMNE Madame la Comptable des Finances Publiques du services des impôts des entreprises de MELUN VILLE aux dépens.

Fait à Melun le DIX DECEMBRE DEUX MIL TREIZE par B C, Juge chargé des fonctions de Juge de l’exécution, assisté de D E, FF de greffier .

LE GREFFIER LE JUGE DE L’EXÉCUTION

D E B C

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