Tribunal de grande instance de Paris, 3e chambre 2e section, 24 janvier 2014, n° 10/15753

  • Titularité des droits sur le modèle·
  • Dépôt au nom de la personne morale·
  • Participation aux actes incriminés·
  • Présomption de la qualité d'auteur·
  • Sur le fondement du droit d'auteur·
  • Date certaine de création·
  • Modèle de conditionnement·
  • Divulgation sous son nom·
  • Action en contrefaçon·
  • Certificat d'identité

Chronologie de l’affaire

Résumé de la juridiction

Le demandeur ne bénéficie pas de la présomption de qualité d’auteur, le flacon de parfum sur lequel il revendique des droits moraux n’ayant pas été divulgué sous son nom. En effet, une telle divulgation suppose une offre de l’oeuvre au public, ce qui n’a pas été réalisé en l’espèce par le fait de montrer le flacon au couturier. En conséquence, il lui appartient de démontrer qu’il est l’auteur du flacon. Le travail et l’apport du demandeur dans la création du flacon ressortent à l’évidence des pièces produites (dessins, attestation d’un expert ¿), et n’ont jamais été contestés de son vivant par le couturier, qui n’a pu ignorer que de nombreux livres et articles de presse désignaient le demandeur comme étant le créateur du flacon, et ce durant une trentaine d’années. Cependant, des pièces tout aussi nombreuses ainsi que des témoignages, recueillis dans d’autres livres, et les propres propos du demandeur montrent de façon incontestable que le couturier est intervenu à toutes les étapes de la création du flacon, donnant ses instructions, contestant des choix et imposant les siens (cordelette en passementerie, gland de soie frangée, perle ronde martelée, couleur ¿), modifiant ce qui avait été initialement prévu. En conséquence, le flacon de parfum est une oeuvre collective. En effet, il s’agit d’une oeuvre créée à l’initiative d’une personne physique, le couturier, qui l’a divulguée sous sa direction et sous son nom, et dans laquelle la contribution personnelle des divers auteurs, dont le demandeur, se fond dans un ensemble en vue duquel elle a été conçue. Le fait que le demandeur revendique plus particulièrement au sein de cet ensemble la paternité de l’inspiration tirée d’une boîte traditionnelle japonaise n’a pas pour effet d’altérer le caractère d’oeuvre collective du flacon. Par conséquent, le demandeur, qui n’a aucune qualité à agir, est irrecevable en sa demande d’atteinte à son droit moral.

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Sur la décision

Référence :
TGI Paris, 3e ch. 2e sect., 24 janv. 2014, n° 10/15753
Juridiction : Tribunal de grande instance de Paris
Numéro(s) : 10/15753
Publication : PIBD 2014, 1010, IIID-641
Domaine propriété intellectuelle : DESSIN ET MODELE
Numéro(s) d’enregistrement des titres de propriété industrielle : 121065
Classification internationale des dessins et modèles : CL09-01
Référence INPI : D20140109
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Sur les parties

Texte intégral

TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE PARIS 3e chambre 2e section N° RG : 10/15753 JUGEMENT rendu le 24 Janvier 2014 Assignation du : 19 Octobre 2010

DEMANDEUR

Monsieur Pierre François D représenté par Me Thierry MOLLET-VIEVILLE. avocat au barreau de PARIS, vestiaire #P75

DÉFENDEURS

Société YVES SAINT LAURENT PARFUMS […] SUR SEINE

Monsieur Stefano P représentés par Me Patrick DUNAUD, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #L0310

Société BEAUTE RECHERCHE & INDUSTRI ES(dénommée BRI) […] SUR SEINE Société YSL BEAUTE […] SUR SHINE

Monsieur Fabien B représentées pur Me Christophe CARON.Cbt CI1RISTOPHECARON (AARPI) avocat au barreau de PARIS, vestiaire #C0500

COMPOSITION DU TRIBUNAL Eric H. Vice-Président, signataire de la décision Arnaud DESGRANGES, Vice-Président Laure C, Vice-Président

assistés de Marie-Aline PIGNOLET, Greffier, .signataire de la décision DÉBATS

A l’audience du 14 Novembre 2013 tenue en audience publique devant Eric H, Arnaud DESGRANGES, juges rapporteurs, qui, sans opposition des avocats, ont tenu seuls l’audience, et, après avoir entendu les conseils des parties, en ont rendu compte au Tribunal, conformément aux dispositions de l’article 7S6 du Code de Procédure Civile.

