Tribunal de grande instance de Paris, 3e chambre 1re section, 5 novembre 2003

  • Élément caractéristique distinctif·
  • Droit d'auteur·
  • Avilissement·
  • Contrefaçon·
  • Dénigrement·
  • Originalité·
  • Parasitisme·
  • Imitation·
  • Nom de domaine·
  • Marque

Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
TGI Paris, 3e ch. 1re sect., 5 nov. 2003
Juridiction : Tribunal de grande instance de Paris
Domaine propriété intellectuelle : MARQUE
Marques : EMILIE JOLIE
Numéro(s) d’enregistrement des titres de propriété industrielle : 1732749
Classification internationale des marques : CL03; CL05; CL16; CL18; CL20; CL24; CL25; CL26; CL28; CL41
Référence INPI : M20030731
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Texte intégral

Suivant exploit en date du 11 octobre 2002, monsieur Philippe de C dit Philippe C et la société CPM CINE PRODUCTION MANAGEMENT ont assigné, devant ce Tribunal, la société TROPIC TELECOM, monsieur Philippe H et CORE INTERNET COUNCIL OF REGISTRARS. Au soutien de leurs demandes, monsieur Philippe C et la société CPM CINE PRODUCTION MANAGEMENT font valoir les éléments suivants : monsieur Philippe C est l’auteur d’une série d’oeuvres littéraires notoirement connues destinées à la jeunesse, racontant les aventures d’une petite fille « EMILIE J », nom et personnage qu’il a créés en 1979. Les aventures de cette petite fille ont été racontées au sein d’un livre d’images, pour la première fois, en 1979, plusieurs chansons portent le nom d'« EMILIE J » telles que « CHANSON D’EMILIE J ET DU GRAND OISEAU », « CHANSON DE L’HORLOGE D’EMILIE J ». La comédie musicale, dont le titre est « EMILIE J », a été présentée au public, pour la première fois, il y a plus de 15 ans, a été ensuite à l’affiche au Théâtre Mogador du 5 novembre 2002 au 5 janvier 2003 puis au Grand Rex. Cette oeuvre est protégée au titre du droit d’auteur. Monsieur Philippe C est également titulaire de la marque semi-figurative « EMILIE JOLIE » n° 1 732 749 déposée le 4 février 1980, renouvelée les 3 août 1990 et 12 avril 2000. Cette marque désigne notamment les services de « divertissement » en classe 41. Monsieur Philippe C a concédé une licence d’exploitation à la société CPM CINE PRODUCTION MANAGEMENT et lui a cédé ses droits d’exploitation de l’oeuvre « EMILIE J ». Il a enregistré le nom de domaine « emilie- jolie.net » et la société CPM, productrice du spectacle EMILIE JOLIE, a autorisé monsieur Serge Kadoche chargé de la construction du site Emilie Jolie à enregistrer le nom de domaine « emilie-jolie.com », ce nom de domaine étant actuellement en cours de cession à la société CPM. Ils ont appris l’existence d’un site correspondant au nom de domaine « emiliejolie.com », à caractère pornographique, le titulaire du nom de domaine étant TROPIC TELECOM, dont le contact administratif est Philippe HALIMI, l’unité d’enregistrement auprès de laquelle le nom de domaine « emiliejolie.com » est enregistré étant « CORE INTERNET COUNCIL OF REGISTRARS ». Le nom de domaine « emiliejolie.com »aurait été déposé par TROPIC TELECOM et Philippe H le 13 mars 2000. Cette pratique, qui consiste à s’approprier les signes distinctifs des tiers sur Internet en les déposant comme noms de domaine, est constitutive de contrefaçon et de concurrence déloyale. Les demandeurs exposent :

- que le titre« EMILIE J », protégeable au titre du droit d’auteur, est reproduit intégralement par la société TROPIC TELECOM et monsieur Philippe H, que cette contrefaçon viole le droit moral de monsieur Philippe C et les droits patrimoniaux de la société CPM CINE PRODUCTION MANAGEMENT, les droits d’exploitation de l’oeuvre ayant été cédés à cette dernière par monsieur Philippe C, et ce en application de l’article 122-4 du Code de Propriété Intellectuelle,
- que l’article L 716-1 du Code de la Propriété Intellectuelle dispose que l’atteinte portée au propriétaire de la marque constitue une contrefaçon engageant la responsabilité civile de son auteur, que la marque antérieure « EMILIE JOLIE »de monsieur C est reproduite servilement par la société TROPIC TELECOM et par monsieur Philippe H qui emploient le nom de domaine « emiliejolie.com », que, de plus, la page d’accueil du site indique en tête « Bienvenue sur EmilieJolie.com », que la marque est parfaitement arbitraire et que

