Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 12 février 2013, n° 11/07200

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Aix-en-Provence, 12 févr. 2013, n° 11/07200
Juridiction : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Numéro(s) : 11/07200
Décision précédente : Conseil de prud'hommes de Draguignan, 30 mars 2011, N° 09/73

Texte intégral

COUR D’APPEL D’AIX EN PROVENCE

18e Chambre

ARRÊT AU FOND

DU 12 FEVRIER 2013

N°2013/145

Rôle N° 11/07200

M’Hammed X

C/

SAS BERGERAT MONNOYEUR B

Grosse délivrée le :

à :

— Me Sandrine GUIDICELLI, avocat au barreau de TOULON

— Me Solenne RIVAT, avocat au barreau de MARSEILLE

Copie certifiée conforme délivrée aux parties le :

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de DRAGUIGNAN en date du 31 Mars 2011, enregistré au répertoire général sous le n° 09/73.

APPELANT

Monsieur M’Hammed X, demeurant Résidence l’Oiseau bleu, bât A11 – 83170 BRIGNOLES

représenté par Me Sandrine GUIDICELLI, avocat au barreau de TOULON

INTIMEE

SAS BERGERAT MONNOYEUR B, demeurant 117 rue Charles Michels – XXX

représentée par Me Solenne RIVAT, avocat au barreau de MARSEILLE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions de l’article 945-1 du Code de Procédure Civile, l’affaire a été débattue le 27 Novembre 2012, en audience publique, les parties ne s’y étant pas opposées, devant Madame Fabienne ADAM, Conseiller, chargé d’instruire l’affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :

Madame Gisèle BAETSLE, Président

Monsieur Guénael LE GALLO, Conseiller

Madame Fabienne ADAM, Conseiller

Greffier lors des débats : Mme J K.

Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 12 Février 2013

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 12 Février 2013

Signé par Mme Gisèle BAETSLE, Président et Mme J K, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS, PROCÉDURE ET MOYENS DES PARTIES

M. X a été embauché le 2/08/2004 en qualité de chauffeur livreur par la société Y aux droits de laquelle vient la SAS BERGERAT MONNOYEUR B ( BM B ) à compter du 1/06/2008.

A la suite d’une altercation avec son supérieur hiérarchique, M. Z, en date du 11/07/2008, M. X sera en arrêt maladie, postérieurement reconnu comme accident du travail par la commission de recours amiable de la CPAM du Var, le 20/04/2010.

Il ne reprendra pas son travail.

M. X a été licencié le 25/11/2008.

Saisi par M. X, qui conteste la légitimité de son licenciement de demandes en paiement de diverses indemnités et en fixation du salaire moyen des 12 derniers mois, par jugement du 31/03/2011, le Conseil de Prud’hommes de Draguignan a déclaré le licenciement nul et a condamné la SAS BERGERAT MONNOYEUR B à payer à M. X :

-11.000 € de dommages-intérêts

—  500 € en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile

M. X a régulièrement fait appel de cette décision.

Reprenant oralement leurs conclusions auxquelles il convient de se référer pour l’exposé de leurs moyens,

M. X d’une part sollicite la confirmation de la décision entreprise en ce qu’elle a constaté la nullité du licenciement et sa réformation pour le surplus de ses dispositions et réclame que son salaire mensuel soit fixé à la somme de 1735,79 € bruts

et que lui soit alloué:

—  20.829,48 € nets € des dommages-intérêts pour licenciement nul

—  41.658,96 € au titre des dommages-intérêts pour harcèlement moral et discrimination raciale

—  1.500 € en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile

tandis que l’employeur conclut à l’infirmation du jugement déféré devant le cour et sollicite la condamnation de au remboursement des sommes versées dans le cadre de l’exécution provisoire et à celle de 2000 € en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

MOTIVATION

Sur la nullité du licenciement:

M. X conclut à la nullité du licenciement sur le fondement des articles L1226-9 et L1226-13 du code du travail.

Ces articles sont applicables en matière de maladie professionnelle ou d’accident du travail et interdisent à l’employeur de procéder au licenciement du salarié en arrêt de travail pendant la suspension du contrat de sauf faute grave ou obligation de procéder à son remplacement.

