Tribunal de grande instance de Toulouse, Pôle civil, fil 3, n° 15/03591

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Sur la décision

Référence :
TGI Toulouse, pôle civil, fil 3, n° 15/03591
Juridiction : Tribunal de grande instance de Toulouse
Numéro(s) : 15/03591

Texte intégral

ORDONNANCE DU : 26 JUILLET 2017

DOSSIER N° : 15/03591

NAC:63B

TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE TOULOUSE

[…]

ORDONNANCE DU 06 JUILLET 2017

Demande d’explication de droit et de fait (article 765 cpc)

Monsieur X, Juge de la mise en état

Madame GIRAUD, Greffier

DEMANDEUR

M. F G (LE C)

né le […] à […][…]

représenté par Maître Jacques MONFERRAN de la SCP MONFERRAN-CARRIERE-ESPAGNO, avocats au barreau de TOULOUSE, vestiaire : 328

DEFENDEURS

S.C.P. H D – AH-H R D – OLIVIER R D, dont le […]

représentée par Maître Nicolas LARRAT de la SCP LARRAT, avocats au barreau de TOULOUSE, vestiaire : 175

CAISSE D’EPARGNE ET DE PREVOYANCE MIDI-PYRENEES inscrite au RCS de TOULOUSE sous le numéro D 383 354 594, garant de l’achèvement du programme, dont le siège social est sis […]

représentée par Maître AH COURRECH de la SCP COURRECH ET ASSOCIES AVOCATS, avocats au barreau de TOULOUSE, vestiaire : 361

S.A.R.L. AGENCE D’ARCHITECTURE ET D’I E, dont le siège social est sis […]

représentée par Maître Corine CABALET de la SCP TERRACOL-CABALET-NEROT, avocats au barreau de TOULOUSE, vestiaire : 257

S.A BNP PARIBAS venant aux droits de la BANQUE FORTIS, banque gérant le compte courant de la SCI A 2002 RESIDENCE DU HAUT COUSERANS, dont le siège social est sis […]

représentée par Maître Bertrand DESARNAUTS de la SELARL LEXAVOUE PAU-TOULOUSE, avocats au barreau de TOULOUSE, vestiaire : 217

Compagnie d’assurances MAF assureur de la SARL AGENCE d’ARCHITECTURE ET d’I E, dont le siège social est […] – […]

représentée par Me Valérie TERRAL-PRIOTON, avocat au barreau de TOULOUSE, vestiaire : 368

E.U.R.L. J K, architecte Y, dont le […]

représentée par Maître H DARNET de la SCP D’AVOCATS DARNET-GENDRE-ATTAL, avocats au barreau de TOULOUSE, vestiaire : 86

S.A.R.L. EURODOME représentée par Maître L M liquidateur judiciaire désigné par jugement du tribunal de commerce d’EVRY en date du 15 mars 2010, dont le siège social est sis […]

défaillant

SAS AA AB représentée par Maître L M liquidateur judiciaire désigné par jugement du tribunal de commerce d’EVRY en date du 19 avril 2010, dont le siège social est sis […]

défaillant

SAS AA représentée par Maître L M liquidateur judiciaire désigné par jugement du tribunal de commerce d’EVRY en date du 19 avril 2010, dont le siège social est sis […]

défaillant

S.C.I. A 2002 RESIDENCE DU HAUT COUSERANS prise en la personne de son représentant légal, Me Z, liquidateur judiciaire, désigné par jugement du tribunal de grande instance de FOIX du 03 février 2010, dont le siège social est sis […]

défaillant

S.A.S AKERYS PROMOTION, dont le siège social est […]

représentée par Maître Hélène LYON de la SCP HELENE LYON – STEPHANE VOLIA, avocats au barreau de TOULOUSE, vestiaire : 79

M. N O, immatriculé au registre spécial des agents commerciaux sous le numéro […]

prescripteur, demeurant 18, Square du Pontu – 49610 ST MELAINE SUR AUBANCE

représenté par Maître Jérôme CARLES de la SCP CAMILLE & ASSOCIES, avocats au barreau de TOULOUSE, vestiaire : 49

S.A.R.L. P Q, dont le […]

représentée par Maître Jérôme CARLES de la SCP CAMILLE & ASSOCIES, avocats au barreau de TOULOUSE, vestiaire : 49

PARTIE INTERVENANTE

LE PROCUREUR DE LA REPUBLIQUE PRES LE TGI DE TOULOUSE, dont le siège social est sis TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE TOULOUSE – 2, […]

Ayant investi dans un programme immobilier devant être construit sur la commune D’USTOU A pour l’achat en VEFA d’immeubles qui leur ont été livrés avec un important retard, les acquéreurs du programme immobilier portant sur l’immeuble LE C, au nombre desquels figure la partie demanderesse, ont acquis en VEFA des lots de copropriété qui n’ont été livrés qu’avec un important retard par suite de la défaillance financière du promoteur, tombé en liquidation judiciaire, et qui ne peuvent être loués qu’à des conditions de bail moins favorables que celles initialement prévues et qui ont rompu l’équilibre financier dans la perspective duquel ils s’étaient engagés..

L’instance a été introduite par la plupart des acquéreurs sous le numéro 09/2183 et a donné lieu à l’institution d’une expertise ordonnée le 24 décembre 2010 dont le rapport a été déposé le 17 avril 2015 en lecture duquel chacun des acquéreurs doit conclure.

Quelques acquéreurs qui n’avaient pas agi à l’origine sont intervenus en cours de procédure pour se joindre aux autres.

Outre les personnes actionnées en responsabilité par tous les acquéreurs, des actions principales ou récursoires ont aussi été dirigées contre les banques prêteuses, contre des mandataires commercialisateurs, toutes personnes qui, chacune, ne sont concernées que par un nombre limité de ventes parmi toutes celles au titre desquelles les acquéreurs agissent.

Le choix a été fait de constituer un dossier par acquéreur en lecture du rapport d’expertise, le dossier souche d’origine 09/2183 étant radié ainsi que cela résulte d’une ordonnance rendue le 26 novembre 2015.

Par conclusions du 04 juillet 2014 déposées avant la décision de disjonction, les acquéreurs agissent en responsabilité contre

— la S.C.P. R D, en lui reprochant d’avoir manqué à son devoir de conseil lors de la conclusion de la vente en manquant à son devoir de conseil,

— les architectes qui ont établi des attestations erronées, notamment l’attestation du 10 avril 2008 mentionnant à tort l’achèvement des travaux

— les banques prêteuses en ce qu’elles auraient manqué à leurs obligations de mise en garde,

— en responsabilité des agents commerciaux pour les mêmes motifs.

Ils demandent donc certaines sommes à titre d’indemnités

Ils exposent que le chantier a été interrompu durant l’été 2008, alors que la livraison avait été initialement prévue pour intervenir à la fin de l’année 2007, que la S.C.I. A 2002 a été mise vainement en demeure d’achever la construction avant que ne soit ouverte à son encontre une procédure de liquidation judiciaire par jugement rendu par le tribunal de grande instance de FOIX le 03 février 2010, puis par le tribunal de commerce d’EVRY, après annulation de la procédure fuxéenne en raison d’une erreur ayant porté sur l’incompétence territorial de cette juridiction.

Durant la procédure

— le remboursement des prêts a été suspendu provisoirement soit à l’amiable soit judiciairement au bénéfice des acquéreurs

— la garantie d’achèvement a été accordée par la CEP

— la consignation du solde de prix a été ordonnée afin de permettre la livraison des immeubles qui ont été achevés dans le courant de l’année 2012 et livrés le 07 septembre 2012.

F G présente une demande indemnitaire décomposée selon les postes suivants :

Perte de loyer HT jusqu’à livraison effective

44 289,00

Perte de chance de ne pas défiscaliser

0,00

Intérêts intercalaires dus à livraison tardive

9 475,00

Dépréciation du bien

103 605,00

Manque à gagner loyers postérieures

69 336,00

Perte de chance du bénéfice de la promesse

34 535,00

Frais de défense

8 800,00

Préjudice moral

20 000,00

Total

290 040,00

Depuis la date de dépôt du rapport d’expertise, ont été déposés divers jeux de conclusions, par ordre chronologique, pour le programme immobilier considéré ; toutes les parties n’ont pas encore conclu mais il est possible et nécessaire de faire le point.

Par conclusions du 15 mars 2016, la CAISSE D’EPARGNE ET DE PREVOYANCE, garant d’achèvement, soutient

— que le notaire ne peut pas se prévaloir du contrat de garantie de parfait achèvement,

— que les sommes débitées du compte centralisateur l’ont été au profit de sociétés du groupe de promotion

— qu’elle a exécuté son contrat de garantie d’achèvement.

Elle discute à la baisse ou conteste les postes de préjudices invoqués par les demandeurs à savoir les pertes de loyers, le paiement des intérêts intercalaires, le retard à défiscaliser et le montant moindre de la défiscalisation obtenue par rapport à celle qui était prévue, la dépréciation du bien, et la perte de chance de bénéficier de la promesse de rachat du bien.

Par conclusions du 08 juillet 2016, la S.C.P. D R conclut au débouté en faisant valoir principalement qu’elle n’a pas commis de faute et qu’il n’y a pas de lien de causalité entre le préjudice subi par les acquéreurs et son rôle d’officier ministériel lors de la réception de l’acte authentique de vente.

Elle fait valoir que son rôle s’est limité à recevoir un acte authentique sans intervenir dans le montage de l’opération de promotion (négociation des conditions de vente, des conditions de baux, études fiscales préalables, détermination des termes de la promesse de rachat).

Elle fait valoir que rien ne l’alertait à la date à laquelle elle a reçu l’acte.

Subsidiairement, elle agit à titre récursoire contre les mêmes acteurs que les acquéreurs en soutenant que sa part de responsabilité ne doit pas excéder 5%, à savoir la S.C.I. A 2000.

Elle fait valoir que le garant d’achèvement, a manqué à ses obligations de surveillance, notamment de surveillance du compte centralisateur, que les architectes ne se sont pas préoccupés des retards anormaux accumulés

Elle recourt aussi contre la BNP PARIBAS venant aux droits de la banque FORTIS auprès de qui la S.C.I. A NEIGE avait ouvert un compte bancaire ordinaire qui a vu transiter des fonds qui auraient dû rester ou être crédités sur le compte centralisateur ouvert auprès de la CEP, garant d’achèvement.

Elle conclut aussi à l’encontre du conseil en gestion de Q en ce qu’ils ont pu user de méthodes commerciales discutables et en ce qu’ils ont pu présenter aux acquéreurs une promesse de rachat pour emporter leur consentement, promesse qui n’a été jointe ni à l’acte de réservation ni portée à la connaissance du notaire.

Par conclusions du 05 septembre 2016, la BNP PARIBAS, venant aux droits de la BANQUE FORTIS, fait valoir qu’elle n’a pas engagé sa responsabilité au motif que son rôle s’est limité à ouvrir dans ses livres un compte ordinaire au nom de la S.C.I. sans avoir aucun pouvoir de contrôle sur les mouvements constatés, sauf anomalie non prouvée en l’espèce, le compte fonctionnant donc sous la responsabilité du client.

A titre subsidiaire, elle conclut à la responsabilité prépondérante de la société de promotion et au caractère nécessairement restreint de la faute qui pourrait être retenue contre elle.

S’agissant de l’évaluation du préjudice, elle soutient que les demandeurs, en demandant la résolution des ventes, qui commandent de les remettre dans l’état antérieur comme si l’acte n’avait pas été conclu, ne peuvent prétendre à obtenir d’elle ni une indemnité égale à la clause pénale de l’acte de vente à résoudre et auquel elle n’est pas partie, ni la perte des avantages fiscaux.

A titre subsidiaire sur le préjudice, elle fait valoir qu’il peut être qualifié en perte de chance de ne pas contracter.

Elle agit à titre récursoire non seulement contre le notaire, le garant d’achèvement et les architectes (S.A.R.L. E et J K) mais elle reproche aux acquéreurs d’avoir contribué à la réalisation de leur propre dommage en émettant des chèques qui ont abondé d’autres comptes que le compte centralisateur.

Par conclusions du 12 décembre 2016, la société AKERYS, qui a été mise en cause pour avoir été chargée de la réalisation des travaux d’achèvement du chantier, fait observer qu’aucune demande n’est dirigée contre elle et qu’elle n’intervient aux fins de jugement commun en demandant 1.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

Par conclusions du 20 mars 2017, la MAF, assignée en qualité d’assureur de L’E.U.R.L. J K et de la S.A.R.L. AGENCE ARCHITECTURE E conclut à titre principal

— à l’absence de garantie, en invoquant l’absence d’aléa

— à l’absence de garantie pour avoir établi des attestations non conformes à la réalité

— à la limite du contrat d’J K, qui n’a conclut qu’un contrat d’assistance au maître de l’ouvrage

Subsidiairement, elle reprend ses conclusions antérieures sur l’absence de faute commise par son assuré, en faisant valoir que les préjudices invoqués ne sont pas des dommages consécutifs à une mauvaise exécution des obligations de constructeurs des ouvrages livrés.

Subsidiairement, elle oppose des plafonds de garantie et exerce ses recours contre les autres personnes dont la responsabilité est recherchée.

