Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 4-1, 24 juillet 2020, n° 17/13096

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Aix-en-Provence, ch. 4-1, 24 juill. 2020, n° 17/13096
Juridiction : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Numéro(s) : 17/13096
Décision précédente : Conseil de prud'hommes d'Aix-en-Provence, 11 juin 2017, N° F12/01127
Dispositif : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée

Sur les parties

Texte intégral

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 4-1

ARRÊT AU FOND

DU 24 JUILLET 2020

N° 2020/150

Rôle N° RG 17/13096 - N° Portalis DBVB-V-B7B-BA3TQ

E X

C/

SARL KY WEST

Copie exécutoire délivrée le :

24 JUILLET 2020

à :

Me Christine SIHARATH, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

Me Jean-philippe ROMAN, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation de départage d'AIX EN PROVENCE CEDEX 3 en date du 12 Juin 2017 enregistré au répertoire général sous le n° F 12/01127.

APPELANTE

Madame E X

née le […] à […], demeurant […]

Représentée par Me Christine SIHARATH, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

INTIMEE

SARL KY WEST prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège, demeurant […]

Représentée par Me Jean-philippe ROMAN, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

*-*-*-*-*

En application des dispositions de l'article 8 de l'ordonnance n°2020-304 du 25 mars 2020, les parties ont été informées que la procédure se déroulerait K audience et ne s'y sont pas opposées dans le délai de 15 jours.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 24 Juillet 2020.

COMPOSITION DE LA COUR

Madame AL AM, Conseiller faisant fonction de Président

Mme Nathalie FRENOY, Conseiller

Mme Stéphanie BOUZIGE, Conseiller

qui en ont délibéré.

ARRÊT

contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 24 Juillet 2020,

Signé par Madame AL AM, Conseiller faisant fonction de Président et Monsieur Kamel BENKHIRA, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

Madame E X a été embauchée en qualité d'équipier polyvalent à temps partiel le 2 novembre 2001 par la SARL KY WEST.

Elle a été promue au poste de formatrice à partir de novembre 2002, en contrepartie d'une rémunération mensuelle brute de 1045 euros pour une durée mensuelle de 110 heures de travail.

Par lettre recommandée du 11 mai 2009, Madame E X a dénoncé auprès de son employeur des faits de harcèlement moral, de discrimination et de violences physiques et morales de la part de Monsieur J Y, directeur du restaurant de Rognac, dans lequel elle était affectée depuis fin 2003.

Madame E X a été en arrêt de travail pour maladie du 6 avril 2011 au 31 décembre 2012.

Par requête du 6 novembre 2012, Madame E X a saisi la juridiction prud'homale d'une demande en résiliation judiciaire de son contrat de travail et de demandes en paiement de dommages-intérêts pour harcèlement moral, de dommages-intérêts pour discrimination, de rappel de salaire et d'indemnités de rupture.

À la suite de deux visites médicales de reprise des 19 mars et 2 avril 2013, Madame E X a été licenciée le 17 mai 2013 pour inaptitude et impossibilité de reclassement.

Par jugement de départage du 12 juin 2017, le conseil de prud'hommes d'Aix-en-Provence a débouté E X de l'intégralité de ses demandes, a dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile et a condamné E X aux entiers dépens.

Ayant relevé appel, Madame E X conclut, aux termes de ses conclusions récapitulatives notifiées par voie électronique le 28 février 2020, à l'infirmation du jugement rendu par le conseil de prud'hommes en toutes ses dispositions aux fins de voir constater les manquements de l'employeur en matière d'organisation de visite médicale de reprise compte tenu de la décision de la CPAM de classement en invalidité 2ème catégorie, de voir constater la discrimination liée à l'âge de la requérante et à ses origines, de voir constater le harcèlement moral, les violences et le stress subi par la requérante, de voir constater les manquements de l'employeur en matière salariale, en conséquence, à titre principal, au prononcé de la résiliation judiciaire du contrat de travail et des avenants conclus entre les parties aux torts exclusifs de l'employeur, à la condamnation de la SARL KY WEST à verser à Madame X les sommes suivantes :

-2786,66 euros à titre d'indemnité légale de licenciement,

-2090 euros à titre de préavis, outre 209 euros à titre de congés payés sur préavis,

-25 100,64 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement nul,

-2612,50 euros à titre d'indemnité compensatrice de congés payés,

à titre subsidiaire, à ce que soit constatée la violation de l'obligation de reclassement, en conséquence, à ce que soit jugé le licenciement K cause réelle et sérieuse, à la condamnation de l'employeur à verser les sommes suivantes :

-2786,66 euros à titre d'indemnité légale de licenciement,

-2090 euros à titre de préavis, outre 209 euros à titre de congés payés sur préavis,

-20 000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement K cause réelle et sérieuse,

-2612,50 euros à titre d'indemnité compensatrice de congés payés,

en tout état de cause, à la condamnation de la SARL KY WEST à verser à Madame X les sommes suivantes :

-25 000 euros à titre de dommages et intérêts pour le préjudice distinct né de harcèlement moral, violences et stress au travail,

-50 000 euros à titre de dommages et intérêts pour le préjudice distinct né de discrimination fondée sur l'âge de la requérante et ses origines,

-19 001,28 euros à titre de rappel de salaire, outre 1900,13 euros de congés payés afférents,

-15 000 euros de dommages et intérêts pour le préjudice distinct né de la carence fautive de l'employeur en matière salariale,

-1000 euros de dommages et intérêts pour le préjudice distinct né du retard dans la mise en place de la visite médicale de reprise,

à ce que soit ordonnée la délivrance des documents de rupture et bulletins de salaire rectifiés sous astreinte de 150 euros par jour de retard à compter de la décision à intervenir et avec faculté de liquidation, à ce qu'il soit ordonné à la SARL KY WEST de procéder à la régularisation de la situation de Madame X auprès des Caisses de Retraite et de Prévoyance, sous la même astreinte et avec la même faculté de liquidation, à ce qu'il soit jugé que les sommes allouées porteront intérêts de droit avec anatocisme à compter de la saisine en justice et à la condamnation de la SARL KY WEST à verser la somme de 3000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et aux éventuels dépens.

La SARL KY WEST conclut, aux termes de ses conclusions notifiées par voie électronique le 27

octobre 2017, au visa des articles R.1454-29, R.1454-30 et R.1454-31 du code du travail (anciennement R.516-40 du code du travail), à la confirmation du jugement dont appel en toutes ses dispositions, en conséquence, au débouté de Madame X de sa demande de prononcé de la résiliation de son contrat de travail aux exclusifs de la société KY WEST, au débouté de Madame X de sa demande de prononcé de la nullité du licenciement, à ce qu'il soit jugé que le licenciement de Madame X est fondé sur une cause réelle et sérieuse, au débouté de Madame X de toutes ses demandes et à la condamnation de Madame X au paiement d'une somme de 5000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens.

L'ordonnance de clôture a été prononcée le 11 juin 2020.

L'affaire ayant été fixée initialement à l'audience du 29 juin 2020 à 14 heures, audience annulée suite à la propagation de l'épidémie de covid-19, les parties ont été avisées le 17 juin 2020 que la décision serait rendue K audience, en vertu de l'article 8 de la loi n° 2020-304 du 25 mars 2020 portant adaptation des règles applicables aux juridictions de l'ordre judiciaire statuant en matière non pénale.

Les parties ne se sont pas opposées à la procédure K audience dans les 15 jours suivant l'avis.

