Tribunal de grande instance de Paris, 3e chambre, 20 novembre 2001

  • Article l 112-2-8 code de la propriété intellectuelle·
  • Empreinte de la personnalité de l'auteur·
  • Numero d'enregistrement 1 712 243·
  • Numero d'enregistrement 3 065 097·
  • Graphisme particulier·
  • Concurrence déloyale·
  • Risque de confusion·
  • Marque de services·
  • Logo et titres et·
  • Public specialise

Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
TGI Paris, 3e ch., 20 nov. 2001
Juridiction : Tribunal de grande instance de Paris
Domaine propriété intellectuelle : MARQUE
Marques : PLAYER; JOYPAD
Numéro(s) d’enregistrement des titres de propriété industrielle : 1712243; 3065097
Classification internationale des marques : CL16; CL41
Référence INPI : M20010945
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Texte intégral

FAITS ET PROCEDURE Autorisée par ordonnance en date du 14 mars 2001, la société HACHETTE DIGITAL PRESSE (HDP) a assigné le 19 mars 1991 devant ce tribunal la société FJM COMMUNICATION ainsi que Messieurs Jean-Marc et Franck C pour entendre :

-constater que la marque figurative PLAYER déposée le 9 novembre 2000 sous le n° 00 3065097 dont sont titulaires Messieurs C et qui est également le titre du magazine de la société FJM COMMUNICATION, constitue la contrefaçon de son droit d’auteur sur le logo et le titre du magazine JOYPAD qu’elle édite depuis 1991,
-constater que la reprise dans le logo du magazine PLAYER également consacré aux jeux sur console et Internet, des éléments caractéristiques du logo de son magazine JOYPAD est constitutive d’actes de concurrence déloyale et à tout le moins d’actes de parasitisme. La société HDP sollicite donc outre les mesures habituelles d’interdiction et de publication, la condamnation des défendeurs in solidum à lui verser la somme de 500.000 F à titre de dommages-intérêts et celle de 30.000 F sur le fondement de l’article 700 du nouveau code de procédure civile ainsi que le prononcé de la nullité de la marque figurative « PLAYER » déposée le 9 novembre 2000 sous le n°003065097. La société HDP expose que :

-elle édite en qualité de locataire gérant du fonds de commerce de la société SIPRESS qui a été absorbée par la société Hachette Filipacchi Presse le 29 décembre 2000, un magazine mensuel dénommé « JOYPAD » consacré depuis 1991 à l’actualité des consoles et jeux vidéos et dont le titre a été déposé comme marque le 21 août 1991 et enregistré sous le n° 1 712 243,
-le logo du magazine a été modifié en septembre 1997, notamment en ce qui concerne le graphisme de la lettre « y » dont la configuration particulière qui en fait une oeuvre originale est protégeable au titre du droit d’auteur en vertu des articles L 111.1 et suivants du code de la propriété intellectuelle,
-Messieurs C qui ont déposé le 9 novembre 2000 la marque complexe « PLAYER » pour désigner les produits et services des classes 16 et 41, et la société FJM COMMUNICATION qui l’exploite, ont lancé en décembre 2000 un magazine consacré au même sujet et dont le logo titre reprend un certain nombre d’éléments spécifiques de son propre logo et en particulier :

- le graphisme particulier du « y »,
- l’utilisation de la queue du « y » comme zone de soulignement et de texte,
- la reprise dans le logo d’un certain nombre de mentions disposées de manière similaire à celle utilisée par « JOYPAD ». Elle fait valoir également que :

-la reprise de ces éléments ainsi que la forme, la taille et la police des lettres outre la place des mentions entourant le titre de la publication sont également constitutives d’actes de concurrence déloyale et à tout le moins d’actes de parasitisme dans la mesure où ce choix délibéré est de nature à générer un risque de confusion entre les deux publications

dans l’esprit du consommateur de jeux vidéos, lequel connait depuis 1991 le magazine JOYPAD. La société FJM COMMUNICATION et Messieurs Jean-Marc et Franck C soutiennent que :