Les autres parties n’ont pas encore conclu à savoir

— la banque prêteuse, mais elle n’a pas été assignée dans ce dossier

— les architectes J K et le cabinet d’architecture E

— la SARL P Q et N O prescripteur commercialisateur.

En outre les premiers échanges de conclusions ne cadrent pas tous les problèmes ; et il convient de demander des précisions en vue d’assurer une certaine conséquence entre les décisions à rendre qui, sur l’ensemble des programmes, approchent le nombre de 200.

Par ailleurs, ce qui a été jugé par la cour d’appel de RIOM le 30 janvier 2017 (confirmant en appel la déclaration de responsabilité de la même S.C.P. de notaires, prononcée par le tribunal de CUSSET) relativement à un programme concernant le même promoteur, les mêmes architectes et le même notaire, doit être discuté et analysé dans le cadre de l’ensemble des procédures dont la présente juridiction est saisie.

MOTIFS

La liquidation judiciaire des sociétés du groupe AA génère un contentieux important qui concerne environ 200 dossiers et trois sites géographiques de l’Ariège (S T, A, et […]) tous conduits par les mêmes personnes, les mêmes architectes et le même notaire. Il convient aussi d’évoquer l’échec d’un programme mené par ces mêmes personnes à LAPRUGNE, dont le tribunal a eu à connaître, car cette jurisprudence est susceptible de trouver application au présent litige.

D’autres opérations du même type ont généré un contentieux important.

Comme le présent litige concerne un ensemble de personne se trouvant dans deux types de situations similaires, la bonne administration de la justice commande d’organiser le débat

— en commençant par un exposé des risques généraux encourus par les acquéreurs quand ils acquièrent en VEFA sous un régime de défiscalisation,

— en donnant connaissance des décisions ayant concerné le programme de LAPRUGNE jugé à CUSSET puis en appel à RIOM, dont un certain nombre de dossiers a été jugé à TOULOUSE

— en mutualisant les conclusions des rapports d’expertise ordonnés dans 4 dossiers procédures “souches” dans lesquelles a été instituée une expertise 09/2150 (S) 09/2183 (C) 09/2656 (B AC AD U V), 09/2657 (MERENS I et II) et 09/2658 (BETHMALE) afin que l’ensemble des acquéreurs aient une vision globale des différents problèmes.

EXPOSE GENERAL DE LA SITUATION DES ACQUEREURS

Les demandeurs, comme tous les copropriétaires d’un des programmes inachevés, ou d’un des programmes achevés avec retard après intervention du garant d’achèvement, recherchent la responsabilité de diverses personnes (notaire, garant d’achèvement, banques prêteuses, commercialisateurs, banque domiciliataire d’un compte non-centralisateur ayant été crédités d’une partie du prix) pour n’avoir jamais pu obtenir aucune contrepartie au prix payé (programmes inachevés), ou pour ne l’avoir obtenu qu’avec retard ; dans ce type de programmes dits de “défiscalisation”, les loyers plafonnés, inférieurs au échéances des prêts, et les économies d’impôts se complètent , du moins jusqu’à la fin de la période durant laquelle ces avantages fiscaux sont consentis, pour équilibrer financièrement une opération généralement entièrement financée par l’emprunt mais cet équilibre n’est pas prévu pour durer pendant toute le temps de l’amortissement de l’emprunt, et, durant la période plus brève durant laquelle les avantages fiscaux sont accordés, il n’est maintenu qu’à condition qu’il n’y ait pas de solution de continuité dans la location, ni de modification à la baisse du loyer d’origine.

Les actions en responsabilité font suite à la défaillance financière du constructeur et s’articulent toujours autour des obligations de contrôle, de conseil ou de mise en garde dont seraient tenus les professionnels (notaire, garant d’achèvement, banque prêteuse, intermédiaire commercialisateurs) à raison du caractère particulièrement risqué de ces opérations de défiscalisation.

Globalement ces risques sont les suivants qui sont déjà en débat d’après les moyens de fait et de droits invoqués ; seront aussi rappelés les risques encourus propres à la défiscalisation.

A) les risques de toute VEFA et sa protection légale

1) protection fournie contrat de réservation

Toute Vente en l’Etat Futur d’Achèvement comporte un risque de non achèvement ou même de non-exécution du programme immobilier vendu, puisque, par définition le bien est vendu avant d’être construit et prêt à être livré, soit en cours de travaux, voire sur simples plans avant même l’exécution du moindre travail de construction ou de rénovation lourde. Aux fins de protection des parties qui empruntent et versent un prix pour l’acquisition d’un bien qui peut n’être qu’à l’état de projet lors de leur engagement, la loi prévoit diverses règles protectrices, inspirées de pratiques mises en oeuvre dans le secteur non protégé où elles ont pu être rodées à titre purement contractuel dans le même esprit de sécurité juridique. Du point de vue de la seule VEFA, les protections essentielles sont les suivantes :

— la possibilité, mais non la nécessité de conclure un contrat de réservation ; cet avant contrat protège tant l’acquéreur profane que le promoteur vendeur ; dans l’intérêt du premier, il est assorti d’un droit de rétractation par application des articles L 271-1 et L 271-2 du code de la construction et de l’habitation, lequel peut se combiner s’il y a lieu avec le formalisme du démarchage à domicile et ce droit de rétractation doit être exercer soit dans un certain délai à compter du contrat de réservation soit, s’il n’y en a pas, dans le même délai suivant la première présentation par LRAR du projet d’acte de vente ;

— dans l’intérêt des deux parties, ce contrat échappe au régime des promesses synallagmatiques de vente et ne peut donner lieu à exécution forcée de la livraison ; il est conçu pour permettre aux parties de se dégager des engagements pris lorsque la réalisation de tout ou partie du programme, qui reste soumise à de multiples aléas, facteurs de retards, peut se révéler impossible ou économiquement inopportune entre le moment où le programme est élaboré et celui de sa réalisation effective, tant peuvent être évolutives les conditions économiques ou les règles locales d’I ;

— l’acquéreur est avisé que les sommes qu’il peut avoir à payer avant l’acte authentique ne sont pas à la libre disposition du vendeur.

2- protection fournie par le formalisme légal lors de la signature de l’acte authentique

Quand il existe, le contrat de réservation doit être visé et contrôlé par le notaire qui doit pouvoir s’assurer d’abord que le délai ou les délais de rétractation (quand ils se cumulent) ont été respectés et ensuite que l’acquéreur ne s’est pas vu réclamer des sommes au-delà de ce qui était possible de lui réclamer avant qu’il n’instrumente.

Le notaire chargé de la vente doit également contrôler la régularité de l’offre de prêt souscrite quand il est avisé que les acquéreurs ont recours à ce type de financement ; ce contrôle doit être exercé même si le prêt n’est pas reçu en la forme notariée ; ce prêt est lui-même soumis à des conditions de forme de l’offre bancaire qui ne peut être acceptée avant l’expiration d’un certain délai après qu’elle a été reçue ; ce contrôle du notaire est nécessaire puisqu’il doit recevoir préalablement à la vente les fonds exigibles à la signature de l’acte authentique (frais, droits d’enregistrement et paiement de la tranche de prix revenant au vendeur).

Il doit attirer aussi l’attention des acquéreurs sur la situation hypothécaire du bien que le vendeur a pu hypothéquer au profit de la banque qui le finance.

En application des articles L 271-1 et suivant du Code de la Construction et de l’Habitation, en l’absence de contrat de réservation, cet acte authentique ne peut pas être signé moins de 8 jours avant que l’acquéreur ait reçu le projet d’acte notarié complet. A défaut, il est non avenu.

Selon l’article R 261-30 du Code de la Construction et de l’Habitation, le projet d’acte authentique doit être notifié au réservant au moins un mois avant la signature de cet acte, la finalité étant que le réservant doit pouvoir apprécier les éventuelles différences entre l’objet du contrat de réservation et l’objet final de la vente soumis à sa signature (mais il peut être renoncé à ce délai à la différence du délai de rétractation).

Quand le contrat est reçu par procuration notariée, le notaire correspondant, qui est le seul à entrer en contact physique avec l’acquéreur, doit disposer de toutes les informations utiles concernant cet acte isolé pour lui.

3 – Protection fournie par l’échelonnement des paiements

La législation relative aux VEFA prévoit un paiement du prix par tranches en rapport avec l’avancement des travaux à venir ou en cours sur le chantier ; les pourcentages sont légalement ou conventionnellement définis et le déblocage des fonds intervient au vu d’une d’attestations délivrées par l’architecte en charge de la maîtrise d’exécution du programme, les attestations devant viser les seuils contractuels atteints ; corrélativement, se trouve ainsi déterminée la proportion du capital emprunté par l’acquéreur à verser via la comptabilité du notaire au moment de la signature de l’acte authentique après distractions des frais de la vente (rémunération du notaire, paiement des droits d’enregistrement ou de la T.V.A. immobilière, paiement des sûretés à recevoir par acte authentique).

Ce système est d’une grande sécurité, sauf collusion frauduleuse entre promoteur et architecte ; il dispense le notaire instrumenteur de toute vérification de l’évolution des travaux de construction, tâche qui n’entre pas dans sa compétence professionnelle.

En outre, en considération de la charge consistant à commercialiser dans la durée tout un programme pouvant concerner un très grand nombre de logements, que le programme soit phasé ou non, la prudence commande que l’officier ministériel mette en place un système de contrôle de la cohérence des attestations reçus de manière à pouvoir détecter, si aux mêmes périodes de temps et pour une tranche donnée présentée comme étant en cours d’exécution, ce sont les mêmes proportions d’avancement des travaux qui sont attestées dans tous les actes. Une incohérence peut être la conséquence d’une fraude détectable.

Il appartient au notaire, au moment où il reçoit l’acte, qui est le moment auquel s’apprécie l’existence d’une faute commise dans l’exercice de son ministère, d’être particulièrement vigilant en cas de rénovation lourde qui présente des risques spécifiques. Il lui appartient aussi de se méfier des opérations à bailleur unique quand il est fait état au travers des attestations d’un phasage en tranches, a priori peu compatible avec une opération de commercialisation de biens à louer à preneur commercial unique.

Quand le contrat est reçu par procuration notariée, le notaire correspondant, qui est le seul à entrer en contact physique avec l’acquéreur, doit disposer de toutes les informations utiles concernant cet acte isolé pour lui.

4- protection fournie par la garantie d’achèvement et le compte centralisateur ; la surveillance contractuelle prévue dans l’intérêt public en exécution des textes qui imposent la garantie extrinsèque

Pour pallier toute défaillance du promoteur vendeur, la loi a rendu obligatoire une garantie d’achèvement aux termes d’un corps de dispositions d’ordre public auxquelles il ne peut pas être juridiquement dérogé.

Ce contrat auquel l’acquéreur n’est pas partie, contient donc une stipulation pour autrui au bénéfice des acquéreurs que la loi entend protéger.

Le type de garantie d’achèvement accordé en l’espèce est une garantie extrinsèque ; elle est donnée par un établissement bancaire ou financier préalablement à la commercialisation sous forme de crédit ou de caution et cette garantie d’achèvement s’organise autour d’une série de mesures prudentielles permettant au garant de contrôler à tout moment et dès le début de la réalisation des travaux, ce que fait le promoteur garanti ; ces contrôles sont de deux types :

— avant la commercialisation, est prévue la fourniture par le promoteur au garant d’achèvement de toutes les données essentielles du projet, à savoir sa nature et son coût qui sont indispensables au garant d’achèvement pour mesurer l’étendue de la garantie à fournir, toutes données qui conditionnent bien évidemment le coût de la garantie qu’il accorde ; ces éléments sont portés dans un contrat qui est déposé chez le notaire chargé de recevoir les actes authentiques de vente du programme et les éléments essentiels de la garantie de parfait achèvement sont repris à l’intention de l’acquéreur que la loi entend protéger (compte centralisateurs, références d’assurances dommages-ouvrage et décennale) ;

— dans ce cadre, est prescrite l’ouverture d’un compte centralisateur qui doit recevoir tous les paiements devant parvenir au promoteur vendeur pour les besoins de la réalisation du programme ; ce compte ne doit être débité que pour les besoins de la réalisation du programme ;

— durant la commercialisation et la durée du chantier, est prévu un système de contrôle contractuel institué afin que le garant puisse, dans son intérêt comme dans l’intérêt des acquéreurs que la loi entend protéger, contrôler que les fonds débloqués sont correctement employés, ce contrôle s’organisant selon des modalités variables d’une part autour de la faculté donnée au garant de suivre à tout moment l’évolution du compte centralisateur et d’autre part sur des obligations faites au promoteur, expressément ou implicitement, de donner régulièrement des informations sur sa santé financière, de signaler toute interruption du chantier, et/ou de ne débiter le compte centralisateur que sur justification de ce que les fonds aboutissent bien dans le Q des constructeurs de la tranche de programme garantie, toutes ces mesures prudentielles visant à ce que le garant d’achèvement puisse intervenir dès qu’une anomalie est détectée pour éviter que les conséquences néfastes ne deviennent financièrement trop lourdes ;

— sont donc instituées des sûretés spéciales d’abord un nantissement grevant les fonds consignés prévus pour être affectés au paiement des travaux, ensuite une hypothèque sur le bien acquis par le promoteur qui prend de la valeur au fur et à mesure que le compte centralisateur se vide des fonds employés à payer les travaux.