SUR CE :

Sur la requalification du contrat à temps partiel en temps complet :

Madame E X soutient qu'elle a signé nombre d'avenants à son contrat de travail qui modifiaient la durée du travail, qu'il est faux de prétendre que la salariée aurait elle-même sollicité la conclusion d'avenants, que les trois notes produites par l'employeur ont été rédigées par Madame X sous la dictée de son employeur pour respecter, comme l'employeur le lui présentait alors, la procédure interne, qu'il ressort manifestement de ces avenants que la salariée ne pouvait, en pratique, travailler pour un autre employeur et qu'elle devait se tenir à la disposition permanente de son employeur qui pouvait à sa guise modifier les horaires de travail, qu'elle devait se tenir à la disposition de son employeur de 8 heures du matin à 22 heures le soir et parfois jusqu'à 23h45, qu'elle était donc placée dans l'impossibilité de prévoir à quel rythme elle devait travailler et et devait se tenir constamment à la disposition de son employeur, que l'employeur allègue K toutefois en apporter la moindre preuve que des plannings auraient été tenus, par voie d'affichage, à la disposition des salariés, que son contrat de travail à temps partiel doit être requalifié en un contrat à temps complet et qu'il est dû à Madame X la somme de 19 001,28 euros à titre de rappel de salaire (395,86 euros par mois sur la base d'un temps complet) sur la période de novembre 2007 (ayant introduit son action en novembre 2012) jusqu'en novembre 2011 (en arrêt maladie depuis le mois d'avril 2011, l'employeur était tenu par la convention collective applicable de lui verser un complément de salaire jusqu'en novembre 2011).

Elle sollicite également 15 000 euros de dommages intérêts pour le préjudice distinct né de la carence fautive de l'employeur.

La SARL KY WEST fait valoir que la Convention collective prévoit en son article 35 les dispositions applicables aux salariés en contrat de travail à temps partiel, que la répartition de la durée contractuelle de travail est effectuée sur les semaines du mois, que ces dispositions ont été respectées, qu'il est prévu que la modification ne peut intervenir qu'après un délai de prévenance d'au moins 7 jours, qu'il est bien indiqué dans les avenants que la répartition peut être modifiée et l'information donnée 7 jours avant son entrée en vigueur par affichage sur les lieux de travail, qu'en l'espèce le planning de travail est affiché 10 jours avant, comme attesté par plusieurs salariés, et que Madame E X doit être déboutée de ses demandes.

***************

Madame E X a été embauchée le 2 novembre 2001 dans le cadre d'un contrat de travail à durée indéterminée à temps partiel, pour une durée mensuelle de 87 heures, avec une répartition des horaires pour une durée de 19 heures la semaine 1, de 21 heures la semaine 2, de 18 heures la semaine 3 et de 22 heures la semaine 4, avec des plages de planification définies à l'article 6 du contrat (mercredi de 9 à 15 heures, jeudi de 10 à 17 heures et de 18 à 22h30, vendredi de 11 à 17 heures et de 18h15 à 23h45, samedi de 11 à 17 heures et de 18h15 à 23h45, dimanche de 10 à 16 heures et de 18 à 23 heures).

Des avenants au contrat de travail ont été signés entre les parties successivement :

-le 18 mars 2002 (à compter du 1er avril 2002) mentionnant un horaire mensuel de 120 heures, réparties à L de 29 heures la semaine 1, de 28 heures la semaine 2, de 27 heures la semaine 3 et de 28 heures la semaine 4,

-le 17 juin 2002 (à compter du 1er juillet 2002) mentionnant un horaire mensuel de 120 heures et une modification des plages de planification,

-le 29 janvier 2003 (à compter du 1er février 2003) mentionnant un horaire mensuel de 120 heures et une modification des pages de planification,

-le 12 mai 2003 (à compter du 1er juin 2003) mentionnant un horaire mensuel de 120 heures et une modification des plages de planification,

-le 18 août 2013 (à compter du 1er août 2013 jusqu'au 31 août 2003) mentionnant un horaire mensuel de 130 heures, réparties à L de 30 heures la semaine 1, de 29 heures la semaine 2, de 31 heures la semaine 3 et de 30 heures la semaine 4,

-le 1er octobre 2003 (à compter du 7 octobre 2003) mentionnant un horaire mensuel de 120 heures et une modification des plages de planification,

-le 15 novembre 2004 (à compter du 1er décembre 2004) mentionnant un horaire mensuel de 130 heures, réparties à L de 30 heures la semaine 1, de 31 heures la semaine 2, de 29 heures la semaine 3 et de 30 heures la semaine 4, et une modification des pages de planification,

-le 6 septembre 2005 (à compter du 18 septembre 2005) mentionnant un horaire mensuel de 130 heures et une modification des pages de planification,

-le 25 octobre 2006 (à compter du 29 octobre 2006) mentionnant un horaire mensuel de 130 heures et une modification des plages de planification,

-le 14 février 2007 (à compter du 1er mars 2007) mentionnant un horaire mensuel de 110 heures, réparties à L de 25 heures la semaine 1, de 26 heures la semaine 2, de 24 heures la semaine 3 et de 26 heures la semaine 4, et une modification des plages de planification,

-le 22 août 2007 (à compter du 1er septembre 2007) mentionnant un horaire mensuel de 110 heures, réparties à L de 25 heures la semaine 1, de 26 heures la semaine 2, de 25 heures la semaine 3 et de 25 heures la semaine 4.

Il est précisé dans le contrat de travail initial et dans les avenants (soit expressément, soit par la formule "les autres termes de votre contrat de travail restent inchangés") que la répartition des horaires peut-être modifiée "en fonction des nécessités de travail dans l'entreprise. Dans ce cas, la nouvelle répartition des horaires sera affichée sur les lieux de travail sept jours avant son entrée en vigueur".

Si Madame X conteste avoir été à l'initiative de certaines modifications et soutient que les demandes écrites de sa main et signées par elle, versées par l'employeur (demande du 17 mars 2002 d'augmentation du nombre d'heures de travail, demande du 3 décembre 2003 de remplacement d'une journée de travail par une autre, demande du 13 novembre 2004 d'augmentation des heures de travail, demande du 17 octobre 2006 de changement de son jour "OFF"), ont été rédigées sur dictée de l'employeur, K en faire la démonstration, il n'en reste pas moins qu'elle a donné son accord à chaque modification par la signature des avenants au contrat de travail.

Le contrat de travail de Madame X et les avenants mentionnent notamment la durée mensuelle prévue, la répartition de la durée du travail entre les semaines du mois, les plages de planification possible (c'est-à-dire les périodes à l'intérieur desquelles les horaires de travail peuvent être planifiés), les cas dans lesquels une modification éventuelle de cette répartition peut intervenir ainsi que la nature de cette modification, la notification de cette modification à la salariée 7 jours au moins avant la date à laquelle cette modification doit intervenir et les limites dans lesquelles peuvent être accomplies des heures complémentaires au-delà de la durée de travail fixée par le contrat, ce dont il résulte qu'ils ont été établis conformément aux prescriptions de l'article L.3123-14 du code du travail (dans sa version antérieure à la loi n°2016-1088 du 8 août 2016) et conformément aux dispositions conventionnelles relatives au travail à temps partiel (Avenant n° 24 du 13 novembre 1998 relatif au travail à temps partiel, ayant annulé et remplacé, dans toutes ses dispositions, l'article 35 de la Convention collective nationale de la restauration rapide en date du 18 mars 1988).