Si le licenciement est prononcé, il est nul.

Mais, ne peut être déclaré nul le licenciement le licenciement d’un salarié en arrêt de travail à la suite d’un accident du travail si, à la date du licenciement, l’employeur ignorait l’existence d’un recours du salarié contre la décision de la caisse primaire ayant refusé de reconnaître qu’il s’agissait d’un accident du travail.

En l’espèce, M. X a saisi la CPAM du VAR le 20/08/2008 pour voir reconnaître à son arrêt de travail, suite à l’agression du 11/07/2008, la qualification d’ accident du travail.

Par courrier du 30/09/2008, la CPAM opposait un refus à sa demande.

Le 14/10/2008, M. X contestait cette décision et saisissait le commission de recours amiable de la CPAM dont la décision de prise en charge sera prise en commission du 20/04/2010 et sera notifié à M. X le 11/05/2010.

A défaut pour M. X d’apporter la preuve de ce que la SAS BERGERAT MONNOYEUR B avait connaissance de ce recours, le licenciement intervenu ne peut être déclaré nul sur le fondement des articles susvisés.

M. X soutient également qu’ayant fait l’objet de harcèlement moral et de discrimination, le licenciement est également nul à ce titre.

Caractérisent le harcèlement moral des agissements répétitifs ayant pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptibles de porter atteinte aux droits ou à la dignité des victimes, d’altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel.

M. X produit à l’appui de ses assertions des attestations de :

— MM. CAIRONI et A qui attestent du comportement agressif de M. Z lorsqu’il était au dépôt de la Garde mais non de faits de harcèlement moral à l’égard de M. X ainsi que le relève en réponse la SAS BN B.

— M. C qui certifie que M. X est un bon ouvrier et qu’il a appris de M. Y, l’ancien gérant, qu’une 'altercation raciste’ a eu lieu en février et alors qu’il n’était pas présent.

— M. D qui a constaté qu’il y a eu une première altercation entre M. X et M. Z et que ce dernier a eu des propos racistes envers le premier lors de son arrivée sur le secteur après avoir été transféré du dépôt de la Garde à Brignoles.

Les propos racistes ne sont pas rapportés

— M. D qui, dans une seconde attestation, relate des faits du mois de février 2008 donc avant le rachat de la société Y par la SAS BN B.

Ainsi que le fait remarquer la SAS BM B, les faits relatés datent d’une époque antérieure au rachat de la société Y par la SAS BM B, laquelle ne peut en être tenue pour responsable.

— M. E qui fait état d’ insultes raciales, de racisme, de violences dont on suppose qu’ils sont dirigés vers M. Z sans cependant le dire clairement.

— M. F Y qui, parlant de M. X , atteste que 'ce collaborateur a eu envers la société Y un comportement exemplaire, jamais de problème, très relationnel avec la clientèle et les individus de Brignoles et d’autres agences '.

— M. H Y qui fait l’éloge de M. X et confirme qu’il n’y a jamais eu avec cet employé de différends avec son entourage professionnel.

Ces attestations sont pour le moins étonnantes et en contradiction avec les précédents qui font état de problèmes relationnels avec M. Z au moins au mois de février 2008.

Il produit également son dépôt de plainte pour les faits du mois de juillet 2008 et une note de service de l’entreprise Y en date du 26 juin 2006 qui rappelle que les propos racistes ne sont pas de mise dans l’entreprise.

L’employeur relève à juste titre que 'le rachat de la société Y est intervenue au mois de juin 2008 et qu’elle n’avait aucun moyen de connaître le climat ambiant qui régnait au sein de la société Y et notamment du ressenti envers M. Z dans la mesure où le dossier disciplinaire de ce dernier était totalement vierge', que ni le médecin du travail ni les délégués syndicaux n’avaient été saisis.