Les références du compte sont mentionnées dans le contrat de garantie d’achèvement et sont expressément reprises dans le contrat de VEFA à l’intention de l’acquéreur emprunteur, afin que ce dernier puisse respecter son obligation de n’abonder que ce compte quand lui sont adressés des appels de fonds.

Le garant d’achèvement est donc informé dès avant le début des travaux :

— de la nature et du coût du programme qui fixe le volume maximal de son engagement et qui commande directement le coût du contrat que le promoteur doit payer pour disposer de cette garantie,

— de l’existence et la permanence du permis de construire et des autorisations administratives de travaux,

— de la nature exacte du projet à partir des marchés principaux (contrat de maîtrise d’oeuvre et CCP CCAG) se référant aux diverses normes professionnelles régissant les divers types de chantiers,

— de la souscription d’une assurance de garantie décennale (qui ne prend effet qu’après la Déclaration Réglementaire d’Ouverture de Chantier), dont les références sont généralement reprises dans l’exemplaire de la garantie remis en l’étude du notaire et sans laquelle ce dernier ne peut entamer la commercialisation, avant d’être ensuite reprises dans les contrats de VEFA,

— de la souscription d’une assurance dommages-ouvrage dont les références sont aussi reprises dans le contrat de garantie, avant d’être ensuite reprises dans les contrats de VEFA.

Ces informations sont portées à la connaissance des acquéreurs qui dispose ainsi de l’identité des assureurs auprès de qui faire les déclarations de sinistres si vient à se produire un dommage après livraison.

Contreparties du risque financier imposé par la loi dans l’intérêt des acquéreurs, ces dispositions contractuelles et légales obligent donc le garant d’achèvement à une surveillance de celui qu’il garantit, afin d’assurer, d’une manière ou d’une autre, l’affectation exclusive des fonds débloqués par les banques prêteuses au financement des travaux pour lesquels la garantie d’achèvement est donnée, à l’exclusion du financement de toute autre activité par quelque personne que ce soit ; les sûretés spéciales prises visent à assurer cette obligation sous la sanction d’un double paiement par le solvens, en venant compléter la responsabilité contractuelle ou quasi-délictuelle de ceux qui peuvent avoir eu une obligation de contrôle.

Quand aucun des contrôles contractuellement possibles n’est déclenché et qu’un promoteur vient ainsi à poursuivre sans être inquiété ses agissements dolosifs en utilisant les fonds portés au crédit du compte centralisateur à d’autres fins que les travaux convenus, les acquéreurs comme le garant d’achèvement se trouvent confrontés à un risque financier qui ne peut qu’augmenter durant tout le temps durant lequel il n’est pas détecté.

Se trouvent ainsi posées

— la caractérisation du manquement du garant d’achèvement à ses obligations contractuelles telles qu’elles sont organisées par le contrat de garantie qu’il passe avant le promoteur avant le début de réalisation de chaque programme ou tranche de programme

— la question du moment où il engage sa responsabilité, car, si la responsabilité est reconnue, il faut la situer par rapport à la date de passation de l’acte de l’acquéreur qui agit en responsabilité contre lui ;

— la question de la nature du préjudice qui lui est imputable, en ce qu’il contient de rechercher si sa faute a contribué à causer le préjudice subi par l’acquéreur ou si cette faute a seulement contribué à faire perdre à cet acquéreur une chance d’éviter ledit préjudice (préjudice direct ou perte de chance), étant rappelé que l’acquéreur reste tenu de rembourser son propre banquier en exécution du prêt qu’il a pu souscrire en pure perte (abandon du programme) ou qu’il se trouve contraint de rembourser dans des conditions plus onéreuses (livraison tardive avec des conditions de loyers moins avantageuses)

Il faut donc fixer le moment à compter duquel le garant d’achèvement a engagé sa responsabilité envers les acquéreurs de chaque programme.

5- la garantie apportée par l’intervention du notaire

Selon une jurisprudence constante, le notaire ne doit se prononcer ni sur l’opportunité économique, ni sur sa viabilité à terme, de l’opération immobilière envisagée dont il doit recevoir les actes authentique de vente en sa qualité d’officier ministériel pour recevoir un acte ; si le notaire le faisait, il sortirait de son rôle d’officier ministériel sans être mandaté pour le faire, sortirait de son rôle d’impartialité et engagerait sa responsabilité civile au profit des cocontractants à qui il prodiguerait un tel conseil au détriment d’une autre partie à l’acte. Cependant, il doit faire en sorte que les consentements de tous les cocontractants soient donnés en connaissance de cause dans des conditions permettant à ces cocontractant de mesurer la portée juridique de leurs engagements et les risques juridiques – mais non économiques – qui s’y attachent ; l’obligation de conseil et de mise en garde consiste à s’assurer que les droits et obligations réciproques légalement contractées par les parties répondent aux finalités révélées par leurs engagements, soient adaptés à leurs capacités et facultés respectives et soient assorties de stipulations propres à les rendre efficaces au regard de la situation juridique recherchée ; c’est à ce titre qu’il doit expliquer la portée et les limites des engagements pris, souvent complexes, ce qui revient à décrire les risques juridiques encourus.

Quand la vente se fait en vertu d’une procuration notariée, il appartient donc au notaire en charge de la commercialisation de donner à son confrère recevant la procuration, tous les éléments de nature à donner le conseil approprié qu’il aurait donné lui-même si la partie contractante avait comparu personnellement devant lui, avec la vision globale qui est la sienne ou qui doit être la sienne à ce moment-là, et avec la connaissance du suivi de l’opération de commercialisation en cours.

Au-delà du devoir de conseil à donner aux parties sur la portée de chacun des engagements pris, et donc sur leurs risques juridiques, le notaire instrumenteur chargé de la réception de tous les actes d’un programme immobilier vendu en VEFA, doit exercer son devoir de conseil en l’intégrant dans le déroulement chronologique des ventes, déroulement qui ne doit présenter aucune anomalie apparente, étant cependant précisé que le notaire n’a pas d’obligation directe de suivre le déroulement du chantier autrement que par la prise en compte des attestations d’architectes qui, au moment où il reçoit l’acte, détermine le montant des sommes à remettre au promoteur et à prélever sur la totalité des fonds transitant par sa comptabilité qui comprennent aussi sa rémunération et les droits à reverser au fisc qui taxe la mutation (T.V.A. ou droits d’enregistrement) ; dans son rôle d’officier ministériel, exclusif de toute relation contractuelle avec les parties, le notaire n’a pas de pouvoir de contrôle direct de la santé financière du promoteur, et n’a pas davantage à s’informer du bon déroulement de l’opération immobilière.

En cas de doute ou d’anomalie constitutifs d’un signal d’alerte permettant de douter du bon déroulement du programme, notamment si apparaissent des signes pouvant trahir la défaillance financière du promoteur, le notaire doit d’abord s’informer auprès de tous interlocuteurs susceptibles de lever les doutes ; en effet, les alertes et les doutes qui peuvent surgir concernant la solvabilité ou l’honnêteté d’un promoteur immobilier, peuvent laisser soupçonner, non seulement un risque économique anormal, mais encore un risque d’inefficacité des actes restant à recevoir, en ce que la contrepartie promise à l’acquéreur devient alors incertaine , et en ce que la résolution ou l’annulation de ces actes à recevoir deviennent alors des hypothèses envisageables contre lesquels il importe de se prémunir.

L’obligation d’alerte et d’information pèse d’autant plus fort sur le notaire instrumenteur, professionnel du droit, que la loi, comme la pratique contractuelle des contrats habituellement usités en la matière, instruites par des décennies de mauvaises expériences, ont mis en place des règles protectrices de l’acquéreur dont il convient de vérifier, à l’occasion de la commercialisation de chaque programme immobilier, qu’elles ne sont pas en réalité contournées, et dont il convient de s’assurer que chacune a bien joué son rôle protecteur au moment où elle devait être appliquée.

A l’égard de chaque acquéreur, le notaire engage sa responsabilité au moment où il reçoit l’acte et il faut donc apprécier si, à ce moment, il devait ou non prendre l’initiative d’une vérification de la situation financière du promoteur vendeur, au besoin sans alerter inutilement l’acquéreur, en vue de pouvoir interrompre la commercialisation en raison des indices défavorables qui avaient pu être portés à sa connaissance.

Dans cette obligation de contrôle, le moment où le notaire a l’obligation d’intervenir ne coïncide donc pas nécessairement avec le moment où le garant peut engager sa propre responsabilité pour ne pas exercer ses propres pouvoirs de contrôle.

En cas de situation anormale, l’agencement des obligations contractuelles du garants d’achèvement et des obligations légales du notaire, font que le premier est, après début des travaux d’un programme l’interlocuteur privilégié auquel le notaire, en cas de doute, doit s’adresser puisque cet interlocuteur est investi d’un large pouvoir de contrôle du promoteur durant toute la durée du chantier.

Il faut donc fixer le moment à partir duquel le notaire a pu se trouver en situation de devoir donner l’alerte en distinguant la situation des acquéreurs antérieurs à celle des acquéreurs postérieurs comme l’a fait la cour de RIOM dans l’affaire de LAPRUGNE. C’est la raison pour laquelle les solutions adoptées par cette cour d’appel doivent être débattues dans le présent dossier.

6 – le compte centralisateur, la banque prêteuse, l’acquéreur et les déblocages de fonds après l’acquisition

Chaque acquéreur doit soit rembourser un capital emprunté en pure perte (abandon des chantiers), soit à des conditions plus onéreuses (chantiers livrés avec retard et dans des conditions de loyers moins favorables). Les fautes en débat ne concernent ici que les fonds débloqués après la réception de la vente par le notaire et qui n’ont pas été employés au financement des travaux pour avoir été versés sur un autre compte que le compte centralisateur ; la question posée est celle du contrôle que doit exercer la banque prêteuse sur la destination des fonds débloqués, ce qui commande de rechercher d’abord si ont été portées à sa connaissance les conditions dans laquelle la garantie d’achèvement est organisée et ensuite d’analyser les obligations qui en découlent pour elle-même.

L’acquéreur emprunteur contracte l’obligation de ne verser les fonds que sur ce compte obligatoirement mentionné avec ses références dans son contrat de VEFA ; la question étant de savoir quelle doit être l’attitude de sa banque, quand elle a été partie à l’acte notariée et qu’elle reçoit sinon de son client, mais de son mandataire – qui peut être le promoteur lui-même – un ordre de virement lui demandant de débiter ce compte pour une cause dont elle peut vérifier qu’elle est étrangère à la réalisation de l’opération immobilière.

L’acquéreur peut commettre une faute s’il accepte en connaissance de cause de verser des fonds sur un autre compte, car les dispositions propres au nantissement des sommes au profit du garant d’achèvement pour la réalisation des travaux, comme l’hypothèque sur l’immeuble censé s’accroître de la valeur apportée par les travaux au fur et à mesure de leur exécution, l’exposent à payer deux fois quand le premier paiement est intervenu en méconnaissance de la garantie.

Toutefois si l’acquéreur vient à donner mandat au promoteur d’appeler lui-même ces fonds, c’est le promoteur qui commet une faute en s’affranchissant des règles qui lui imposent son mandat, sans que la banque prêteuse soit pour autant dégagée de sa responsabilité.

Le compte centralisateur prévoyant affectation précise des fonds qui sont portés à son crédit, il faut rechercher si, dans ces deux hypothèses, la banque prêteuse qui libère les fonds, commet ou non une faute du même ordre en exécutant l’ordre de l’acquéreur ou l’ordre de son mandant. En effet, quand le prêt de la banque prêteuse est repris dans l’acte authentique d’acquisition, – généralement pour prise de garantie réelle -, cette banque, qui a signé le contrat, a connaissance des références précises du compte centralisateur et sait par conséquent que le déblocage des fonds doit nécessairement être porté au crédit de ce compte.

Si elle ne prend pas de garantie réelle, il faut définir son pouvoir de contrôle sur une demande de mouvement de fonds destiné à un autre compte que le compte centralisateur dont elle connaît la référence

Si elle s’est fait consentir un droit réel sur la propriété de l’acquéreur, il faut discuter de sa responsabilité en constatant alors qu’elle a le même intérêt que l’acquéreur à s’assurer que le bien prend effectivement la valeur attendue par la réalisation effective des travaux de construction. La question est donc alors de savoir si la banque prêteuse, quand elle est partie à l’acte et se trouve en position de devoir défendre une sûreté réelle, ne partage pas la faute de l’emprunteur en débloquant des fonds à destination d’un autre compte que le compte centralisateur.

B) les risques inhérents à toute défiscalisation ; les limites du devoir de conseil du notaire

Les acquéreurs en VEFA font l’objet d’un démarchage commercial pour la vente de droits immobiliers en défiscalisation ; ils signent la plupart du temps un contrat de réservation visant un projet déjà étudié, et signent dès la conclusion de la réservation divers mandats afin que soient conclus tous les actes nécessaires à la location du bien qu’ils ont acquis :

— mandat donné au promoteur de recevoir la livraison du bien,

— mandat pour conclure le bail d’habitation ou un bail commercial,

— mandat de gestion de ce bail (dans une opération de défiscalisation pour l’habitation, il y a autant de preneurs différents que d’appartements mais dans une résidence de tourisme, il n’y a qu’un preneur unique commerçant assujetti à la T.V.A.).