Si Madame X critique l'étendue des plages de planification à l'intérieur desquelles ses horaires de travail pouvaient être fixés, l'amplitude horaire desdites plages n'excède pas cependant le double seuil, journalier et hebdomadaire, fixé à l'article 4.5 de l'Avenant n° 24 du 13 novembre 1998 (seuil hebdomadaire : durée hebdomadaire de travail × 3, plafonnée à 75 heures ; seuil journalier : 12 heures)

Dès lors que le contrat de travail de Madame E X répond aux exigences des dispositions légales et conventionnelles applicables, il incombe à Madame X de rapporter la preuve des heures effectivement réalisées et de sa mise à disposition permanente de l'entreprise.

Madame E X ne prétend pas avoir accompli des heures de travail au-delà de son temps de travail et des heures complémentaires contractuellement prévus. Si elle affirme, K verser d'élément probant, que les plannings n'étaient pas mis à la disposition des salariés par voie d'affichage comme soutenu par l'employeur, ce dernier produit toutefois les témoignages de 8 salariés, établis en conforrmité avec les dispositions de l'article 202 du code de procédure civile, ces membres du personnel rapportant avoir toujours eu leurs plannings communiqués "au moins 10 jours avant (la) période de travail", plannings "affichés en salle de repos".

Madame X ne rapporte pas la preuve d'avoir été contrainte de se tenir à la disposition permanente de son employeur, ni qu'elle était placée dans l'impossibilité de prévoir à quel rythme elle devait travailler.

Il convient, par conséquent, de confirmer le jugement en ce qu'il a débouté Madame X de sa demande de requalification de son contrat de travail à temps partiel en contrat à temps plein et de ses demandes subséquentes de rappel de salaires et d'indemnisation au titre d'une carence fautive de l'employeur en matière salariale.

Sur le harcèlement moral et la discrimination :

Madame E X soutient qu'elle a commencé à souffrir du comportement fautif de son supérieur hiérarchique, Monsieur J Y, quelques semaines après que ce dernier ait été nouvellement nommé à la direction de l'établissement de Rognac, que Monsieur Y reprochait notamment à la salariée d'être bien trop âgée pour travailler dans la restauration rapide

(Madame X était alors âgée de 52 ans), qu'elle subissait continuellement des pressions morales, des réflexions quotidiennes désobligeantes, des insinuations déplaisantes, le ton employé étant systématiquement sarcastique et sournois, qu'elle sera encore davantage harcelée après s'être plainte directement à Monsieur Y, qu'il n'aura de cesse de la réprimander, de l'humilier devant ses collègues de travail en l'accusant injustement de mal faire son travail, qu'elle sera mise à l'écart, isolée, constamment surveillée, son vestiaire fouillé, que tout sera mis en 'uvre pour la faire craquer, qu'elle était d'ailleurs la seule formatrice à ne pas bénéficier de primes, qu'en outre, au mépris de l'avis d'aptitude avec réserve émis le 26 avril 2010 par le médecin du travail qui avait interdit le port de charges lourdes, Monsieur Y la postera tout de même aux "frites" qui est le poste le plus difficile en ce qu'il comporte la manipulation de cartons très lourds, que l'employeur lui faisait également des remarques sur ses origines, que pire encore, dans des accès de colère, Monsieur Y la menacera à plusieurs reprises tant verbalement que physiquement, s'approchant d'elle, la bousculant avec force et frappant dans un mur manquant de peu de la cogner au visage et que c'est à la suite d'un énième assaut de violence le 5 avril 2011 que Madame X a été placée en arrêt de travail, ne pouvant plus supporter cette situation et le stress engendré.

Elle réclame la somme de 25 000 euros à titre de dommages et intérêts pour préjudice distinct résultant du harcèlement moral, des violences et stress au travail, ainsi que la somme de 50 000 euros à titre de dommages et intérêts pour le préjudice distinct résultant de la discrimination fondée sur l'âge de la requérante et ses origines.

La SARL KY WEST réplique que l'argument sur la discrimination liée à l'âge et les origines est inadmissible pour l'entreprise McDonald's dont l'origine du personnel est des plus cosmopolites, tel que cela résulte de la liste du personnel comprenant la date de naissance et l'âge de chacun ainsi que du registre du personnel, que les attestations produites par l'appelante sont empruntes de contradiction, que Monsieur Z se garde de dire que lui-même a engagé une procédure à l'encontre de son employeur, que ce témoin indique que Madame X occupait le poste de préparation des frites alors que Madame A indique que la salariée se trouvait en caisse, que Madame X croit pouvoir dire que le poste "frites" conduit à la manipulation de cartons très lourds alors que les employés McDonald's qui travaillent à ce poste ne soulèvent pas les cartons mais se contentent de prendre dans les cartons des sachets qui pèsent 2,2 kg, ce qui ne peut être considéré bien évidemment comme un carton "très lourd", que Madame X produit des certificats de médecins parlant de dépression, qui selon les dires de l'intéressée, serait liée à son activité, K aucune constatation objective, que la société concluante prouve de manière objective, notamment par de nombreuses attestations, qu'il n'y a jamais eu de discrimination ou harcèlement de la part des supérieurs de Madame X qui a toujours obtenu les faveurs de son employeur (à l'initiative de la salariée, le contrat de travail a fait l'objet de plusieurs avenants ; elle a sollicité un bilan de compétence et a demandé à suivre une formation professionnelle, ce qui lui a été accordé K difficulté), que la salariée acceptait difficilement l'autorité, que ce qu'elle qualifie de harcèlement est en réalité un rappel à l'ordre suite au non-respect des procédures repas, qu'en réalité, Madame X a toujours été une employée privilégiée et très exigeante dans son travail, n'hésitant pas depuis toujours, à chaque remontrance, à parler de harcèlement K pour autant accepter de se plier à la réglementation interne de la société et que le jugement doit être confirmé et la salariée déboutée de ses demandes.

***************

A l'appui de ses demandes, Madame E X produit les éléments suivants :

-une attestation du 20 février 2012 de Monsieur B, non conforme aux dispositions de l'article 202 du code de procédure civile et à laquelle n'est pas jointe la copie d'une pièce d'identité, attestation dont l'authenticité ne peut être vérifiée et qui doit être écartée des débats;

-le courrier recommandé du 11 mai 2009 adressé par Madame X à la SARL KY WEST, à

l'attention de Monsieur C, avec copie à l'inspection du travail, en ces termes :

« Par la présente, je vous fais part des conditions de travail auxquelles je suis contrainte, en tant qu'équipier en votre restaurant MacDonald's situé à […].

En effet, depuis la fin de l'année 2003, et début 2004 et comme je vous l'ai déclaré à plusieurs reprises, Monsieur Y J, le directeur de restaurant, m'assujetti à de nombreuses entrave au bon déroulement de mon poste soit :

- L'Harcèlement moral défini'tels que :

- l'espionnage K cesse de mes prises de commande en caisse K L (surveillance extrême),

- l'objectif fixé de cette personne à me faire licencier par tous les moyens par des directives données aux Manager de restaurant "il n'y a pas d'écart de caisse, il faut qu'on la vire par tous les moyens, trouvez quelque chose" affirmations transmises par un membre du personnel,

- les fouilles répétés de mon casier K mon accord ou avertissement préalable où Monsieur Y s'est permis de jeter à la poubelle quelques-uns de mes effets personnels (élastique de type "chouchou" pour les cheveux, mon rouge à lèvres, ma brosse à cheveux),

- l'évolution de mon poste nulle, malgré l'irréprochabilité de mon travail fourni, malgré mon ancienneté et mes demandes : il me juge sur son ressenti personnel et non professionnel,

- Monsieur Y J fait également preuve de discrimination vis-à-vis de mon âge quant au poste que j'occupe, en tenant les propos suivants : "mais tu ne devrais pas travailler ici, c'est un travail de jeune, toi tu es vieille et ménopausée !", des propos qui m'ont beaucoup affecté et qui ne m'ont pas laissé indifférente à ce jour, et lorsque je vous en ai informé personnellement, Monsieur Y J m'a menacé en me disant "t'es aller voir D !' Tu vas voir, avec moi t'es grillé !".

