Tribunal de grande instance de Paris, 19e chambre contentieux médical, 13 mars 2017, n° 15/13335

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
TGI Paris, 19e ch. cont. médical, 13 mars 2017, n° 15/13335
Juridiction : Tribunal de grande instance de Paris
Numéro(s) : 15/13335

Sur les parties

Texte intégral

T R I B U N A L

D E GRANDE

I N S T A N C E

D E P A R I S(footnote: 1)

19e contentieux médical

N° RG :

15/13335

N° MINUTE :

DEBOUTE

Assignation du :

31 Juillet 2015

AJ du TGI DE PARIS du 05 Septembre 2014 N° 2014/031384

RLG

JUGEMENT

rendu le 13 Mars 2017

DEMANDERESSE

Madame G C veuve X

[…]

Hall 9

[…]

représentée par Me Moussa DIEDHIOU, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #E1210

(bénéficie d’une aide juridictionnelle Partielle numéro 2014/031384 du 05/09/2014 accordée par le bureau d’aide juridictionnelle de Paris)

DÉFENDEURS

[…]

[…]

[…]

COMPAGNIE D’ASSURANCES LA SHAM

[…]

[…]

représentées par Maître Juliette VOGEL de la SCP V W AA & ASSOCIES, avocats au barreau de PARIS,, vestiaire #P0581

CPAM H I

Direction des Contentieux

[…]

[…]

représentée par Me Maher NEMER, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #R0295

Monsieur J Z (K L)

[…]

[…]

représenté par Maître Gilles CARIOU de la SCP NORMAND & ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #P0141

Monsieur M A

[…]

[…]

représenté par Maître Georges LACOEUILHE de l’AARPI LACOEUILHE & ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #A0105

COMPOSITION DU TRIBUNAL

Monsieur Jean-BESSON, Premier Vice-Président

Président de la formation

Madame Rozenn LE GOFF, Vice-Présidente

Madame N O, Juge

Assesseurs

assistés de Mathilde U, Greffier lors des débats ,

DÉBATS

A l’audience du 23 Janvier 2017 tenue en audience publique devant Rozenn LE GOFF, juge rapporteur, qui, sans opposition des avocats, a tenu seule l’audience, et, après avoir entendu les conseils des parties, en a rendu compte au Tribunal, conformément aux dispositions de l’article 786 du Code de Procédure Civile.

JUGEMENT

— Contradictoire

— En premier ressort

— Prononcé publiquement, par mise à disposition au greffe, les parties en ayant été avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de Procédure Civile.

— Signé par Jean-Paul BESSON, Président et par Mathilde U, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

[…]

EXPOSE DU LITIGE

Madame G C veuve X, née le […], […] et ayant un très gros utérus polymyomateux a subi le 27 février 2009 à la […] une hystérectomie totale non conservatrice, réalisée par le Docteur Z.

Le Docteur A, chirurgien digestif exerçant à titre libéral au sein de la même clinique Rémusat est intervenu au cours de l’K pour pratiquer la cure d’une éventration postopératoire résiduelle, sous ombilicale, dans laquelle s’incarcérait un fragment d’iléon. Les Docteurs A et Z procédaient ensuite ensemble à la suture.

Vers le 5e jour post-opératoire, apparaissaient de très violentes douleurs abdominales s’accompagnant d’un arrêt des matières et des gaz, de quelques vomissements et de très nombreuses nausées, témoignant d’un tableau occlusif s’installant progressivement.

Un scanner abdomino-pelvien était réalisé, le 6 mars 2009, lors duquel était constatée une formation hétérogène pelvienne médiane et para-médiane droite avec présence d’un corps étranger intra-abdominal. Madame C était opérée en urgence, le 6 mars 2009, par le Docteur A afin d’extraire un textilome oublié lors de l’K.

Le 24 mars 2009, Madame C a quitté la […].

