Tribunal de grande instance de Paris, 4e chambre 1re section, 14 novembre 2017, n° 16/03412

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
TGI Paris, 4e ch. 1re sect., 14 nov. 2017, n° 16/03412
Juridiction : Tribunal de grande instance de Paris
Numéro(s) : 16/03412

Sur les parties

Texte intégral

T R I B U N A L

D E GRANDE

I N S T A N C E

D E P A R I S

4e chambre 1re section

N° RG :

16/03412

N° MINUTE :

Assignation du :

10 Février 2016

JUGEMENT

rendu le 14 Novembre 2017

DEMANDERESSE

S.A.S B C D E

[…]

[…]

[…]

représentée par Me Mathieu BOLLENGIER-STRAGIER, avocat au barreau de PARIS, avocat postulant, vestiaire #C0495

DÉFENDERESSES

Association L’EGLISE PROTESTANTE PARIS EVANGILE

15 à […]

[…]

représentée par Maître Nicolas DUVAL de la SCP SCP NOUAL DUVAL, avocats au barreau de PARIS, avocats plaidant, vestiaire #P0493

S.A.R.L. J2M BUREAUTIQUE FRANCE

[…]

[…]

représentée par Me Frédéric TROJMAN, avocat au barreau de PARIS, avocat plaidant, vestiaire #C0767

COMPOSITION DU TRIBUNAL

Madame ALBOU DUPOTY, Vice-Présidente

Madame ABBASSI-BARTEAU, Vice-président

Madame X, Juge

assistée de Marion PUAUX, Greffier,

DÉBATS

A l’audience du 10 octobre 2017 tenue en audience publique devant Madame ALBOU DUPOTY, juge rapporteur, qui, sans opposition des avocats, a tenu seule l’audience, et, après avoir entendu les conseils des parties, en a rendu compte au Tribunal, conformément aux dispositions de l’article 786 du Code de Procédure Civile.

JUGEMENT

Prononcé par mise à disposition par le greffe

Contradictoire

En premier ressort

FAITS ET PROCÉDURE

L’association ÉGLISE PROTESTANTE PARIS ÉVANGILE, démarchée par un fournisseur de matériel bureautique, la SARL J2M BUREAUTIQUE FRANCE, a signé le 20 avril 2012 un contrat de location avec une société de financement, la société B C D E, pour l’installation d’un standard téléphonique de la marque Alcatel.

La convention de location financière avec option d’achat a été conclue pour une durée de cinq ans avec 21 loyers trimestriels d’un montant de 1.667,16 euros, le premier loyer intercalaire étant d’un montant de 759,49 euros.

Le 22 mars 2013, l’association a adressé par le biais de son conseil, un courrier recommandé avec avis de réception à la société fournisseur J2M BUREAUTIQUE FRANCE expliquant qu’ayant été trompée par ses représentants sur la nature des contrats signés le 20 avril 2012, elle demandait leur annulation pour vice de consentement pour erreur et dol. Une copie du courrier était adressée à la société bailleresse B C D E.

Par acte d’huissier du 23 mai 2013 l’association ÉGLISE PROTESTANTE PARIS ÉVANGILE a adressé une sommation à la société bailleresse B C D E aux termes de laquelle elle l’informait qu’elle mettait un terme aux prélèvements trimestriels, lui demandait de prendre acte de la nullité du contrat de vente du matériel et en conséquence du contrat de location financière et de procéder à l’enlèvement du matériel.

La société B C D E a délivré à l’association un commandement de payer le 21 août 2003 pour le loyer impayé du mois de juillet 2013, puis l’a assignée en référé devant le tribunal de céans sous son ancienne dénomination de FÉDÉRATION DES ÉGLISES VIE CHRÉTIENNE FRANCE, par acte d’huissier du 18 octobre 2013.

