Tribunal de grande instance de Paris, 3e chambre, 20 février 2001

  • Acte pris en considération : conclusions du defendeur·
  • Article l 613-5 b code de la propriété intellectuelle·
  • Demande reconventionnelle en réparation du préjudice·
  • Société incapable de commercialiser seule le produit·
  • Article l 611-3 code de la propriété intellectuelle·
  • Certificat complementaire de protection no 92c01151·
  • Période posterieure à la rupture des negociations·
  • Liberté dans l'exercice des droits de la défense·
  • Cout supplementaire supporte par le defendeur·
  • Actes accomplis a des fins non commerciales

Chronologie de l’affaire

Résumé de la juridiction

Element operant : reprise de negociations purement fictive et destinee a tenir informer le brevete de l’evolution du produit concurrent

elements pris en consideration : fautes du brevete, difficulte de recrutement des patients, transfert des essais dans un autre pays

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Sur la décision

Référence :
TGI Paris, 3e ch., 20 févr. 2001
Juridiction : Tribunal de grande instance de Paris
Publication : PIBD 2001 729 III 530
Domaine propriété intellectuelle : BREVET
Numéro(s) d’enregistrement des titres de propriété industrielle : FR92C0151
Référence INPI : B20010039
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Texte intégral

FAITS ET PROCEDURE Le 13 mai 1997, la société WELLCOME FOUNDATION LIMITED (ci-après WELLCOME), anciennement GLAXO WELLCOME, mettait en demeure la société FLAMEL TECHNOLOGIES (ci-après FLAMEL) de cesser les essais cliniques phase III qu’elle venait de démarrer en France au motif que ces essais consacraient l’utilisation de la molécule aciclovir protégée par le CCP n° 92 C 0151 dont elle est propriétaire et que ces essais visaient exclusivement à mettre au point son système micropump en violation de ses droits. Sur autorisations judiciaires, la société WELLCOME a fait procéder au siège de la société PAREXEL INTERNATIONAL, société chargée de réaliser les essais au nom de la société FLAMEL, le 4 septembre 1997 à une saisie-contrefaçon et a réitéré cette opération le 20 novembre 1997 au siège de la société FLAMEL. Ces deux saisies ayant permis d’apprendre que la société CREAPHARM avait été chargée de fabriquer de l’aciclovir, la société WELLCOME a assigné les 17 et 18 septembre 1997, cette société, la société PAREXEL et la société FLAMEL en contrefaçon des revendications 5, 9 et 10 de son CCP dont la date d’expiration est le 15 mars 1999, par fabrication, utilisation, détention et offre d’aciclovir et en indemnis0ation. Aux termes de ses dernières conclusions, la société WELLCOME demande au tribunal de :

- dire que les sociétés CREAPHARM et FLAMEL se sont rendues coupables de contrefaçon des revendications 5, 9 et 10 de son CCP par la fabrication, l’utilisation, la détention et l’offre d’aciclovir jusqu’au 19 mars 1999,
- condamner la société FLAMEL à lui payer la somme provisionnelle de 3 MF à valoir sur la réparation du préjudice qu’elle a subi à évaluer définitivement après dires d’expert à désigner,
- en application de l’article 24 du Nouveau Code de Procédure Civile ordonner la suppression dans les conclusions de la société FLAMEL signifiées le 5 mars 1999 de certains paragraphes qui sont scientifiquement faux, diffamatoires et dénigrants pour elle,
- condamner la société FLAMEL à lui payer la somme de 1 MF en réparation de l’atteinte portée à son image,
- condamner la société FLAMEL à lui payer la somme de 250.000 francs en application de l’article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile, et ce, sous le bénéfice de l’exécution provisoire et de la publication de la décision à intervenir.