Le 24 septembre 2012, le Tribunal de grande instance de Paris a condamné in solidum la […] et les docteurs Z et A à indemniser Madame C à hauteur de la somme de 8.809, 35 euros au titre de son préjudice corporel imputable à l’ oubli de la compresse.

Procédure

Invoquant une aggravation de son état de santé, Madame G C veuve X a fait assigner la […] ainsi que les docteurs Z et A par acte du 31 juillet 2015 aux fins de voir ordonner une expertise et obtenir une somme provisionnelle de 2.500 euros.

Par ordonnance du 11 juillet 2016 le juge de la mise en état a rejeté les demandes de Madame G C veuve X tendant à obtenir la désignation d’un expert ainsi que l’allocation d’une provision à valoir sur la réparation de son préjudice en aggravation, et condamné la demanderesse à payer la somme de 800 € à chacun des médecins, sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

Selon ses dernières conclusions notifiées par voie électronique le 6 octobre 2016, Madame G C veuve X demande au tribunal de :

— Ordonner une mesure d’expertise, l’expert recevant la mission d’indiquer s’il y a, ou non, aggravation de son état de santé, depuis le jugement du 24 Septembre 2012, de déterminer son pretium doloris, son préjudice esthétique et tout préjudice matériel découlant de l’aggravation constatée, constater, en outre, qu’elle est victime de saignements fréquents lorsqu’elle se rend aux toilettes.

— Lui Accorder une provision de deux mille cinq cents euros (2 500 €).

Dire et juger que cette provision sera avancée par les défendeurs et leurs assureurs.

— Débouter les demandeurs reconventionnels de l’ensemble de leurs demandes, fins et conclusions,

notamment leurs demandes fondées sur des dommages-intérêts, sur l’article 700 du Code de Procédure Civile.

— Dire et juger que toutes les audiences, quelles soient au fond ou d’incident, seront des audiences

collégiales.

— Annuler alors la décision avant dire droit rendue le 11 Juillet 2016.

— Condamner les demandeurs reconventionnels aux entiers dépens.

Selon ses dernières conclusions notifiées par voie électronique le 6 janvier 2017, la Caisse Primaire d’Assurance Maladie de Paris demande au tribunal de :

— CONDAMNER solidairement les docteurs Z et A et leurs assureurs, la Clinique REMUSAT et son assureur à lui verser la somme de 3.309,28 €, à due concurrence de l’indemnité réparant le préjudice corporel de la victime, toutes réserves étant faites pour les prestations non connues à ce jour et pour celles qui pourraient être versées ultérieurement.

— DIRE que cette somme portera intérêts au taux légal à compter de la demande.

— CONDAMNER solidairement les docteurs Z et A et leurs assureurs, la Clinique REMUSAT et son assureur à lui verser la somme de 2.500,00 €, par application de l’article 700 du Code de Procédure Civile,

— ORDONNER l’exécution provisoire de la décision

— CONDAMNER également les mêmes et sous la même solidarité en tous les dépens dont distraction au profit de la SELARL BOSSU & ASSOCIES, Avocats, et ce, en application des dispositions de l’article 699 du Code de Procédure Civile.

Selon ses dernières conclusions notifiées par voie électronique le 15 décembre 2016, le Docteur J Z demande au tribunal de:

— Dire et juger que Madame C ne rapporte pas la preuve de l’aggravation de son état,

En conséquence,

— Rejeter la demande provisionnelle, tout comme la demande d’expertise, sollicitées par Madame C,

— Débouter Madame C de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions,

— Condamner Madame C au paiement de la somme de 3.000 euros de dommages et intérêts au titre de la procédure abusive,

— Condamner Madame C au paiement de la somme de 2.000 euros au titre des dispositions de l’article 700 du Code de Procédure Civile

Si le Tribunal considérait recevables les écritures de la CPAM de Paris, malgré l’K de la clôture le 21 novembre 2016,

— Rejeter l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions de la CPAM de Paris, d’ores et déjà intégralement indemnisée des suites du jugement en date du 24 septembre 2012

Selon leurs dernières conclusions notifiées par voie électronique le 9 septembre 2016, la maison de santé Remusa et son assureur, la SHAM, demandent au tribunal de :

— Débouter Madame G C de sa nouvelle demande d’expertise médicale.