- Aussi, Monsieur Y J, lors d'un entretien avec ma personne, a su faire preuve de violence et d'impulsivité à mon égard et a mis un coup de poing sur le mur qui était à proximité de mon visage, simplement parce que nous n'avions pas le même point de vue, et lorsque je vous en ai parlé lors d'un entretien, vous m'aviez clairement déclaré "oui, mais E, il ne l'a pas mit à toi le coup !...",

- Dernièrement un outil de travail pour la prise de commande a été mis en place. N'ayant jamais été formé sur cet outil, Monsieur Y, lors d'un "Rush", m'a contrainte à l'utiliser malgré que je ne connaissais pas du tout son fonctionnement, dans le but de me déstabiliser lors de ma prise de fonction, d'autant plus que le superviseur de restaurant (Éric) était présent,

- Mes horaires et jours de travail ont été mis en place d'un commun accord avec vos services, et Monsieur Y J à souhaiter, malgré mon désaccord, me faire signer un avenant à mon contrat, qui de plus est, n'était pas du tout à mon avantage.

Je vous informe également que malgré plusieurs informations transmises sur mon indisponibilité de travail concernant le jeudi soir pour des raisons d'activités sportives, aucun changement n'a été effectué, et Monsieur Y continu à me mettre en service.

Enfin, tout est mis en 'uvre pour me provoquer, voire me démotiver.

Mais ce qui me fait le plus de tort, se sont ses agissements humiliants vis-à-vis de moi K L en incitant les membres du personnel de toutes catégories à être contre moi, ces paroles désobligeantes envers mes origines maghrébines en me demandant à chaque approche de l'été "alors tu ne vas pas au bled cette année '!" en y ajoutant un peu d'ironie, il me harcèle à chaque moment de pause pour contrôler ce qu'il y a sur mon plateau repas contrairement aux autres employés.

Toutes ces raisons font qu'aujourd'hui, je me retrouve dans une situation très critique, de part ses violences physiques et morales et l'harcèlement constant duquel je suis victime.

À ce jour, chaque fois que je vous fais part de ces faits et que vous tentez de les limiter en vous entretenant avec Monsieur Y J, la situation s'envenime d'avantage et empire.

De plus, ce qui est désolant, c'est que la réponse que j'ai eu de votre part face à ces agissements, est "mais qu'est-ce que tu veux que j'y fasse E ' Je peux rien faire".

Donc que puis-je faire moi, si vous-même ne pouvait rien faire '

Par la présente, Monsieur le chef d'entreprise, je vous demande par écrit, de bien vouloir faire le nécessaire afin que cette situation cesse au plus vite car celle-ci m'atteint profondément'»;

-le courrier recommandé du 11 mai 2009 de Madame E X adressé à l'inspection du travail avec copie de la lettre ci-dessus expédiée à son employeur ;

-le courrier recommandé du 27 mai 2009 de la SARL KY WEST adressé en réponse à Madame E X, avec copie à l'inspection du travail, en ces termes :

« Votre courrier, en date du 11 mai dernier, a retenu toute mon attention et vous trouverez ci-dessous mes observations.

Tout d'abord, ainsi que je vous l'avais précisé oralement, j'ai tenu à rencontrer personnellement votre directeur, J Y, afin de mieux comprendre la situation que vous relatez et obtenir des précisions concernant les faits évoqués. Ceci est réalisé.

Revenons sur votre situation au sein de notre entreprise.

Engagée en qualité d'équipière polyvalente, vous avez été recrutée en date du 2 novembre 2001 (depuis 7 ans 1/2) sur la base de 20h par semaine (87h par mois) avec 5 jours d'activité du mercredi au dimanche.

Dès avril 2002 (5 mois après votre embauche) et pour faire suite à votre demande votre durée mensuelle de travail était portée à 120h puis, un peu plus tard, toujours suite à votre demande, portée à 130h avec modifications de vos jours de repos qui devenaient dimanche et lundi, ceci suivant un avis favorable émis par votre directeur actuel, J Y !.

Et, pour finir sur ce chapitre, en février 2007, vous avez, à nouveau, souhaité des changements à savoir obtenir 3 jours de repos consécutifs, les vendredis, samedis et dimanches tout en ramenant votre contrat à 110h mensuels !. Tout ceci vous a été accordé à titre exceptionnel puisque notre entreprise à un fort besoin de main d''uvre pendant ces 3 jours de fin de semaine!.

Sur tous ces points évoqués je crois que vos demandes ont été étudiées très largement à votre avantage, par M. Y puisqu'elles ont répondu, point par point, à vos souhaits ce que probablement peu d'entreprises auraient été disposées à accepter puisqu'elles modifient la planification de certains de vos collègues de travail !.

D'autre part vous évoquez "l'objectif" d'J Y de vous licencier par tous les moyens !.

Les faits évoqués plus haut concernant la réalisation de vos souhaits en matière d'aménagement de votre temps de travail ne vous semblent-t-ils pas un peu contradictoires '

En ce qui concerne votre âge vous me semblez totalement intégrée à l'entreprise existante et à ma connaissance, ce n'est un sujet de discussion pour personne. La meilleure preuve est sûrement que la grande majorité de votre travail se passe en ligne de caisse donc au contact de la clientèle et en représentante de notre enseigne !.

Enfin je ne peux vous laisser proclamer que vous subissez des violences physiques, ceci est évidemment et heureusement totalement faux. Nous avons d'ailleurs, ainsi que vous le précisez, déjà eu l'occasion de l'évoquer ensemble. Vos propos, à cet égard ne sont pas exagérés, ils sont simplement mensongers !.

D'autre part vous évoquez vos origines. Vous savez, comme moi, que dans notre entreprise AUCUNE discrimination raciale ou religieuse n'est effectuée et ce, E, depuis l'ouverture de notre restaurant. Si besoin était, il suffit de regarder l'équipe de vos supérieurs hiérarchiques, en effet sur 6 membres de l'équipe de gestion 3 ont la même origine que vous et de plus promus directement, et avec grande satisfaction, par J Y !.

Je pense qu'au vu de tous ces éléments il convient, E, de garder L et mesure dans les propos.

Je suis à votre disposition pour vous entendre, en présence de votre directeur, afin, s'il reste quelques malentendus, que nous puissions les dissiper. Il semble en effet nécessaire qu'une relation d'une plus grande confiance s'établisse pour permettre de retrouver, au quotidien, la finalité de notre travail à savoir un service à la clientèle de qualité.

Je reste à votre écoute.

Bien cordialement » ;

-une lettre de rappel à l'ordre du 9 février 2011 de Monsieur J Y à l'adresse de Madame E X, en ces termes :

« La présente lettre a pour objet de vous rappeler les consignes de travail que vous avez omises.