Au vu des ces éléments, il s’avère que les faits du mois de juillet 2008 dont l’employeur produit le compte rendu qu’en a fait M. Z, bien différent de la plainte de M. X, s’avère unique au sein de l’entreprise de la SAS BM B et ne sauraient donc constituer des faits répétitifs de harcèlement moral rendant nul le licenciement dont M. X a fait l’objet.

Sur la légitimité du licenciement :

En cas de maladie non professionnelle ou d’accident n’ayant pas le caractère d’accident du travail, l’employeur peut licencier le salarié pour motif valable.

Au x termes des dispositions de l’article L1232-6 du code du travail, lorsque l’employeur décide de licencier un salarié, il lui notifie sa décision par lettre recommandée avec avis de réception.

Cette lettre comporte l’énoncé du ou des motifs invoqués par l’employeur.

Cette lettre fixe les limites du litige.

M. X a été licencié par lettre du 25/11/2008 qui reproche à M. X 'une utilisation abusive de votre téléphone professionnel durant vos arrêts maladie, sans aucune justification au regard de la fonction que vous occupez au sein de la société BM B.

Compte tenu des circonstances nous vous notifions par la présente votre licenciement pour cause réelle et sérieuse, prenant effet dès la première présentation de ce courrier recommandé. Compte tenu des circonstances, nous vous dispensons d’effectuer votre préavis .'

Il sera souligné qu le motif invoqué ne présente aucun caractère discriminatoire.

A l’appui de ce motif , la SAS BM B produit les factures de juillet, août et septembre 2008, qui font certes état de communications téléphoniques hors forfait mais de peu d’importance.

M. X ne conteste pas avoir utilisé le téléphone de service à des fins personnelles.

Il convient cependant de remarquer que la société aurait pu demander la restitution de ce téléphone dès l’arrêt de travail initial qu’elle a reçu, mais qu’elle a au contraire attendu l’ entretien préalable pour ce faire soit 3 mois plus tard.

Elle ne justifie pas qu’elle ait avant le licenciement, elle ait rappelé au salarié l’interdiction qui lui était faite de ne se servir du téléphone de service uniquement pour des communications professionnelles.

Par ailleurs, le salarié n’étant pas tenu, en période de suspension du contrat de travail, des obligations du contrat de travail, et seul est de nature à justifier son licenciement disciplinaire un acte de déloyauté ; que ne constitue pas un manquement à son obligation de loyauté le fait pour un salarié de téléphoner avec le téléphone de service dans le cadre du forfait qui est de toute façon décompté à la société et même au-delà du forfait dans la mesure où ce hors forfait n’est pas abusif, ce qui est le cas en l’espèce;

En conséquence, le motif avancé n’est pas suffisamment sérieux pour justifier le licenciement de M. X.

M. X est donc fondé dans sa demande initiale en dommages-intérêts qui seront fixés, compte tenu de son ancienneté et du salaire moyen sur les 12 derniers mois de 1775,75 € non contesté par l’employeur à la somme de 10654,74 €, M. X ne justifiant pas d’un préjudice plus important.

Il est équitable d’allouer à M. X la somme de 1500 € en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

La SAS BERGERAT MONNOYEUR B qui succombe supportera les dépens.

PAR CES MOTIFS

La Cour,

Statuant publiquement,

INFIRME le jugement entrepris,

et statuant à nouveau:

DIT que le licenciement est sans cause réelle et sérieuse et condamne la SAS BERGERAT MONNOYEUR B à payer à M. X :

—  10654,74 € de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

—  1500 € en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile

CONDAMNE la SAS BERGERAT MONNOYEUR B à payer à M. X la somme de1500 € au titre des dispositions de l’article 700 du nouveau code de procédure civile.

CONDAMNE la SAS BERGERAT MONNOYEUR B aux dépens.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT

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Textes cités dans la décision

  1. Code de procédure civile
  2. Code du travail
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Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 12 février 2013, n° 11/07200