son utilisation par les défendeurs ne s’explique que par une volonté de profiter de la renommée de la marque EMILIE JOLIE, que la contrefaçon est constituée par application des articles L 713-2 et L 713-3 du Code de la Propriété Intellectuelle,
- qu’enfin, la réservation et l’utilisation du nom de domaine « emiliejolie.com » est également constitutive de concurrence déloyale et de parasitisme envers les demandeurs, que le nom de domaine « emiliejolie.com » reproduit en effet servilement la dénomination EMILIE JOLIE, que l’usurpation est renforcée par la notoriété acquise de l’oeuvre EMILIE J, que de tels actes constituent des actes d’avilissement et de dénigrement de l’image d’Emilie J et engagent la responsabilité de la société TROPIC TELECOM et de monsieur H, que ces actes et le préjudice en résultant pour les demandeurs sont d’autant plus graves que le site correspondant au nom de domaine est un site pornographique alors qu’EMILIE J est destinée à de très jeunes enfants et classée dans la catégorie jeunesse
- que le jugement doit être opposable à la société CORE INTERNET COUNCILS OF REGISTRARS qui est l’organisme d’enregistrement du nom de domaine « emiliejolie.com ». Les défendeurs, bien que régulièrement assignés, n’ont pas constitué avocat. L’affaire a été clôturée le 17 septembre 2003 et plaidée à la même date.

Attendu que les demandeurs agissent tant au titre du droit d’auteur qu’en contrefaçon de marque et soulèvent des actes de parasitisme ; Attendu que le titre « EMILIE J » du conte musical dont Philippe C est l’auteur est incontestablement original, c’est à dire présente l’empreinte caractéristique de son auteur qui relate les rêves d’une petite fille qu’il a appelée Emilie comme sa petite fille alors âgée de trois ans ; Attendu que, de même, monsieur Philippe C justifie avoir déposé la marque semi figurative Emilie JOLIE le 4 février 1980, marque régulièrement renouvelée, la dernière fois le 13 avril 2000, désignant notamment les services de divertissement en classe 41 et avoir concédé l’exploitation tant du spectacle que de la marque à la société demanderesse ; Attendu que les demandeurs produisent, au soutien de leurs demandes, un procès-verbal de constat en date du 1er octobre 2002 sur la création d’un site correspondant au nom de domaine « emiliejolie.com » ; qu’aux termes dudit constat, l’huissier précise :" Je frappe l’adresse www.emiliejolie.com. S’affiche alors la page d’accueil avec les mentions ; « Bienvenue sur EmilieJolie.com ». Le web des 100% Sexe et non censuré"; que, sur cette page figure la photo d’une femme nue dont on voit les organes génitaux et, par ailleurs, d’autres femmes nues et un couple en train de faire l’amour ; que l’enregistrement de ce site remonte au 13 mars 2000 ; qu’une interrogation d’un moteur de recherche de noms de domaine a permis de relever que l’unité d’enregistrement auprès de laquelle le nom de domaine« emiliejolie.com » a été enregistré est « CORE INTERNET COUNCIL OF REGISTRARS », que son titulaire est TROPIC TELECOM dont le contact administratif est Philippe HALIMI "; que ce site est manifestement à usage pornographique ; Attendu qu’il résulte de l’ensemble de ces documents que monsieur H et la société

