Tribunal de grande instance de Paris, 8e chambre 1re section, 27 octobre 2009, n° 08/09095

  • Règlement de copropriété·
  • Syndicat de copropriétaires·
  • Lot·
  • Destination·
  • Assemblée générale·
  • Immeuble·
  • Autorisation·
  • Bâtiment·
  • Agrément·
  • Bois

Chronologie de l’affaire

Commentaire0

Augmentez la visibilité de votre blog juridique : vos commentaires d’arrêts peuvent très simplement apparaitre sur toutes les décisions concernées. 

Sur la décision

Référence :
TGI Paris, 8e ch. 1re sect., 27 oct. 2009, n° 08/09095
Juridiction : Tribunal de grande instance de Paris
Numéro(s) : 08/09095

Sur les parties

Texte intégral

T R I B U N A L

D E GRANDE

I N S T A N C E

D E P A R I S

8e chambre 1re section

N° RG :

08/09095

N° MINUTE :

Assignation du :

09 Juin 2008

(footnote: 1)

JUGEMENT

rendu le 27 Octobre 2009

DEMANDEUR

Syndicat des copropriétaires 14 rue de la Cure […]- représenté par son syndic la S.A. Société GERANCE DE PASSY

[…]

[…]

représenté par Maître Marie-Hélène LEONE CROZAT, avocat au barreau de PARIS, avocat plaidant, vestiaire #E468

DÉFENDEUR

Monsieur A X

[…]

[…]

représenté par Maître Pierre-Bruno GENON CATALOT, avocat au barreau de PARIS, avocat plaidant, vestiaire B 96

COMPOSITION DU TRIBUNAL

Alain PALAU, Vice Président

Dominique MOUTHON-VIDILLES, Vice-Présidente ayant fait rapport à l’audience

[…], Juge

assistés de Rose-Marthe ACHERON, faisant fonction de greffier

DEBATS

A l’audience du 15 Septembre 2009

tenue en audience publique au cours de laquelle les avocats ont été avisés de la date du délibéré par mise à disposition au greffe

JUGEMENT

Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe

Contradictoire

en premier ressort

* * *

FAITS ET PROCÉDURE:

Par acte notarié du 23 mai 1997, Monsieur A X a acquis le lot n°201 (anciennement lot n°3 puis n°22) constitué d’un appartement en duplex formant le bâtiment C de l’immeuble en copropriété du 14 rue de la Cure à Paris 16e .

Ce bâtiment dispose d’une toiture plate.

En juin 2000, souhaitant créer un accès direct afin de pouvoir nettoyer son toit ainsi que ses descentes d’eaux pluviales régulièrement obstruées par des feuilles et autres débris végétaux, Monsieur X a sollicité l’autorisation de l’assemblée générale de percer une trémie pour poser un velux et de réaliser un garde corps.

L’assemblée générale du 15 juin 2000 a refusé d’accéder à ses demandes.

Par jugement du Tribunal de Grande Instance de Paris en date du 26 novembre 2002, Monsieur X a été autorisé à réaliser les travaux projetés.

Par arrêt du 30 octobre 2003, en considérant que “Monsieur X cherchait en réalité à aménager son toit en terrasse accessible et que de ce fait, il portait atteinte aux droits des autres copropriétaires qui pouvaient légitimement redouter que ce toit aménagé en terrasse soit le siège de manifestations conviviales certes sympathiques mais bruyantes et qui n’avaient depuis la construction de l’immeuble aucun vis à vis”, la Cour d’appel de Paris a infirmé le jugement aux motifs qu’accorder les autorisations à l’intéressé lui permettraient de procéder à une surélévation déguisée puisqu’il disposerait alors d’une salle à manger en plein air que rien ne lui interdirait de bâcher par la suite.

Par arrêt du 16 mars 2005, la Cour de cassation a cassé l’arrêt au motif que les aménagements apportés pour rendre accessible la terrasse ne constituaient pas, en l’état actuel, des travaux de surélévation et a renvoyé l’affaire devant la Cour d’appel d’Orléans.