Par ordonnance en date 16 janvier 2014, le juge des référés du tribunal de grande instance de Paris a constaté la résiliation de plein droit du contrat de location de matériel, a condamné l’association à restituer le matériel et à payer la somme provisionnelle de 29.960,35 euros due au titre du contrat de location.

Par acte d’huissier en date du 10 février 2016, la société B C D E a assigné devant le tribunal de céans l’association ÉGLISE PROTESTANTE PARIS ÉVANGILE pour obtenir le paiement des loyers impayés, des loyers à échoir et des frais et pénalités liées à la résiliation.

L’association a assigné la société J2M BUREAUTIQUE FRANCE, en intervention forcée par exploit du 11 juillet 2016.

Le 11 octobre 2016 une ordonnance de jonction a été prononcée par le juge de la mise en état.

Aux termes de ses dernières conclusions signifiées par voie électronique le 25 janvier 2017, auxquelles il est expressément référé, l’association ÉGLISE PROTESTANTE PARIS ÉVANGILE demande au visa de l’ancien article 116 du code civil et des articles L.122-11-1 et L.122-15 du code de la consommation, au tribunal de :

— constater que les contrats de vente de matériel, le bon de livraison et le contrat souscrit auprès de B C D FRANCE sont interdépendants et forment un ensemble contractuel;

— prononcer la nullité de l’ensemble contractuel constitué du contrat de vente du matériel, du bon de commande et du contrat de location financière conclu le 20 février 2012 pour manœuvres dolosives;

— prononcer la nullité de l’ensemble contractuel pour vente agressive;

— juger non écrite la clause 6-1 des conditions générales du contrat de location et prononcer la nullité de l’ensemble contractuel ;

— condamner un solidum les deux sociétés à lui payer la somme de 9.095,29 euros au titre de restitution des échéances réglées depuis février 2012;

— condamner un solidum les deux sociétés au paiement de 20.000 euros de dommages et intérêts;

— condamner la société B C D E au retrait du matériel sous astreinte de 100 euros par jour de retard, 10 jours après le prononcé du jugement;

A titre subsidiaire, elle demande au tribunal de prononcer la nullité de la clause relative au prix de la location et à titre infiniment subsidiaire de condamner la société J2M BUREAUTIQUE FRANCE à la garantir de toutes condamnations qui seraient prononcées à son encontre au profit de la société B C D E et considérer que la somme demandée par cette dernière au titre des loyers à échoir s’analyse en une clause pénale et fixer le montant de cette indemnité à un euros.

En tout état de cause, elle sollicite du tribunal de grande instance qu’il : – déclare que les conditions générales de location lui sont inopposables

— déboute les sociétés B C D E et J2M BUREAUTIQUE FRANCE de l’ensemble de leurs demandes,

— condamne in solidum les deux sociétés ou à défaut l’une ou l’autre à la somme de 4.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’à supporter les entiers dépens.

— Ordonne l’exécution provisoire

Au soutien de ses prétentions, l’association fait valoir que des manœuvres dolosives l’ont amenée à conclure le contrat de vente puis le contrat de location du 20 avril 2012. Elle indique qu’elle a été initialement démarchée par la société J2M BUREAUTIQUE FRANCE en décembre 2011 pour améliorer son contrat de location de photocopieur. La SARL lui aurait proposé une offre de contrat de location qui devait permettre d’économiser un montant de 1.129,02 euros par an et qui était assortie de la remise d’un chèque de 10.918 euros.

Elle soutient que les représentants de la société J2M BUREAUTIQUE FRANCE lui auraient indiqué qu’il s’agissait de tester ce standard téléphonique, qu’il n’existait aucun engagement et qu’à compter de la première échéance annuelle l’association, elle serait libre de stopper le contrat et, en conséquence, le prélèvement des échéances trimestrielles.

Elle considère que la proposition alléchante du «ྭsubventionnementྭ» de l’achat par la remise d’un chèque d’un montant important lui a paru comme un montage financier original et avantageux qui a facilité la signature des deux contrats.