Ils s’assurent aussi en général contre certains risques propres liés à ce type de contrat car l’équilibre de l’opération relève de la permanence de la location et seule la perception de revenus locatifs permet de maintenir l’avantage fiscal tout en équilibrant l’opération d’investissement ; ces contrats d’assurance sont proposés dès le stade de la réservation par le promoteur immobilier – ce qui accroît le coût global – et ne relèvent pas de la mission d’authentification du notaire ; sont ainsi prévues :

— des garanties contractuelles pour compenser des retards de livraison sans retarder le moment où les acquéreurs peuvent commencer à défiscaliser, l’indemnité étant alors égales à des loyers et elle est versée entre le moment prévu pour la livraison et la date effective de livraison, la durée de cette assurance étant souvent de 6 mois à un an, l’intention étant de permettre l’obtention des avantages fiscaux pendant l’année de la garantie de parfait sans nécessairement que la livraison soit faite à la date prévue mais ces garanties atteignent vite leur limites de temps ;

— des assurances locatives pour garantir les périodes d’absence temporaire de locataires, mais de telles assurances groupe ne sont pas conclues pour la durée des prêts et les conditions peuvent varier rapidement et on observe une très forte réduction des garanties depuis le retournement du marché de 2008 ;

— voire des assurances contre la perte de valeur du bien, mais elles sont généralement assorties de conditions tenant à la santé de l’emprunteur-acquéreur de sorte qu’elles ne jouent que très rarement en pratique.

Dans une opération de défiscalisation, le montant des loyers est généralement plafonné pour pouvoir bénéficier des avantages fiscaux ; il ne couvre pas la totalité de l’échéance des prêts à rembourser quand l’emprunt porte sur la totalité du capital nécessaire à l’acquisition ; l’équilibre financier n’est atteint que grâce aux avantages fiscaux (présentés comme un gain par les commercialisateurs). A la sortie de la période d’avantages fiscaux, le propriétaire se trouve donc soumis à un déficit jusqu’à la fin du prêt ; dans la conjoncture haussière d’avant 2008, il comptait sur une revente à un prix supérieur à celui de l’acquisition, ce qui lui aurait permis de faire un gain et cette possibilité lui était présentée comme le moyen d’échapper à cet inconvénient ; le retournement de conjoncture de 2008 a changé la donne en démontrant que les extrapolations à la hausse procédaient d’une illusion commune. C’est donc bien le contexte de conjoncture haussière dont personne ne croyait à la fin, mise en avant par les vendeurs, qui a convaincu les acquéreurs, dont le consentement a par ailleurs pu être emporté par des promesses de rachat futur, parallèlement faites par le promoteur pour un prix garanti, sans égard au risque d’un retournement du marché, et, dont on peut être certain qu’elle n’a pas été portée à la connaissance du notaire qui a la charge de recevoir les actes authentiques (cf affaire de LAPRUGNE).

Ces contrats ne s’analysent donc pas comme conférant une garantie ni de l’avantage fiscal recherché, lequel dépend de la rentrée effective des loyers, ni de revenus locatifs pérennes. Le contrat ne comporte pas davantage de garantie portant sur le maintien de la valeur d’acquisition du bien, a fortiori une garantie d’accroissement de cette valeur.

Il appartient donc au notaire instrumenteur, comme à tous ses confrères qui reçoivent procuration et qui sont souvent les seuls à voir les clients, d’aviser les acquéreurs de l’existence de ces risques juridiques ; une telle mise en garde d’ordre juridique sur la portée et les limites des engagements reste étrangère à une appréciation que porterait l’officier ministériel sur l’opportunité économique de l’opération. Comme l’avant contrat de réservation n’est pas une promesse synallagmatique de vente, le conseil doit être donné au moment de la passation de l’acte authentique.

Ce n’est cependant pas ce risque qui s’est réalisé pour le programme de construction litigieux puisque l’exploitation n’a pas commencé, mais les perspectives d’un accroissement facile du Q restent le moteur des acquisitions et de la perte de vigilance des acquéreurs ; elle participe forcement au “risque global” “encouru ; c’est pourquoi le contentieux est si fréquent, ce qui révèle l’existence d’un marché faisant socialement problème.

C) les risques accrus dans un investissement réalisé en loi Demessine (résidences hôtelières ou de tourisme) et les limites du conseil à donner

La défiscalisation des résidences de tourisme s’appuie sur des avantages fiscaux attachés à une exploitation commerciale confiée à un preneur unique qui conclut un bail commercial avec la société de promotion, bail qui est ensuite subdivisé et cédé à autant de bailleurs qu’il y a d’acquéreurs de lots achetant des droits de propriété.

L’acquéreur-investisseur devient alors tributaire dans le long terme que constitue la durée de son emprunt, de la réussite durable d’une activité touristique ou commercial unique ; l’assujettissement à la T.V.A. de l’activité exploitée génère un risque juridique supplémentaire qui doit être rappelé par le notaire. En effet l’assujettissement de l’exploitant locataire à la T.V.A., permet au bailleur non commerçant d’opter pour la perception de loyers soumis à la T.V.A. qui est alors récupérée sur le preneur et le consommateur final ; la T.V.A. immobilière payée lors de l’acquisition en VEFA est aussi récupérable mais seulement tant que dure l’exploitation commerciale ou que l’acquéreur ne revend pas son lot ; dans le cas contraire, en cas de cession d’une activité commerciale sur le site, le propriétaire sort du régime de production de services et se trouve traité comme un consommateur final ayant acquis un immeuble pour lui-même, ce qui peut l’obliger à payer au fisc ce que l’on appelle une “régularisation de T.V.A.”, à raison de 1/20e par année restant à courir jusqu’à la 20e année suivant la vente.

L’opération est un pari économique très risqué et ses inconvénients ont conduit le législateur à en tirer les conséquences ; par une disposition propre aux résidences de tourisme, l’article L 145-7-1 du code de commerce aujourd’hui supprimé les possibilités de résiliation triennales pendant les 9 premières années du bail, en considération du fait que les preneurs pouvaient avoir intérêts à se libérer rapidement de loyers intrinsèquement surévalués à raison de la nécessité de devoir assurer le remboursement d’un prix d’achat de l’immeuble grevée par la commission perçue par le commercialisateur (au moins 10% en général) ; cette disposition légale ne protège cependant pas contre les conséquences d’une procédure collective (sauvegarde ou redressement judiciaire suivie de reprise).

Les risques juridiques de la volatilité de l’activité commerciale ont été pris en compte dans les actes qui comportent un avertissement spécifique et l’on doit donc supposer que, malgré la complexité du régime, ces risques ont été mesurés par les acquéreurs, qui ont été reçus en personne par un officier ministériel.

D) les risques particuliers en cas de rénovation

En cas de rénovation lourde, les règles de la VEFA s’appliquent, notamment quant au paiement du prix, qui doit être échelonné.

Mais ce type de chantier est exposé à une fraude facile qui peut s’instaurer quand survient une connivence entre le vendeur et l’architecte, et que ce dernier délivre des attestations de complaisance laissant croire à la réalisation effective d’importants travaux ; une telle attestation mensongère permet ainsi la libération d’importantes sommes sans que pour autant ne soient réellement entrepris ces travaux significatifs à la hauteur des sommes débloquées. En effet, dans le cas d’une rénovation lourde, attester que l’immeuble est hors d’eau ou hors d’air afin d’obtenir d’importantes remises de fonds, ne suffit pas et ne prouve strictement rien, car, par hypothèse, l’immeuble peut parfaitement se trouver hors d’eau et hors air avant toute entame de travaux ; une attestation sommaire ne décrit pas une réalité fausse de la situation immeuble mais constitue une fausse déclaration sur l’existence de travaux réellement entrepris ; cela peut tromper, comme l’expérience juridictionnelle le prouve, non seulement l’acquéreur mais aussi le notaire instrumenteur en charge de la commercialisation du programme, en ce que d’une attestation sommairement rédigée ou rédigée de manière sibylline, peut se déduire, malheureusement un peu vite, que la situation hors d’eau ou hors air évoquée dans cet écrit, est celle d’un immeuble sur lequel ont été réalisé des travaux en rapport avec le montant des marchés signés et des fonds libérés, alors qu’en réalité, il n’en a rien été et que l’investissement du promoteur vendeur a pu se limiter à l’acquisition de l’immeuble, la rédaction et la publication d’un règlement de copropriété et, au mieux au financement de quelques menus travaux cosmétiques, d’un coût négligeable, uniquement destinés à détenir quelques factures dans le seul but d’endormir la vigilance des cocontractants et des multiples intervenants dans cette opération complexe.

Une partie du programme de A 2002 était une rénovation lourde.

E) Le préjudice en cas d’anéantissement des contrats ; distinction entre préjudice et restitution.

Résolution et annulation doivent être distinguées dans certains de leurs effets même si, dans les deux hypothèses, il y a anéantissement de la vente, et anéantissement de même nature du contrat de prêt qui lui est lié puisque l’article L 312-12 du code de la consommation s’applique au bénéfice des acquéreurs. Les deux contrats subissent le même sort.

L’annulation du contrat de VEFA emporte de plein droit l’annulation du contrat de prêt à la date à laquelle l’annulation est prononcée.

La résolution du contrat de VEFA pour absence de livraison emporte de plein droit résiliation du contrat de prêt à la date à laquelle elle intervient, à savoir

— soit de droit à la date de la liquidation judiciaire du promoteur au plus tard, ou à la rigueur au terme de la poursuite d’activité autorisée dans le cadre de cette liquidation ;

— soit une date antérieure à laquelle la résolution doit alors être prononcée par décision de justice.

Dans les deux cas, l’acquéreur ne veut pas de la propriété qui est restituée au vendeur promoteur lequel doit restituer le prix, qui n’est pas juridiquement un préjudice.

L’indemnisation des préjudices est à distinguer des obligations de restitution à opérer du chef de l’anéantissement des contrats. Le préjudice à indemniser n’est pas le même selon qu’il y a annulation ou résolution.

1) la garantie de la restitution de la part de prix effectivement payée (qui n’est pas un préjudice)

La restitution du prix de vente ne constitue pas un préjudice mais constitue une créance due par le vendeur en contrepartie du droit de propriété qu’il récupère ; cependant, il appartiendra aux personnes actionnées dont la responsabilité serait retenue à raison d’une faute commise par elles de garantir cette restitution du prix puisque le cocontractant débiteur de cette restitution financière est insolvable, pour avoir dilapidé la part de prix reçue, ce qui est l’hypothèse de l’espèce.

Il appartiendra ensuite à l’acquéreur à qui le prix est restitué de déléguer à sa banque les sommes qu’il lui doit recevoir d’où l’importance d’avoir un décompte précis de ce qui est dû à la banque prêteuse avant toute question de recherche de responsabilité pouvant la concerner.

Selon le coresponsable recherché et le moment où on lui impute sa faute, qui

— pour le garant d’achèvement peut se situer avant la vente comme après la vente,

— pour le notaire qui se situe notamment au moment où il reçoit l’acte

— pour la banque prêteuse après la vente pour les paiements qui ne sont pas crédités sur le compte centralisateur

— pour le commercialisateur, au moment du démarchage et de la signature du contrat de réservation, la question se pose de savoir si cette faute fait du responsable visé le cogarant de la restitution de la totalité de ce prix ou seulement d’une partie.

2) le dénouement du prêt bancaire – la rémunération contractuelle due à la banque en cas de résiliation du prêt est un préjudice à réclamer aux responsables

Il importe de dénouer les comptes de résiliation du prêt indépendamment de toute question de responsabilité.

a) le compte à faire à la date de résiliation

Par l’effet de cette liquidation judiciaire de la société de promotion, les marchés d’entreprise ont été résiliés de plein droit depuis le prononcé de cette liquidation judiciaire qui a fait cesser l’activité de la société venderesse, la rendant inapte à remplir ses obligations. La résiliation peut cependant être fixée judiciairement à une date antérieure si cela est demandé et prouvé.

En droit, la résiliation du prêt bancaire intervient de manière concomitante par application de l’article L 312-12 du code de la consommation, les emprunteurs ont ainsi l’obligation de devoir rembourser le capital restant dû sauf à tenir compte de la continuation consensuelle convenue et des suspensions amiables ou judiciaires accordées dans l’attente de l’issue du présent procès. En pratique en effet, dans l’attente d’une éventuelle reprise du chantier par le garant d’achèvement ou, à défaut dans l’attente de l’issue des actions judiciaires, le prêt est poursuivi à titre provisoire sauf à être suspendu à l’amiable ou judiciairement dans l’attente de la décision à intervenir sur les responsabilités encourues.