JUGEMENT Prononcé par remise de la décision au greffe Contradictoire en premier ressort

FAITS. PROCEDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

Monsieur Pierre D, créateur-designer d’articles de luxe dans ie domaine de la haute coulure et spécialement dans celui des arts du flacon de parfum, indique avoir créé en 1976 le flacon pour contenir le parfum OPIUM de YVES SAINT LAURENT, ce parfum ayant été lancé en septembre 1977, en France puis à l’étranger. Ayant constaté que sans son autorisation, un nouveau flacon, modifiant son œuvre, avait été lancé, portant ainsi atteinte selon lui à son droit moral, il a, par actes des 19, 20 et 28 octobre 2010, fait assigner en réparation de cette atteinte la société YVES SAINT LAURENT PARFUMS, la société BEAUTE. RECHERCHE & INDUSTRIES, la société YSL BEAUTE ainsi que Monsieur Stetano P styliste-designer de la maison YVES SAINT LAURENT, et Monsieur Fabien B, photographe et directeur artistique. Dans ses dernières conclusions du 26 juin 2013, Monsieur Pierre D, après avoir réfuté les arguments présentés en défense, demande en ces termes au Tribunal de : 1/ dire el juger que les moyens de défense et les demandes reconventionnelle des sociétés YVES SAINT LAURENT PARFUMS. BEAUTE. RECHERCHE & INDUSTRIES el YSL BEAUTE ainsi que de MM Stefano P et Fabien B sont irrecevables, et subsidiairement mal fondés. En conséquence, les en débouter, et notamment :

- rejeter la demande des sociétés BEAUTE. RECHERCHE & INDUSTRIES et YSL BEAUTE ainsi que M. Fabien B tendant à ce que le procès-verbal de constat du 12 juillet 2010 soit déclaré nul el écarté des débats.

- rejeter la demande des sociétés BEAUTE. RECHERCHE & INDUSTRIES et YSL BEAUTE ainsi que M. Fabien B tendant à ce que les pièces TMV 29 à TMV 36bis soient écartées des débats,
- rejeter la demande des sociétés BEAUTE. RECHERCHE & INDUSTRIES et YSL BEAUTE ainsi que M. Fabien B tendant à ce que la société BEAUTE. RECHERCHE& INDUSTRIES soit mise hors de cause.

- rejeter la demande des sociétés BEAUTE. RECHERCHE" & INDUSTRIES et YSL BEAUTE ainsi que M. Fabien B, tendant à ce que le Tribunal saisisse la Cour de l’Union Européenne de la question préjudicielle exposée dans leurs écritures et à statuer dans l’attente de sa réponse, 2/ lui adjuger le bénéfice de son assignation des 19. 20 et 28 octobre 2010. à savoir notamment :

- dire et juger que les sociétés YVES SAINT LAURENT PARFUMS, BEAUTE. RECHERCHE & INDUSTRIES et YSL BEAUTE ainsi que MM Stefano P et Fabien B ont pour les motifs exposés ci-dessus porté atteinte à son droit moral sur son flacon qu’il avait créé en 1976, et notamment porte atteinte à l’intégrité el à la paternité de cette œuvre.

En conséquence.

- interdire la poursuite de telles atteintes, avec toutes les mesures de rappel, confiscation et destruction, et ce sous une astreinte de 100€ par infraction (une infraction étant constituée par chaque support représentant le flacon incriminé) et de 10.000€ par jour de retard, lesdites astreintes devant être liquidées par le Tribunal de céans,
- dire et juger que ces mesures d’interdiction, de rappel, de confiscation et de destruction pourront entrer en vigueur dans un délai raisonnable que le Tribunal fixera et dont H tiendra compte dans la réparation des préjudices par lui subis,
-condamner les défendeurs à lui payer des dommages et intérêts à fixer à dire d’Expert et par provision la somme de 500.000 €. selon les modalités suivantes :

- 50.00 € par YVES SAINT LAURENT PARFUMS.

- 50.00 € par BEAUTE, RECHERCHE & INDUSTRIES BRI,
- 50.000 € par YSL BEAUTE, conjointement et solidairement pour les faits qui leur sont communs, 50.000 € par YVES SAINT LAURENT PARFUMS et BEAUTE, RECIIERC11E & INDUSTRIES,
- conjointement cl solidairement pour les faits qui leur sont communs. 50.000 € par YVES SAINT LAURENT PARFUMS et YSL BEAUTE.

- 50.000 € par Stefano P,
- 50.000 € par Fabien B.

- conjointement et solidairement pour les faits qui leur sont communs. 50.000 € par Stefano P et Fabien B

- et solidairement pour les faits qui leur sont communs, 50.000 € par Stefano P et YVES SAINT LAURENT PARFUMS. BEAUTE. RECHERCHE & INDUSTRIES et YSL BEAUTE.

- conjointement et solidairement pour les faits qui leur sont communs. 50.000 € par Fabien B et YVES SAINT LAURENT PARFUMS, BEAUTE. RECHERCHE & INDUSTRIES et YSL BEAUTE.

- ordonner à chacun des défendeurs de communiquer ses quantités, chiffres d’affaires et bénéfices concernant les flacons condamnés,
- ordonner la publication et la diffusion du jugement à intervenir notamment dans dix journaux ou périodiques de son choix et aux frais avancés, conjoints et solidaires, des cinq défendeurs, dans la limite 'un budget total de 100.000 € H.T.,
- dire et juger que les condamnations porteront sur tous les faits illicites commis jusqu’au jour du prononcé du jugement à intervenir.