En date du 31 janvier 2011, du 01 février 2011, du 02 février 2011 ainsi que du 07 février 2011, j'ai pu constater que vous ne respectiez pas les procédures mises en place au sein du restaurant, notamment celles concernant la "tenue de travail" et "les repas employés" (cf articles 14 et 16 du règlement intérieur).

En effet, les membres de l'équipe de gestion présents ont remarqué que vous emportiez vos repas après vos heures de travail et j'ai pu moi-même le constater avec vous le 07 février 2011. De plus ce même jour vous ne vous êtes pas changée après votre travail et, contrairement au règlement, avez quittée le restaurant dans votre tenue de travail.

Je vous rappelle que vous avez l'obligation de respecter le règlement intérieur ainsi que les procédures existantes et vous demande de vous conformer avec effet immédiat à ces obligations.

Je vous informe par la présente que si de tels manquements devaient perdurer, une procédure disciplinaire pouvant aboutir au prononcé d'une sanction pourra être déclenchée.

Je vous souhaite et vous engage vivement à prendre en compte avec effet immédiat et durablement mes observations' » ;

-le courrier en réponse du 12 février 2011 de Madame E X, en ces termes :

« [...] En effet, je ne conteste pas les faits qui m'ont été reprochés, cependant, comme je vous l'ai expliqué le 7 février 2010 lorsque vous m'avez fait part verbalement de vos observations (sur le fait que j'ai emporté mon repas et quitté le restaurant K m'être au préalable changée de tenue), j'ai dû quitter précipitamment mon poste à la fin de mes horaires de travail à 13h00 car j'ai dû me rendre à mon rendez-vous relatif à mon Bilan de compétences à 14h00 (pour lequel vous êtes bien entendu avisé) et faute de temps, j'ai dû faire exception, sachant que des odeurs de cuisines et de fritures se faisaient ressentir sur ma personne et que le restaurant n'ayant pas de sanitaires, je trouvais incohérent de m'habiller en tenue civile avant de m'être au préalable doucher, chose que j'ai faite en rentrant me préparer à mon domicile pour ce même rendez-vous.

Toutefois, pour les 31 janvier, 1 et 2 février 2011, je ne comprends pas pourquoi j'ai été la seule à être concernée par ces constatations, sachant que mes collègues de travail équipier polyvalent et également l'équipe de gestion prennent eux aussi leurs repas en dehors du restaurant, ils les emportent avec eux à l'extérieur...

Ces agissements à mon égard et uniquement à mon égard prouvent une nouvelle fois votre mésentante avec ma personne qui ne m'a jamais été justifiées à ce jour.

Il s'agit donc selon le code du travail d'un harcèlement moral afin de compromettre mon avenir professionnel au sein du restaurant'

Monsieur Y, toutes mes démarches n'ayant pas abouties à ce jour, si cet harcèlement définit ci-dessus ne cesse pas à compter de ce jour, je me verrais dans l'obligation d'attenter une procédure pénale à votre encontre pour le motif suivant HARCELEMENT MORAL.

Espérant que nos relations de travail s'amélioreront à l'issue de ce courrier et que les reproches qui m'ont été communiqués dans votre lettre seront les mêmes tous les membres du personnel et non plus uniquement à ma personne' » ;

-l'attestation du 4 février 2013 de Monsieur M Z, qui déclare :

« J'ai été témoin de discrimination envers Me E X en l'enceinte de l'entreprise SARL KY WEST.

Par exemple, l'ensemble de l'équipe de gestion avait pour ordre de Mr Y J de poster E au poste de frite, soit le poste le plus "ingras". Malgré ses demandes de changement de postes, c'était continuellement refusé.

En toute objectivité, le directeur J Y se trouve être une personne haineuse et nerveuse lorsque les choses ne vont pas dans son sens.

J'ai eu l'occasion de le voir mettre des coups de poing dans le mur et même une bagarre avec un client'

J'ai travaillé au restaurant MacDonald Rognac avec Madame E X de octobre 2005 à fin janvier 2011 donc 4 ans en tant que que Manager » ;

-une deuxième attestation du 21 mai 2013 de Monsieur M Z, qui atteste :

« j'atteste sur l'honneur que la prise de repas à emporter, au sein de l'entreprise SARL KY WEST à Rognac était effective, par toute l'équipe de gestion dont moi, des formateurs et des équipiers. Bien que non tolérée, c'était une pratique de tous les employés. Sur ce sujet, Me E X fût l'objet d'une surveillance poussée Mr Y, bien plus que les autres membres de l'équipe. Par cette attestation, je ne détaille pas le règlement intérieur de l'entreprise, mais bien les pratiques réelles et effectives de toute l'équipe' » ;

-une troisième attestation du 18 décembre 2017 de Monsieur M Z, qui certifie :

« je certifie sur l'honneur que Me X n'était pas violente ou agressive, à aucun moment j'ai pu constater cela pendant ces prises de poste. En effet j'ai été Responsable opérationnelle pendant 4 ans et j'ai suffisant travaillé avec Me X pour certifier que tout les dires de la partie adverses sont calomnieuse et mensongères. Mon directeur Mr Y ainsi que l'ensemble de l'équipe de direction m'ordonner souvent de posté Me X à des postes dévalorisant tel que les frites. J'atteste bien que Me N O a été pendant des années la compagne de Mr Y et elle est la mère de ses trois enfants (de Mr Y).

Pendant tout le temps où j'ai pu travailler avec Me X, je n'ai constaté aucunement la moindre erreur de sa part (aucune absence, assidu, consciencieuse) malgré tout ce que les autres membres de l'équipe de responsable ont pu lui faire.

Aussi, je n'ai aucune connaissance de l'affaire avec Mlle X P et je ne vois pas pourquoi cela se trouve dans cette affaire.

Je tenais personnellement que j'ai été licencié par une accusation infondée (vol d'argent) aucune preuve a été trouvée et j'ai beaucoup perdu à cause des mêmes personnes qui attaquent Me X, évidemment je les attaque et j'ai gagné aux prud'hommes » ;

-l'attestation du 13 janvier 2013 de Madame Q A, K emploi, qui relate :

« J'ai travaillé à MacDonald's Rognac avec Mme E X de novembre 2003 à octobre 2008. Durant cette période j'ai pu constater que Mr J Y, directeur du restaurant, ainsi que l'équipe de Gestion présente à cette époque étaient K cesse à observer, à épier ses moindres faits et gestes et d'autant plus lorsque Mme E X se trouvait en caisse. On pouvait ressentir qu'elle n'était pas du tout appréciée par cette équipe de gestion alors qu'elle travaillait comme n'importe quel équipier polyvalent.

Suite à cela, j'ai surpris également Mr J Y dans les vestiaires des femmes en train de fouiller dans le casier personnel de Mme E X » ;

-l'attestation du 23 janvier 2013 de Monsieur R S, magasinier, qui rapporte :

« Me X a subi d'énormes pressions morales de la part de Mr Y J au sein de son activité dans le restaurant, qui se caractérisait notamment et particulièrement par des réflexions très désagréables et répétitives sur son âge telles que : "A ton âge pourquoi tu travailles à McDo!", J'ai eu l'occasion de l'entendre en personne.

Elle était mise à l'écart et essentiellement posté aux frites durant les heures de rush afin qu'elle ne soit pas en contact direct avec la clientèle et car c'était un poste très difficile et ingrat de par le poids des cartons de frites à porter pour réapprovisionner les congélateurs ainsi que par la chaleur des friteuses et des projections d'huiles, afin de la pousser à bout physiquement et psychologiquement.