Monsieur X a alors fait procéder aux travaux autorisés par le jugement du 26 novembre 2002 et a également fait réaliser des travaux, sur la base d’une autorisation administrative du 20 octobre 2003, consistant dans la création d’un balcon en façade, la pose de caillebotis avec plots, le renforcement de la structure du bâtiment, le changement de la dalle du rez-de-chaussée et la création d’un sous-sol.

Par arrêt du 10 novembre 2006, la Cour d’appel d’Orléans a confirmé le jugement du 26 novembre 2002 autorisant les travaux refusés par l’assemblée générale au motif qu’à ce stade, la copropriété n’était pas autorisée à faire un procès d’intention à Monsieur X en le soupçonnant de vouloir créer une terrasse d’agrément alors qu’il est avéré que le toit de la toiture est encombré de débris végétaux de sorte qu’il avait un motif légitime de rendre son toit-terrasse accessible.

Sur les travaux réalisés postérieurement à l’arrêt de la Cour de cassation dont le syndicat des copropriétaires demandait la démolition, la Cour a considéré que ces travaux, non autorisés préalablement par l’assemblée générale et qui tendaient à aménager la terrasse en lieu de vie, modifiaient l’aspect extérieur de l’immeuble et sa destination et affectaient les parties communes et a donc condamné Monsieur X, sous astreinte, à procéder à leur démolition.

Sur requête en interprétation formée par le syndicat des copropriétaires, la Cour d’appel d’Orléans a, par arrêt en date du 9 novembre 2007, considéré que de fait, le syndicat des copropriétaires entendait obtenir de la cour qu’ajoutant à son arrêt, elle dise que Monsieur X ne peut pas aménager sa terrasse privative en “lieu de vie”, alors que tel n’était pas l’objet de sa saisine et que l’intéressé reste libre, sous réserve, lorsque la loi l’impose, d’une autorisation du syndicat des copropriétaires, ou à défaut de la juridiction compétente, d’aménager sa terrasse comme il l’entend.

En février 2007, l’astreinte commençant à courir en mars 2007, Monsieur X a convoqué le syndicat des copropriétaires afin de faire constater l’exécution des travaux de démolition en présence de deux huissiers mandatés par chacune des parties.

Constatant que si les dalles de caillebotis avec leurs plots sont remisées à une extrémité de la toiture et que le balcon en façade a disparu, il existait cependant des claustras accrochés aux garde-corps, un plancher en latté recouvert d’un revêtement synthétique vert et divers meubles dont deux parasols, coffres, hamacs et autres effets bâchés et après habilitation de l’assemblée générale du 18 février 2008, le syndicat des copropriétaires a fait assigner Monsieur X, par exploit daté des 3 et 5 juin 2008, en suppression de ces aménagements.

Aux termes de ses dernières écritures visées par le Greffe le 29 juin 2009, le syndicat des copropriétaires du 14 rue de la Cure à Paris 16e demande de constater que les aménagements de la toiture du bâtiment C constituent une pièce à vivre, de dire que cette affectation est contraire au règlement de copropriété, que la pose de claustras et de parasols constitue une surélévation de fait contraire au règlement de copropriété, de dire que cette affectation de la toiture est contraire à la destination de l’immeuble et au respect du droit de jouissance des autres copropriétaires, en conséquence de condamner Monsieur X à remettre la toiture du bâtiment C en état, dans le respect du règlement de copropriété, par l’enlèvement des aménagements non autorisés, à savoir claustras en bois clipsés sur les garde-corps, la grille en fer forgé, les transats, parasols, hamacs, coffre en bois, table et chaises de jardin, le plancher en latte et le revêtement synthétique et ce, sous astreinte de 1.000 euros par jour de retard à compter de la signification du jugement à intervenir, qu’il soit dit qu’à défaut d’exécution trois mois après la signification du jugement, il sera autorisé à faire enlever, avec l’assistance de la force publique et d’un serrurier, en présence d’un huissier qui en dressera procès-verbal, l’ensemble des éléments précités à ses frais avancés, ces frais restant à la charge de Monsieur X, le bénéfice de l’exécution provisoire et la condamnation de Monsieur X à lui verser la somme de 3.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile et aux dépens qui pourront être recouvrés directement conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.