Le coût de l’emprunt souscrit à savoir

— les intérêts contractuels payés ou devant être payés réclamés par la banque prêteuse jusqu’à la résiliation anticipée du prêt (il faut reconstituer faire un arrêté de compte précis à la date d’anéantissement des contrats et imputer correctement tous paiements postérieurs)

— les frais de dossier payés à la banque,

— le coût des sûretés consenties à la banque,

— l’indemnité contractuelle de résiliation à laquelle la banque aurait pu prétendre à la date d’anéantissement du contrat, comme s’il y avait eu résiliation anticipée à cette date, et recalculée sur la part du capital effectivement débloqué.

Sauf cas d’annulation des contrats, ces sommes restent acquises à la banque ; la banque est en droit récupérer le capital restant dû ainsi que sa rémunération du crédit car elle a droit à ses rémunérations contractuelles.

b) comment prendre en compte les paiements postérieurs

Il faut ensuite tenir compte de tous les paiements effectués après la date de résiliation et les imputer correctement en tenant compte

— de ce que les sommes dues à banque à la date de la résiliation selon le calcul susdit produisent des intérêts conventionnels (sauf cas d’annulation)

— de ce que les sommes payées sont imputées d’abord sur les intérêts dus sauf décision judiciaire contraire qui serait venue prescrire une imputation prioritaire sur le capital.

3) le préjudice subi

Toutes les personnes dont la responsabilité est recherchée, sont actionnées pour être déclarées coauteurs du préjudice causé avec le cocontractant vendeur qui n’a pas rempli son obligation de livraison.

Quand l’acquéreur poursuit l’anéantissement du contrat de VEFA, ou lorsqu’il l’a déjà obtenue, ou lorsqu’elle résulte de plein droit de la liquidation de la société de promotion sans que la garantie d’achèvement soit intervenue pour achever le programme immobilier, l’acquéreur qui a vocation à être remis dans la situation antérieure au contrat anéanti, a droit, de manière certaine, au paiement à titre de dommages-intérêts par son contractant vendeur (et en sus du prix à restituer)

— au remboursement des frais de vente,

— au remboursement du coût du crédit résolu ou annulé qui comprend le montant de ce qu’il doit restituer à sa banque selon un compte à arrêter à une date qu’il faut déterminer et en tenant compte des périodes de suspension des paiements,

— à la réparation de tous préjudices matériels immatériels et moraux se rattachant à l’anéantissement du contrat et aux tracas engendrés par cette situation, notamment l’impossibilité d’avoir pu placer les fonds apportés dans l’opération et non financés par le crédit.

Il faut donc calculer

1- la créance de remboursement du prêt par anticipation en se plaçant à la date de l’anéantissement de la VEFA qui aussi celle de la résiliation du prêt

2- évaluer son montant actuel en tenant compte des intérêts produits depuis cette date

3- imputer les paiements postérieurs d’abord sur les intérêts, s’il y a lieu sur le capital, sauf décision judiciaire contraire à cette règle d’imputation

S’agissant des autres préjudices à indemniser, les principes semblent être dégagés notamment par trois arrêts de la 1re chambre civile de la cour de cassation rendu le 02 juillet 2014 (numéros 835 836 et 838) qui se prononcent sur le lien de causalité pouvant exister entre la faute du notaire et les préjudices dont la réparation est demandée. Selon cette jurisprudence, quand il y a anéantissement du contrat, que ce soit par résiliation ou annulation, la fonction de la responsabilité civile est de replacer la victime, aux dépens du responsable, dans la situation où elle se serait trouvée si l’acte dommageable ne s’était pas produit ; la cour de cassation semble en tirer la conclusion, à la suite de l’anéantissement d’une VEFA, que l’acquéreur ne peut être indemnisé au titre du manque à gagner et d’une plus-value potentielle alors que, si le notaire avait satisfait à son devoir de conseil, cet acquéreur n’aurait pas donné suite à la vente, si ce n’est à ses risques, pour en déduire que le préjudice allégué est dépourvu de lien de causalité avec les manquements relevés à l’encontre de l’officier ministériel.

4) le préjudice subi en raison des débits du compte centralisateur après la vente et lien de causalité

Les acquéreurs et les banques prêteuses – ces dernières quand elles sont parties à la vente – se voient reprocher d’avoir, après la vente, débloqué ou remis à la S.C.I. des fonds qui auraient dû être versés sur le compte centralisateur et non pas remis au promoteur qui ne remplissait pas son obligation de construire mais utilisaient les fonds à d’autres fins.

Ces mouvements de fonds sont postérieurs à la vente dont il est soutenu qu’elle aurait pu être évitée de sorte qu’au moment où ces mouvements ont eu lieu, la question est posée de savoir si le préjudice qui en découle ne se limiterait pas à la garantie du remboursement de la seule partie du prix qui a ainsi été financée, les autres chefs de préjudice ayant déjà été générés au moment de la vente.

F) Le préjudice en cas de résiliation de la VEFA suivie de l’achèvement du programme par le garant d’achèvement

Dans ce cas, la propriété n’est pas restituée, le contrat de VEFA n’est pas résolu, mais simplement résilié en ce que ce ne sont que les obligations de construire qui sont inexécutables. Ces obligations sont exécutées par le garant d’achèvement qui finit les travaux, au besoin en réparant les défauts imputables aux entreprises (sauf ses recours contre elles) et qui livre ensuite.

En pratique, l’article L 312-12 du code de la consommation ne s’applique donc pas et le contrat de prêt se poursuit d’accord entre les parties à ce contrat, mais dans des conditions de temps qui sont modifiées ; s’il n’est pas renégocié, le retard causé par l’arrêt du chantier puis sa reprise ultérieure et tardive, donnent lieu à la perception d’intérêts contractuels supplémentaires par la banque qui sont autant de chefs de préjudices pour l’acquéreur, alors en droit d’en réclamer indemnisation aux coresponsables.

Le préjudice en débat comprend alors

— les loyers non perçus pendant la période durant laquelle ils auraient dû l’être,

— les charges supplémentaires de paiement d’intérêts durant la même période de temps car les intérêts intercalaires peuvent être perçus sans amortissement pendant une durée supérieure à celle qui était contractuellement prévue ;

S’agissant des modifications défavorables des loyers (loyers plus bas que prévu) et du régime de défiscalisation qui en découle, l’appréciation du poste de préjudice suppose

— la preuve d’un lien de causalité entre le préjudice et les fautes commises ce qui renvoie à la question de l’applicabilité de la jurisprudence susdite

— la réponse à la question de savoir si le préjudice réparable est la perte elle-même ou seulement la perte de chance de l’éviter

Pour apprécier le préjudice, il faut connaître le montant des déductions fiscales qui auraient été accordées sur la base du loyer d’origine et celles dont ont pu en réalité bénéficier les acquéreurs après l’achèvement de l’immeuble par un tiers, à compter d’une date plus tardive. Cela suppose donc que chaque acquéreur produise les documents fiscaux faisant apparaître le montant de la déduction obtenue et qu’il justifie du le permettant de comparer les déductions obtenues avec celles les déductions qu’il aurait pu obtenir si le chantier s’était déroulé normalement et si le bien avait été livré à la date contractuellement prévue.

Est souvent réclamée une indemnité pour perte pour dévalorisation du bien acquis.

G) la responsabilité des commercialisateurs

Ils interviennent en exécution du mandat de commercialisation que leur donne le groupe de promotion pour commercialiser chaque programme, moyennant une commission qui renchérit le prix de l’immeuble (12% semble-t-il perçu par AA). Le commercialisateur peut placer les contrats de réservation avant comme après le début des travaux du programme.

Il faut donc caractériser sa faute, nécessairement antérieure à la passation de l’acte authentique, en la situant par rapport à une situation anormale qu’il pourrait avoir connue à la date du contrat de commercialisation souscrit par celui qui l’actionne en responsabilité.

La responsabilité des commercialisateurs doit aussi être examinée en vérifiant s’ils ont ou non réussi à emporter le consentement des acquéreurs en leur faisant signer des promesses de vente à exécuter à l’issue de la période de bénéfice des avantages fiscaux. Il résulte des pièces et conclusions que de telles promesses ont été signées, qu’elles n’ont pas été portées à la connaissance du notaire et qu’elles ont pu, par leur apparence de sérieux, convaincre certains acquéreurs.

Se pose aussi la question de savoir si les promesses ainsi faites ont généré la perte subie elle-même ou seulement une perte de chance de l’éviter.

NÉCESSITE D’APPRÉCIER LES RESPONSABILITES DE CHAQUE PROGRAMME EN CONSIDÉRATION DES AUTRES

A) les différents programmes

La S.C.I. A 2002 […], ci-après S.C.I. A 2002, la S.C.I. RÉSIDENCE L’AE AF S et la S.C.I. RÉSIDENCE DU GRAND HOTEL sont des filiales du groupe AA qui s’est lancé dans la réalisation de divers programmes immobiliers implantés dans le département de L’ARIEGE, qui donnent tous lieux à des difficultés judiciaires ayant eu un volet pénal. Le tribunal de grande instance de TOULOUSE est ainsi saisi des difficultés rencontrées par

— le programme de la RESIDENCE DU LAC au S T

— le programme AC AD B U V à A

— le programme LE C à A

— le programme MERENS I et MERENS II à A

— le programme BETHMALE à A

— le programme du GRAND HOTEL à AULUS

Toutes ces S.C.I. ont ainsi proposé, par l’intermédiaire de commercialisateurs, à des personnes privées souhaitant investir, d’acheter en VEFA des locaux ayant vocation à être loués à un preneur unique chargé d’y exploiter le fonds de commerce d’une résidence touristique, assujettie à la T.V.A., sous un régime de défiscalisation permettant d’être remboursé sous forme de déduction d’impôts d’une partie du prix d’achat.

Tous ces programmes ont connu de graves difficultés, certains d’entre eux étant abandonnés, par suite de la liquidation judiciaire de la société de promotion S.C.I. A 2002 et du S T prononcées en 2010 par le tribunal de grande instance de Foix. La S.C.I. LE GRAND HOTEL à […] a aussi cessé son activité en 2008 en raison de difficultés financières et elle a été placée en liquidation judiciaire.

Il conviendrait de vérifier si le tribunal de commerce d’EVRY a prononcé la confusion des patrimoines entre les S.C.I. et les sociétés du groupe AA.

Certains programmes, suffisamment avancés, ont pu être terminés en exécution de la convention de garantie d’achèvement et ils ont été livrés, ce qui est le cas des programmes du S T, du bâtiment LE C. Les bâtiments AC AD, B et U V ont été achevés dans des délais qui semblent normaux, mais si les appartements ont été vendus et livrés, un certain nombre de parkings vendus avec ces appartements n’ont pas été livrés pour être situés sous l’immeuble voisin le C qui n’a pu être achevé qu’en 2011 sur le financement du garant d’achèvement.

Les autres programmes ou parties de programmes ont été abandonnés alors que d’importantes sommes d’argent avaient été payées pour des montants sans rapport avec leur niveau de réalisation, l’argent étant parti ailleurs ; le tribunal doit ainsi se prononcer sur les demandes d’indemnisation formés par les acquéreurs de droits immobiliers qui ne sortiront jamais de terre parce que la garantie de parfait achèvement n’a pas été appelée et parce que le permis de construire est périmé, les constructions édifiées étant vouées à la démolition

Sont ainsi concernés par l’abandon total des constructions

— le programme MERENS I et MERENS II à A

— le programme BETHMALE à A

— une partie du programme d’AULUS

B) les procédures qui ont donné lieu à jugements sur le fond

1) le programme du GRAND HOTEL D'[…]

Le tribunal a déjà statué sur une série de procédures concernant le chantier abandonné du GRAND HOTEL D’AULUS ; les demandes étaient exclusivement dirigées contre la CEP à qui il était reproché de ne pas avoir exécuté la garantie d’achèvement appelée. Le manquement reproché à la CEP était donc d’une nature totalement étrangère à la faute qui lui est reproché dans les dossiers à juger concernant le S T et A.

2) le programme du CORDAT à LAPRUGNE (03) jugé à CUSSET et RIOM et partiellement jugé à TOULOUSE

Le groupe AA a également entrepris un programme immobilier de rénovation lourde à LAPRUGNE (03), qui n’a pas davantage été mené à terme et qui a été définitivement abandonné après péremption du permis de construire ; les actes d’acquisition ont été soit annulés, soit résolus par le tribunal de CUSSET par des décisions rendues peu après la liquidation judiciaire de la société de promotion.

Ces décisions ayant anéanti les contrats de VEFA ont été suivies d’actions en responsabilité contre la S.C.P. D AG D dirigées par les acquéreurs qui ont renoncé à acquérir ; le tribunal de CUSSET a certes été saisi de la plupart de ces actions mais le tribunal de grande instance de TOULOUSE a été saisi de 6 procédures qui ont donné lieu à un jugement commun rendu le 30 mars 2017.

La CEP, garant d’achèvement, a été actionnée à titre récursoire par le notaire, mais, pour ce qui est des jugements rendus à TOULOUSE et à la demande expresse des 6 acquéreurs demandeurs qui n’entendaient agir qu’à l’encontre du notaire, l’action récursoire contre le garant d’achèvement – qui n’est pas la CEP mais la SOCFIM – a été disjointe ; le tribunal devra donc encore statuer ultérieurement sur ce recours du notaire contre le garant d’achèvement (sur des moyens de même nature que ceux développés dans les présents dossiers concernant le S T et A 2002).