- condamner, sous la même solidarité, les cinq défendeurs à lui payer la somme de 50.000 € à titre de remboursement des peines et soins du procès en application de l’art. 700 Code de procédure civile,
- ordonner, en liaison de la nature de l’affaire, l’exécution provisoire du jugement à intervenir nonobstant appel et sans caution,
- condamner, toujours sous la même solidarité, les cinq défendeurs aux entiers dépens dont distraction au profil de son conseil, conformément à l’article 699 du Code de procédure civile.
Dans leurs dernières écritures signifiées le 31 octobre 2013, la société YSL BEAUTE, rachetée en 2009 par la société L’OREAL, la société BEAUTE. RECHERCHE et INDUSTRIES (ci-après société BRI), créée en 2000 et dont l’activité est l’insertion de la fragrance dans le flacon pour le compte de la société YSL BEAUTE, et Monsieur Fabien B, présenté comme étant « l’une des figures les plus en vague de la profession ». à qui la société YSL BEAUTE a confié la réalisation d’un nouveau flacon d’eau de parfum OPIUM, entendent voir le Tribunal : A titre préliminaire.

- dire et juger que l’huissier de justice, le 12 Juillet 2010. a procédé par l’intermédiaire d’un tiers à une saisie-contrefaçon déguisée de droit d’auteur, sans décliner son identité, puisque son constat d’achat a été effectué, avec un prête-nom, aux fins de saisir trois produits censés porter atteinte au droit d’auteur de Monsieur Pierre D. -dire et juger que les investigations de l’huissier de justice, qui auraient dû être dépourvues de subterfuge, conformément au principe de loyauté de la preuve, ne pouvaient être accomplies

que selon les formes prévues aux articles L. 332-1 et suivants du Code de la propriété intellectuelle, En conséquence. - dire et juger que le constat d’huissier en date du 12 juillet 2010. visé en pièce adverse n° 37, est nul et doit être é carté des débats et dire et juger qu’à défaut d’apporter d’autres éléments de preuve visant à caractériser l’atteinte à ses droits d’auteur. Monsieur P DINANT) sera débouté de l’intégralité de ses réclamations.

A titre subsidiaire.

-dire et juger que Monsieur D fournit, en pièces adverses n° 29 à 36 bis et 45. des témoignages censés éclairer le Tribunal sur les faits litigieux qui ne sont parfois pas datés, font état de rumeurs, de suppositions, de témoignages indirects et n’identifient pas l’auteur desdits témoignages, de sorte que la partie n’est pas en mesure d’en contester contradictoirement leur contenu, En conséquence,
- dite et juger qu’à défaut de présenter des garanties suffisantes pour emporter la conviction du Tribunal et de le mettre en mesure d’évaluer la valeur et la portée de ces pièces, elles seront écartées des débats.

-dire et juger que la société BEAUTE, RECHERCHE & INDUSTRIES a pour activité de mettre la fragrance dans le flacon et qu’elle doit donc être mise hors de cause puisque son activité même l’empêche de commettre d’une façon ou d’une autre une atteinte au droit moral du demandeur.

En conséquence, - débouter Monsieur D de toute réclamation à son encontre. A titre principal.

- dire et juger que Monsieur Pierre D, qui ne bénéficie pas de la présomption de qualité d’auteur, doit prouver que son travail lui confère la qualité d’auteur et dire et juger qu’il ne prouve pas son apport créatif.

- dire et juger que chaque détail du flacon de parfum OPIUM a été déterminé par le choix arbitraire et original d’Yves SAINT LAURENT : la forme en inrô du flacon. la couleur, la cordelette en passementerie, le gland de soie frangée et la perle ronde martelée, l’œilleton décalé, le bouchon du flacon, les mentions, les couleurs cl les caractères inscrits sur le flacon et dire et juger que le flacon de parfum OPIUM est le reflet de la personnalité d’Yves SAINT LAURENT.

- dire et juger que lorsque Monsieur D intervient aux côtés d’Yves SAINT LAURENT, ce n’est que pour exécuter matériellement l’œuvre en sa qualité de prestataire technique et dire et juger qu’il agit en qualité de porte-parole de la personnalité d’Yves SAINT LAURENT.

En conséquence.

- dire et juger que si le flacon de parfum OPIUM est le reflet de la personnalité d’Yves SAINT LAURENT. Monsieur Pierre D ne prouve pas que son travail sur ledit flacon lui confère la qualité d’auteur, de sorte qu’il ne peut pas invoquer une atteinte à son droit moral, et le débouter de toutes ses réclamations.

A titre subsidiaire,
- dire et juger qu’il existe de nombreuses différences entre les flacons litigieux et que les rares éléments communs sont banals et se retrouvent dans la majorité des flacons de parfum et dire et juger que le flacon d’eau de parfum OPIUM ne reprend pas les éléments originaux du flacon de parfum d’origine,
-dire et juger qu’il s’agit de flacons distincts, le premier n’incorporant pas les éléments originaux du second, de sorte que le droit moral de Monsieur D n’est pas concerné par le nouveau flacon d’eau de parfum OPIUM,
En conséquence,
- débouter Monsieur D de l’intégralité de ses réclamations. A titre infiniment subsidiaire.