La société PAREXEL demande au tribunal de la mettre hors de cause ainsi que l’a sollicité la société WELLCOME. La société CREAPHARM rappelle :

- qu’elle est une structure ayant pour objet de mettre à disposition de ses clients un laboratoire équipé de moyens humains et matériels dans un environnement pharmaceutique agréé par l’Agence du médicament et ce, notamment pour faire des essais ;

- qu’elle n’est pas en mesure dans ces conditions de vérifier une éventuelle contrefaçon et ce, d’autant qu’en l’espèce l’étude qui était commandée concernait "deux groupes de 200 sujets à inclure (2*300 à réaliser)" et correspondait à des essais de phase 3 sans rapport avec une pré-commercialisation. Aussi, la société CREAPHARM sollicite le débouté des demandes et l’allocation d’une somme de 50.000 francs en application de l’article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile. La société FLAMEL rappelle que :

- elle est une société de haute technologie développant des innovations dans les domaines pharmaceutique, chimique et agrochimique ;

- elle a notamment développé des techniques d’encapsulage de médicaments ayant pour résultat la libération prolongée de ces derniers ; ces techniques appelées MICROPUMP sont protégées par des brevets mondiaux ;

- souhaitant établir un partenariat avec WELLCOME pour développer cette technique sur l’aciclovir, médicament traitant les infections virales herpétiques, la société FLAMEL s’est rapprochée de cette dernière ;

- les pourparlers ont duré plusieurs mois avec des positions contradictoires de la société WELLCOME, celle-ci souhaitant en définitive retarder l’arrivée sur le marché du GENVIR (nom du produit alliant le MICROPUMP et l’ACICLOVIR) dans l’attente de la mise au point d’un dérivé de l’ACICLOVIR, le VALACICLOVIR, dont l’administration ne se fait qu’en deux prises par jour ;

- devant l’échec des négociations, elle a souhaité seule mettre en oeuvre les essais de phase III du GENVIR. La société FLAMEL soutient que :

- les essais de phase III qu’elle a menés ne constituent pas une contrefaçon mais relèvent des dispositions de l’article L.613-5 b) du Code de la Propriété Intellectuelle qui

autorisent les actes accomplis à titre expérimental portant sur l’objet de l’invention breveté ;

- la société WELLCOME a eu dans la conduite des négociations un comportement fautif, établi d’ailleurs dans le compte-rendu de M. Joël P, directeur en charge de la stratégie commerciale et du marketing « produits herpétiques » ;

- la société WELLCOME a multiplié les procédures et ce, en vue de retarder la mise au point du GENVIR,
- le préjudice qu’elle a subi est important et ce, compte-tenu de sa taille. Aussi, la société FLAMEL réclame le débouté des demandes en contrefaçon de la société WELLCOME et reconventionnellement la condamnation de celle-ci à lui payer, sur le fondement de l’article 1382 du code civil, une somme de 390 MF assortie de l’exécution provisoire à hauteur de 53, 1 MF et celle de 200.000 francs en application de l’article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile avec l’autorisation de publication de la décision à intervenir. La société WELLCOME réfute les arguments de la société FLAMEL et sollicite le rejet des demandes reconventionnelles.

DECISION La société WELLCOME ne formulant plus aucune demande à l’encontre de la société PAREXEL dans ses dernières écritures, il y a lieu de mettre hors de cause cette dernière. I – SUR LES DEMANDES DE LA SOCIETE WELLCOME : 1 – sur le certificat complémentaire et sa portée : Il est constant en application de l’article L.611-3 du Code de la Propriété Intellectuelle que le certificat complémentaire de protection qui répond au souci de compenser la diminution de la durée effective d’exploitation des brevets de médicament résultant du régime d’autorisation qui lui est particulier assure pendant toute sa durée de validité la même protection à l’invention que le brevet lui-même. La société WELLCOME justifie avoir été titulaire jusqu’au 15 mars 1999 d’un certificat complémentaire de protection, délivré le 26 août 1992 et enregistré sous le n° 92 C 0150 portant sur le principe actif « aciclovir ».