Il se prévaut de l’arrêt de la Cour d’appel de renvoi et soutient que le toit- terrasse a été qualifié de partie privative et considéré comme inaccessible, qu’il a été dit que les travaux ayant pour objet le nettoyage du toit et des descentes EP ne pouvaient être refusés par l’assemblée de 2000 en soupçonnant à ce stade Monsieur X de vouloir créer une terrasse d’agrément mais que les travaux tendant à aménager la terrasse en lieu de vie modifiaient l’aspect extérieur de l’immeuble et sa destination, affectaient les parties communes et avaient été irrégulièrement exécutés comme n’ayant pas été soumis à l’assemblée générale des copropriétaires.

Il ajoute qu’après convocation par Monsieur X afin de constater l’exécution des travaux de démolition, le syndic et un huissier ont constaté la dépose d’un balcon en façade et en toiture et le remisage, à une extrémité de la toiture, des dalles de caillebotis avec leurs plots mais également la présence de divers aménagement dont un plancher en latté sur lequel est posé un revêtement synthétique vert, des claustras en pin tout autour de la toiture et divers meubles.

Il relève que Monsieur X a clairement affiché sa volonté de créer une terrasse d’agrément et de rendre habitable sa toiture et considère que cette utilisation des lieux est contraire à la destination de l’immeuble et au règlement de copropriété.

Il indique que l’autorisation d’accéder à la toiture du bâtiment C n’a été obtenue que pour nettoyer une terrasse inaccessible et estime que si de ce fait, elle est devenue accessible, elle ne saurait pour autant devenir un lieu de vie sans aller à l’encontre des droits des autres copropriétaires et violer le règlement de copropriété.

Il rappelle les travaux d’agrandissement intervenus sur le lot, en 1990 et l’autorisation donnée par l’assemblée générale au propriétaire de fermer la terrasse de sorte que lorsque Monsieur X l’acquiert en mai 1997, le lot est composé de trois pièces avec une toiture plate.

Il se réfère au règlement de copropriété qui précise que le propriétaire du bâtiment C ne pourra en aucun cas le surélever, ce qui se comprend compte tenu de la configuration des lieux, le bâtiment C étant accolé au bâtiment A.

Il estime que le changement d’affectation de la toiture en lieu de vie, contraire au règlement de copropriété, porte atteintes aux droits des autres copropriétaires en ce que les aménagements ont un impact négatif sur la qualité des espaces, sur celle des ambiances et sur le voisinage et réduisent le droit au soleil, à la lumière, aux vues et au calme pour les voisins immédiats et pour l’ensemble des habitants de l’immeuble et se prévaut du rapport établi par Madame Y, architecte.

Il ajoute que ce changement de destination nécessite un accord unanime en assemblée, ce qui n’est pas le cas et qu’il ne peut être autorisé par le Tribunal.

Il soutient que c’est donc à bon droit qu’il demande à ce que les aménagements de la toiture ayant pour objet de l’aménager en lieu de vie soient supprimés.

Enfin, il se réfère à un jugement du Tribunal correctionnel du 4 juillet 2007 qui permet de mieux appréhender la psychologie “jusqu’au-boutiste” de Monsieur X qui détruit tout ce qui lui fait obstacle par injures, coups et blessures, agressions tant sur les copropriétaires que sur les agents de la Force Publique amenant le Tribunal à prononcer une condamnation exemplaire d’interdiction de paraître au 14 rue de la Cure et à 10 mois d’emprisonnement pour le couple assortis d’un sursis.

Aux termes de ses dernières écritures visées par le Greffe le 23 janvier 2009, Monsieur A X conclut au débouté de l’intégralité des demandes formées à son encontre et à la condamnation du syndicat des copropriétaires à lui verser la somme de 5.000 euros à titre de dommages intérêts pour procédure abusive et vexatoire et celle de 5.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile et aux dépens qui pourront être recouvrés directement conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.

