Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 21 novembre 2013, n° 12/23959

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Aix-en-Provence, 21 nov. 2013, n° 12/23959
Juridiction : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Numéro(s) : 12/23959
Décision précédente : Tribunal de grande instance de Grasse, 10 décembre 2012, N° 12/04746

Sur les parties

Texte intégral

COUR D’APPEL D’AIX EN PROVENCE

1re Chambre B

ARRÊT AU FOND

DU 21 NOVEMBRE 2013

D.D-P

N° 2013/676

Rôle N° 12/23959

H Y

C/

L D

J E

Grosse délivrée

le :

à :

Me Maxime ROUILLOT,

Me Pierre LIBERAS

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal de Grande Instance de GRASSE en date du 11 Décembre 2012 enregistré au répertoire général sous le n° 12/04746.

APPELANT

Maître H Y

né le XXX à Valenciennes

Mandataire Judiciaire

XXX

pris en sa qualité de liquidateur judiciaire de la société LIFE INVEST FUND 3 INC.

représenté par Me Pierre LIBERAS, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE, plaidant par Me Frédéric MASQUELIER, avocat au barreau de DRAGUIGNAN

INTIMES

Madame L D

née le XXX à XXX

XXX

XXX

représentée et plaidant par Me Maxime ROUILLOT, avocat au barreau de NICE

substitué par Me Gilles BOUCHER, avocat au barreau de NICE.

Maître J E

né le XXX à Toulouse

Administrateur Judiciaire – XXX

pris en sa qualité de mandataire ad hoc représentant le société LIFE INVEST FUND 3 INC.

représenté par Me Pierre LIBERAS, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE, plaidant par Me Frédéric MASQUELIER, avocat au barreau de DRAGUIGNAN

COMPOSITION DE LA COUR

L’affaire a été débattue le 24 Octobre 2013 en audience publique. Conformément à l’article 785 du Code de Procédure Civile, Mme Danielle DEMONT-PIEROT, Conseiller , a fait un rapport oral de l’affaire à l’audience avant les plaidoiries.

La Cour était composée de :

Monsieur François GROSJEAN, Président

Monsieur Hugues FOURNIER, Conseiller

Mme Danielle DEMONT-PIEROT, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Mme F G.

Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 21 Novembre 2013.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 21 Novembre 2013,

Signé par Monsieur François GROSJEAN, Président et Mme F G, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

EXPOSE DU LITIGE

Par acte reçu par maître VIVES-GAYMARD, notaire à Nice, le 17 février 2009, Mme L D a vendu à la société LIFE INVEST FUND 3 INC, société de droit américain, un appartement avec parking.

Cette vente a été consentie moyennant une partie réglée comptant d’un montant de 42'500€

et le versement d’une rente mensuelle viagère indexée de 700 € créée au profit et sur la tête du vendeur jusqu’à son décès, et stipulée payable d’avance le premier de chaque mois.

En garantie du paiement de la rente, l’immeuble est l’objet d’une inscription de privilèges au profit de la crédirentier. Le vendeur se réserve en outre à son profit pendant sa vie et jusqu’à son décès, le droit d’usage et d’habitation du bien vendu.

L’acte stipule en outre une clause résolutoire de plein droit à défaut de paiement d’un seul terme de la rente, un mois après un simple commandement de payer demeuré infructueux, contenant déclaration par le crédirentier de son intention d’user du bénéfice de la clause.

Faisant valoir qu’aucune rente ne lui est plus versée depuis février 2012, et qu’un commandement de payer visant la clause résolutoire délivré le 2 mars 2012 est resté infructueux, Mme L D a obtenu l’autorisation d’assigner à jour fixe et a fait délivrer l’exploit introductif d’instance le 5 septembre 2012, à la société LIFE INVEST FUND 3 INC en la personne de son liquidateur judiciaire aux fins d’obtenir la résolution de la vente par application de la clause résolutoire.

Par jugement en date du 30 avril 2012 le tribunal de Commerce de Fréjus a ouvert une procédure de redressement judiciaire à l’encontre de la société LIFE INVEST FUND 3 INC . La date de cessation des paiements a été provisoirement fixée au 30 avril 2012. Me Y a été désigné en qualité de mandataire judiciaire et Me E en qualité d’administrateur judiciaire avec mission d’assistance.

Cette procédure par jugement du 23 juillet 2012 a été convertie en liquidation judiciaire. Me Y a été désigné en qualité de liquidateur, et Me E a été désigné en qualité de mandataire ad hoc de la société.