Il y a lieu de relever que la société FLAMEL ne conteste pas la validité de ce titre ni avoir utilisé dans les essais qui lui sont reprochés le principe actif protégé à savoir l’aciclovir et avoir ainsi reproduit les revendications du certificat qui lui sont opposées. 2 – sur l’application de l’article L 613-5 b) du Code de la Propriété Intellectuelle : Il n’est pas contesté que lors des opérations de saisie-contrefaçon intervenues à la demande de la société WELLCOME, la société FLAMEL se livrait à des essais dit de « phase 3 » pour la mise au point de son médicament GENVIR associant le principe actif « aciclovir », protégé par le certificat précité, à sa technologie « micropump ». Il s’agissait au terme du protocole n° CLFT 9676 signé le 4 septembre 1997 entre FLAMEL, PAREXEL et le Professeur J Cette phase est classée par les auteurs de l’ouvrage précité dans la rubrique « essais thérapeutiques ».

-la phase 4 qui intervient après autorisation de mise sur le marché a pour objectif d’affiner la connaissance du produit, de mettre en évidence les effets indésirables rares, d’affiner la connaissance et la fréquence des effets indésirables, d’évaluer la stratégie du traitement, d’adapter la posologie pour des cas particuliers. Si la société WELLCOME ne conteste pas que les essais de la phase III visant à définir les conditions d’utilisation d’un nouveau produit relève de l’exception précitée, elle soutient que les essais de bioéquivalence c’est-à-dire ceux visant à démontrer que la spécialité testée a la même composition qualitative en principe actif que la – spécialité de référence, tels que ceux réalisés par FLAMEL ne bénéficient pas de cette exception. Le tribunal relève :

- d’une part :

- qu’il est constant que l’exception précitée qui bénéficie aux actes à caractère expérimental ne s’applique pas aux actes accomplis à des fins industrielles et commerciales ;

- que les actes accomplis à des fins industrielles et commerciales ne peuvent s’agissant de médicament s’effectuer que postérieurement à l’autorisation de mise sur le marché de la spécialité en cause ;

- qu’en l’espèce les essais de bioéquivalence consistant à comparer les propriétés du produit expérimenté à la spécialité de référence étant nécessaires à l’obtension de l’autorisation de mise sur le marché du GENVIR ne peuvent pas être considérés comme des actes accomplis à des fins industrielles et commerciales, leur finalité immédiate étant l’obtension de l’AMM ;

— d’autre part :

- que les essais effectués par FLAMEL entraient dans la catégorie des actes expérimentaux puisqu’il s’agissait de vérifier que le GENVIR était une alternative au médicament breveté ; que pour ce faire, il fallait aller au-delà des essais montrant que la technologie des d« établir principalement une équivalence clinique entre deux formulations d’aciclovir », le Zovirax 200mg en comprimés 5 fois par jour pendant 5 jours et le Viropump (ancien nom du GENVIR) 600mg 2 fois par jour pendant 5 jours comme traitement des récurrences d’herpès génital et secondairement de confirmer la sécurité et la tolérance de l’aciclovir lors de l’utilisation de la nouvelle formulation. Pour s’exonérer du grief de contrefaçon, la société FLAMEL sollicite le bénéfice de l’article L 613-5 b) du Code de la Propriété Intellectuelle, qui dispose que les droits conférés par le brevet ne s’étendent pas aux actes accomplis à titre expérimental qui portent sur l’objet de l’invention brevetée. Il ressort de l’extrait de l’ouvrage « le médicament, naissance, vie et mort d’un produit pas comme les autres » de MM. Gilles B, Daniel S et de Mme Eveline E que les phases d’essai des médicaments chez l’homme sont au nombre de 4 :

-La phase 1 a pour objectif d’évaluer la tolérance en fonction de la dose et de réaliser les premières études pharmaceutiques ;

-la phase 2 précoce permet d’étudier chez l’homme la propriété pharmacodynamique et de parfaire la connaissance de la pharmacocinétique ;

-la phase 2 tardive a pour objectif de mettre en évidence l’efficacité thérapeutique, la posologie, les relations effets/concentrations circulantes, les facteurs pouvant modifier la cinétique et les effets indésirables. La phase 1 et la phase 2 précoce sont considérées comme des phases préliminaires, la phase 2 tardive comme des essais thérapeutiques pilotes.

