Tribunal de grande instance de Paris, 9e chambre 3e section, 9 mars 2018, n° 17/07535

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Sur la décision

Référence :
TGI Paris, 9e ch. 3e sect., 9 mars 2018, n° 17/07535
Juridiction : Tribunal de grande instance de Paris
Numéro(s) : 17/07535

Texte intégral

T R I B U N A L

D E GRANDE

I N S T A N C E

D E P A R I S

9e chambre

3e section

N° RG :

17/07535

N° MINUTE :

Assignation du :

15 Février 2017

ORDONNANCE DU JUGE DE LA MISE EN ETAT

rendue le 09 Mars 2018

DEMANDEUR

Monsieur A-B Y

[…]

[…]

représenté par Maître D E-F, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #C1901

DÉFENDERESSES

S.A. LA BANQUE POSTALE

[…]

[…]

représentée par Maître Denis-clotaire LAURENT de l’AARPI TARDIEU GALTIER LAURENT DARMON associés, avocats au barreau de PARIS, vestiaire #R0010

S.A. BNP PARIBAS

[…]

[…]

représentée par Maître Julien MARTINET du PARTNERSHIPS HOGAN LOVELLS (PARIS) LLP, avocats au barreau de PARIS, vestiaire #T0004

S.A. THE ROYAL BANK OF SCOTLAND PLC

[…]

[…]

représentée par Maître Clément DUPOIRIER du PARTNERSHIPS HERBERT SMITH FREEHILLS PARIS LLP, avocats au barreau de PARIS, vestiaire #J0025

Société WORLDPLAY AP LTD

[…]

[…]

[…]

représentée par Maître Denis CHEMLA et Me Dan BENGUIGUI, avocats au barreau de PARIS, avocats postulants, du LLP ALLEN & OVERY LLP vestiaire #J0022

Société SEROPH HOLDING BV

[…]

4818 CP

[…]

représentée par Maître Harold HERMAN, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #T03

MAGISTRAT DE LA MISE EN ETAT

D REVIL, Vice-Présidente,

assistée de Cléa ADOLPHE-MACAISNE, Greffier.

DÉBATS

A l’audience du 19 janvier 2018, avis a été donné aux avocats que l’ordonnance serait rendue le 09 mars 2018 par mise à disposition au greffe.

ORDONNANCE

Rendue publiquement par mise à disposition au greffe

Contradictoire

Susceptible de recours dans les conditions énoncées par l’article 776 du code de procédure civile

Par actes d’huissier de justice des 15 février , 13 et 15 mars 2017 , M. A-B Y a assigné en responsabilité la société La banque postale, la société BNP Paribas, la société de droit étranger Royal Bank of Scotland, la société de droit étranger Worldpay AP limited et la société de droit étranger Seroph Holding BV devant ce tribunal.

Il expose avoir été démarché par la société Boursofx afin d’investir des fonds sur sa plateforme de trading en ligne, laquelle proposait des investissements sur le marché des changes dit Forex et du trading sur les options binaires. Il a ainsi viré à plusieurs reprises en 2014 des sommes pour un montant total de 40.500 euros de ses comptes ouverts en les livres de la société BNP Paribas et la société La banque postale, sur des comptes ouverts dans les livres de la société Royal Bank of Scotland par la société Worldpay AP limited, lesquels fonds ont été ensuite transférés vers les comptes de la plateforme de paiement en ligne Allcharge, détenue par la société Algocharge, devenue la société Seroph Holding BV, société dépourvue de l’agrément nécessaire. Il ajoute que ses interlocuteurs de la société de courtage ont disparu,qu’il est désormais établi qu’aucune des sommes confiées n’a été investie sur un marché financier et qu’il a perdu l’intégralité des fonds versés. Il fait valoir que la société La banque postale, la société BNP Paribas, la société Royal Bank of Scotland ainsi que les société prestataires de service de paiement en ligne Worldpay et Seroph Holding BV auraient commis des fautes contribuant directement à son préjudice.

Par conclusions communiquées par la voie électronique le 31 octobre 2017, la société Seroph Holding BV a saisi le juge de la mise en état d’un incident et sollicite aux termes de ses dernières conclusions d’incident communiquées par la voie électronique le 24 novembre 2017 le sursis à statuer dans l’attente de l’instruction définitive actuellement en cours devant le de grande instance de Paris, ainsi que la radiation de l’affaire du rôle dans cette attente, outre la condamnation de M. X aux dépens et à lui payer 5.000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile.