Il sollicite en outre la dispense de toute participation au paiement des condamnations qui seront prononcées à l’encontre du syndicat des copropriétaires au titre des dommages intérêts et de l’indemnité au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Il se réfère au règlement de copropriété et à ses actes modificatifs pour affirmer que la “partie de terrasse affectée” à son lot est une partie privative.

Il fait observer que d’autres copropriétaires de l’immeuble ont une terrasse et que le quartier est composé d’immeubles récents dont bon nombre de logements sont pourvus de spacieuses terrasses.

Il affirme qu’avant qu’il ne se réapproprie sa terrasse, ses voisins, les époux Z, l’utilisaient illégalement et l’avait aménagée en jardin et lieu de réception en supprimant le garde-corps en fer forgé situé devant leur fenêtre et se prévaut d’un constat d’huissier établi le 20 Juillet 1998.

Il rappelle que par jugement en date du 24 mars 2005, confirmé pour l’essentiel par la Cour d’appel, ce Tribunal a condamné les époux Z à lui verser des dommages intérêts et a relevé que les “plantations”, le “gazon artificiel” et les 24 bacs à fleurs qu’ils avaient posés “entraînaient des nuisances”.

Il estime que ces deux décisions ont le mérite de montrer que ce que lui reproche aujourd’hui le syndicat des copropriétaires, c’est de faire le même usage de sa terrasse que celui que les autres copropriétaires en faisaient jadis avant lui.

Il rappelle le contentieux qui l’a opposé à la copropriété et les diverses décisions rendues et dénonce la tentative du syndicat des copropriétaires de contrecarrer la chose jugée par l’adoption d’une nouvelle résolution qui a été annulée.

Il soutient que disposant définitivement d’un accès direct de l’intérieur de son bâtiment à la terrasse qui est une partie privative, le syndicat des copropriétaires n’est pas admis à l’empêcher d’en jouir comme une partie privative, à savoir comme lieu de vie et d’agrément par définition habitable.

Il relève que le syndicat des copropriétaires emploie une formule évasive selon laquelle il lui serait interdit de l’utiliser comme lieu “d’agrément” et d’y installer des meubles et objets lui permettant de se reposer, d’y déjeuner ou de prendre l’apéritif et fait observer qu’aucune clause du règlement de copropriété n’ampute ainsi l’usage de la terrasse.

Il ajoute que le syndicat n’explique pas davantage en quoi la destination de l’immeuble serait affectée par l’usage qu’il fait de sa terrasse et considère que la destination de l’habitation bourgeoise de l’immeuble est étrangère au sujet traité.

Il indique que la thèse du syndicat est affectée d’une irréductible contradiction dès lors qu’un propriétaire d’une partie privative qui dispose légalement d’un usage et d’une jouissance libres ne peut se voir interdire d’y habiter, ce qui est la première fonction de l’usage et d’en profiter, ce qui est le premier attribut de la jouissance.

Il estime que le syndicat des copropriétaires s’escrime à réintroduire le débat sur la surélévation de fait résultant de la hauteur des meubles installés sur la terrasse alors que la Cour de cassation a considéré que les aménagements qui ne sont que des meubles et objets mobiliers amovibles, détachables et transportables “ne constituaient pas des travaux de surélévation” .

Concernant le grief tiré du non-respect de la destination de l’immeuble et du droit de jouissance des autres copropriétaires, il soutient qu’il se heurte à l’autorité de la chose jugée par l’arrêt de la Cour d’appel du 10 novembre 2006 qui a estimé que les travaux en cause n’étaient pas de nature à permettre une atteinte à l’intimité des autres copropriétaires ou à réduire la luminosité et que les distances légales prévues aux articles 678 et 680 étaient respectées.

Enfin, il affirme que l’instance revêt à l’évidence un caractère abusif, qu’elle n’a été inspirée que par l’intention malicieuse renouvelée de lui nuire ce qui justifie l’allocation de dommages intérêts en réparation du préjudice moral subi.

* * *

L’ordonnance de clôture est intervenue le 15 septembre 2009.