-la phase 3 a pour objectif la confirmation et l’extension des résultats relatifs à l’efficacité et à la sécurité d’emploi, l’évaluation du bilan efficacité/sécurité à moyen et éventuellement à long terme, l’étude des effets indésirables les plus fréquents, l’observation des autres caractéristiques propres au médicament (interaction médicamenteuse, facteurs tels l’âge susceptible de modifier les résultats…) « micropump » était utilisable avec l’aciclovir (essais effectués à l’occasion du dépôt du brevet déposé par FLAMEL le 18 octobre 1994) et démontrer que la spécialité nouvelle qui associe le principe actif « aciclovir » à la technologie « micropump » permettait par une posologie différente de la spécialité de la demanderesse de traiter les mêmes affections ; il ne s’agissait pas seulement de tester la bioéquivalence d’un générique par rapport à une spécialité de référence (le GENVIR n’étant pas un générique du ZOVIRAX dès lors qu’il n’a pas la même forme pharmaceutique) mais de tester si l’association du principe actif en cause à la technologie de FLAMEL améliorait les conditions de posologie de ce dernier

tout en restant équivalent en efficacité de traitement à celui-ci dans la spécialité de référence. Le tribunal considère qu’en décider différemment reviendrait à priver les chercheurs de la possibilité d’expérimenter l’utilisation de principes actifs connus et protégés dans de nouvelles conditions pour en améliorer soit la posologie soit les effets de traitements et ce, antérieurement à la prise d’accord avec les propriétaires des brevets initiaux et nuirait ainsi au développement de brevets de perfectionnement, en donnant un monopole de fait aux titulaires des premiers brevets. Dans ces conditions, il y a lieu de rejeter la demande en contrefaçon de la société WELLCOME. II – SUR LA DEMANDE RECONVENTIONNELLE DE LA SOCIETE FLAMEL 1 – sur la responsabilité de GLAXO WELLCOME : La société FLAMEL soutient que la société WELLCOME a conçu et mis en oeuvre une stratégie délibérée en poursuivant des négociations fictives avec elle et en procédant à des saisies-contrefaçon et procédures injustifiées afin de l’empêcher de pénétrer avec le produit GENVIR sur le marché des médicaments soignant l’herpès génital. Il ressort de l’examen des nombreux courriers échangés entre les parties entre 1995 et 1999 et produits aux débats que les relations entre FLAMEL et WELLCOME peuvent être scindées en 3 périodes : une première période de négociations entre février 1995 et septembre 1996, une deuxième période dite « judiciaire » en 1997 et une troisième période de nouveaux pourparlers en 1998 et début 1999. 2 – Période 1995-1996 :

-à la suite d’une lettre d’information adressée par FLAMEL à GLAXO le 8 février 1995 des contacts très soutenus entre ces deux sociétés ont été entretenus jusqu’en août 1995 en vue de la signature d’un accord d’utilisation par la société GLAXO de la technologie « Viropump » dans le cadre de l’exploitation de l’aciclovir ;

-en août 1995, les pourparlers ont été interrompus en raison de la fusion entre GLAXO et WELLCOME (lettre du 9 août 1995 de M. E de GLAXO à FLAMEL) ;

-à la suite d’une lettre de relance de la société FLAMEL (lettre du 13 septembre 1995) à la société GLAXO WELCOME, de nouveaux contacts ont été pris mais se sont soldés le 20 novembre 1995 par un refus de la société GLAXO WELLCOME d’utiliser la technologie FLAMEL pour l’aciclovir avec toutefois l’indication d’une possibilité d’étude de cette technologie pour d’autres produits ;