Mr Y est une personne impulsive et lunatique, j'ai entendu pas mal de critiques injustifiées de la part de l'équipe de gestion et de Mr Y, ils étaient médisants sur cette personne et son travail et cela devant nous, les autres employés, alors qu'elle faisait correctement son travail. Il n'y avait plus de tabou quand il s'agissait de Me X. Elle était l'unique employée à subir des contrôles de son plateau repas. L'équipe de gestion lors des évaluations, privilégié les personnes avec qui ils avaient un bon feeling. Elle était pas jugée sur son travail, mais sur sa personne, elle travaillait autant que les autres... mais n'avait pas plus de considération pour autant. Il est certain que Me X a été victime d'agissements discriminatoires car elle était la seule dans ce cas au sein du restaurant.

J'ai travaillé à MacDonald's Rognac du 14 juin 2004 au 30 juin 2008 » ;

-une deuxième attestation du 22 mai 2013 de Monsieur R S, qui déclare :

« Je confirme mes affirmations concernant les faits dont a été victime Me E X au sein du restaurant McDonald's de Rognac. Elle était essentiellement postée aux frites durant les heures de "rush" et était soumise à de grosses pressions morales exercées par Mr Y.

Aussi, je certifie sur l'honneur que tous les employés et manager du restaurant dont moi-même emportaient régulièrement leur repas avec eux K qu'aucun reproche ne soit fait de la part de Mr Y, celui-ci étant parfaitement au courant. Cela était toléré par Mr Y. Je n'ai jamais reçu de rappel à l'ordre suite à ça » ;

-l'attestation du 1er février 2013 de Madame T U, équipière polyvalente, qui déclare : « Ayant travaillé plusieurs années avec E X, j'ai en effet constaté certaines choses anormales ainsi que beaucoup de paroles déplacées.

En effet, E ne faisant pas "partie" de la norme d'âge pour travailler dans la restauration rapide, j'ai entendu plusieurs réflexions à ce sujet qui n'avaient pas lieu d'être. Une inégalité donc dans les tâches à faire au travail s'est donc installée. Faisant faire les corvées à E à répétition plutôt que de faire participer à tour de rôle toute l'équipe.

De plus, E était constamment surveillé sur sa prise de repas qui normalement doit être contrôler à tout le personnel; Or, beaucoup y échappait.

Un seul courrier injustifié à ce sujet lui a été adressé.

E a toujours été une personne agréable au travail ne contestant pas ce qu'on lui demandait; certains membres de l'équipe en a donc "profité".

Pour finir, je pense que E ne méritait pas d'être considérée à part de l'équipe et n'avait pas à subir tout ce qu'on lui demandait.

(travaillé avec E de novembre 2003 à avril 2011) » ;

-la fiche d'aptitude périodique du 26 avril 2010 dans laquelle le médecin du travail a déclaré Madame E X "apte avec restriction pas de port de charges lourdes" ;

-le certificat du 19 avril 2011 du Docteur G, médecin traitant qui « certifie suivre médicalement Mme E X qui présente depuis le 06/04/2011 un état anxiodépressif réactionnel d'après elle a des problèmes professionnels, état nécessitant un traitement médical et une prise en charge psychiatrique spécialisée » ;

-le certificat du 3 janvier 2013 du Docteur G qui « certifie que Madame E X a présenté à partir du 06/04/2011 un état anxio-dépressif réactionnel sur asthénie chronique et somatisation, justifiant un traitement médical et un suivi spécialisé » ;

-le certificat du 21 mai 2013 du Docteur G qui « certifie suivre médicalement E

X. Son état de santé a nécessité en avril 2011 un arrêt de travail prolongé pour anxiété et dépression réactionnelle à des problèmes professionnels allégués, justifiant une prise en charge par le Dr H (Psychiatre), lequel a assuré que la pathologie dont souffrait Mme X relevait de la législation de l'Accident de Travail » ;

-le certificat du 5 décembre 2017 du Docteur G, qui « certifie suivre médicalement depuis 1999 Madame E X laquelle n'a jamais présenté d'état violent ou agressif, à ma connaissance et n'ai jamais constaté de comportement violent ou agressif » ;

-le certificat du 22 avril 2011 du Docteur V H, médecin psychiatre, qui « certifie que Mme E X présente un état anxieux réactionnel à des traumatismes... en travail, lequel état de santé justifie un arrêt de travail » ;

-le certificat du 2 septembre 2011 du Docteur H indiquant que Madame X présente "un état anxieux sévère qui contre-indique la reprise d'une activité professionnelle" ;

-le certificat du 18 janvier 2013 du Docteur H qui « certifie avoir prodigué (ses) soins à Mme E X d'avril 2011 à novembre 2011 dans le cadre d'un état anxio-dépressif réactionnel » ;

-le certificat du 11 janvier 2013 du Docteur W I, médecin psychiatre, qui « certifie suivre Madame E X depuis le 5 décembre 2011 pour un état dépressif avec une angoisse massive, des pleurs fréquents, des idées noires. Elle m'a fait part de difficultés professionnelles relationnelles qui remonteraient à plusieurs années. Elle nécessite toujours un traitement médicamenteux et psychothérapique » ;

-le certificat du 18 décembre 2017 du Docteur I qui « certifie avoir suivi Madame E X depuis le 5 décembre 2011 pour un état dépressif avec des ruminations anxieuses, des pleurs fréquents, des idées noires, des troubles du sommeil sévères. Elle manifeste un abattement physique et moral et se sent accablée. Elle m'a fait part de difficultés professionnelles relationnelles qui remonteraient à plusieurs années. Elle nécessite un traitement médicamenteux et un suivi » ;

-le titre de pension d'invalidité catégorie 2 notifié à Madame E X le 23 novembre 2012 ;

-la fiche d'aptitude suite à la visite médicale de reprise du 19 mars 2013, le médecin du travail concluant : « inapte au poste à prévoir ne peut pas faire d'effort, ni de manutention, un poste léger de 2 heures maximum par jour pourrait être possible dans un autre établissement » et la fiche d'inaptitude définitive "à tous postes dans l'entreprise" en date du 2 avril 2013 ;

-les attestations du conjoint de Madame X et de leurs deux enfants, qui rapportent que celle-ci rentrait du travail "les larmes aux yeux", "s'enfermait dans sa chambre...", avait "perdu beaucoup de poids", les témoins relatant par ailleurs les dires de Madame X.

Madame E X présente ainsi des éléments qui, pris dans leur ensemble, établissent des faits qui permettent de présumer l'existence d'un harcèlement moral et également qui laissent supposer l'existence d'une discrimination directe ou indirecte fondée sur l'âge et sur les origines de la salariée.

Au vu de ces éléments, il incombe à la partie défenderesse de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un harcèlement moral et que ses décisions sont justifiées par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement, de même qu'il lui incombe de prouver que ses décisions sont justifiées par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination.