Par jugement en date du 11 décembre 2012 n° 1134/2012 le tribunal de grande instance de Grasse a :

'reçu l’intervention volontaire de Me J E en sa qualité de mandataire ad hoc, représentant la société LIFE INVEST FUND 3 INC ,

' débouté Me Y et Me E, ès qualités, de leurs fins de non recevoir tendant à voir déclaré irrecevable l’assignation et à voir annuler le commandement de payer visant la clause résolutoire du 2 mars 2012 ;

' constaté que la clause résolutoire figurant au contrat est acquise au crédirentier et prononcé la résolution de la vente consentie le 17 février 2009 par Mme L D à la société LIFE INVEST FUND 3 INC ;

' débouté Me Y et Me E de leur demande de modération de la clause pénale et du surplus de leurs demandes ;

' dit que l’ensemble des sommes versées à Mme D par à la société LIFE INVEST FUND 3 INC 42'500 € payée comptant que les rentes viagères perçues lui sont acquises à titre de dommages et intérêts en réparation de son préjudice moral et financier ;

' fixé la créance de Mme X la liquidation judiciaire de la société LIFE INVEST FUND 3 au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile à la somme de 2500 € ;

' ordonné la publication du jugement à la Conservation des hypothèques

' et condamné Me H Y ès qualités aux dépens.

Le tribunal énonce en ses motifs

Sur la nullité du commandement de payer

— que Me Y et E soutiennent que le commandement de payer n’a pas été signifié au siège de la société LIFE INVEST 2001 INC, mais à l’adresse suivante : 199 avenue du général Leclerc chez EAGLE FININVEST ; que suite à la liquidation du cabinet domiciliaire nul n’habitait à cette adresse dont les locaux étaient vides ; que la défenderesse a reçu le commandement n’a pas pu régulariser la situation ; que le procès-verbal de signification mentionne que copie de l’acte a été remis à la secrétaire qui a déclaré être habilitée à recevoir l’acte ; que pour justifier d’un siège social aux États-Unis la société verse un document en anglais non traduit où il est toutefois fait mention de l’adresse du 199 av du Gal Leclerc Saint-Raphaël en français ; que l’acte de vente litigieux du 17 février 2099 énonce que l’acquéreur est représenté par M. C directeur de la société, demeurant à Saint-Raphaël ; que tous les courriers reçus par le crédirentière proviennent de cette adresse qui a donné lieu à l’ouverture de la procédure collective ; que l’acte a été valablement délivré à une personne qui s’est déclarée habilitée ; qu’il y a lieu en conséquence de rejeter la demande de nullité du commandement ;

— que l’acte de vente comporte une clause de selon laquelle « il est formellement stipulé qu’défaut de paiement à son échéance exacte d’un seul terme de la rente viagère présentement constituée, et 30 jours après un simple commandement de payer, dont l’acquéreur aura effectivement connaissance, contenant déclaration du crédirentier de son intention de se prévaloir du bénéfice de la présente clause, et demeuré infructueux, la présente vente sera résolue de plein droit, purement et simplement, sans mise en demeure préalable, nonobstant l’offre postérieure des arrérages .» ;

— que du fait du commandement infructueux, la clause résolutoire a pris son plein et entier effet le 2 avril 2012, soit antérieurement à l’ouverture de la procédure de redressement judiciaire prononcée le 30 avril 2012, ce qui n’est pas contraire à la prohibition édictée à l’article L. 621-40 devenu L. 622-21 du code de commerce ;

Sur les conséquences de la résolution de la vente

que Mme D sollicite à bon droit que la partie du prix payé comptant et les mensualités de la rente déjà versée lui soient acquis conformément aux dispositions contractuelles de l’acte qui prévoient expressément qu’en cas de résolution par l’effet de la clause résolutoire « tous les arrérages perçus par le crédirentier, tous les embellissements et améliorations apportés au bien vendu seront de plein droit et définitivement acquis au crédirentier sans recours ni répétition de la part du débirentier défaillant, et ce à titre de dommages et intérêts et d’indemnités forfaitairement fixées. Le débirentier ne pourra pas lui réclamer le remboursement des arrérages payés. Ceux-ci seront définitivemment acquis au crédirentier.