-à la suite d’une nouvelle demande de la société FLAMEL (lettre du 15 décembre 1995) de nouveaux contacts sont noués au cours desquels la société FLAMEL présente sa

technologie à plusieurs responsables de la société GLAXO WELLCOME et fournit des documentations. Ces négociations se terminent par une réunion le 17 septembre 1996 au cours de laquelle la société GLAXO WELLCOME indique qu’elle n’est pas intéressée par le Viropump pour l’aciclovir compte-tenu de l’existence de son médicament VALTREX mais maintient son intérêt pour l’utilisation de la technologie FLAMEL pour d’autres médicaments. Cette position est actée par la société FLAMEL dans un courrier du 18 septembre 1996. Le tribunal relève qu’aucun des courriers échangés entre les deux sociétés pendant cette période n’établit la mauvaise foi de la société GLAXO WELLCOME dans les négociations. Celle-ci a à trois reprises notifié à la société FLAMEL son refus d’utiliser la technologie viropump pour l’aciclovir ; c’est sur l’insistance de la société FLAMEL que le projet a été remis à l’étude par trois fois. A aucun moment, dans l’échange de correspondances, la société FLAMEL ne se plaint de promesses non tenues par la demanderesse ni de la lenteur des négociations. A chaque fois, elle prend acte du refus qui lui est opposé et relance les pourparlers en essayant de trouver un interlocuteur plus bienveillant étant précisé qu’il ressort des pièces produites qu’à l’intérieur de la société GLAXO WELLCOME les positions sur l’utilisation de la technologie viropump avec l’aciclovir n’étaient par identiques chez tous les responsables. Dans ces conditions, le tribunal estime que la volonté de nuire à FLAMEL de la part de GLAXO WELLCOME n’est pas démontrée pendant la période 1995-1996, et ce, d’autant qu’à aucun moment, elle n’a imposé à la société FLAMEL de clause d’exclusivité. 3 – Période judiciaire : En janvier 1997, la société FLAMEL annonce le lancement des essais de phase 3 de son médicament GENVIR. Le 13 mai 1997, la société GLAXO WELLCOME met en demeure la société FLAMEL de cesser toute utilisation de l’aciclovir contrefaisant son certificat complémentaire de protection. Les 4 septembre 1997 et 20 novembre 1997, la société GLAXO WELLCOME fait procéder à des opérations de saisie-contrefaçon au siège de la société PAREXEL et au siège de la société FLAMEL. Les 17 et 18 septembre 1997, la société GLAXO WELLCOME assigne la société FLAMEL, la société PAREXEL et la société CREAPHARM devant la présente juridiction. Il est constant que le fait d’intenter une action en justice en contrefaçon pour un titulaire de droits en propriété industrielle ne peut en soi être qualifié d’abusif ; que toutefois, si l’action intentée ne vise pas à sauvegarder lesdits droits mais a pour but d’éliminer ou de gêner un concurrent, cette action peut être qualifiée d’abusive.

En l’espèce, le tribunal relève que :

- la société GLAXO WELLCOME en raison des négociations de 1995-1996 avait une parfaite connaissance du produit GENVIR et du fait qu’il ne s’agissait pas d’un générique mais d’un produit associant le principe actif aciclovir à la technologie Viropump.

- la société GLAXO WELLCOME avait parfaitement conscience que ce produit était un produit concurrent de son produit VALTREX (cf compte-rendu de visite du 17 septembre 1996) ;

- depuis septembre 1996, la société GLAXO WELLCOME connaissait l’intention de la société FLAMEL de lancer les essais cliniques viropump Phase III fin 1996 et en connaissait le contenu (cf même document) ;