Elle demande l’annulation du contrat de vente et par voie de conséquence la nullité du contrat de location financière qu’elle juge interdépendants puisqu’ils ont été signés concomitamment auprès de la même personne, un préposé de la société J2M BUREAUTIQUE FRANCE qui disposait d’un imprimé pré-rempli de la société B C D.

L’association considère que ces deux conventions peuvent aussi être annulées sur le fondement de l’article L.122-11 et L.132-1 du code de la consommation puisque la signature a été obtenue par des méthodes de vente agressives et que les clauses relatives au prix ont créé un déséquilibre significatif. En tout état de cause, elle constate que les conditions générales de location lui sont inopposables car elles n’ont été ni signées, ni paraphées.

Dans ses dernières conclusions signifiées par voie électronique le 30 janvier 2017 auxquelles il est expressément référé, la SARL J2M BUREAUTIQUE FRANCE demande au visa des articles 1134 du code civil et suivants au tribunalྭ:

— principalement de se déclarer incompétent au profit du tribunal de commerce de Bobignyྭ;

— à titre subsidiaire de débouter l’association ÉGLISE PROTESTANTE PARIS ÉVANGILE de l’ensemble de ses demandesྭ;

— de la condamner à lui payer la somme de 5.000 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive;

— à titre infiniment subsidiaire de débouter la société B C D E de ses demandes à son encontre.

— en tout état de cause, la condamnation de l’association aux dépens et lui payer la somme de 5.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Au soutien de ses prétentions, elle fait valoir que le tribunal de commerce de BOBIGNY avait compétence pour trancher tout litige aux termes de l’article 10 des conditions générales de vente du contrat conclu avec l’association.

Elle estime que l’association n’apporte pas la preuve d’un quelconque dol, qu’elle a régularisé les contrats sans émettre la moindre réserve, réceptionné le matériel et encaissé le chèque de 10.918 euros. Elle soutient que les deux contrats signées par l’association sont totalement indépendants l’un de l’autre.

Elle considère que l’association ne peut se prévaloir du code de la consommation pour des achats relatifs à son activité professionnelle et qu’elle fait preuve de mauvaise foi en demandant la restitution de 9.095, 29 euros alors qu’elle a encaissé un chèque de 10.918 euros. La société J2M BUREAUTIQUE FRANCE sollicite la somme de 5.000 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive.

La société J2M BUREAUTIQUE FRANCE estime qu’il faudra débouter B C D E de sa demande subsidiaire visant à obtenir sa condamnation à restituer le prix de la cession du matériel puisque les deux contrats étaient parfaitement indépendants et qu’en procédant au règlement de sa facture, la société de financement a pris le risque à sa charge.

Aux termes de ses dernières conclusions signifiées par voie électronique le 7 mars 2017 auxquelles il est expressément référé, la société B C D E désormais dénommée CM CIC LEASING SOLUTIONS demande au tribunal de grande instance de :

— débouter l’association ÉGLISE PROTESTANTE PARIS ÉVANGILE de l’ensemble de ses demandes,

— constater la résiliation du contrat de location financière aux torts et griefs de l’associationྭ;

— condamner l’association à lui restituer le matériel objet de la convention résiliée sous huitaine après la signification de la décision et sous astreinte de 20 euros par jour de retardྭ;

— condamner l’association à payer la somme de 29.988,25 euros au titre des onze loyers impayés, des pénalités contractuelles, des loyers à échoir, de l’option d’achat et de la clause pénale prévus au contrat, avec intérêts de droit à compter du 8 décembre 2015;

A titre subsidiaire, elle sollicite la résolution du contrat de vente et la condamnation de la société J2M BUREAUTIQUE FRANCE au paiement de la somme de 28.106 euros correspondant au prix de cession du matériel majoré des intérêts à compter du 21 février 2012.