La partie du prix payée comptant sera quant à sa destination, laissée à l’appréciation souveraine des tribunaux. »

— que la résolution du contrat par l’effet de la clause résolutoire est acquise au crédirentier au 2 avril 2012, soit avant le jugement d’ouverture ;

que par ailleurs il ne s’agit pas d’une demande en paiement, mais de voir juger acquises les sommes déjà perçues ; que le moyen tiré de l’article L. 622-7 du code de commerce qui emporte « interdiction de payer toute créance née antérieurement au jugement d’ouverture, à l’exception du paiement par compensation de créances connexes » doit être écarté ;

— que Mme Z ne verse aucune pièce pour justifier de sa situation financière exacte ; que compte tenu de son âge (80 ans), la vente litigieuse a nécessairement constitué pour l’intéressée un complément de revenus ; que dès lors les arrérages échus ont présenté un caractère alimentaire et qu’ils ont eu vocation être consommés au fur et à mesure par la crédit rentière ;

— qu’en ce qui concerne le bouquet, la carence de la société a nécessairement placé l’intéressée, âgée de 80 ans, dans une situation de difficultés financières et morales incontestables depuis presque une année depuis février 2012 jusqu’au jour du jugement ; que le fait de ne pas se voir restituer les rentes déjà perçues n’indemnise pas ce préjudice puisque ces rentes ont été consommées au fur et à mesure de leur perception ; et que le bouquet est donc acquis à la crédit rentière.

Par déclaration adressée au greffe de la cour le 20 décembre 2012 Me H Y a relevé appel de cette décision.

Par conclusions notifiées le 23 juillet 2013 Me H Y agissant en qualité de liquidateur judiciaire de la société LIFE INVEST 2001 INC et Me J E agissant en sa qualité de mandataire ad hoc représentant la société LIFE INVEST 2001 INC demandent à la cour :

' de réformer le jugement entrepris ;

statuant à nouveau

' de déclarer nul le commandement de payer signifier le 2 mars 2012 et de rejeter l’ensemble des demandes de Mme D ;

à titre subsidiaire, en cas de résolution de la vente,

' de la condamner à lui payer ès qualités la totalité des arrérages perçus depuis la conclusion du contrat de vente le 17 février 2009 ainsi que la somme de 42 500 € au titre du bouquet payé comptant ;

à titre infiniment subsidiaire

' de réduire les demandes de dommages et intérêts à de plus justes proportions ;

et en tout état de cause

' et de condamner Mme D à leur payer la somme de 3000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile, outre les dépens avec distraction

Les mandataires jusdiciaires soutiennent que Mme A qui n’était pas la secrétaire de la société LIFE INVEST FUND 3 INC n’était dès lors pas habilitée à recevoir le commandement de payer visant la clause résolutoire querellé ; que pour que la signification soit faite à personne morale, il importe en effet que l’acte ne soit pas remis à une personne quelconque se trouvant au siège de la société, encore faut-il que cette personne soit au service de la société ; que si la jurisprudence admet que l’huissier n’a pas l’obligation de vérifier les pouvoirs ou la qualité déclarée de celui qui se présente comme habilité à réceptionner l’acte, cette règle signifie seulement que l’huissier ne pourra pas voir sa responsabilité engagée en cas de déclaration inexacte, et non que la signification de l’acte est régulière ; et que cette irrégularité a causé un grief à la société car les actionnaires mis en demeure auraient pu payer les rentes jusqu’à l’ouverture de la procédure collective ou solliciter des délais de paiement.

Ils ajoutent que la résolution du contrat emporte anéantissement ab initio et implique la remise en état des choses dans leur état antérieur ; que la crédirentière doit restituer ce qu’elle a reçu ; qu’en considérant que sa demande était non une demande en paiement mais une demande d’acquisition des sommes versées, les premiers juges ont nié l’effet retroactif de la résolution d’un contrat et les effets de la procédure collective qui interdit de privilégier une créance de dommages et intérêts antérieure résultant de l’exécution d’un contrat ; que seule une 'créance échue à titre privilégié de 3641,29 € au titre des échéances impayées pour les mois de février à juin 2012 et une créance à échoir à titre rpivilégié de 263'329,20 € au titre des échéances à échoir’ a été déclarée par Mme D , et non au titre 'd’une clause pénale’ ; que son préjudice financier n’est pas encore certain, car la créance d’arrérages de la rente pourrait lui être payée dans le cadre de la procédure collective, puisque la société est propriétaire de nombreux biens immobiliers en cours d’évaluation par un expert désigné par le juge commissaire.