Dans le cas des procédures concernant le programme de LAPRUGNE, toutes les juridictions (CUSSET d’abord, RIOM sur appel et enfin TOULOUSE dans le suivi des décisions des décisions auvergnates) ont retenu la responsabilité en estimant qu’à compter d’une certaine date de l’automne 2006, le notaire avait reçu des actes de résiliations amiables, ce qui constituait des faits alarmants, qui auraient mérité de sa part le lancement d’une alerte avec interruption corrélative de la commercialisation ; de la sorte, le dommage ne serait pas resté dissimulé et ne se serait pas aggravé au préjudice de ceux qui s’étaient déjà engagés dans des emprunts souscrits en pure perte ; la responsabilité du notaire n’a pas été retenue pour les actes reçus antérieurement à cette date (1 seule des 6 demandes portées devant le tribunal de TOULOUSE ) mais elle a été retenue pour les actes reçus postérieurement (5 des 6 demandes portées devant le tribunal de TOULOUSE).

La décision rendue le 30 mars 2017 par la présente juridiction doit par conséquent ainsi être mise dans le débat de manière à ce que, nonobstant la particularité de chaque espèce et de chaque programme, l’aspect général de la situation puisse être débattu en considération de cette jurisprudence. Au surplus sont concernés le même notaire, le même groupe de promotion et les mêmes architectes. En revanche, les conditions contractuelles de la garantie d’achèvement ne sont pas identiques, mêmes si, dans tous les cas, elles organisent un contrôle du promoteur par le garant.

La simultanéité des programmes immobiliers dans le temps, commande aussi que dans chaque dossier, soient versés toutes les expertises diligentées dans les procédures “souches” 09/2150 (S) 09/2183 (C) 09/2656 (B AC AD U V), 09/2657 (MERENS I et II) et 09/2658 (BETHMALE).

En effet, la chronologie, la présence des mêmes acteurs, la situation de la plupart des programmes à A, l’identité de compte centralisateur entre les deux programmes inachevés de A, et l’existence pour les programmes achevés avec retard de comptes centralisateurs distincts et de ventes portant sur des lots partagés entre deux programmes, milite pour que chaque acquéreur ait connaissance des conclusions auxquelles les experts ont abouti dans les différents programmes réalisés.

C) Chronologie des programmes ariègeois

Les opérations de construction entreprises par la S.C.I. A 2002 ont été phasées dans le temps et se sont déroulées parallèlement à celles menées au S T

1- le programme AC AD B U V à A a été commercialisé entre le 02 mai 2005 (vente BARTHE) et le 27 juin 2006 (vente ROBIN), soit en l’espace d’un an, à l’exception d’une ultime vente intervenue au tout début de l’année 2007 (vente MARTINEZ) selon la chronologie des actes reçus par Me D.

Les appartements ont été livrés avant la défaillance financière de S.C.I. A 2002 dans des délais qui semblent avoir été normaux ou du moins acceptables et acceptés.

Mais les parkings n’ont pas tous été livrés, car certains se trouvaient dans l’immeuble voisin LE C, qui a connu un retard de livraison jusqu’en 2011.

L’expertise a démontré qu’une somme de 2.115.000 euros, payée par les acquéreurs a pu être utilisée par des sociétés autres que les constructeurs qui étaient a priori les seuls à pouvoir être les destinataires des sommes débitées du compte centralisateur.

2- le programme LE C à A a été commercialisé entre le 26 octobre 2005 (vente WANG) et le 26 septembre 2006 (vente FERRON) selon la chronologie des actes reçus par Me D.

Il n’a pas été terminé dans les temps puisque le chantier a été interrompu et achevé sur financement fourni par le garant d’achèvement ; il a été livré en 2011 après que le garant d’achèvement eu repris un chantier qui avait été réalisé à 80% semble-t-il.

Comme pour le programme du S T, les acquéreurs ont payé 95% du prix sur la base d’une attestation d’J K non conforme à la réalité qui a fait état de l’achèvement du programme, ce qui a permis que soient perçus par la S.C.I. maître de l’ouvrage une tranche de prix à laquelle elle ne pouvait prétendre.

Pour ce programme, il conviendrait d’expliquer la discordance existant entre les intitulés de comptes centralisateurs, car la plupart des actes de vente ne reprennent pas l’intitulé du compte centralisateur porté dans le contrat.

3- le programme MERENS I et II a été commercialisé entre le 13 juillet 2006 (vente MATHIEU) et le 07 août 2007 (vente COCCO), soit en l’espace d’un an, selon la chronologie des actes reçus par Me D, à l’exception d’une ultime vente intervenue en juillet 2008 (vente CHABANEL)

Le stade de la réalisation n’avait pas dépassé 7 et 16% lorsque la société A 2002 a cessé de financer le chantier ; ce chantier n’a jamais été repris et ne le sera jamais.

Les experts relèvent encore une attestation non conforme à la réalité, dressée par J K qui a permis la perception d’une tranche de prix supplémentaire à laquelle la S.C.I. maître de l’ouvrage ne pouvait prétendre.

L’expertise a cependant démontré qu’une somme de 2.500.000 euros, payée par les acquéreurs des programmes BETHMALE et MERENS I et II, qui disposaient d’un compte centralisateur commun, a pu être utilisée par des sociétés autres que les constructeurs qui étaient a priori les seuls à pouvoir être les destinataires des sommes débitées du compte centralisateur.

4- le programme BETHMALE a été commercialisé entre le 02 août 2006 (vente HASSAM) et le 13 juin 2007 (Vente PALET) selon la chronologie des actes reçus par Me D, si l’on fait abstraction de la dernière vente du 16 avril 2008 (vente DAUGE)

Le stade de la réalisation n’avait pas dépassé 22 % lorsque la société A 2002 a cessé de financer le chantier ; ce chantier n’a jamais été repris et ne le sera jamais.

Les experts relèvent encore une attestation non conforme à la réalité, dressée par J K, qui a permis la perception d’une tranche de prix supplémentaire à laquelle la S.C.I. maître de l’ouvrage ne pouvait prétendre.

L’expertise a cependant démontré qu’une somme de 2.500.000 euros, payée par les acquéreurs des programmes BETHMALE et MERENS I et II, qui disposaient d’un compte centralisateur commun, a pu être utilisée par des sociétés autres que les constructeurs qui étaient a priori les seuls à pouvoir être les destinataires des sommes débitées du compte centralisateur.

5- le programme du S T a été commercialisé entre le 30 juin 2006 (vente REMOND) et le 18 décembre 2007 (vente GOUJON) selon la chronologie des actes reçus par Me D.

Le chantier a été réalisé à 80% environ avant d’être arrêté et achevé par le financement apporté par le garant d’achèvement. Mais les acquéreurs ont payé 95% du prix sur la base d’une attestation d’J K non conforme à la réalité et qui a fait état d’un achèvement du programme, laquelle a couverte des incohérences dans les dernières attestations établies par le cabinet E et a permis que soient perçus par la S.C.I. maître de l’ouvrage une tranche de prix à laquelle elle ne pouvait prétendre.

L’expertise a démontré qu’une somme de 3.100.000 euros, payée par les acquéreurs a pu être utilisée par des sociétés autres que les constructeurs qui étaient a priori les seuls à pouvoir être les destinataires des sommes débitées du compte centralisateur.

Les immeubles ont été livrés le 07 septembre 2013, un an environ après avoir été achevés en 2012 grâce au financement de la CEP

En résumé

— mi 2005 à mi 2006 AC AD pour 46 appartements

— automne 2005 à été 2006 C pour 28 appartements

— mi 2006 à mi 2007 S pour 61 appartements

— mi 2006 à mi 2007 MERENS I II pour 44 appartements

— mi 2006 à mi 2007 BETHMALE pour 25 appartements

Il semble probable qu’une partie des fonds des programmes du S T et des programme MERENS et BETHMALE a servi à financer les retards subis par les deux premiers et que l’on ait payé des loyers fictifs pour faire croire aux acquéreurs que les choses se passaient bien.

Cela pose la question de savoir, s’agissant du préjudice subi, si les acquéreurs ont bénéficié de la défiscalisation sur la base de loyers fictifs et la question de savoir qu’elle a pu être l’attitude du fisc lorsqu’il en a été informé.

Des explications sont nécessaires sur ce point.

LES CONDITIONS D’ACHÈVEMENT DU PROGRAMME LE C

A) le projet

Le programme des immeubles du bâtiment LE C a porté sur 61 appartements.

B) Le permis de construire

Le permis de construire porte le numéro PC 0932203h0015 et a été accordé par la commune du S T le 24 octobre 2003.

C) la garantie d’achèvement

La CAISSE D’EPARGNE MIDI PYRENEES, a consenti une garantie d’achèvement selon acte sous-seing privé du 24 octobre 2005 déposé ultérieurement en l’étude de la S.C.P. D R D ; le contrat prévoit qu’elle est rémunérée forfaitairement à hauteur de 30.000 euros.

Le notaire reçoit mandat de reverser sur ce compte toute somme qui viendrait à lui être payée directement.

La garantie est donnée sous forme d’un cautionnement plafonné à 3.521.000 euros pour des travaux évalués dans leur ensemble à 4.239.000 euros ; la partie garantie s’oblige à informer le garant de toute interruption de travaux et à adresser au garant les bilans et procès-verbal d’assemblées générale est susceptible d’être appelée dès qu’intervient une interruption de travaux.

La CEP se voit ainsi consentir une hypothèque et un nantissement des sommes dont le compte centralisateur doit être crédité

Elle se voit conférer un pouvoir de contrôle complet sur l’emploi des fonds et le paiement des entrepreneurs.

La partie cautionnée s’interdit d’utiliser le solde de ce compte centralisateur sans l’accord de la CEP.

Il est en conséquence stipulé que le prix payé par l’acquéreur n’est libératoire qu’à la condition que le paiement soit fait sur un compte centralisateur ouvert par la S.C.I. A 2002 […] et dont les références portées dans le contrat de garantie.

Banque

Guichet

Numéro

Rib

13135

00080

08.6861246.74

67

Mais au bas de la garantie, il est mentionné de manière manuscrite qu’est substitué le compte 08.6961246.67

Les experts vont cependant relever que ce compte centralisateur n’a été utilisé que pour une vente et que les actes de chaque acquéreur portaient des références d’autres comptes, notamment

— le compte 8 696 124667.62 pour 17 ventes

— le compte 8 696 124667 pour 8 ventes (qui est le compte substitué par la mention manuscrite figurant au bas de la convention de cautionnement)

— le compte 8 696 124667.34 pour une vente

— le compte 8 696.124674 pour une dernière vente.

La CAISSE D’EPARGNE ET DE PREVOYANCE MIDI PYRENEES a donné sa garantie d’achèvement conformément à l’article R 261-21 B du code de la construction et de l’habitation pour verser les sommes nécessaires à l’achèvement des biens et droits immobiliers vendus.

Sont rappelées dans les contrats d’acquisition les polices d’assurances concernant la construction du bâtiment à savoir

— dommages-ouvrage : police 6024828 D auprès de la MAF

— décennale CNR police 50045482 N auprès de la MAF

— tous risques chantiers police 500453H auprès de la MAF

Ce contrat est porté à la connaissance de chaque acquéreur pour qu’il respecte l’obligation de ne pas créditer d’autre compte que le compte centralisateur

D) les étapes vers l’échec du programme d’après les pièces juridiques communiquées

1) les attestations d’avancement des travaux

Selon les contrats de VEFA concernant le programme LE C, les appels de fonds devaient se faire auprès des banques prêteuses selon les échelonnements suivants

Etapes

Pourcentage

Cumul

Réservation

5%

5%

Acte

20%

25%

Fondations

10%

35%

Hors d’eau

35%

70%

Cloisons

10%

80%

Plomberies

10%

90%

Achèvement

5%

95%

Livraison

5%

100%

Les attestations d’architectes qui ont permis le déblocage des fonds sont les suivantes :

Attestations

Fondations

E

30/11/05

Hors d''eau

E

06/07/07

Cloisons

E

12/10/07

Plomberie

E

30/01/08

Achèvement

K

11/04/08

Les experts estiment que l’attestation d’J K ne correspond pas à la réalité mais cette attestation explique pourquoi les acquéreurs ont ainsi versé 95% du prix, voire dans certains cas 100%.

b) l’arrêt des travaux

Le chantier a été interrompu au mois d’août 2008 après que tous les acquéreurs aient payé 95% du montant du prix d’achat (à l’exception d’un seul qui a payé 100% par erreur).

Les travaux seront repris plusieurs années plus tard et les biens seront livrés en 2011.

c) la liquidation judiciaire de la S.C.I. A 2002

La S.C.I. A 2002 RESIDENCE DU HAUT COUSERANS a été placée en redressement judiciaire par le tribunal de grande instance de FOIX le 25 novembre 2009 ; ce redressement judiciaire a été converti en liquidation judiciaire par jugement subséquent du 03 février 2010.

Me Z a été nommée comme liquidateur judiciaire.