La SARL KY WEST verse les éléments suivants :

-le courrier du 1er août 2011 de la CPAM des Bouches-du-Rhône adressé à l'employeur pour lui notifier le refus de prise en charge de l'accident déclaré par Madame E X en date du 6 avril 2011 au titre d'un accident du travail, au motif que « la preuve d'un accident survenu au temps et au lieu du travail n'a pu être établie du fait des contradictions constatées. Absence d'action soudaine et brutale assimilable à un traumatisme qui fait présumer un facteur traumatisme lié au travail » ;

-une "liste des employés" 2012 de la SARL KY WEST, comprenant les noms et prénoms, dates de naissance, âges et ancienneté de chacun des salariés ;

-une copie du registre unique du personnel de la SARL KY WEST ;

-l'avenant au contrat de travail de Monsieur J Y en date du 28 juin 2004, employé en qualité de directeur de restaurant à compter du 1er juin 2004, avec en annexe un "memo sur les missions du directeur", qui a "pour mission de superviser tous les aspects de la vie du restaurant' anime l'ensemble des équipes. Ressources Humaines, sécurité, respect des normes et de la législation, production, contrôle de qualité, finances et marketing local sont de son ressort'", ainsi qu'une fiche de "définition de fonctions" : "Recrute ses collaborateurs' Anime et coordonne l'ensemble des équipes et en particulier le travail des assistants de direction et des responsables opérationnels' Organise les activités des responsables d'équipes et des assistants. Fait réaliser et valide les plannings des équipiers, et assure le respect des contrats individuels. Responsable du respect de la législation sociale et de la réglementation du travail au sein du restaurant. Planifie et dirige les réunions de l'équipe de gestion et des équipiers. Garant du respect d'un climat social permettant la meilleure efficacité professionnelle'", outre des missions de qualité et de sécurité et des missions de gestion ;

La société intimée conclut que ce n'est pas le directeur qui attribue les postes ou détermine les fonctions de chacun ;

-l'attestation du 7 mars 2013 de Madame AA AB, assistante de direction, qui déclare : « En tant manager au restaurant Ky West, j'atteste n'avoir jamais eu ordre de mettre spécifiquement Mme E X au poste frites de la part de Mr Y J. J'ai le souvenir que Mme E X été souvent postée en cuisine, en caisse comme aux frites car c'était une équipière polyvalente.

Je peux confirmer qu'il n'y avait pas de discrimination raciale au sein du restaurant de la part de l'équipe de direction ou du directeur Mr Y J.

Je n'ai jamais reçu de consigne visant à mettre Mme E X en cuisine afin de ne pas être au contact des clients.

En tant que membre de l'équipe de gestion, je n'ai jamais exercée ni même reçue l'ordre, un quelconque harcèlement.

Je n'ai jamais constater, ni entendue dire que Mr Y J avait personnellement harceller, bousculée ou même réprimandée violemment Mme E X.

J'ai même toujours constatée que Mr Y J avais une communication professionnelle » ;

-l'attestation du 22 mars 2013 de Madame AC AD, directrice adjointe, qui rapporte : « J'atteste en ma qualité de directrice adjointe que Monsieur J Y n'a jamais fait preuve de racisme envers quiconque. La plupart des équipes ont été recrutés par le directeur et l'origine de ces personnes ou leurs physiques ne sont pas des critères de sélection. Pour preuve les origines diverses qui composent notre personnel.

De plus il n'a jamais donné ordre aux managers de mettre tel ou tel équipier à un poste afin que les clients ne le voit pas. Chaque manager poste les personnes suivant leurs compétences et les besoins du restaurant.

Enfin je ne l'ai jamais entendu faire des menaces verbales, ni vu faire des menaces physiques envers les équipiers ni envers un membres de l'équipe de gestion » ;

-l'attestation du 28 mars 2013 de Madame AN AO-AP, responsable marketing, qui déclare : « Ma fonction de responsable Marketing m'a amenée au cours des 5 dernières années, à passer 1 à 2 rushs du midi par semaine dans le restaurant de rognac. Mon travail consiste à aider au service, au comptoir ou au drive le personnel.

J'ai eu à de nombreuses reprises l'occasion de travailler avec Madame E X qui se trouvait régulièrement au service des clients en caisse. Je n'ai jamais constaté une attitude harcelante ou anormale de la part de Mr Y J à l'encontre de Madame E X. Je n'ai jamais entendu de propos racistes ou discriminants de la part de Mr Y J à l'encontre de Madame E X » ;

-l'attestation du 19 mars 2013 de Madame O N, directrice de restaurant, qui témoigne : « j'ai donc travaillé avec E. J'étais son manager, depuis l'ouverture du restaurant McDonald's de Rognac. Il était délicat de travailler avec E, souvent elle n'écoutait pas ce qu'on lui demandait et n'en faisait qu'à sa tête.

En tant qu'assistante de direction, j'ai évalué E à son poste d'équipier. L'entretien avait été difficile. Puis le lendemain, j'allais pour rentrer dans le bureau Manager puis j'ai senti qu'on me tirait par le col de la chemise. Je me suis retournée et c'était E qui m'agrippait le col pour introduire un billet de 50 € dans ma chemise. Cela représentait le montant de son évaluation attribué sur 75 € possible de montant maximum. J'ai donc du la rattraper pour lui remettre son argent mais elle criait en fuyant, impossible de lui parler.

L'après-midi, nous recherchions souvent E, elle quittait son poste. Elle allée plonger des nuggets, puis sortait par la porte du...(mots illisibles) et allait nourrir les chats sur le parking. Pendant ce temps, elle ne faisait pas les produits pour les clients ou ne prenait pas non plus la commande. On devait lui courir après pour qu'elle reprenne son poste et quand je lui expliquait qu'elle ne devrait pas faire ça, pour les pertes de produits, l'attente engendrée pour les clients, elle ne voulait rien savoir car était juste des méchants...(mots illisibles) les pauvres chats.

Enfin, le soir de l'annonce de ma mutation, Karina a appeler sur mon téléphone personnel, en pleurant qu'elle s'excusait qu'elle regrettait son comportement entre autres après le départ de sa fille, suite au vol qu'elle avait commis dans le restaurant. Je suis resté tard dans la nuit au téléphone, je l'ai écouté, essayé de la calmer suite au drame familial que cet événement avait causé. E était très difficile à gérer, elle se sentait persécutée en permanence » ;

-l'attestation du 8 mars 2003 de Monsieur J Y, directeur du restaurant McDonald's de Rognac, qui atteste n'avoir jamais été l'auteur d'actes discriminatoires, ni avoir eu de paroles déplacées ou désobligeantes relatives à l'âge, à l'origine ou à l'état de santé de Madame E X, ni avoir menacé verbalement ou physiquement Madame X, ni avoir fouillé dans son casier personnel, le témoin précisant avoir "par contre effectuer un contrôle des vestiaires femmes avec témoin suite à la plainte d'un employée d'un vol de téléphone portable. Lors de ce contrôle, j'ai pu constater que plusieurs casiers n'étaient pas fermés à l'aide d'un cadenas, comme le stipule le règlement intérieur. L'un des casiers contenait des affaires personnelles mais aussi un nombre important de salades "crudités" qui ne pouvaient être vendues car la DLC était dépassée. Ces salades au lieu d'être mis à la poubelle, procédure en vigueur, ont donc été "récupérées" K autorisation de qui que ce soit. Mme X a reconnu que c'était son casier et n'a pas justifié ce fait" ; Monsieur Y relate également que Madame X nourrissait de nombreux chats errants avec des nuggets de poulet, que la communication devenait de plus en plus difficile avec Madame X et que cela s'était amplifié " lorsque nous avons été obligés de nous séparer de sa fille équipière également au sein du restaurant suite à un vol d'argent (50 euros) reconnu par ladite personne. Je pense effectivement que cet événement a fortement perturbé Mme X et qu'elle m'a personnellement tenu responsable de ce qui devenait "une honte" familiale alors que je ne faisais que mon travail de directeur de restaurant" ;

-l'attestation du 7 mars 2013 de Monsieur AF AG, assistant de direction, qui «certifie n'avoir jamais constaté de comportements racistes, discriminatoires ou haineux de la part de Mr Y. Je n'ai pas remarqué de harcèlement ou de pression particulière sur Mme E X, de la part de Mr Y ou de l'équipe de gestion. J'ai pu observer que Mme X était régulièrement postée en caisse, parfois en cuisine ou aux frites comme tous les équipiers polyvalents.