Au soutien de ses prétentions, la demanderesse fait valoir que l’association ÉGLISE PROTESTANTE PARIS ÉVANGILE tente de s’exonérer de ses obligations contractuelles en invoquant des manœuvres dolosives de la part du fournisseur J2M BUREAUTIQUE FRANCE entreprises de concert avec la société B C D E qu’elle ne démontre pas.

Elle précise que le matériel livré fonctionnait parfaitement et que l’association continue à l’utiliser sans régler les loyers. Elle rappelle que le contrat de location était sans ambiguïté quant au montant et à la durée des loyers et que l’association s’est acquittée des loyers pendant presque deux ans

Elle conteste l’interdépendance des deux contrats alléguée par l’association, en considérant que cette dernière pouvait faire appel à un autre prestataire pour gérer la maintenance du matériel loué et que le contrat de location financière est «ྭsans maintenance intégréeྭ». Le locataire ne peut donc pas, selon elle, opposer à son bailleur financier les défaillances de la société J2M.

La demanderesse s’estime fondée à réclamer la condamnation au paiement des sommes dues en vertu de la résiliation du contrat de location financière. Elle fait valoir qu’au titre du contrat signé, l’association lui doit 29.988,25 euros, soit les onze loyers impayés et échus pour un montant de 18.386,82 euros auxquels s’ajoutent les pénalités conventionnelles à hauteur de 1.838,68 euros, cinq loyers restant à échoir postérieurement à la résiliation s’élevant à la somme de 8.362,50 euros, un montant de 564 euros d’option d’achat et la somme de 836,25 euros correspondant à la clause pénale.

Subsidiairement, elle demande la condamnation de la société J2M BUREAUTIQUE FRANCE à restituer le prix de la cession du matériel. Elle considère que si un manquement du fournisseur J2M BUREAUTIQUE FRANCE était reconnu et aboutissait à l’anéantissement du contrat, cela entraînerait ipso facto l’anéantissement du mandat.

L’ordonnance de clôture a été prononcée le 2 mai 2017.

SUR CE

Sur l’exception d’incompétence soulevée par la société J2M BUREAUTIQUE FRANCE

La société J2M bureautique soulève une exception d’incompétence aux motifs que le contrat conclu avec l’association ÉGLISE PROTESTANTE PARIS ÉVANGILE prévoyait aux termes de l’article 10 des conditions générales de vente du contrat que tout litige issu du contrat était de la compétence du tribunal de commerce de Bobigny.

L’article 74 du code de procédure civile dispose que les exceptions doivent, à peine d’irrecevabilité, être soulevées simultanément et avant toute défense au fond ou fin de non-recevoir.

Aux termes de l’article 771 du code de procédure civile, lorsque la demande est présentée postérieurement à sa désignation, le juge de la mise en état est, jusqu’à son dessaisissement, seul compétent, à l’exclusion de toute autre formation du tribunal, pour statuer sur les exceptions de procédure, les demandes formées en application de l’article 47 et sur les incidents mettant fin à l’instance. Les parties ne sont plus recevables à soulever ces exceptions et incidents ultérieurement à moins qu’ils ne surviennent ou soient révélés postérieurement au dessaisissement du juge.

L’exception d’incompétence ayant été formée par la société J2M BUREAUTIQUE FRANCE pour la première fois par conclusions au fond notifiées par voie électronique le 30 janvier 2017 et non devant le juge de la mise en état par voie d’incident, il y a lieu de la dire irrecevable.

Sur l’annulation du contrat de vente de matériel pour manœuvres dolosives

Aux termes de l’article 1116 du code civil le dol est une cause de nullité de la convention lorsque les manœuvres pratiquées par l’une des parties sont telles, qu’il est évident que, sans ces manœuvres, l’autre partie n’aurait pas contracté. Le dol ne se présume pas et doit être prouvé. Le dol n’est cause de nullité de la convention que s’il émane de la partie qui a souscrit l’obligation. Toutefois le dol peut émaner du représentant d’une des parties. Par application des dispositions susvisées, les agissements qui provoquent une erreur de la victime sont qualifiées de manœuvres dolosives.