— Débouter Madame G C de sa demande de provision.

— Débouter la demanderesse, ainsi que toute autre partie à l’instance, du surplus des demandes formées à leur encontre

— Condamner Madame G C au paiement de la somme de 2.500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens distraits au profit de la SCP V W AA en application des dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.

Selon ses dernières conclusions notifiées par voie électronique le le Dr A demande au tribunal de :

— Débouter Madame C de l’ensemble de ses demandes ;

— Condamner Madame C à lui verser la somme de 5 000 euros de dommages et intérêts au titre de la procédure abusive ;

— Condamner Madame C à lui payer la somme de 2000 euros au titre de l’article 700 du Code de Procédure Civile ;

— Condamner Madame C aux entiers dépens

En application de l’article 455 du Code de procédure civile, il est renvoyé aux conclusions des parties quant à l’exposé détaillé de leurs prétentions et moyens.

L’ordonnance de clôture rendue le 21 novembre 2016 a fait l’objet d’un rabat lors de l’audience du 23 janvier 2017 afin d’admettre les dernières conclusions de la Caisse Primaire d’Assurance Maladie ainsi que celles du Docteur Z, puis une nouvelle ordonnance de clôture à été prononcée avant l’ouverture des débats.

MOTIFS DE LA DÉCISION

I / Sur l’action principale

Il est constant que la victime d’un accident médical fautif peut toujours intenter une action en aggravation de son préjudice, à condition toutefois de rapporter la preuve, d’une part, d’une aggravation de son état de santé et, d’autre part, d’un lien de causalité direct et certain entre cette aggravation et l’accident médical litigieux.

En l’espèce, Madame G C veuve X invoque des « douleurs inexplicables, mais toutes liées aux différentes interventions qu’elle a subie les 27 février et 6 mars 2009 », affirmant qu’avant lesdites interventions, elle ne souffrait d’aucune douleur.

Il ressort cependant du rapport d’expertise déposé par le Docteur P Q le 10 septembre 2011 qu’avant les interventions chirurgicales litigieuses, les antécédents de la demanderesse étaient très importants avec la mise en place d’un stérilet, une kystectomie ovarienne gauche, un syndrome septique, des phénomènes infectieux importants de type salpingite, une invalidité de catégorie I, des troubles digestifs ainsi que des douleurs chroniques de la fosse iliaque droite.

L’expert Q avait alors indiqué que cet état antérieur permettait de considérer que les interventions effectuées par les Docteurs Z puis A le 27 février 2009 étaient parfaitement justifiées, s’imposaient sans aucune alternative, étaient parfaitement adaptées à l’état de Madame C et conformes aux connaissances médicales avérées et aux connaissances de la pratique médicale s’agissant de leur réalisation technique per opératoire.

L’expert a ensuite circonscrit précisément les conséquences de la faute résultant de l’oubli du champ abdominal durant 7 jours, à savoir que cet oubli :

"- a rendu plus importantes les douleurs de la phase postopératoire,

- a nécessité une K supplémentaire le 6 mars 2009,

- a rendu la phase de convalescence postopératoire, qui n’est jamais indolore, même en l’absence de toute complication, plus pénible après la deuxième K,

- a rallongé la durée de l’arrêt de travail, qui aurait normalement été d’un mois après une dizaine de jours d’hospitalisation, en l’absence de l’oubli du champ abdominal.

Mais les autres plaintes alléguées ne sont pas en rapport direct et certain avec l’oubli de ce champ pendant 7 jours et très rapidement enlevé, avant d’avoir pu entraîner quelque trouble chronique que ce soit ».