- dire et juger que Monsieur D exerce son droit moral dans l’intention de nuire aux défendeurs et le détourne de sa finalité car il confie a ses droits extrapatrimoniaux un rôle qui est exclusivement dévolu aux droits patrimoniaux.

En conséquence.

- dire et juger que le droit moral de Monsieur D est paralysé par un usage abusif et débouter Monsieur D de l’intégralité de ses réclamations.

A titre plus qu’infiniment subsidiaire,
-
dire et juger que Monsieur D utilise le doit moral afin que cette prérogative serve à réparer ce qu’il considère être en réalité une atteinte à son honneur et à sa réputation, étrangère à son droit moral,

A titre subsidiaire,
- dire et juger que le droit moral de Monsieur D est limité par la nature collective du flacon de parfum OPIUM, de sorte que sa prérogative est limitée par le droit moral des autres contributeurs.

- dire et juger que le droit moral de Monsieur D esl limité par les usages du monde de la parfumerie, la destination de l’œuvre qui justifient que le flacon d’eau de parfum évolue, ce que le demandeur ne pouvait ignorer en sa qualité de professionnel avisé,

En conséquence.

- débouler Monsieur D de toutes ses réclamations.

Si le tribunal devait considérer que Monsieur D a subi une atteinte ci son droit moral : Avant dire droit, sur la question préjudicielle.
-
SAISIR la Cour de justice de l'Union européenne de la question préjudicielle suivante : « L’article 3-1 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne peut-il être compris comme autorisant un Etal membre ci poser en règle que toute modification, quelle qu’en soit l’importance, apportée à une œuvre de l’esprit, porte atteinte au droit de son auteur au respect de celle-ci, avec la conséquence que cet auteur pourrait ainsi s 'opposer à la commercialisation de cette œuvre, même légèrement modifiée, par le titulaire des droits patrimoniaux harmonisés, sur le territoire dudit Étal membre, lorsque l’œuvre en question, de par sa nature, est susceptible d’être également protégée au titre des dessins et modèles, et cela alors que le législateur européen considère, dans les directives n° 98/71/CE et n° 20 01/29/CE, que les disparités des protections offertes aux dessins et modèles et aux droits patrimoniaux de l’auteur d’un Etat membre à l’autre ont une incidence directe sur l’établissement et le fonctionnement du marché intérieur et sont de nature à fausser le jeu de la concurrence ? »

En conséquence,
-
ordonner le sursis à statuer dans l’attente de la réponse donnée par la Cour de justice de l’Union européenne à cette question préjudicielle.

En tout état de cause,
-dire et juger que les mesures de réparation en nature sollicitées par le demandeur ne visent pas à sanctionner une atteinte à son droit moral, car elles sont propres à l’atteinte aux droits patrimoniaux, sont totalement disproportionnées, compte tenu des éléments du litige, et constituent un obstacle au commerce légitime . – dire et juger que Monsieur D tente d’obtenir en réalité, sur le fondement de son droit moral, une véritable rémunération de droits patrimoniaux et dire et juger que les mesures financières sollicitées sont totalement disproportionnées. En conséquence,
- débouter Monsieur D de toutes ses réclamations et. à titre subsidiaire, réduire le montant des dommages et intérêts à une somme symbolique.

Et,
- débouter Monsieur D de ses demandes de publication judiciaire et de sa demande indéterminée de communication déchiffres comptables qui viole le secret des affaires.

- débouter Monsieur D de sa demande irréversible d’exécution provisoire, incompatible avec la nature de l’affaire et de toutes ses autres réclamations.

Et,
- condamner Monsieur D à payer aux défendeurs la somme de 10.000 € au titre des dispositions de l’article 700 du Code de procédure civile.

- condamner Monsieur D à payer les entiers dépens de la procédure qui pourront être directement recouvrés par son conseil dans les conditions de l’article 699 du Code de procédure civile. Dans leurs dernières écritures du 5 novembre 2013, la société YVES SAINT LAURENT PARFUMS, cédée au groupe PPR en 1999 et qui s’est occupée depuis sa création de l’activité parfums de la maison de couture YVES SAINT LAURENT, et Monsieur Stefano P. directeur artistique de celle maison entre 2004 et 2012. demandent au Tribunal de : A titre principal.

- dire et juger que le flacon du parfum « Opium » n’a pas été divulgué ni exploité sous le nom de Monsieur Pierre D mais sous celui de YVES SAINT LAURENT,
- dire et juger que Monsieur Pierre DIN A ne rapporte pas la preuve de sa qualité d’auteur du flacon du parfum « Opium ».

- dire et juger que Monsieur Pierre D ne disposait d’aucune liberté créative dans la conception du flacon du parfum « Opium ».

- dire et juger que le flacon « Opium » est l’œuvre de Monsieur Yves SAINT LAURENT.

En conséquence.

-déclarer irrecevable l’action de Monsieur Pierre D fondée sur la prétendue atteinte à son droit moral d’auteur du flacon « Opium »,
- débouter Monsieur Pierre D de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions.