Par conclusions déposées le 6 mai 2013 Mme L D demande à la cour de débouter les appelants de toutes leurs demandes, de confirmer en toutes ses dispositions le jugement entrepris, et ajoutant de condamner les appelants ès qualités à lui payer la somme de 5'000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile, outre les dépens.

Le commandement a été régulièrement délivré et le non paiement de la rente a causé un grave préjudice à la crédirentière qui est âgée, de santé fragile, et qui sera réparé par la non restitution tant du bouquet que des rentes déjà versées, comme déjà jugé.

La société LIFE INVESTFUND 3 INC , intimée, assignée le 19 mars 2013 selon procès-verbal de recherches infructueuses n’a pas constitué avocat .

MOTIFS :

Attendu en premier lieu, concernant la nullité du procès verbal de signification du commandement de payer, que le tribunal a déjà répondu par des motifs développés pertinents qui méritent adoption, sauf à leur ajouter que le fait que la personne présente au siège de la société qui s’est déclarée habilitée à recevoir l’acte ne soit pas salariée par la personne morale destinataire de l’acte ne rend pas la signification irrégulière, contrairement à ce qui est soutenu;

Attendu en conséquence que le jugement qui a dit que les effets de la clause résolutoire étaient acquis au crédirentier au 2 avril 2012, avant l’ouverture de la procédure collective, doit être approuvé ;

Attendu, en ce qui concerne le moyen des mandataires judiciaires tiré de l’article L 622-7 du code de commerce, que la demande de Mme D de voir résolue la vente par l’application de la clause résolutoire et qu’il soit dit que les sommes déjà versées lui sont acquises en application des stipulations contractuelles, ne peut s’analyser en une action en paiement de sommes prohibée par cet article, d’où il suit le rejet du moyen ;

Attendu ensuite, sur le moyen tiré de ce que la crédirentière n’a pas déclaré de créance à titre indemnitaire ou de clause pénale, que l’intimée a déclaré sa créance pour le montant total des rentes échues et à échoir, en indiquant expressément qu’elle entendait se prévaloir de la clause résolutoire articulée à la clause pénale ;que l’acte de vente liant les parties précise que l’arrérage des rentes déjà versées est de plein droit acquis au crédirentier « à titre de dommages et intérêts et d’indemnités forfaitairement fixés », de sorte que la créance a été régulièrement déclarée ;

Attendu qu’il est à relever par ailleurs que les mandataires considèrent un peu plus loin de leurs écritures, non sans contradiction, que la déclaration de créance est valable et que le préjudice est, selon eux, inexistant puisque ces sommes pourraient être encore réglées à Mme D à l’issue de la procédure collective ;

Attendu qu’il s’ensuit le rejet de ce moyen ;

Attendu que le montant de la clause pénale stipulée n’est pas excessif au sens de l’article 1152 du Code civil en ce qui concerne le montant total des arrérages de la rente déjà perçus par Mme D ;

Attendu, en revanche, en ce qui concerne le bouquet, que la partie du prix payé comptant doit être restituée à la société débirentière ; qu’en effet d’une part cette créance au titre de l’application d’une clause pénale pour s’opposer à la restitution du prix déjà versé en cas de résolution de la vente aurait du être déclarée au passif de la société, ce qu’elle a omis de faire dans sa déclaration de créance qui n’en fait pas mention ; qu’à supposer cette créance au titre du bouquet ait été régulièrement déclarée, la résolution de la vente, à raison d’une défaillance depuis le mois de février 2012 seulement, doit remettre les parties en l’état qui était le leur avant celle-ci ;

Attendu que le jugement déféré sera réformé sur ce point ;

Attendu que Mme D succombantdevra supporter la charge des dépens ;

PAR CES MOTIFS,

La cour statuant par arrêt contradictoire, prononcé publiquement, par mise à disposition au greffe,

Infirme le jugement déféré en ce qu’il a dit que la somme de 42 500 € payée comptant est acquise à Mme L D à titre de dommages et intérêts en réparation de son préjudice moral et financier ;

statuant à nouveau

Déboute Mme L D de sa demande de ce chef,

Confirme pour le surplus jugement déféré,

Y ajoutant

Vu l’article 700 du code de procédure civile,

Dit n’y avoir lieu de faire application de ce texte,

Condamne Mme L D aux dépens, et dit que ceux-ci seront recouvrés conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.

LE GREFFIER LE PRESIDENT

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