MOTIFS:

sur la portée de l’arrêt de la Cour d’appel de renvoi

Par arrêt de la Cour d’appel d’Orléans devenu définitif, il a été dit que le toit-terrasse constituait une partie privative et qu’il doit être considéré comme inaccessible, la cour relevant à ce propos que Monsieur X ne peut pas prétendre, sans une certaine mauvaise foi, que son toit-terrasse serait accessible après avoir soutenu le contraire tout au long de la procédure alors que celle-ci qu’il a initiée, a précisemment pour but de rendre accessible un toit-terrasse qui ne l’est pas.

Concernant les travaux soumis à l’autorisation de l’assemblée générale consistant en la réalisation d’une trémie pour poser un velux créant un accès direct à la toiture et la pose d’un garde corps, nécessaires à l’entretien du toit-terrasse, la Cour a considéré qu’il ne s’agissait pas de travaux de surélévation, qu’ils ne portaient pas atteinte à la destination de l’immeuble, qu’ils ne sont pas de nature à permettre une atteinte à l’intimité des autres copropriétaires ou à réduire la luminosité et que les distances légales prévues aux articles 678 et 680 sont respectées et a confirmé l’autorisation judiciaire accordée par le jugement du 26 novembre 2002.

Concernant les travaux dont l’autorisation n’avait pas été soumise à l’assemblée générale, tendant à l’aménagement de la terrasse en lieu de vie et consistant dans la création d’un balcon en façade, le renforcement de la structure du bâtiment et la pose de caillebotis et de plots, la Cour d’appel a estimé que ces éléments qui modifient l’aspect extérieur de l’immeuble et sa destination et qui affectent les parties communes, devaient être impérativement soumis à l’autorisation de l’assemblée générale et que ne l’ayant pas été, il convenait d’en ordonner la démolition..

Il a donc été définitivement dit que le toit-terrasse constitue une partie privative, qu’il était inaccessible, que Monsieur X n’a été autorisé à procéder à des travaux permettant d’y accéder qu’afin d’en assurer le nettoyage, que ces seuls travaux ne constituent pas des travaux de surélévation, ne portent pas atteinte à la destination de l’immeuble et aux droits des autres copropriétaires mais que par contre, les travaux tendant à l’aménagement de la terrasse en lieu de vie modifiaient l’aspect extérieur de l’immeuble et sa destination et qu’ils devaient, en conséquence, être soumis à l’accord de l’assemblée générale.

Il en résulte d’ores et déjà qu’en ce qui concerne les travaux, objet de la présente instance, Monsieur X ne peut utilement invoquer l’autorité de la chose jugée afférente tant à l’arrêt de la Cour de cassation qu’à celui de la Cour d’appel de renvoi en ce qu’ils ont retenu l’absence de surélévation, la conformité à la destination de l’immeuble et l’absence d’atteintes aux droits des autres copropriétaires dès lors qu’il ne s’est agi que des travaux relatifs à l’accès au toit afin de procéder à son nettoyage et non pas, comme le soutient Monsieur X, des aménagements en cause.

C’est en l’état de ces constatations qu’il convient d’examiner les demandes formées par le syndicat des copropriétaires.

sur les demandes du syndicat des copropriétaires en suppression des aménagements complémentaires

Aux termes de l’article 8 de la loi du 10 juillet 1965, le règlement de copropriété détermine la destination des parties privatives ainsi que les conditions de leur jouissance.

En l’espèce, le règlement de copropriété du 6 décembre 1955 précise que le lot n°3 (qui deviendra n°22 puis n°201) est un local, actuellement à usage de garage, disposant au-dessus d’une pièce avec une terrasse.

L’état modificatif du règlement de copropriété publié le 28 décembre 1994 portant suppression du lot n° 3 et création du lot n°22 rappelle que lors de l’assemblée générale du 7 juin 1990, le propriétaire du lot n°3 a été autorisé à aménager une toiture sur la terrasse qui avait été précédemment fermée et précise que ce lot devenu n°22 comporte au premier étage non plus “une pièce avec une terrasse devant” mais “deux pièces, salle de bains, penderie, wc”.

Il en ressort qu’aux termes du règlement de copropriété modifié, la terrasse a disparu au profit de pièces d’habitation et que dorénavant, “le toit-terrasse” est affecté à l’usage de toiture.