A titre subsidiaire.

- dire et juger que le nouveau flacon de F eau de parfum « Opium » n’est pas une adaptation du flacon du parfum « Opium » dont Monsieur Pierre D prétend être l’auteur.

En conséquence.

- dire et juger les demandes de Monsieur Pierre D mal fondées,
- débouter Monsieur Pierre D de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions.

A titre infiniment subsidiaire.

-dire et juger que le supposé droit moral de Monsieur Pierre D ne lui permet pas de former des demandes visant au rappel, à la confiscation et à la destruction des flacons litigieux.

- dire et juger que le supposé droit moral de Monsieur Pierre D ne lui permet pas de former des demandes de dommages-

intérêts calculés sur la base d’éléments relevant des droits patrimoniaux et notamment sur les chiffres d’exploitation des flacons litigieux,

En conséquence.

- dire et juger les demandes formées par Monsieur Pierre D en vue de la réparation de la prétendue atteinte à son droit moral mal fondées.

- débouter Monsieur Pierre D de l’ensemble de ses demandes visant à la réparation de la prétendue atteinte à son droit moral,

A titre très infiniment subsidiaire,
- dire et juger que Monsieur Pierre D ne justifie pas de son prétendu préjudice et des mesures tendant à le réparer.

En conséquence.

- débouter Monsieur Pierre D de l’ensemble de ses demandes visant à la réparation de son prétendu préjudice.

En tout état de cause.

- débouter Monsieur Pierre D de l’ensemble de ses demandes, fins el conclusions,
- condamner Monsieur Pierre D à leur verser la somme de 15.000 euros au titre de l’article 700 du Code de procédure civile.

- condamner Monsieur Pierre D aux entiers dépens.

L’ordonnance de clôture a été rendue le 7 novembre 2013.

MOTIFS DE LA DECISION
-Sur le rejet de pièces
Monsieur B, la société BRI et la société YSL demandent que des courriels et des lettres produites par le demandeur, soit ses pièces 29 à 36 bis et 45. soient écartés des débats, aux motifs qu’ils ne seraient pas tous datés, qu’ils ne feraient que rapporter des suppositions, des allégations ou des témoignages indirects, en particulier quand leurs auteurs indiquent qu’il était de notoriété publique que Monsieur D était le créateur du flacon du parfum OPIUM, et que dès lors ils ne présenteraient pas de garanties suffisantes pour emporter la conviction. Cependant, ainsi que l’indiquent d’ailleurs à juste titre ces mêmes défendeurs, « les juges apprécient souverainement la valeur et la portée » des moyens de preuve qui leur sont soumis, de sorte qu’il n’y a pas lieu à rejet de pièces.
-Sur la mise hors de cause

La société BRI demande sa mise hors de cause. Elle explique qu’elle n’a aucun rôle de création, de commercialisation, de développement ou de marketing, puisqu’elle se contente de mettre la fragrance OPIUM dans les flacons, et qu’elle n’est donc intervenue en aucune manière sur l’œuvre revendiquée par le demandeur ou sur le droit moral de ce dernier. Monsieur D soutient quant à lui que cette société « est certainement impliquée ». dans la mesure où elle remplit le flacon, y appose son nom et le diffuse. Cependant, il appartient au demandeur de démontrer que chaque personne physique ou morale qu’il met en la cause a joué un rôle dans les faits qui ont pu lui causer préjudice.

Or. le moins qu’on puisse dire est que cette démonstration n’est nullement apportée en l’espèce. En particulier, il n’est pas indiqué par le demandeur en quoi la société BRI, intervenant seulement d’une manière technique, aurait pu en quoi que ce soit porter atteinte aux droits qu’il revendique sur le flacon dont s’agit. La société BRI sera donc mise hors de cause.

— Sur la titularité

Selon l’article L. l13-1 du Code de la propriété intellectuelle. « la qualité d’auteur appartient, sauf preuve contraire, et celui sous le nom de qui l’œuvre est divulguée ».

Se fondant sur ce texte. Monsieur D, qui soutient que ie flacon du parfum OPIUM a été divulgué sous son nom et qu’il en est le créateur, revendique des droits sur celle œuvre.

Il expose qu’en juillet 1976. dans sa maison de MARRAKECH. Yves SAINT LAURENT lui a demandé de créer un flacon pour contenir un (( parfum vénéneux à la Pierre L », sur le thème de fleurs de feu.

Il raconte avoir alors imaginé de s’inspirer des inrô et netsuke, connus depuis le 16e siècle au Japon et avoir ainsi, en septembre de la même année et au même endroit, « divulgué » à Yves SAINT LAURENT le résultat de ses travaux, à savoir un flacon qu’il a baptisé Ishi, du mot japonais Ishiban signifiant un, œuvre qui aurait tout de suite été adoptée par le grand couturier qui aurait, à ce moment, décidé d’appeler son parfum OPIUM.