-le magazine JOYPAD est le seul magazine de la société HDP consacré aux jeux vidéos alors qu’elle -même édite plus de 9 magazines sur ce thème dont certains depuis 1996,
-le logo déposé à titre de marque par la société SIPRESS le 21 août 1991 comporte un « y » sans graphisme particulier,
-la société FJM COMMUNICATION a déposé en avril 1998 la marque « ULTRAPLAY » pour son magazine de PLAY STATION avec un « y » de typologie « larissa » utilisant la queue du « y » comme zone de texte,
- le magazine « CONSOLE NEWS » créé en 1996 a changé de nom pour devenir en 2000 « PLAYER » et la société FJM COMMUNICATION a utilisé le même graphisme que celui utilisé pour la marque « ULTRA PLAY »déposée en 1998. Les défendeurs qui contestent le caractère protégeable au regard du droit d’auteur du graphisme du « y » revendiqué par la société HDP et qui font valoir leur propre exploitation antérieure du graphisme du « y » concluent au débouté de la demande en nullité de la marque « PLAYER » ainsi qu’au débouté des demandes en concurrence déloyale ou en parasitisme dès lors qu’en l’absence de similitude entre les deux titres il n’existe aucun risque de confusion entre les deux publications qui s’adressent au surplus à un public d’initiés qui sait que « PLAYER » concerne également les joueurs sur internet alors que « JOYPAD » ne concerne que les consoles. Enfin, la position dominante d’HACHETTE sur le marché de la presse spécialisée dans le domaine des consoles et des jeux vidéos n’est pas démontrée alors que FJM COMMUNICATION s’est spécialisée depuis plusieurs années dans ce domaine et a su construire sa notoriété ce qui exclut tout acte de parasitisme. Les défendeurs sollicitent en outre à titre reconventionnel la condamnation de la société HDP dont la présente action constitue un acte de concurrence déloyale délibéré à leur verser à titre de dommages-intérêts pour procédure abusive la somme de 100.000 F ainsi que celle de 30.000 F sur le fondement de l’article 700 du nouveau code de procédure civile.

DECISION Il convient de rappeler que la société HDP ne revendique nullement l’atteinte à la marque dénominative « JOYPAD » et que seule est invoquée l’atteinte au droit d’auteur et ce uniquement sur « le graphisme particulier du »y"", graphisme dont elle fait valoir le

caractère protégeable en ce que la queue du « y » a été tirée pour devenir une zone de soulignement d’une part et une zone de texte d’autre part. I – SUR L’ATTEINTE AUX DROITS D’AUTEUR DE LA SOCIÉTÉ H.D.P : 1 – Sur le caractère protégeable du graphisme revendiqué : En application des dispositions de l’article L 112.2 8° du code de la propriété intellectuelle : « sont considérées comme oeuvres de l’esprit au sens du présent code : 8° les oeuvres graphiques et typographiques. » Il appartient donc à ce tribunal d’apprécier si le « y » du titre du magazine « JOYPAD » constitue une oeuvre originale portant l’empreinte de son créateur et comme telle, protégeable au titre du droit d’auteur. Le « y » du titre « JOYPAD » qui utilise comme l’ensemble des lettres composant ce titre, la police de caractères « larissa » non protégeable en tant que police d’imprimante usuellement utilisée notamment pour des titres de revues, comporte un étirement de la queue de la lettre qui lors de sa première utilisation en septembre 1997 assurait la fonction de soulignement de la lettre « O » précédente ainsi que de zone dans laquelle figurait le N° ainsi que le mois et l’année de la revue considérée. Or le simple « étirement » d’une partie d’une lettre alors que le caractère original du graphisme de la dite lettre n’est pas revendiqué, et ce aux fins d’assurer les fonctions de soulignement et de zone de texte, ne constitue pas une oeuvre originale protégeable au titre du droit d’auteur. En effet d’une part le procédé d'« étirement » ne résulte d’aucun effort créatif puisqu’il consiste uniquement à prolonger la queue d’une lettre définie par la police d’imprimante de la dite lettre, prolongement qui a pour effet automatique de souligner soit les lettres précédentes dans le cas du « y » soit les lettres suivantes (voir Nescafé). D’autre part, l’utilisation d’une zone de soulignement en zone de texte est un procédé banal dénué de toute recherche créative, notamment pour les titres des revues. En conséquence et sans qu’il soit nécessaire de statuer sur la titularité des droits, il convient de débouter la société HDP de sa demande en contrefaçon de droits d’auteur à défaut de caractère protégeable du « y » revendiqué. 2 – Sur la validité de la marque « PLAYER » n°003065097 : Dès lors que la marque « PLAYER » ne porte pas atteinte aux droits antérieurs de la société HDP à défaut de caractère protégeable du « y » revendiqué au titre du droit d’auteur, la société demanderesse qui n’invoque pas la contrefaçon de sa marque, ne peut solliciter la nullité de la marque « PLAYER » sur le fondement de l’article L 711.4 e) du code de la propriété intellectuelle qui dispose :