Mais ces décisions ont été annulées en raison de l’incompétence territoriale du tribunal de grande instance de FOIX et la liquidation judiciaire sera à nouveau prononcée par le Tribunal de Commerce d’Evry par jugement du 03 septembre 2012, en lien avec les procédures collectives de liquidation judiciaire déjà ouvertes par cette juridiction les 15 mars 2010 et 19 avril 2010 à l’encontre des sociétés AA, EURODOME et AA AB qui détiennent son capital social.

Comme déjà indiqué, il serait opportun de savoir si des décisions ultérieures ont prononcé la confusion de patrimoines entre toutes ou certaines seulement de ces sociétés.

D) la date de l’anéantissement des VEFA. Le sort des prêts

La date de la liquidation judiciaire signifie que la S.C.I. n’a plus aucune activité, et que les contrats de VEFA sont résiliés, faute pour elle d’avoir la possibilité de fournir la contrepartie, mais le transfert de propriété intervenu est maintenu.

Dans le cas d’un programme ainsi interrompu mais achevé avec le financement du garant d’achèvement, le contrat de prêt n’est pas résilié mais se poursuit sur une durée rallongée s’ils ne sont pas renégociés.

Il faut donc prendre en compte la période de suspension plus ou moins longue.

Les fonds perdus par les acquéreurs selon le rapport d’expertise

a) la mission donnée aux experts avait expressément pour but de faire le point sur le degré d’exécution des programmes et de rechercher comment les fonds avaient été employés et de vérifier l’effectivité du contrôle exercé par le garant d’achèvement

Les experts avaient pour mission d’investiguer sur les conditions précises dans lesquelles les fonds ont été remis par les acquéreurs à la S.C.I. Cette mission était ainsi libellée :

1) se faire remettre par le liquidateur de la S.C.I. A 2002 RESIDENCE DU HAUT COUSERANS la comptabilité du promoteur afférente à l’opération immobilière concernant le présent dossier de l’immeuble LE C, et ce sous le contrôle du juge commissaire de la liquidation dont les pouvoirs peuvent aller jusqu’à la levée du secret de toute enquête ou instruction pénale qui pourrait être ouverte ou qui a pu l’être

2) accéder pareillement et dans les mêmes conditions de contrôle judiciaire, à la comptabilité de sociétés EURODOME, AA AB ET AA, ainsi que leurs liquidateurs judiciaires désignés par le tribunal de commerce d’EVRY, toutes sociétés dont il est indiqué qu’elles seraient les gérantes de la S.C.I. A 2002

3) se faire remettre tous documents contractuels et d’I intéressant le programme immobilier litigieux, notamment les contrats liant la S.C.I. maître de l’ouvrage et les architectes mise en cause, ainsi que la DROC et les procès-verbaux de réunion de chantiers établis jusqu’à l’interruption des travaux,

4) dresser l’historique du chantier jusqu’à son interruption en faisant une synthèse des causes principales du retard pris et en donnant les éléments d’appréciation du comportement des architectes ayant eu en charge la surveillance du chantier,

5) évaluer la valeur des travaux réellement faits en exécution des marchés d’origine,

6) évaluer le coût actuel des travaux restant à faire pour parvenir à l’achèvement du programme immobilier si cet achèvement est juridiquement possible et si le garant d’achèvement s’y engage

7) se faire remettre par chaque prescripteur ayant placé les contrats de réservation, les conditions générales du mandat à lui donné en vue de cette commercialisation par la S.C.I. ou toute autre société intéressée, et décrire ce qu’il est advenu des fonds versés par les réservataires lors de la signature des contrats de réservation et expliquer pourquoi ils auraient pu être virés sur d’autres comptes que ceux de l’étude R D, généralement mentionnée dans les contrats de réservation comme celle devant recevoir les actes authentiques de vente

8) se faire remettre par la Caisse d’Epargne et de Prévoyance Midi Pyrénées le contrat de crédit passé entre cet organisme financier et la S.C.I. A 2002 RESIDENCE DU HAUT COUSERANS, ou avec ses sociétés gérantes, pour le financement du programme immobilier objet du présent litige de manière à connaître les contraintes prudentielles et comptables (compte spéciaux par exemples) imposées par la banque à la S.C.I. pour le maniement des fonds remis par les acquéreurs et de manière à vérifier ensuite si pour chaque acquéreur, ces prescriptions ont été respectées; et dire en quoi ces contraintes prudentielles et comptables ont été méconnues et indiquer si la banque prêteuse pouvait s’apercevoir des anomalies, des incohérences et du mauvais emploi des fonds remis par les acquéreurs

9) pour chaque lot vendu, se faire remettre

- l’offre bancaire du prêt souscrit par chaque acquéreur

- la date de l’acceptation de cette offre de prêt

- la date d’avis de mise à disposition des fonds par la banque prêteuse

- la date du premier versement par la banque prêteuse et l’identification du compte ayant reçu ces fonds

- tout document attestant de la transmission des données de ce crédit à l’étude R D ou à toute autre étude qui aurait reçu séparément un acte authentique de prêt en vue de la vente à passer en l’étude R D

10) pour chaque lot vendu, se faire remettre les relevés précis des paiements du prix effectués par l’acquéreur emprunteur, ou par la banque prêteuse en son acquit, et en faire un tableau chronologique en mentionnant les références (banque, titulaire et numéro de compte) du compte crédité, qu’il s’agisse du compte centralisateur ou d’un autre, et, pour le cas où le prix aurait été délégué ou cédé sur un compte appartenant à une personne tierce, autre que la S.C.I. venderesse, expliciter la cause de la créance ainsi éteinte en l’acquit de cette S.C.I.,

11) présenter ensuite les sommes payées dans un tableau récapitulant la répartition des fonds appelés pour le bâtiment considéré entre les différents comptes crédités

12) pour chaque paiement ayant contractuellement nécessité le visa préalable de la maîtrise d’oeuvre ou un “bon à payer”, comparer

- l’état décrit dans les documents établis par ladite maîtrise d’oeuvre pour justifier l’appel de fonds

- avec l’état réel de l’avancement de la construction à la date de ce paiement

- et plus particulièrement avec les prestations de l’entreprise désignée comme pouvant être payée et en vérifiant si cette entreprise en a bien été payée

- de manière à ce que le tribunal puisse vérifier si l’appel des fonds était réellement justifié au regard de l’échelonnement prévu contractuellement pour le paiement du prix

- évaluer le montant des fonds qui ont ainsi pu être libérés sans correspondre à un travail de construction réellement exécuté

13) pour chaque appel de fonds réclamé par la S.C.I. ou les architectes indiquer s’il a été demandé aux banques prêteuses des créditer un compte autre que le compte centralisateur, en précisant à partir de quand la banque a su ou pu savoir que l’opération immobilière prise globalement était organisée autour d’un compte centralisateur

14) fournir tous autres éléments utiles notamment sur les préjudices révélés

Les experts commis n’ont pas pu obtenir la totalité des éléments demandés pour s’être heurtés à l’impécuniosité des procédures collectives.

b) les fonds débloqués par les banques

Les ventes se sont étalées entre le 26 octobre 2006 jusqu’au 26 décembre 2007

Le notaire a mentionné le compte centralisateur 08.696124667 62 qui n’est pas celui porté dans l’acte de garantie passé entre le promoteur et la CEP, et qui n’est pas davantage l’unique compte porté dans les VEFA.

Quoiqu’il en soit, les experts ont ainsi établi que la S.C.I. a perçu les montants suivants et il est distingué entre ce qui a été payé par la comptabilité du notaire, de ce qui ne l’a pas été.

Nom

Date acte

Prix

Payé

% No

[…]

Payé

% payé

WANG

26/10/05

[…]

[…]

25%

[…]

[…]

95%

BOUSSION

27/10/05

[…]

[…]

25%

[…]

[…]

95%

FAGAULT

02/11/05

[…]

[…]

25%

[…]

[…]

90%

COURDENT

03/11/05

[…]

[…]

25%

[…]

[…]

100%

DOUAIRE

08/11/05

[…]

[…]

25%

[…]

[…]

95%

MORFOISE

10/11/05

[…]

[…]

25%

[…]

[…]

95%

MERGOLA

14/11/05

[…]

[…]

25%

[…]

[…]

95%

VANDERMERSCH

16/11/05

[…]

[…]

25%

[…]

[…]

95%

BERNIER

22/11/05

[…]

[…]

25%

[…]

[…]

95%

[…]

18/12/05

[…]

[…]

25%

[…]

[…]

95%

BONNEAU

27/12/05

[…]

[…]

25%

[…]

[…]

100%

LOUIS

30/12/05

[…]

[…]

25%

[…]

[…]

98%

XAVIER

30/12/05

[…]

[…]

25%

[…]

[…]

95%

FOURRE

16/01/06

[…]

[…]

25%

[…]

[…]

95%

CHAUVEAU

22/02/06

[…]

[…]

25%

[…]

[…]

95%

KERVELLA

23/02/06

[…]

[…]

35%

[…]

[…]

95%

POSTAIRE

23/02/06

[…]

[…]

35%

[…]

[…]

85%

BOTREL

24/02/06

[…]

[…]

35%

[…]

[…]

90%

MARQUET

24/02/06

[…]

[…]

35%

[…]

[…]

95%

GALIBERT

15/03/06

[…]

[…]

35%

[…]

[…]

95%

CORBI

24/03/06

[…]

[…]

35%

[…]

-0

35%

[…]

11/04/06

[…]

[…]

35%

[…]

-0

35%

G

25/04/06

[…]

[…]

35%

[…]

-0

35%

DURAND

22/06/06

[…]

[…]

35%

[…]

[…]

90%

LECOQ

30/06/06

[…]

[…]

35%

[…]

[…]

95%

BIDAUT

06/07/06

[…]

[…]

35%

[…]

[…]

95%

ORGELET

16/08/06

[…]

[…]

35%

[…]

[…]

95%

FERRON

26/09/06

[…]

[…]

35%

[…]

[…]

95%

Total

[…]

[…]

[…]

[…]

c) les débits du compte centralisateur

Examinant le compte utilisé comme compte centralisateur, les experts ont ainsi recensé les mouvements suivants

Cpte Centralisateur C

Crédits

Montant

D C versements actes

1 666 740,17

D C Autres

21 115,54

[…]

82 860,06

[…]

247 601,79

S.C.I. A 2002

37 116,23

Autres

38 586,80

Total

2 094 020,59

Débits

Montant

EURODOME

827 154,05

[…]

149 163,29

FBCR

261 284,60

CUMINETTI

212 583,43

ROUZEAU

202 165,78

PLANOVESI

59 151,36

MALLET

59 740,20

[…]

62 132,20

VERITAS

20 804,42

FALGUIE

30 686,52

Divers

207 154,74

Total

2 092 020,59

Hors BTP

1 038 449,54

Les experts font observer que les sociétés de gestion n’avaient pas pu commencer à exploiter et que les entreprises de travaux publics sont loin d’avoir reçu la majorité de ces sommes. En présument que le poste “Divers” correspond à des travaux, c’est une somme de l’ordre de 1.000.000 euros qui a été employée à d’autres fins que la réalisation du programme du bâtiment LE C sans que le garant d’achèvement ne contrôle leur utilisation.

EXPLICATION ATTENDUES CONCERNANT L’IMMEUBLE LE C

A) demande d’explication sur les postes de préjudices invoqués

La perte des loyers qui auraient permis de payer les intérêts

Le programme interrompu en août 2008 a été livré en retard en 2011 après que les travaux ont été financés par le garant d’achèvement ; les acquéreurs ont donc subi un préjudice pendant tout le temps écoulé entre la date initialement prévue pour la livraison du programme, et le temps de la livraison.

Durant cette période, les acquéreurs

— n’ont pas perçu les loyers initialement prévus qui aurait servi à payer les intérêts de l’emprunt,

— ont payé des intérêts intercalaires sur les fonds débloqués,

— ont éventuellement entamé l’amortissement du capital en sus du paiement des intérêts payés à chaque échéance,

— payé des primes d’assurances ADI qui ont leur cause dans les rapports avec la banque mais qui constituent une charge assumée pendant une période de temps supplémentaires,

— bénéficié de suspensions amiables ou judiciaires des prêts qui n’ont pas arrêté le cours des intérêts ni modifié les règles d’imputation des paiements sauf décision judiciaire contraire.

La défiscalisation

La livraison a eu pour conséquence que les biens livrés avec retard ont pu être loués avec le bénéfice de la défiscalisation mais dans des conditions de loyers plus faibles, ce qui est de nature à avoir diminué les avantages fiscaux.

Pour apprécier le préjudice de défiscalisation manquée, les acquéreurs doivent faire savoir s’ils ont

— commencé à défiscaliser prématurément en déclarant des loyers qui n’existaient pas en réalité en précisant si le fisc a procédé à des rectifications

— dire alors si la défiscalisation après livraison est la continuation de la défiscalisation initiale qu’elle prend en compter ou si c’est un nouveau régime

— le cas échéant produire les déclarations de revenus qui justifient des avantages fiscaux obtenus avant livraison

— préciser si le fisc a envoyé des propositions de rectifications et en indiquer les suites, notamment transactionnelles.

Pour les défiscalisations en cours, en indiquer le montant, le montant du loyer et le mode de calcul de manière à apprécier si la location actuellement faite sur la base d’un loyer plus bas que celui envisagé lors de l’engagement, révèle une perception moindre que si la défiscalisation était intervenue dans les conditions initiales.