Il ajoute avoir confié en janvier 1977 à Yves SAINT-LAURENT ses dessins pour des vaporisateurs, dont le décor reprenait

certains des éléments du flacon en question, et que sa paternité sur ces différentes créations, qui « ne fait pas de doute », lui a été toujours attribuée. Il verse certains de ces dessins aux débats. Les défendeurs contestent cette paternité. Pour Monsieur B et la société YSL BEAUTE, le demandeur, sur qui repose la charge de la preuve, ne démontre pas que son travail sur ledit flacon lui confère la qualité d’auteur. Ils font tout d’abord remarquer que c’est le nom d’YVES SAINT LAURENT qui apparaît en lettres d’or sur le flacon de parfum OPIUM et non celui de Monsieur D", de sorte que ce flacon n’a pas été divulgué sous son nom et qu’il ne peut donc bénéficier de la présomption instaurée par le texte sus-visé. Factuellement, ils relèvent que la maison de Majorelle a été acquise par Yves SAINT LAURENT en 1980 et non avant 1976, ce qui jette le discrédit sur l’entière narration du demandeur, d’autant plus que le couturier avait organisé le transfert à son profit de la marque OPIUM en classe 3 dès le 16 janvier 1976, soit six mois avant le séjour au cours duquel, à en croire Monsieur D, la discussion relative à un parfum qui n’avait pas encore de nom se serait tenue.

Ils estiment également que les dessins produits par Monsieur D pour prouver sa création ne seraient que des « ébauches » sans date certaine, tandis qu’il ne fournit ni maquette en résine, ni maquette en plexiglas.

Ils insistent aussi sur la personnalité d’Yves SAINT LAURENT qui, dans le processus de création, voulait absolument tout contrôler, du nom à la forme du flacon en passant par la campagne publicitaire, l’atmosphère et les couleurs, ce qui irait à l’inverse du « blanc-seing » que décrit le demandeur.

Enfin, ils racontent le processus de création du flacon en cause, dont chaque détail aurait été déterminé par Yves SAINT LAURENT lui-même.

Tel est également l’avis de la société YVES SAINT LAURENT PARFUMS et de Monsieur Stefano P, pour lesquels c’est Monsieur Yves SAINT LAURENT qui a créé le flacon dont s’agit. Ces défendeurs insistent sur le fait que le thème général du flacon du parfum OPIUM est l’Asie, qui se trouve être un des thèmes de prédilection du couturier, puisque dès 1970 il a créé des modèles de vêtements inspirés de la Chine, en particulier un modèle de tunique et pantalon avec des broderies chinoises,

et qu’il a consacré toute une collection, en 1977 au thème de la Chine, dénommée d’ailleurs Les Chinoises Opium.

Ils expliquent que la forme et la matière du flacon litigieux s’inscrivent dans la droite lignée de ces inspirations asiatiques. En effet, ce flacon serait directement inspiré des inrôs japonais, un inrô étant une boîte en laque constituée de plusieurs compartiments s’emboîtant les uns dans les autres portée à l’origine par les samouraïs pour transporter, suspendue à leur ceinture, des herbes médicinales et de l’opium. Il est très probable selon eux qu’Yves SAINT LAURENT ait lui-même possédé des inrôs anciens, d’autant qu’un ouvrage sur les parfums écrit à propos d’OPIUM : « Le flacon dit inrô fut inspiré d’une pièce ancienne chinoise confiée par Yves Saint Laurent ».

Ils précisent que c’est aussi Yves SAINT LAURENT qui a décidé que le flacon serait en laque, comme le confirment certaines pièces produites par le demandeur lui-même, celte laque provenant d’un meuble chinois appartenant au couturier, et que la couleur dudit flacon, d’un ocre très particulier, était sa couleur fétiche. Enfin, ils font remarquer que l’œilleton du flacon serait l’évocation d’un veste chinoise créée par Yves SAINT LAURENT, que la passementerie en soie noire l’ornant a été ajoutée par lui, tout comme son bouchon et son packaging. Cela étant, il est manifeste que, contrairement à ce que le demandeur soutient, le flacon en question n’a pas été divulgué sous son nom, une telle divulgation supposant une offre de l’œuvre au public qui n’a pas été réalisée en l’espèce par le seul fait, pour lui, de montrer le flacon à Messieurs Yves SAINT LAURENT et Pierre B, ce qui a pour conséquence que, ne bénéficiant pas de la présomption de titularité, il lui appartient de démontrer qu’il est l’auteur du flacon qu’il revendique. A cet effet, Monsieur D produit d’abord un croquis d’un flacon ressemblant au flacon définitif, supportant sur sa face le mot ISHI au-dessus de l’œilleton et les mots YVES SAINT LAURENT en dessous. En titre de la feuille, il est indiqué : « INRO & NESUKE COLLECTIONNES OEUVRES D’ARTS symbole de raffinement et de richesse en Chine et au Japon ». Verticalement, le long du flacon, le nom de Pierre D est écrit. Au milieu sur la droite est marqué « SEPT 76 A MARRAKECH » avec une signature pouvant être celle du demandeur, et en bas à droite il est encore écrit « SEPT. 76 », toutes ces mentions étant manuscrites.