A ce stade, il apparaît donc que toute référence par Monsieur X à l’utilisation antérieure de la terrasse est inopérante, cette terrasse ayant disparu et ne pouvant être assimilée avec la toiture qui l’a recouverte.

Il n’est pas contesté que le règlement de copropriété dans ses versions successives est resté taisant sur le caractère accessible de ce toit-terrasse, partie privative; cependant, il a été définitivement dit par la Cour d’appel de renvoi qu’il était inaccessible depuis sa construction.

Le modificatif au règlement de copropriété du 16 décembre 1996 n’a apporté aucune correction à la composition de ce lot devenu lot n°201.

Ce lot a été acquis comme tel en 1997 par Monsieur X lequel après avoir obtenu judiciairement l’autorisation de rendre “le toit-terrasse” accessible pour procéder plus commodément à son nettoyage, a souhaité le transformer en terrasse d’agrément en revendiquant dans la présente instance le droit de l’utiliser, pour l’usage qui lui convient et notamment “pour y déjeuner ou prendre l’apéritif, y flâner, y inviter des amis pour prendre l’air ou boire un verre, y installer des paravents ou tous autres meubles”.

La transformation du “toit-terrasse”, inaccessible lors de son acquisition puis devenu accessible pour les besoins de son nettoyage, en terrasse d’agrément constitue un changement de l’affectation d’une partie privative prévue au règlement de copropriété de sorte qu’il ne peut y être procédé sans l’autorisation de l’assemblée générale.

Il ressort du constat établi le 12 février 2007, en présence des deux parties, que le gros oeuvre de la toiture-terrasse est recouvert d’un plancher en latté sur lequel est posé un revêtement synthétique vert, façon pelouse synthétique, que les deux côtés du périmètre de la toiture sont agrémentés de claustras en pin autoclave fixés au garde-corps de la terrasse au moyen d’équerres en acier et que sont posés divers meubles parmi lesquels deux parasols avec empiétements à roulettes, coffres, hamacs et autres effets bâchés.

Il résulte des photographies versées aux débats et du constat établi le 24 juillet 2008 que la terrasse est clôturée sur deux côtés donnant sur le bâtiment A par des claustras au maillage serré d’une hauteur de 2 mètres et adossés, sur un côté, sur une grille en fer forgé et que sont installés des transats, deux très grands parasols qui couvrent la toiture en partie, un hamac d’une longueur d’environ quatre mètres, un coffre en bois, une table, des chaises de jardin, un plancher en latte et revêtement synthétique, un équipement pour grillades.

L’ensemble de ces éléments atteste de l’utilisation de la toiture comme une véritable pièce à vivre en plein air.

Aux termes de l’article 3 du chapitre II du règlement de copropriété (page 11), il est expressément mentionné qu’en ce qui concerne le lot n°3, “toute surélévation de ce lot est interdite.”

La pose des gardes-corps a été définitivement considérée comme n’étant pas des travaux de surélévation et judiciairement autorisée. Par contre, l’installation de claustras opaques d’une hauteur de 2 mètres qui dépassent d’environ 1 mètre ces gardes-corps, constitue indéniablement des travaux de surélévation interdits par le règlement de copropriété.

Si aux termes de l’article 9 de la loi du 10 juillet 1965, chaque copropriétaire jouit et use librement de ses parties privatives sous la condition de ne porter atteinte ni aux droits des autres copropriétaires ni à la destination de l’immeuble, il apparaît qu’en l’espèce, l’ensemble des aménagements est source de nuisances pour les autres copropriétaires dès lors que selon le rapport de visite de Madame Y, architecte, régulièrement versé aux débats et dont les termes ne sont pas contestés en défense, ces éléments accentuent le caractère de “confinement” et d'”encaissement du cadre bâti”, ils rapprochent les vis à vis et renforcent l’effet de proximité, ils ont un impact négatif sur la qualité des espaces et sur le voisinage, ils réduisent le droit au soleil, à la lumière, aux vues et au calme pour les voisins immédiats et pour l’ensemble des habitants de l’immeuble.