Il devra ensuite être débattu

— du lien de causalité entre les pertes constatées et les fautes retenues à l’encontre de chaque responsable

— de la question de savoir si le préjudice correspond au déficit de défiscalisation ou à une perte de chance de l’éviter.

Sur les surcoûts bancaires

Pour apprécier le préjudice lié aux surcoûts bancaires, il faut se placer à la date de la livraison pour faire un compte arrêté à cette date, que le contrat de prêt ait ou non été suspendu, qu’il ait été ensuite renégocié ou non.

Le prêt d’origine a engendré des coûts supplémentaires ; s’il n’a pas été renégocié, le choix de l’achèvement et du maintien du transfert de propriété a conduit à ce que le contrat de prêt, s’il n’a été renégocié, se poursuit mais avec des coûts supplémentaires

Il sera demandé à l’emprunteur, comme à la banque prêteuse de produire un décompte précis de la créance bancaire en fournissant les éléments suivants

— si le contrat n’a pas été renégocié, faire un décompte hors ADI à jour à la date de livraison effective du 07 septembre 2013 en précisant la date du début de l’amortissement s’il ne s’agit pas de prêt in fine,

— indiquer le montant total des intérêts conventionnels effectivement perçus par la banque à cette date qu’il s’agisse d’intérêts tant intercalaires ou de la part d’intérêts incluses dans les échéances d’amortissement effectivement payées ;

— s’il y a lieu, indiquer le montant des échéances impayées à cette date, – établir ensuite un second décompte définitif à la date de la suspension des prêts en faisant apparaître l’assiette en capital sur laquelle les intérêts conventionnels continuent de courir depuis l’autorisation de suspension,

— préciser si une décision judiciaire rendue par ailleurs inverse les règles d’imputation des paiements.

B) demandes d’explications relatives à la responsabilité du garant d’achèvement

Le garant d’achèvement n’est pas l’auteur de l’inexécution du programme abandonné, et il n’a pas à répondre d’une inexécution de son obligation puisqu’il n’a pas été mis en demeure de la remplir avant péremption du permis de construire (différence avec le programme d'[…]).

Le garant d’achèvement est recherché pour avoir manqué à ses obligations de contrôles en ce que, si elles avaient été remplies et s’il s’était opposé à ce que les fonds versés sur le compte centralisateur en soient débitées pour d’autres fins que les travaux de construction, les acquéreurs du programme inachevé, n’auraient pas perdu leurs investissements (programmes abandonnés) ou auraient subi un préjudice moindre (programmes achevés avec retard).

Il faut donc demander aux parties de s’expliquer sur les points suivants concernant la responsabilité du garant d’achèvement ;

Il faut donc demander aux parties de s’expliquer sur les points suivants concernant la responsabilité du garant d’achèvement

— de situer la date des premiers débits du compte centralisateur, non affectés à la rémunération des entreprises travaillant sur l’immeuble pour la construction duquel les fonds ont été portés au crédit du compte centralisateur,

— et expliquer en quoi consisterait la faute du garant d’achèvement en a situant avec précision par rapport à la date de l’acte d’acquisition de chaque demandeur.

Au cas particulier, expliquer pourquoi le compte centralisateur prévu au contrat de garantie d’achèvement prévu au contrat n’a pas été utilisé et pourquoi les fonds ont été majoritairement dirigés sur un compte dont les références sont celles du compte centralisateur des immeubles AC AD, B et U V

C) demandes d’explications relatives à la responsabilité du notaire

Le notaire du programme n’intervient qu’au travers de la passation des actes authentiques et sa responsabilité suppose qu’il détecte une anomalie car il n’a pas de pouvoir direct de contrôle du promoteur ; sauf anomalie détectable en son étude, il ne semble pas disposer du pouvoir d’intervenir sur les débits du compte centralisateur ni d’en connaître l’évolution après la réception et il doit accorder du crédit à la teneur des attestations d’architectes, sauf incohérences manifestes entre elles.

Il semble en revanche disposer du droit de s’adresser au garant d’achèvement pour qu’il exerce ses contrôles contractuels.

Au cas particulier, il semble que les acquéreurs aient pu verser des fonds sur le compte centralisateur prévu pour être celui des immeubles AC AD U V et B.

La jurisprudence de la cour d’appel de RIOM, jurisprudence suivie par le présent tribunal dans les 6 affaires ayant donné lieu au jugement du 30 mars 2017 concerne l’échec du programme immobilier de rénovation lourde des bâtiments miniers à LAPRUGNE entamée par le même groupe de promotion AA, les mêmes architectes E ET K, le même notaire à savoir la S.C.P. D R D ayant été choisie pour recevoir les actes de ce programme lointain également été chargée ; il a été estimé que la responsabilité du notaire avait été encourue à partir du moment où sont intervenues des résiliations amiables et, par voie de conséquence, Il a donc été jugé que le notaire n’avait pas engagé sa responsabilité pour les ventes passées antérieurement à cette date.

Le débat doit s’instaurer sur la nature des signaux qui auraient dû conduire le notaire à donner l’alerte en situant le moment de leur apparition.

D) sur les conclusions attendues d’J K

J K n’a pris que des conclusions de pure forme sans lien avec le fond du litige ; il importe qu’elle conclue au fond et que soit déterminé par elle ou par ses adversaires le montant partiel des prix qu’elle a contribué à faire débloquer indûment.

Durant les opérations d’expertise, elle a opposé l’existence de poursuites pénales ayant pu la concerner pour s’opposer à toute explication de fond. Il faut aujourd’hui à titre d’information obtenir les décisions juridictionnelles rendues au pénal tant par les juridictions d’instruction que par les juridictions correctionnelles.

Pour plusieurs programmes, J K a établi des attestations erronées qui ont pu jouer un rôle dans le déblocage d’une partie des fonds prêtés remis à la S.C.I.

Sur le fond, tous les rapports d’expertise relèvent qu’elle a rédigé des attestations erronées pour plusieurs des chantiers avant l’arrêt des travaux intervenu en août 2008 sur tous les chantiers en cours ; le maître de l’ouvrage a pu ainsi percevoir des fonds auxquels il ne pouvait prétendre.

La question se pose de savoir si le préjudice qu’elle a pu causer, s’évalue par rapport à la totalité des fonds indûment payés au promoteur ou s’il se limite aux seules sommes qui ont été payées indûment après la date de l’attestation erronée.

Par ailleurs, la délivrance de ces attestations a pu retarder la mise en œuvre de la garantie d’achèvement quand on sait que le garant est libéré de ses obligations contractuelles quand l’achèvement est régulièrement constaté, ce qui n’est pas le cas en l’espèce. Les experts notent qu’un technicien s’est rendu sur les lieux pour faire le point sur la situation des chantiers à la même époque.

Ces attestations ont causé aussi, d’après l’emploi des fonds irrégulièrement débités des comptes centralisateurs, le versement de “loyers” fictifs à divers acquéreurs de sorte que se pose la question de savoir

— s’ils ont ou fait valoir – de bonne foi – des avantages de défiscalisation auprès du fisc

— comment le fisc a réagi quand il l’a appris et si des rectifications fiscales ont été opérées

E) Demande d’explications concernant la BNP ex BANQUE FORTIS

Cette banque a vu transiter sur un compte ouvert par la S.C.I. des sommes importantes qui ont pu être remises soit directement par les acquéreurs ayant méconnu leur obligation de les verser sur le compte centralisateur, soit des fonds qui ont pu être débités dudit compte.

Cela pose la question de savoir si, comme il est demandé, cette banque serait susceptible d’être déclarée coresponsable de tous les préjudices subis alors que des fonds ne lui ont été remis qu’après la passation des actes authentiques et qu’elle n’a strictement aucun pouvoir de contrôle des parties intéressées à l’opération de promotion.

La situation demande donc des explications complémentaires de la part des parties concernées.

F) demande d’explication concernant le commercialisateur mis en cause

La responsabilité du commercialisateur est recherchée ; il n’est intervenu qu’au moment de la conclusion du contrat de réservation en un temps pour l’acquéreur disposait d’un droit de rétractation.

Comme il est évoqué que des promesses de rachat futur à prix ferme ont pu emporter la conviction des acquéreurs, promesse a priori peut susceptibles d’avoir été connues du notaire, il faut que les acquéreurs en justifient et ensuite que s’instaure le débat sur le préjudice qui en découle selon que l’on estime qu’il s’agit de la perte économique subie ou d’une perte de chance de ne pas l’avoir subie.

PAR CES MOTIFS

Le juge de la mise en état statuant publiquement, par jugement contradictoire, en premier ressort :

Vu les articles 3 et 765 du code de procédure civile

* demande aux parties de faire savoir si le tribunal de commerce d’Evry a prononcé la confusion des patrimoines entre les S.C.I. tombées en liquidation et les sociétés du GROUPE AA et dans l’affirmative, rappeler la date de cessation des paiements

* dans une bonne administration de la justice à rendre dans l’ensemble des procédures concernant les programmes litigieux, ordonne

— le versement au débat des 6 jugements rendus par le tribunal de grande instance de TOULOUSE le 30 mars 2017 concernant un autre programme réalisé par le groupe AA

— la mise en commun des rapports d’expertise déposés dans les procédures “souches” 09/2150 (S) 09/2183 (C) 09/2656 (B AC AD U V), 09/2657 (MERENS I et II) et 09/2658 (BETHMALE)

* demande aux acquéreurs et banques prêteuses d’établir un arrêté de la créance bancaire au 28 juin 2011, date de livraison effective des lots de l’immeuble LE C en donnant connaissance des postes suivants

— si le contrat n’a pas été renégocié, faire un décompte hors ADI à jour à la date de livraison effective du 28 juin 2011 en précisant la date du début de l’amortissement s’il ne s’agit pas de prêt in fine

— indiquer le montant total des intérêts conventionnels effectivement perçus par la banque à cette date en supplément de ce qui aurait été perçu selon le calendrier d’un remboursement normal prévu après une livraison en temps utile ;

— s’il y a lieu, indiquer le montant des échéances impayées à cette date ;

— établir ensuite un second décompte définitif à la date de la suspension des prêts en faisant apparaître l’assiette en capital sur laquelle les intérêts conventionnels continuent de courir depuis l’autorisation de suspension

— préciser si une décision judiciaire extérieure a prescrit l’imputation des échéances par priorité sur le capital plutôt que sur les intérêts ;

* demande aux parties concernées de s’expliquer davantage sur la faute qui peut être reprochée au garant d’achèvement

1 – s’agissant de tous les programmes pris séparément, achevés ou abandonnés, indiquer si les débits constatés par l’expert se situent avant le 1er ordre de service délivré

2 – caractériser la faute alléguée en expliquant ce que le garant d’achèvement aurait dû faire, et à quel moment il aurait dû le faire au regard de ses obligations contractuelles,

3- conclure sur la question de savoir si à son égard, le préjudice est égal aux pertes subies ou s’il s’analyse en une perte de chance d’avoir pu les éviter ;

4- expliquer pourquoi le compte centralisateur (référence imprimée comme référence de substitution) prévu au contrat de garantie d’achèvement prévu au contrat n’a pas été utilisé pour toutes les ventes

* aux parties concernées de s’expliquer davantage sur la faute qui peut être reprochée au notaire sur la faute qu’elles entendent reprocher au notaire

1 – s’agissant de tous les programmes pris séparément, achevés ou abandonnés, expliciter les anomalies qui auraient dû conduire le notaire à donner l’alerte en fonction de ce qu’il pouvait savoir et constater et dater ce moment

2 – caractériser la faute alléguée en expliquant ce que le notaire aurait dû faire, et à quel moment il aurait dû le faire au regard de ses obligations contractuelles

3- conclure sur la question de savoir si à son égard, le préjudice est égal aux pertes subies ou s’il s’analyse en une perte de chance d’avoir pu les éviter ;

* demande à l’acquéreur d’indiquer s’il a perçu des loyers fictifs en croyant que le bien avait été livré, de préciser s’il a ou non alors entamé la défiscalisation à cette occasion, et d’indiquer si cette défiscalisation a ensuite été remise en cause par l’administration fiscale en justifiant alors des remboursements effectués et, s’il y a lieu le montant des pénalités éventuellement payées

* enjoint à J K de conclure sur le fond à peine de clôture partielle et lui demande de communiquer toute décision pénale rendue publiquement ayant pu la concerner

* enjoint à la SARL AGENCE E de conclure sur le fond à peine de clôture partielle

* demande aux parties de s’expliquer davantage sur la faute qu’elles entendent reprocher à la BANQUE FORTIS et à cette fin, produire et analyser les mandats en vertu desquels elle a pu être recevoir des fonds, soit en provenance des banques prêteuses, soit en provenance du compte centralisateur

* s’agissant de la responsabilité du commercialisateur, demande aux parties concernées de s’expliquer davantage sur la faute causale qu’il aurait commise et notamment sur la question de fait de la remise à l’acquéreur d’une promesse ferme de rachat futur du bien financé

* renvoie l’affaire à l’audience de mise en état écrit du 26 octobre 2017

* réserve les dépens

LE GREFFIER LE JUGE

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Tribunal de grande instance de Toulouse, Pôle civil, fil 3, n° 15/03591