- la société GLAXO WELLCOME connaissait également la jurisprudence sur les essais cliniques et pouvait d’autant moins en ignorer le contenu qu’elle avait essuyé un refus du Président du tribunal de grande instance de Lyon le 7 août 1997 pour ce motif. Le tribunal estime que le lancement des saisies-contrefaçon par la société GLAXO WELLCOME n’avait pas pour but de sauvergarder ses droits de propriété industrielle puisqu’elle savait parfaitement qu’ils n’étaient pas atteints mais celui de retarder la mise sur le marché d’un produit concurrent. L’utilisation d’une telle stratégie judiciaire par GLAXO WELLCOME est d’ailleurs avouée par M. P Joël, directeur de la stratégie commerciale internationale de cette société dans un compte-rendu interne du 28 décembre 1998 sur le contenu de la réunion FLAMEL/ GLAXO WELLCOME du 11 décembre précédent ; la position de GLAXO WELLCOME y est clairement exprimée : « GW souhaite retarder le processus de dépôt du Genvir. GW fera appel du jugement français qui a rejeté sa demande pour contrefaçon de brevet par FT ». Dans ces conditions, le tribunal considère que la société GLAXO WELLCOME a commis un abus de droit en lançant les opérations de saisie-contrefaçon précitées ainsi que les assignations ultérieures en référé et au fond et ce, dans le but de retarder l’arrivée d’un produit concurrent sur le marché. 4 – Période d’octobre 1998 à janvier 1999 : Il ressort du constat d’huissier en date du 26 octobre 1999, que le 2 octobre 1998, 3 personnes de GLAXO WELLCOME se sont présentées dans les locaux de la société FLAMEL et ce, dans le but de reprendre contact avec celle-ci (cf compte-rendu du 28 décembre 1998 précité : « GW ne contactera plus FT »). Après cette première rencontre, un échange de courriers entre les deux sociétés est intervenu ainsi que d’eux réunions, l’une le 16 novembre 1998 à Londres et l’autre le 11 décembre 1998 dans les locaux de la société FLAMEL.

Ainsi que cela ressort du compte-rendu précité, cette dernière rencontre avait pour objectif de faire préciser à la société FLAMEL l’état de ses principaux projets de développement et particulièrement du GENVIR. Il apparaît de ces différents documents (courriers et compte-rendu) que lors de ces contacts, la société GLAXO WELLCOME maintenait sa position de principe de 1996 sur le positionnement respectif des produits VALTREX et GENVIR ; qu’elle ne proposait à la société FLAMEL que le maintien d’un intérêt de principe pour la technologie Viropump sans lui faire aucune proposition transactionnelle s’agissant du présent litige ; qu’elle savait parfaitement que la société FLAMEL lui donnerait toutes les informations qu’elle souhaitait dès lors que depuis 1995, cette dernière estimait que « GLAXO WELLCOME était le meilleur partenaire possible pour développer le GENVIR » (cf attestation du Docteur S du 22 octobre 1999). Dans ces conditions, le tribunal estime que cette reprise de négociations était purement fictive et destinée à tenir informer GLAXO WELLCOME de l’évolution du produit GENVIR concurrent et qu’en conséquence, elle a commis une manoeuvre déloyale en faisant croire à la société FLAMEL qu’elle était de nouveau intéressée par le GENVIR alors qu’il n’en était rien. III – SUR LES PREJUDICE SUBIS CONSECUTIVEMENT AUX FAUTES DE GLAXO WELLCOME : 1 – sur le coût supplémentaire supporté par la société FLAMEL suite aux actions de la société GLAXO WELLCOME : Le tribunal relève :

- que dès février 1997, les médecins qui devaient participer aux essais cliniques de Phase III du GENVIR étaient inquiets quant à la possibilité d’utiliser des « produits protégés » pendant ceux-ci (cf lettre de PAREXEL du 6 février 1997) ;

- qu’en avril/mai 1997, le recrutement des patients devenait problématique ;

- qu’en octobre 1997, le nombre de patients plafonnant, la société FLAMEL était contrainte à augmenter la taille de son « échantillon » en Allemagne. Il est incontestable que cette difficulté de recrutement de patients en France est consécutive aux pressions exercées par GLAXO WELLCOME sur les médecins dès son information par internet en janvier 1997 des essais GENVIR ; que cette difficulté est devenue insurmontable en septembre 1997 à la suite des différentes saisies-contrefaçon et actions en justice intentées par elle. Aussi, le tribunal considère que le surcoût des essais consécutif à leur transfert en Allemagne est la conséquence des fautes relevées ci-avant à la charge de la société GLAXO WELLCOME.