Les pièces versées au débat établissent que le président de l’association a signé le 20 avril 2012 avec J2M BUREAUTIQUE FRANCE une demande de location avec option d’achat et sans maintenance pour un standard téléphonique Alcatel à la société B C D E.

Le contrat de location financière conclu également le 20 avril 2012 avec la société B C D E concerne également «ྭune installation téléphoniqueྭ»ྭ de marque Alcatel.

La location est prévue sur une durée de 63 mois pour un loyer trimestriel d’un montant de 1.667,16 euros, le premier loyer intercalaire étant d’un montant de 759,49 euros. Ce standard téléphonique a été livré et réceptionné le 20 avril 2012 par le client, comme le démontrent un procès-verbal de réception client et un avis de livraison adressé à la société de location. Le 24 février 2012, l’association a reçu un échéancier précis des loyers trimestriels de 1.667,16 euros dus jusqu’en janvier 2017 pour cette installation téléphonique.

L’association ÉGLISE PROTESTANTE PARIS ÉVANGILE fait cependant valoir qu’elle a été amenée à signer un contrat de vente de matériel et un contrat de location sans comprendre la portée des engagements qu’elle prenait en raison des manœuvres dolosives des représentants de la société J2M BUREAUTIQUE FRANCE.

Il apparaît que la proposition initiale de la SARL J2M BUREAUTIQUE FRANCE soumise à l’association portait initialement sur une location de photocopieurs. Versée aux débats, cette proposition a été présentée sous forme d’un tableau qui comparait le montant et les services payés par l’association dans le cadre de son contrat de location de l’époque et ceux qu’elle pourrait payer si elle signait avec la SARL.

L’offre permettait l’acquisition d’un nouveau photocopieur, la conservation de son ancien photocopieur pour un montant de loyer trimestriel de 1.335 euros HT, ainsi que la remise d’un chèque de 10.918 euros «ྭpour couvrir le coût de ses prestataires de bureautique actuelsྭ». Le tableau comparatif présentait la possibilité d’une économie annuelle de 1.129,02 euros par an.

Ce démarchage initial pour un contrat de location de photocopieurs est admis dans les conclusions de la SARL J2M BUREAUTIQUE FRANCE qui indique que l’association souhaitait «ྭchanger leur ancien photocopieur qui était devenu obsolèteྭ». Dans ses conclusions, le fournisseur ne conteste pas l’authenticité de l’offre initiale versée aux débats par l’association.

Une attestation de F-G H, bénévole de l’association, également versée aux débats confirme que lors du démarchage du 6 décembre 2011 où elle était présente, la proposition faite au président de l’association par deux représentants de la SARL concernait uniquement deux photocopieurs.

Elle indique qu’un deuxième rendez-vous de démarchage a eu lieu le 18 janvier 2012 où Monsieur Z A directeur commercial de la SARL J2M BUREAUTIQUE et son commercial Georges Y évoquent la possibilité d’essayer un standard téléphonique sans engagementྭ:

«ྭau deuxième rendez-vous les mêmes quatre personnes étaient présentes (…) le 18 janvier 2012 à 17h, M. Z A nous a expliqué que sa société J2M BUREAUTIQUE fournissait aussi des standards téléphoniques et que nous pouvions – je cite – «ྭtesterྭ» un standard Alcatel pendant un an sans engagement, et cela nous coûterait rien car les frais de la première année seraient pris en charge par sa société qui avait trouvé un accord de financement avec B CAPITALྭ. Cet accord prenait la forme d’un chèque de 10.918 euros de B C».

Ce témoignage précis démontre que les éléments de langage livrés lors des démarchages ont pu entretenir une certaine confusion sur les objectifs du contrat de location et conduire le président de l’association à signer un bon de commande et un contrat de location du matériel téléphonique sans mesurer les termes de son engagement.