Cette société indique intervenir sur le marché des prestations de service de paiement sur internet sous la dénomination commerciale Algocharge et explique recevoir, pour le commerçant, dans le cas de « non direct solution » les fonds versés par le client payeur dudit commerçant, ces fonds transitant d’abord par un autre prestataire de service de paiement, telle la société de droit étranger Worldpay AP limited. Elle précise avoir passé des contrats avec diverses plateformes de trading en ligne sur le marché du Forex et des options binaires et qu’à la suite de plaintes, des enquêtes préliminaires ont été ouvertes à l’encontre de plusieurs de ces plateformes menant à l’ouverture d’une information judiciaire des chefs de démarchage financier illicite, fourniture de services d’investissement non autorisés et d’escroqueries en bande organisée.

Elle-même a été mise en examen des chefs de blanchiment d’escroqueries en bande organisée, exercice illégal de l’activité de prestataire de services de paiement et complicité d’exercice illégal de l’activité de prestataire de service d’investissement, et placé sous le statut de témoin assisté pour complicité d’escroqueries en bande organisée.

Elle rappelle que le juge civil saisi d’une action civile en réparation du dommage causé par l’infraction doit surseoir à statuer en application de l’article 4 du code de procédure pénale et ce jusqu’à ce que la juridiction pénale ait statué sur l’action publique, et relève l’identité d’objet entre la présente action en responsabilité délictuelle et l’instruction, dans la mesure où lui est reproché, d’une part, d’avoir fourni sans habilitation des services de paiement aux sociétés de trading non régulées et d’avoir manqué à ses obligations de vigilance et de vérification et d’autre part, l’infraction d’exercice illégal de l’activité de prestataire de services de paiement et la complicité d’exercice illégal de l’activité de prestataire de service d’investissement. Elle considère ainsi que l’appréhension exhaustive de ses manquements dépend directement de l’issue de la procédure pénale. Elle en conclut à l’automaticité du sursis.

Par ses dernières conclusions d’incident communiquées par la voie électronique et visées par le greffe le 12 janvier 2018, la société Royal Bank of Scotland s’en rapporte à justice sur l’exception soulevée par son contradicteur.

Par conclusions d’incident communiquées par la voie électronique le 9 janvier 2018, M. Y conclut au débouté de l’exception adverse et sollicite la condamnation de la société de droit étranger Seroph Holding BV aux dépens, qui seront distraits au profit de maître D E-F, et à lui payer 5.000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile.

Il fait valoir essentiellement que les sociétés de courtage citées dans les faits visés par l’instruction ne comprennent pas la société Boursofx, avec laquelle il a contracté.

Par conclusions d’incident communiquées par la voie électronique le 10 janvier 2018, la société de Worldpay AP Limited s’en rapporte à justice sur l’exception de sursis à statuer.

Par conclusions d’incident communiquées par la voie électronique le 12 janvier 2018, la société Royal Bank of Scotland s’en rapporte à justice sur l’exception de sursis à statuer.

Par conclusions d’incident communiquées par la voie électronique le 17 janvier 2018, la société BNP Paribas s’en rapporte à justice sur l’exception de sursis à statuer et demande que, dans l’hypothèse où le sursis serait prononcé, qu’il concerne l’ensemble des prétentions du demandeur.

La société La banque postale n’a pas conclu sur l’incident, lequel a été plaidé le 19 janvier 2018.

EXPOSE DES MOTIFS

Selon l’article 4 du code de procédure pénale, l’action civile en réparation du dommage causé par l’infraction prévue par l’article 2 peut être exercée devant une juridiction civile, séparément de l’action publique ; toutefois, il est sursis au jugement de cette action tant qu’il n’a pas été prononcé définitivement sur l’action publique lorsque celle-ci a été mise en mouvement ; la mise en mouvement de l’action publique n’impose pas la suspension du jugement des autres actions exercées devant la juridiction civile, de quelque nature qu’elles soient, même si la décision à intervenir au pénal est susceptible d’exercer, directement ou indirectement, une influence sur la solution du procès civil.

Pour l’application de cette règle, il convient que les actions, civile et publique, portent sur les mêmes faits et qu’elles procèdent d’une même cause juridique.

En l’espèce, M. Y reproche à la société de droit étranger Seroph Holding BV d’avoir fourni à la société Boursofx, société de courtage non agréée, des services de paiement sans y être habilitée, et lui reproche encore d’avoir manqué à ses obligations de vigilance et de vérification en ce qu’elle ne pouvait ignorer leur activité et leurs pratiques ni qu’il s’agissait d’une société de courtage non régulée.