Néanmoins, comme le soutiennent les défendeurs, ce croquis n’a en rien une date certaine, et en outre il ne montre pas de

manière incontestable que Monsieur D est effectivement l’auteur du flacon.

Il en est de même de l’autre dessin représentant, sous plusieurs angles, le flacon qui porte le nom OPIUM – sans le même boulon de cordelette que sur le flacon définitif – qui, s’il supporte bien le nom de Pierre D, n’est pas daté.

Le demandeur produit également un courrier par lequel Jean- Claude G responsable développement au sein de la société MBF PLASTIQUES, certifie que sa société a réalisé les plans de pièces et les outillages nécessaires à la fabrication des habillages du flacon OPIUM « sur un design de Monsieur Pierre D », à partir de la fin 1976. Cependant, si cette lettre confirme l’intervention du demandeur dans la création du flacon en cause, plus particulièrement pour mettre en forme ce flacon avant l’industrialisation, elle n’a pas pour effet de le présenter comme étant son seul créateur. Il verse aussi aux débats un certificat d’identité de 15 modèles de flacon, dont le flacon OPIUM déposé le 22 octobre 1976 à L’INPI et publié le 15 mars 1977 sous le n° 160.996 , qui est au nom, non du demandeur, mais de la SARL ATELIERS DINAND à LEVALLOIS. Enfin est produite une attestation émanant de Jean-Marie M. expert près la Cour d’appel de VERSAILLES, qui atteste « que le flacon modèle « inro » acquis en 1977 par la société des parfums Yves Saint Laurent pour commercialiser leur parfum « Opium » est bien une œuvre dessinée et conçue par Pierre D. créateur- designer pionnier opérant depuis 1960 dans le secteur design pour la parfumerie de luxe (…) « Opium »fut un grand succès commercial et son succès perdure de nos jours. Pierre D, son « metteur en forme » a toujours été reconnu par la profession et la presse beauté comme étant le créateur du flacon « Opium » ».

Ces divers documents attestent le rôle indéniable de Monsieur D dans la création du flacon du parfum OPIUM, rôle confirmé par les différentes coupures de presse produites qui, à propos du nouveau flacon, citent toutes le demandeur comme étant l’auteur de l’ancien flacon, par les extraits de livres et par les courriers ou attestations de Olivier B (« Qu’est-il arrivé à ton flacon OPIUM ? »). de Nicolas D, qui lui demande si, en tant que créateur, il a été consulté sur le dessin du nouveau flacon, de Nathalie P (« Ce flacon d’OPIUM que tu avais créé pour YSL »), ou encore d’Edith T.

Cependant, force est de constater que le demandeur ne verse aux débats ni contrat avec la maison YVES SAINT LAURENT, ni quelconque indication sur les règlements qu’il a pu percevoir en contrepartie de cette création, documents qui auraient pu aider

à lui donner de manière indéniable la qualité de seul créateur du flacon.

Ace titre, il n’est pas inintéressant de constater que le même Jean-Marie MARTIN-HATTEMBERG. expert qui vient d’être cité pour avoir attesté que Monsieur D était le créateur du flacon litigieux, a pourtant écrit lors d’une vente aux enchères d’un grand flacon Opium, qu’il s’agissait de la « réplique du flacon original modèle « Inro » dessiné par Pierre D et choisi par Monsieur Saint Laurent ».

C’est que l’intervention d’Yves SAINT LAURENT dans la création de ce flacon résulte en effet des différentes pièces produites. Ainsi, il a été dit par les défendeurs que le flacon s’inscrit de façon générale dans les sources d’inspiration récurrente de ce couturier. De plus, les nombreux ouvrages cités, comme Yves Saint Laurent par Yves Saint Laurent paru aux Editions Herscher/Musée de la mode, Yves Saint Laurent par Laurence B, ou encore Pierre B, le faiseur d’étoiles par Béatrice P. s’accordent pour dire que c’est Yves SAINT LAURENT qui a choisi la cordelette en passementerie, le gland de soie frangée et la perle ronde martelée ainsi que la couleur du flacon, qui a souhaité un œilleton et déterminé son emplacement, créé le bouchon en le voyant comme « une houle de billard et d’argent ciselé du Khan Moghol » selon Laurence B, décidé enfin des caractères et des mentions qui devaient figurer sur le flacon, jusqu’à la taille de la lettre 0.

D’ailleurs, dans le livre Parfums de légende, un siècle de créations françaises de Michael E, Pierre D. cité par l’auteur, admet que « les fleurs de feu rouge et or qui sont sur le coffret d’Opium sont l’idée d’Yves. Je fis mien ses mots es ses symboles », l’auteur ajoutant : « Travaillant avec Yves Saint Laurent et Pierre D, Loïc [Loïc D] fit tout le travail préliminaire sur les orientations du parfum et sa présentation ».