De plus, les conditions générales du contrat qui sont versées aux débats par B C D E et qui fixent les conditions réelles de résiliation du contrat ne sont ni signées, ni paraphées par le président de l’association ÉGLISE PROTESTANTE PARIS ÉVANGILE. Il n’est donc pas établi qu’elles aient été connues ou transmises au président de l’association lors de la signature du contrat.

Le bon de commande dont fait état la société J2M BUREAUTIQUE FRANCE dans ses conclusions sans le verser aux débats, confirme qu’une certaine confusion a entouré la signature de ces contrats. Ainsi, elle évoque un bon de commande signé le 18 janvier 2012 pour l’installation «ྭde plusieurs postes de marque SIEMENSྭ» alors qu’un matériel Alcatel a été finalement livré.

Le fournisseur indique également dans ses conclusions que le bon de commande prévoyait «ྭdans deux ans et dans le cadre d’un nouveau contrat, le solde définitif du contrat All bureautiqueྭ». Contrairement à ce qui était évoqué dans l’offre initiale, il n’était donc pas question d’un nouveau contrat en matière de photocopieurs, l’association conservait son contrat précédent pendant deux ans.

Le manque de clarté sur les obligations contractuelles a été accentué par le fait que les signatures du président de l’association du bon de commande, de la demande de location multi-option et du contrat de location ont été recueillies concomitamment par le représentant du fournisseur J2M BUREAUTIQUE FRANCE qui disposait d’un contrat pré-rempli de la société de financement, ce qui n’est pas contesté par les deux sociétés dans leurs conclusions.

Dans le courrier qu’il a adressé le 22 mars 2013 à la société J2M BUREAUTIQUE FRANCE, le conseil de l’association confirme que l’association pensait pouvoir se rétracter du contrat de matériel téléphonique après une année d’utilisation. Il souligne que le chèque de 10.918 euros offert était d’ailleurs venu renforcer l’impression qu’il s’agissait d’une bonne affaire. Il fait ainsi part de la «ྭsurpriseྭ» de l’association qui a constaté début 2013 qu’elle ne pouvait pas solliciter la fin du contrat et la restitution du matériel.

Le président de l’association a donc signé un bon de commande portant sur un matériel téléphonique et souscrit un contrat de location financière sans comprendre la portée de ses engagements. La société J2M BUREAUTIQUE FRANCE a usé d’artifices sans lesquels le président de l’association n’aurait pas contracté et qui caractérisent des manœuvres dolosives de sorte que la nullité du contrat de vente du matériel de téléphonie qu’il a conclu avec l’association sera prononcée.

Sur l’annulation du contrat de location financière

Aux termes d’une jurisprudence constante de la cour de cassation, la nullité d’un contrat de vente de matériel doit entraîner la caducité ab initio du contrat de location financière dès lors que les contrats sont concomitants et successifs et s’inscrivent dans une opération incluant une location financière sont interdépendants. De plus sont réputées non écrites les clauses des contrats inconciliables avec cette interdépendance.

En l’espèce, les conventions litigieuses, le bon de commande et la demande de location multi-options du fournisseur et le contrat de location financière de la société B C D E ont été signés de manière concomitante, sous le contrôle du préposé de la société J2M BUREAUTIQUE FRANCE. Ils s’inscrivent dans une même opération économique globale et sont interdépendants.

Le contrat de location financière doit, en conséquence, être déclaré caduc dès l’origine. La société B C D E doit en conséquence restituer à l’association ÉGLISE PROTESTANTE PARIS ÉVANGILE la totalité des sommes versées en exécution du contrat, soit la somme de 9.095,29 euros assortie d’intérêts à taux légal à compter du présent jugement.

La société J2M BUREAUTIQUE FRANCE sera condamnée à restituer à la société B C D E le prix de cession du matériel soit la somme de 28.106 euros qui sera assortie d’intérêts à taux légal à compter du présent jugement.