La société Seroph Holding BV a été mise en examen le 20 mai 2016 dans le cadre de la procédure judiciaire ouverte devant le tribunal de grande instance de Paris sous le numéro d’instruction 2601/14/2 des chefs de :

– blanchiment d’escroqueries en bande organisée, pour avoir à Paris et sur l’ensemble du territoire national, en Israël, aux Pays-Bas et à Londres, entre le 14 novembre 2011 et 2014, apporté son concours à une opération de placement, de dissimulation ou de conversion du produit direct ou indirect d’un crime ou d’un délit, en l’espèce des escroqueries en bande organisée réalisées au moyen des sociétés fictives de négociation sur le marché des devises 4 XP (Forex Place), Aston Z (ainsi que tous ses dérivés), […], et Z Capital Market ;

– exercice illégal de l’activité de prestataire de services de payement, pour avoir aux Pays-Bas et en Israël, à compter de janvier 2011 et jusqu’au 20 octobre 2015, fourni à titre de profession habituelle pour les sociétés extraterritoriales Forex Place ltd, Aston Z ltd (ainsi que tous ses dérivés), […], et Z Capital Market ltd des services de payement, en l’espèce des acquisitions d’ordre de payement et l’exécution de virements associés à un compte de payement (au sens de la directive du Parlement européen et du Conseil du 13 novembre 2007 concernant les services de payement dans le marché intérieur), alors qu’elle n’avait aucun agrément à cet effet en Europe ;

– complicité d’exercice illégal de l’activité de prestataire de services d’investissement, pour avoir aux Pays-Bas et en Israël, à compter de janvier 2011 et jusqu’au 21 janvier 2014 (date du réquisitoire introductif), été complice de l’exercice illégal de l’activité de prestataire de services d’investissement commis par les sociétés extraterritoriales Forex Place ltd, Aston Z ltd (ainsi que tous ses dérivés), […], et Z Capital Market ltd (notamment fourniture de conseil en investissement et exécution d’ordres pour le compte de tiers, pour des contrats financiers relatifs à des devises), en leur apportant des solutions de payement en sa qualité de prestataire de services de payement, en sachant qu’elles n’étaient pas agréées comme prestataires de services d’investissement alors qu’elles auraient dû l’être ;

Cette société a été placée également sous le statut de témoin assisté du chef de complicité d’escroqueries en bande organisée, pour avoir à Paris et sur l’ensemble du territoire national, en Israël, aux Pays-Bas et à Londres, entre le 14 novembre 2011 et 2014, été complice des escroqueries en bande organisée commises au moyen des sociétés de négociation frauduleuses et non régulées 4 XP (Forex Place), Aston Z (ainsi que tous ses dérivés), […], et Z Capital Market, au préjudice de centaines de victimes pour un montant total de 105 millions d’euros, en aidant sciemment lesdites sociétés dans la préparation ou la consommation de l’infraction, en l’espèce en fournissant aux escrocs la possibilité de faire envoyer les fonds placés par leurs victimes vers les sociétés frauduleuses localisées en Israël, permettant ainsi leur détournement ;

Toutefois, il n’est pas établi ni même allégué que M. Y se soit constitué partie civile dans le cadre de cette information.

De plus, le demandeur indique avoir été démarché par la société Boursfox, laquelle n’est pas au nombre des sociétés visées par l’instruction.

Par conséquent, en l’absence d’identité de faits, il n’y a pas lieu d’ordonner le sursis à statuer en application des dispositions de l’article 4 du code de procédure pénale.

Il y a lieu de réserver les dépens et les demandes formées au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

L’affaire sera ainsi renvoyée à l’audience de mise en état du

Vendredi 01 juin 2018 à 13h30 pour conclusions au fond de la société Seroph Holding BV avant le 30 mai 2018.

PAR CES MOTIFS

Le juge de la mise en état, statuant par ordonnance contradictoire, mise à disposition, susceptible de recours dans les conditions énoncées par l’article 776 du code de procédure civile ;

Rejette la demande de sursis à statuer formée par la société Seroph Holding BV ;

Renvoie l’affaire à l’audience de mise en état du Vendredi 01 juin 2018 à 13h30 pour conclusions au fond de la société Seroph Holding BV avant le 30 mai 2018.

L’audience se tiendra au tribunal de Paris, Parvis du tribunal de Paris, 75017 Paris.

Les parties seront informées du numéro de la salle d’audience par un affichage visible sur des panneaux signalétiques situés au rez-de-chaussée, et aux niveaux 2, 4 et 6 du tribunal.

Réserve les dépens et les demandes formées au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Faite et rendue à Paris le 09 Mars 2018

Le Greffier Le Juge de la mise en état

1:

Copies exécutoires

délivrées le :

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