TROPIC TELECOM ont porté atteinte au droit d’auteur de monsieur C, violant ainsi le droit moral de ce dernier et les droits patrimoniaux de la société demanderesse ; Que, de même, en déposant le nom de domaine, monsieur HALIMI et la société TROPIC TELECOM ont reproduit les éléments caractéristiques essentiels de la marque complexe déposée par monsieur C pour des services pouvant être assimilés par des clients à la classe 41 et ce bien qu’obéissant à des finalités radicalement opposées à celle de la marque déposée par monsieur C ; Que dès lors, il ya lieu de retenir la contrefaçon et de réparer le préjudice moral de monsieur C pour atteinte à la marque et le préjudice patrimonial de ce chef subi par la société demanderesse ; Attendu que la société TROPIC TELECOM et monsieur H seront condamnés solidairement à payer à chacun des demandeurs, à ces différents titres, la somme de 4.500 euros ; Attendu qu’en utilisant le nom de domaine contesté à des fins pornographiques, la société TROPIC TELECOM et monsieur H ont dénigré et avili l’image d’Emilie J ; que ces actes de parasitisme doivent être réparés par la somme de 4.500 euros au bénéfice de chacun des demandeurs; Attendu qu’il convient de faire droit aux demandes d’interdiction sollicitées tout en réduisant l’astreinte et à la demande de transfert du nom de domaine ; Attendu que le jugement sera opposable à CORE INTERNET COUNCILS OF REGISTARS.qui devra faire cesser immédiatement l’accès au site litigieux, en tant que de besoin ; Attendu qu’il apparaît inéquitable de laisser à la charge des demandeurs les frais irrépétibles qu’ils ont exposés ; Que monsieur H et la société TROPIC TELECOM seront condamnés à leur payer à chacun la somme de 1500 euros sur le fondement de l’article 700 du Nouveau code de Procédure civile ; Attendu qu’au vu de la nature de l’affaire, il convient d’ordonner l’exécution provisoire du présent jugement ; Attendu que les autres demandes seront rejetées comme non justifiées ; Attendu que monsieur H et la société TROPIC TELECOM, parties succombantes, doivent les dépens. PAR CES MOTIFS Statuant par jugement public, réputé contradictoire, en premier ressort, Dit qu’en réservant et en utilisant le nom de domaine « emiliejolie.com », la société TROPIC TELECOM et monsieur H ont porté atteinte aux droits d’auteur de monsieur C sur le titre du conte et du spectacle EMILIE J. , spectacle sur lequel la société demanderesse dispose des droits patrimoniaux. Condamne la société TROPIC TELECOM et monsieur Philippe H solidairement à payer à monsieur Philippe C la somme de 4.500 euros de dommages intérêts en réparation du préjudice subi du fait de l’atteinte à son droit moral sur le titre « Emilie J ». Condamne la société TROPIC TELECOM et monsieur Philippe H solidairement à payer à la société CPM CINE PRODUCTION MANAGEMENT la somme de 4.500 euros de dommages intérêts en réparation du préjudice subi du chef de ses droits patrimoniaux sur l’oeuvre. Dit qu’en réservant et en utilisant le nom de domaine « emiliejolie.com », la société

TROPIC TELECOM et monsieur H ont porté atteinte aux droits de marque de monsieur C sur la marque française complexe EMILIE J 732 749 déposée le 3 août 1990 et renouvelée depuis régulièrement, désignant notamment les services de divertissement en classe 41, marque ayant fait l’objet d’une licence d’exploitation en faveur de la société demanderesse. Condamne la société TROPIC TELECOM et monsieur Philippe H solidairement à payer à monsieur Philippe C la somme de 4.500 euros de dommages intérêts en réparation du préjudice subi du fait de l’atteinte à son droit moral sur la marque « Emilie Jolie ». Condamne la société TROPIC TELECOM et monsieur Philippe H solidairement à payer à la société CPM CINE PRODUCTION MANAGEMENT la somme de 4.500 euros de dommages intérêts en réparation du préjudice subi du chef de ses droits patrimoniaux sur la marque. Dit qu’en réservant et en utilisant le nom de domaine « emiliejolie.com », la société TROPIC TELECOM et monsieur H ont commis des actes de parasitisme distincts. Condamne la société TROPIC TELECOM et monsieur Philippe H solidairement à payer à monsieur Philippe C la somme de 4.500 euros de dommages intérêts en réparation du préjudice subi du fait des actes de parasitisme. Condamne la société TROPIC TELECOM et monsieur Philippe H solidairement à payer à la société CPM CINE PRODUCTION MANAGEMENT la somme de 4.500 euros de dommages intérêts en réparation du préjudice subi du fait des actes de parasitisme. Interdit à la société TROPIC TELECOM et à monsieur Philippe H de faire usage du nom de domaine « emiliejolie.com » sous astreinte de 100 euros par infraction constatée à compter de la signification du présent jugement. Donne injonction à la société TROPIC TELECOM et à monsieur Philippe H d’effectuer auprès de l’organisme compétent le transfert du nom de domaine « emiliejolie.com » au bénéfice de monsieur C à titre gratuit et ce dès la signification du présent jugement . Déclare le jugement commun à CORE INTERNET COUNCILS OF REGISTRARS, lequel, en tant que de besoin, devra faire cesser immédiatement l’accès au site « emiliejolie.com ». Condamne la société TROPIC TELECOM et monsieur Philippe H à payer à chacun des demandeurs la somme de 1.500 euros sur le fondement de l’article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile. Ordonne l’exécution provisoire du présent jugement. Rejette les autres demandes. Condamne la société TROPIC TELECOM et monsieur Philippe H aux dépens.

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