Compte-tenu des facture versées aux débats, le tribunal estime à la somme de 6 MF, le surcoût imputable à ce transfert que la société GLAXO WELLCOME devra prendre en charge. 2 – sur la perte de bénéfices futurs : La société FLAMEL soutient que les actions de la société GLAXO WELLCOME ont gravement perturbé son projet et irrémédiablement compromis les chances du GENVIR, lui causant un préjudice qu’elle chiffre à 369, 6 MF de bénéfices perdus. Le tribunal note :

- que la société FLAMEL depuis l’origine en 1995 est à la recherche d’un partenariat avec un grand laboratoire pharmaceutique, bénéficiant d’un réseau de commercialisation mondial pour la mise en oeuvre du GENVIR (cf §1.21. Du dossier d’évaluation du dommages financier) ;

- qu’après septembre 1996 et devant le refus de la société GLAXO WELLCOME, elle ne justifie pas avoir trouvé ce partenariat et que d’ailleurs, c’est en raison de cette carence, qu’elle a accepté de renouer des contacts avec GLAXO WELLCOME fin 1998 ; *qu’ainsi elle ne peut prétendre à la perte de bénéfices futurs dès lors que quand bien même la société GLAXO WELLCOME n’aurait pas commis de faute à son égard, elle était incapable seule de commercialiser le produit en cause ; que par ailleurs, elle ne démontre pas avoir fait des recherches en 1997 et 1998 pour trouver un nouveau partenaire et avoir essuyé des refus soit du fait du retard pris sur les essais de Phase III soit en raison de son conflit avec la société GLAXO WELLCOME ; qu’enfin la liberté de contracter s’oppose à ce que le tribunal considère que la société GLAXO WELLCOME aurait du s’engager avec elle. En conséquence, sa demande du chef des bénéfices perdus est en conséquence rejetée. IV – SUR LES AUTRES DEMANDES : Eu égard à la liberté dont dispose chaque partie dans l’exercice de droits de la défense et à la considération que les paragraphes dont il est demandé la suppression sont en lien avec le litige et ne porte pas atteinte au respect dû à la Justice, il n’y a pas lieu de faire droit à cette demande. La nature de la décision n’impose pas sa publication. L’équité commande d’allouer à la société FLAMEL la somme de 100.000 francs en application de l’article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile et celle de 30.000 francs à la société CREAPHARM sur le même fondement.

Eu égard à l’ancienneté des agissements en cause, il y a lieu à exécution provisoire de la présente décision. PAR CES MOTIFS, le Tribunal, statuant publiquement, contradictoirement et en premier ressort, Met hors de cause la société PAREXEL, Déboute la société GLAXO WELLCOME de sa demande en contrefaçon, Dit qu’en opérant des saisies-contrefaçon et en intentant en 1997 des actions judiciaires à l’encontre de la société FLAMEL et en nouant avec elle des contacts fin 1998, dans le but de retarder la mise sur le marché du GENVIR, la société WELLCOME a commis des actes déloyaux à l’encontre de la société FLAMEL, Condamne la société WELLCOME à payer à la société FLAMEL la somme de 6 MF à titre de dommages et intérêts pour le préjudice consécutif à ces agissements déloyaux, Ordonne l’exécution provisoire, Déboute les parties du surplus de leurs demandes, Condamne la société WELLCOME à payer à la société FLAMEL la somme de 100.000 francs et à la société CREAPHARM la somme de 30.000 francs en application de l’article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile et aux dépens, Fait application de l’article 699 du Nouveau Code de Procédure Civile au profit des avocats en défense qui en ont fait la demande pour la part des dépens dont ils ont fait l’avance sans en avoir reçu préalablement provision.

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