En outre, dans ses propres écritures, le demandeur, qui revendique en revanche la forme de l’inrô et, plus généralement, l’apport d’une louche d’orientalisme dans ce flacon, reconnaît que « le gland de soie frangée est un choix de Yves SAINT LAURENT », ou que ce dernier « a demandé à ce que le bouchon créé par D soit de taille plus grande et a eu l’idée d’entourer le goulot (et non le bouchon) d’une bande dorée », ou encore que Yves SAINT LAURENT « a pu, à propos de l’inrô de D, modifier légèrement la nuance du rouge, pour un rouge plus foncé », ajoutant dans son blog, dont des extraits sont produits en défense, que « Saint Laurent avait toujours insisté pour que l’œilleton soit décalé sur le côté car il aimait l’asymétrie ».

Il apparaît à l’issue de cette étude que, si le travail et l’apport de Monsieur D dans la création du flacon ressortent à l’évidence des pièces produites, et n’ont du reste jamais été contestés de son vivant par Yves SAINT LAURENT qui n’a pu ignorer que de nombreux livres et articles de presse désignaient le demandeur comme étant le créateur dudit flacon, et ce durant une trentaine d’années, il n’en demeure pas moins que des pièces tout aussi nombreuses ainsi que des témoignages, recueillis dans d’autres livres, et que les propres propos de Monsieur D, montrent de façon incontestable que le couturier est intervenu à toutes les étapes de cette création, donnant ses instructions, contestant des choix et imposant les siens, modifiant ce qui avait été initialement prévu, ce qui a pour conséquence que l’œuvre en cause doit être considérée comme étant une œuvre collective. En effet, il s’agit bien d’une œuvre créée à l’initiative d’une personne physique ou morale, en l’espèce Yves SAINT LAURENT, qui l’a divulguée sous sa direction et sous son nom. et dans laquelle la contribution personnelle des divers auteurs, à savoir pour ce flacon au moins Monsieur Yves SAINT LAURENT. Monsieur Pierre D voire Monsieur Loïc D cite ci- dessus, se fond dans un ensemble en vue duquel elle a été conçue, soit la totalité des critères définis par l’article L.l 13-2 du Code de la propriété intellectuelle, étant précisé que le fait que Monsieur D revendique plus particulièrement au sein de cet ensemble la paternité de l’inspiration tirée de l’inrô n’a pas pour effet d’altérer le caractère d"œuvre collective du flacon. Or, en vertu des dispositions de l’article L. 113-5 du même Code selon lesquelles « l’œuvre collective est, sauf preuve contraire, la propriété de la personne physique ou morale sous le nom de laquelle elle est divulguée. Cette personne est investie des droits de l’auteur », la société YVES SAINT LAURENT, on en tout cas l’entité chargée alors de la commercialisation du parfum OPIUM, est seule investie des droits d’auteur sur le flacon éponyme, en particulier des prérogatives de droit moral. En conséquence, Monsieur Pierre D, qui n’a aucune qualité à agir, ne pourra qu’être déclare irrecevable de l’ensemble de ses demandes, et ce sans qu’il soit nécessaire d’examiner les autres moyens soulevés en défense et tirés en particulier de l’absence de validité du constat d’huissier du 12 juillet 2010. ou encore nous demandant de saisir la Cour de Justice de l’Union Européenne d’une question préjudicielle. - Sur les autres demandes Il y a lieu de condamner Monsieur Pierre D, partie perdante, aux dépens qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l’article 699 du Code de procédure civile pour ceux des défendeurs qui l’ont demandé.

En outre, il doit être condamné à verser aux défendeurs, qui ont dû exposer tics frais irrepetibles pour faire valoir leurs droits, une indemnité au litre de l’article 700 du Code de procédure civile qu’il est équitable de fixer, d’une part s’agissant de Monsieur Fabien B et des sociétés BRI et YSL BEAUTE, à la somme globale de 5.000 euros, d’autre part pour ce qui est de Monsieur Stefano P et de la société YVES SAINT LAURENT PARFUMS, à la même somme globale de 5.000 euros.

PAR CES MOTIFS

Le Tribunal, statuant publiquement, par mise à disposition au greffe, par jugement contradictoire et rendu en premier ressort. - DIT n’y avoir lieu à rejet de pièces ; - ORDONNE la mise hors de cause de la société BEAUTE, RECHERCHE et INDUSTRIES ; - DIT que le flacon du parfum OPIUM est une œuvre collective ; - DIT qu’en conséquence Monsieur Pierre D n’est pas titulaire de droit moral sur cette œuvre : - DECLARE irrecevables toutes les demandes présentées par Monsieur Pierre D au titre de l’atteinte à son droit moral d’auteur ; - CONDAMNE Monsieur Pierre D à paver, d’une part à Monsieur Fabien B et aux sociétés BEAUTE, RECHERCHE et INDUSTRIES et YSL BEAUTE, la somme globale de 5.000 euros, d’autre part à Monsieur Stefano P et à la société YVES SAINT LAURENT PARFUMS, la même somme globale de 5.000 euros, au titre de l’article 700 du Code de procédure civile ;

- CONDAMNE Monsieur Pierre D aux dépens, qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l’article 699 du Code de procédure civile pour ceux des défendeurs qui l’ont demandé.

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Tribunal de grande instance de Paris, 3e chambre 2e section, 24 janvier 2014, n° 10/15753