En conséquence de l’ensemble de ces éléments, Monsieur X ne pouvait procéder à la transformation de la toiture de son lot en pièce à vivre sans avoir reçu l’autorisation de l’assemblée générale à laquelle ce Tribunal ne peut se substituer.

Dès lors, il sera fait droit aux demandes du syndicat des copropriétaires tendant à ce qu’il soit enjoint à Monsieur X d’enlever les claustras en bois clipsés sur les garde-corps la grille en fer forgé, les transats, les parasols, les hamacs, le coffre en bois, la table, les chaises de jardin, le plancher en latte et le revêtement synthétique.

Compte tenu du comportement de Monsieur X qui bien qu’ayant acquis un bien en copropriété, s’obstine à ignorer le statut qui la régit et qui s’impose à lui comme à tout autre copropriétaire, la demande d’astreinte est justifiée et sera ordonnée selon les modalités fixées au dispositif de la présente décision.

De même, pour le cas où Monsieur X ne respecterait pas la présente décision, il sera fait droit à la demande d’autorisation formée par le syndicat des copropriétaires à procéder à l’enlèvement de l’ensemble des éléments précités à ses frais avancés avec l’assistance de la force publique et d’un serrurier si besoin est et en présence d’un huissier qui en dressera procès-verbal, les frais étant mise à la charge de Monsieur X.

sur les autres demandes

Compte tenu du sens de la présente décision, les demandes reconventionnelles en dommages intérêts et en dispense de participer au paiement des condamnations prononcées à l’encontre du syndicat des copropriétaires formées par Monsieur X seront rejetées.

Compte tenu de l’ancienneté du litige, il convient d’assortir la présente décision, sauf en ce qui concerne les dépens et l’indemnité allouée au titre de l’article 700 du code de procédure civile, de l’exécution provisoire qui apparaît compatible avec la nature de l’affaire.

Conformément aux dispositions de l’article 700 du code de procédure civile, il convient de mettre à la charge de Monsieur X qui succombe à l’égard du syndicat des copropriétaires une somme au titre des frais de procédure engagés et non compris dans les dépens. Cette somme sera fixée à 3.000 euros.

PAR CES MOTIFS

Le Tribunal,

statuant par jugement contradictoire, en premier ressort et publiquement par mise à disposition au greffe:

— Condamne Monsieur X à enlever tous les aménagements tendant à rendre la terrasse d’agrément à savoir les claustras en bois clipsés sur les garde-corps, la grille en fer forgé, les transats, parasols, hamacs, coffre en bois, table et chaises de jardin, plancher en latte et revêtement synthétique et ce, sous astreinte de 200 euros par jour de retard passé un délai d’un mois à compter de la signification de la présente décision et ce, pendant une durée de trois mois.

— Dit qu’à défaut d’exécution dans un délai de quatre mois après la signification du jugement, le syndicat des copropriétaires sera autorisé à faire enlever, avec l’assistance de la force publique et d’un serrurier si besoin est et en présence d’un huissier qui en dressera procès-verbal, l’ensemble des éléments précités à ses frais avancés et que ces frais resteront à la charge de Monsieur X.

— Ordonne l’exécution provisoire de la présente décision sauf en ce qui concerne les dépens et l’indemnité allouée au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

— Déboute Monsieur X de l’intégralité de ses demandes.

— Condamne Monsieur X aux dépens qui seront augmentés de la somme 3.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile au profit du syndicat des copropriétaires.

— Autorise Maître LEONE-CROZAT, avocat à recouvrer les dépens dans les conditions de l’article 699 du code de procédure civile.

Fait et jugé à Paris le 27 Octobre 2009

Le Greffier Le Président

FOOTNOTES

1:

Expéditions

exécutoires

délivrées le :

Chercher les extraits similaires
highlight
Chercher les extraits similaires
Extraits les plus copiés
Chercher les extraits similaires
Inscrivez-vous gratuitement pour imprimer votre décision
Tribunal de grande instance de Paris, 8e chambre 1re section, 27 octobre 2009, n° 08/09095