La société B C D E sera condamnée au retrait du matériel au sein de l’entreprise, sous astreinte de 50 euros par jour de retard, 10 jours après le prononcé du jugement.

Sur le préjudice de l’association ÉGLISE PROTESTANTE PARIS ÉVANGILE

L’association ÉGLISE PROTESTANTE PARIS ÉVANGILE justifie d’un préjudice économique causé par le comportement fautif de la société J2M BUREAUTIQUE FRANCE qui l’a amenée par des manœuvre dolosives à s’engager contractuellement pour louer un standard téléphonique dont elle n’avait pas besoin.

L’association a engagé des dépenses inutiles qui auraient pu être investies plus profitablement.

Par conséquent la société J2M BUREAUTIQUE FRANCE sera condamnée à lui payer à la somme de 3.000 euros à titre de dommages et intérêts.

Cette dernière sera, en conséquence, déboutée de sa demande tendant à la condamnation de l’association ÉGLISE PROTESTANTE PARIS ÉVANGILE à lui payer des dommages et intérêts pour une procédure abusive.

Sur les frais et dépens

Succombant à l’instance, la SARL J2M BUREAUTIQUE FRANCE supportera la charge des dépens.

Il apparaît équitable de condamner la SARL J2M BUREAUTIQUE FRANCE à payer à l’association ÉGLISE PROTESTANTE PARIS ÉVANGILE une somme de 3.000 euros au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

Il n’y a pas lieu à application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile au profit de la société B C D E qui en fait la demande.

L’exécution provisoire est compatible avec la nature de l’affaire et nécessaire eu égard à l’ancienneté du litige. Elle sera prononcée.

PAR CES MOTIFS

Le tribunal statuant publiquement par jugement mis à disposition au greffe, contradictoire et rendu en premier ressort,

Dit irrecevable l’exception d’incompétence soulevée,

Prononce l’annulation du contrat de vente conclu entre la SARL J2M BUREAUTIQUE FRANCE et l’association ÉGLISE PROTESTANTE PARIS ÉVANGILEྭ ;

Prononce l’annulation du contrat de location financière conclu entre la société B C D E et l’association ÉGLISE PROTESTANTE PARIS ÉVANGILE ྭ;

Condamne la société B C D E à restituer à l’association ÉGLISE PROTESTANTE PARIS ÉVANGILE la somme de 9.095,29 euros assortie d’intérêts au taux légal à compter du présent jugementྭ;

Condamne la société J2M BUREAUTIQUE FRANCE à restituer à la société B C D E la somme de 28.106 euros au titre du prix de la cession du matériel assortie d’intérêts au taux légal à compter du présent jugementྭ;

Condamne la société B C D E au retrait du matériel au sein de l’entreprise, sous astreinte de 50 euros par jour de retard, 10 jours après le prononcé du jugementྭ;

Condamne la société J2M BUREAUTIQUE FRANCE à payer à l’association ÉGLISE PROTESTANTE PARIS ÉVANGILE la somme de 3.000 euros à titre de dommages et intérêts.

Déboute la SARL J2M BUREAUTIQUE FRANCE de sa demande d’indemnisation pour procédure abusive de l’association ÉGLISE PROTESTANTE PARIS ÉVANGILE

Déboute les parties du surplus de leurs demandesྭ;

Condamne la société J2M BUREAUTIQUE FRANCE à payer à l’association ÉGLISE PROTESTANTE PARIS ÉVANGILE la somme de 3.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civileྭ;

Déboute la société B C D E de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civileྭ;

Condamne la société J2M BUREAUTIQUE FRANCE aux dépensྭ;

Déboute la société B C D E de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civileྭ;

Ordonne l’exécution provisoire de la présente décision.

Fait et jugé à Paris le 14 novembre 2017

Le Greffier Le Président

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