« Ne peut être adopté comme marque un signe portant atteinte à des droits antérieurs et notamment : e) aux droits d’auteur ; « II – SUR LA CONCURRENCE DÉLOYALE ET LE PARASITISME : 1 – Sur la concurrence déloyale : La société HDP poursuit la société FJM COMMUNICATION et Messieurs C en concurrence déloyale aux motifs qu’en imitant le logo du titre de la publication »JOYPAD« pour leur revue »PLAYER« ils se sont rendus coupables de manoeuvres déloyales alors que les magazines »JOYPAD« et »PLAYER" concernent le même public de la presse spécialisée en jeux et consoles vidéo. Les manoeuvres reprochées sont l’addition des éléments suivants :

-forme, taille et police des lettres du titre,
-graphisme de la lettre « y »,
-reproduction verticale accolée à la première lettre du nom de la publication,
-incrustation dans le logo de trois mentions équivalentes à savoir :

- indication des machines sur lesquelles les jeux sont l’objet de la publication,
- signature ou slogan très proche : « le magazine du joueur sur consoles et Internet » pour « JOYPAD » et « le magazine des consoles » pour « PLAYER »,
- numéro et mois. Or la forme, la taille et la police des lettres du titre sont utilisées de manière courante et banale et notamment par la défenderesse depuis 1998 dans le titre de sa revue sur les playstations intitulée « ULTRA PLAY » sans que la société demanderesse qui édite sa propre revue depuis 1991 l’ait considérée comme pratiquant des actes de concurrence déloyale et la reproduction verticale accolée à la première lettre du nom de la publication est un procédé classique en la matière (voir « l’argus du voyage »). En outre cette même revue « ULTRA PLAY » incruste dans son logo, son slogan « le magazine des ultraPlayStations » ainsi que le numéro et le mois. Enfin la référence aux machines concernées par la publication apparait nécessaire s’agissant de jeux ou de consoles vidéos. Cependant la reprise de tous ces éléments combinés serait susceptible de constituer un acte de concurrence déloyale s’il existait de ce fait un risque de confusion entre les deux publications. Or les autres éléments de la page de titre, s’agissant au surplus de revues qui s’adressent à un public spécialisé, sont de nature à éviter tout risque de confusion entre les deux publications.

Il n’existe en effet aucune similitude tant visuelle et phonétique qu’intellectuelle entre les deux titres « JOYPAD » et « PLAYER », et leurs contenus sont différents puisque la première revue s’adresse uniquement aux joueurs sur console alors que la seconde concerne également l’internet. En conséquence et à défaut de risque de confusion entre les deux publications, il convient de débouter la société HDP de sa demande en concurrence déloyale. 2 – Sur le parasitisme : La société HDP qui ne démontre pas la position de leader de sa revue « JOYPAD » alors que la société défenderesse édite de nombreuses revues spécialisées dans le domaine des consoles et jeux vidéos et que les deux revues en litige ne concernent pas le même public de spécialistes, sera déboutée de sa demande de ce chef. III – SUR LA DEMANDE RECONVENTIONNELLE : La société FJMCOMMUNICATION et Messieurs C qui ne démontrent pas le caractère abusif de la présente procédure seront déboutés de leur demande reconventionnelle en dommages-intérêts. L’exécution provisoire n’apparait pas nécessaire en l’espèce et il n’y a pas lieu de l’ordonner. Il serait inéquitable de laisser à la charge des défendeurs les frais irrépétibles de la procédure et la société HDP qui succombe sera condamnée à leur verser la somme de 4.573 euros en application de l’article 700 du nouveau code de procédure civile. PAR CES MOTIFS : Le tribunal, Statuant publiquement, Par jugement contradictoire et en premier ressort,
-Dit que le « y » allongé du titre de la revue « JOYPAD » ne constitue pas une oeuvre de l’esprit protégeable en vertu des dispositions des articles L 111.1 et suivants du code de la propriété intellectuelle, En conséquence,
-Déboute la société HDP de l’ensemble de ses demandes,
-Déboute les défendeurs de leur demande reconventionnelle en dommages-intérêts,
-Dit n’y avoir lieu à exécution provisoire,

— Condamne la société HDP à payer aux défendeurs la somme de 4.573 euros sur le fondement de l’article 700 du nouveau code de procédure civile,
-Condamne la société HDP aux dépens qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l’article 699 du nouveau code de procédure civile par la SCP ALTERMAN BENEZRA LECLERCQ et ce pour les dépens dont elle a fait l’avance et pour lesquels elle n’a pas reçu de provision.

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