L’expert a aussi, et surtout, précisé que les douleurs décrites par la patiente en réunion d’expertise ressortissent à deux types de causes, en relation directe avec l’état antérieur :

— d’une part des radiculalgies (cruralgies droites) en rapport direct avec les antécédents de lombalgies et de cure de hernie discale L4-L5 en 2008, avant les faits incriminés. Ceci pour les douleurs de l’aine droite irradiant vers la grande lèvre droite,

— d 'autre part des douleurs de la fosse iliaque droite, correspondant à une zone de tympanisme colique net, de siège strictement identique aux douleurs dont se plaignait Madame C, selon elle, avant l’hystérectomie. Ces douleurs sont des douleurs de colopathie spasmodique.

À l’appui de son action en aggravation, Madame G C veuve X produit les éléments nouveaux suivants :

— deux ordonnances en date des 15 juin 2015 et 25 janvier 2016 concernant la prescription d’analgésiques ;

— un certificat médical du 26 juin 2015, établissant qu’elle a consulté le Docteur R S du Centre de l’Imagerie Médicale, qui lui a fait faire une IRM pelvienne, le 26 Juin 2015, examen qui a révélé un «prolapsus postérieur, discarthrose L.4 –L.5 et L.5-S1 » ;

— un compte-rendu d’analyses d’urine et de selles en date du 12 février 2016 ;

— une lettre du Docteur T F, chef de clinique assistant à l’hôpital de la Salpêtrière, en date du 31 août 2016.

Il apparaît cependant à l’analyse de ces documents :

— que l’I.R.M. pelvienne du 26 juin 2015 confirme l’absence d’anomalies dans la loge d’hystérectomie ;

— que le compte-rendu d’analyses d’urine et de selles ne révèle aucun trouble particulier ;

— qu’en sa lettre du 31 août 2016, le Docteur F indique que « L’examen clinique retrouve une sensibilité abdominale diffuse, prédominante dans le pelvis. L’examen au spéculum et le toucher vaginal sont tout à fait normaux et ne retrouvent pas de lésion fibreuse rétractile au niveau du cul-de-sac vaginal. La patiente a réalisé une I.R.M. pelvienne en 2015 qui était normale. J’explique à la patiente qu’il n’existe pas d’origine gynécologique à ses douleurs. Il s’agit, à mon avis, plutôt de douleurs secondaires à des phénomènes adhérentiels non accessibles à un éventuel traitement chirurgical. ».

Il s’en déduit à l’évidence que les douleurs dont se plaint Madame G C veuve X, et que le tribunal ne met pas en doute, ne sont pas en relation de causalité avec les interventions qu’elle a subies les 27 février et 6 mars 2009.

Dans ces conditions, Madame G C veuve X ne peut qu’être déboutée de son action.

Pour les mêmes raisons, la Caisse Primaire d’Assurance Maladie sera déboutée de ses demandes.

II / Sur les demandes reconventionnelles

L’exercice d’une action en justice constitue, en principe, un droit et ne dégénère en abus pouvant donner naissance à une dette de dommages intérêts que dans le cas de malice, de mauvaise foi, d’erreur grossière équipollente au dol voire de légèreté blâmable .Tel n’est pas le cas en l’espèce et il convient de débouter les médecins de leur demande de dommages intérêts pour procédure abusive.

Par ailleurs, le juge de la mise en état a d’ores et déjà accordé une indemnité à chacun des médecins sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

Le tribunal estime qu’il n’y a pas lieu d’en rajouter.

PAR CES MOTIFS :

Le tribunal, statuant publiquement par mise à disposition au greffe, contradictoirement et en premier ressort,

Déclare Madame G C veuve X mal fondée en son action, l’en déboute ;

Rejette les demandes de la Caisse Primaire d’Assurance Maladie de Paris ;

Rejette les demandes reconventionnelles ;

Condamne Madame G C veuve X aux dépens, qui seront recouvrés conformément aux dispositions relatives à l’aide juridictionnelle, et accorde aux avocats qui en ont fait la demande, le bénéfice de l’article 699 du code de procédure civile.

Fait et jugé à Paris le 13 Mars 2017

Le Greffier Le Président

M. U J-P. BESSON

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