Je n'ai pas remarqué de différences d'attitude ou de considération de l'équipe de gestion ou du directeur envers Mme X. Cependant j'ai pu remarquer que Mme X s'isoler fréquemment dans les...(mots illisibles) pendant ses heures de travail, ainsi que certaines difficultés à s'intégrer à l'équipe » ;

-l'attestation du 7 mars 2013 de Madame AH AI, employée McDonald depuis le 25 juin 2010, qui « certifie n'avoir jamais constaté de harcèlement moral ou physique sur la personne E X que ça soit de la part de l'équipe de gestion ou de Mr Y J. Je n'ai jamais entendu le moindre propos raciste ou de discrimination. D'ailleurs beaucoup de personnes d'origine Maghrébine travaillent dans ce restaurant. Mr Y J n'a jamais émis de pression sous aucune forme à Mme E X. Cette dernière étant la plupart du temps postée en caisse, quelquefois aux frites ou en cuisine, mais ça c'est pour tout le monde pareil. Nous sommes des employés polyvalents. Je tiens à dire que Mr Y J n'a jamais eu de comportement haineux ou encore moins de violence. Jamais il n'y a eu d'actes ou de paroles pour la faire craquer » ;

-l'attestation du 6 avril 2013 de Monsieur AJ AK, équipier polyvalent, employé au restaurant Macdonald's depuis le 2 décembre 2007, qui déclare :

« Je n'ai jamais constaté d'attitude raciste ou comportement haineux de Mr Y envers qui que ce soit et plus particulièrement envers Mme E X. J'ai même constaté que Mr Y avait embauché plusieurs personnes d'origine maghrébine toujours présentes d'ailleurs. J'ai également constaté que Mme X été aussi souvent posté au poste a frite qu'en caisse » ;

-la lettre de rappel à l'ordre du 9 février 2011 remis en main propre à Madame E X et le courrier en réponse de la salariée reçu le 15 février 2011 par la société KY WEST (courriers déjà versés par l'appelante) ; l'annexe au contrat de travail d'équipier polyvalent indiquant que "tous les repas offerts gratuitement doivent être consommés dans la salle de repos en dehors du temps de travail ou pendant le temps de pause, et ne peuvent en aucun cas être emportés" et la procédure "repas du personnel" portant la date du 16 décembre 2011 et précisant que "les repas sont pris uniquement sur place' Les repas sont pris dans la salle de repos'";

-l'attestation de présence de Madame E X à son bilan de compétences du 7 février 2011 au 4 avril 2011 (24 heures au total) et l'accord en date du 13 décembre 2010 donné par la SARL KY WEST à la réalisation de ce bilan de compétences, suite à la demande de Madame

X par courrier du 10 décembre 2010 ;

-la convention de formation professionnelle du 28 septembre 2010 relative à une formation en informatique suivie du 4 au 25 octobre 2010 (90 heures) par Madame E X ;

-la lettre recommandée du 11 mai 2009 adressée par Madame E X à son employeur sur ses conditions de travail et la lettre en réponse du 27 mai 2009 de la SARL KY WEST (lettres déjà produites ci-dessus par l'appelante) ; le courrier du 27 mai 2009 adressant à l'inspection du travail la copie du courrier du même jour adressé à Madame E X.

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Il convient d'observer que les témoins dont les attestations sont versées par la SARL KY WEST sont pour cinq d'entre eux des membres de l'équipe de gestion (Mmes AA AB, AC AD, AN AO-AP et O N respectivement assistante de direction, directrice adjointe, responsable marketing et manager et M. AF AG, assistant de direction), mis en cause par Madame E X quant à leur participation aux faits de harcèlement et de discrimination sur les directives du directeur du restaurant, Monsieur J Y.

Seuls deux des témoignages versés par la société intimée ont été établis par des employés (Mme AH AI, employée - responsable d'accueil selon sa deuxième attestation du 9 avril 2013 - et M. AJ AK, équipier polyvalent), alors même que la SARL KY WEST verse par ailleurs les témoignages de six autres équipiers polyvalents qui attestent de l'affichage des plannings mais n'apportent aucune précision sur les conditions de travail au sein de l'entreprise.

En tout état de cause, les membres de l'équipe de gestion, s'ils écartent tout harcèlement ou discrimination exercé par le directeur du restaurant, n'invoquent aucune difficulté dans le comportement ou le travail de Madame E X, à l'exception de Monsieur AF AG, qui rapporte "[...] que Mme X s'isoler fréquemment dans les...(mots illisibles) pendant ses heures de travail" et qu'elle présentait "certaines difficultés à s'intégrer à l'équipe" et à l'exception de Madame O N et de Monsieur J Y.

Madame O N ne précise qu'elle est ou a été la compagne de Monsieur J Y, avec lequel elle a eu trois enfants selon le témoignage non utilement contredit à ce sujet de Monsieur M Z en date du 18 décembre 2017. Elle est la seule, avec Monsieur J Y, à rapporter des comportements fautifs de Madame E X (celle-ci "écoutait pas ce qu'on lui demandait et n'en faisait qu'à sa tête", "allait nourrir les chats sur le parking", "était très difficile à gérer, elle se sentait persécutée en permanence") ou de sa fille (accusée de vol au sein du restaurant - évènement qui aurait perturbé Mme X et expliquerait son ressentiment vis-à-vis du directeur selon les témoins), étant observé que Madame X n'a pas fait l'objet de rappel à l'ordre ou de sanction suite aux comportements décrits.

Les éléments ainsi versés par la SARL KY WEST ne sont pas suffisants à prouver que les agissements et décisions du directeur du restaurant étaient justifiés par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement et à toute discrimination.

En effet, il est établi que :

-Madame X, qui s'en était déjà plainte auprès de son employeur dès 2009 (son courrier du 11 mai 2009), a subi « des réflexions très désagréables et répétitives sur son âge telles que: "A ton âge pourquoi tu travailles à McDo!"...» (attestation de R S) et « plusieurs réflexions à ce sujet qui n'avaient pas lieu d'être... E ne faisant pas "partie" de la norme d'âge pour travailler dans la restauration rapide » (attestation de T U) ; les deux témoignages versés à ce

sujet par l'appelante ne sont pas contredits par ceux versés par la société intimée, lesquels n'évoquent aucunement l'âge de la salariée et indiquent tout au plus que les témoins n'ont pas entendu de propos discrimant à l'encontre de la salariée ; de même, la liste des salariés mentionnant seulement deux autres salariés "âgés" (l'une de 58 ans, l'autre de 47 ans) est inopérante à démontrer que Madame X n'aurait pas été victime de discrimination en L de son âge ;

-Madame X, qui s'en était déjà plainte auprès de son employeur dès 2009 (son courrier du 11 mai 2009), était la seule à être surveillée lors de sa prise de repas et s'est vu notifier le 9 février 2011 un rappel à l'ordre pour avoir notamment emporté son repas à l'extérieur, alors qu'il résulte des témoignages de Mesdames Q A et T U et de Messieurs M Z et R S, non contredits par les témoigages produits par l'employeur, que les autres employés emportaient également leurs repas à l'extérieur K faire l'objet de remarque ou de rappel à l'ordre de leur employeur (à noter que, si le témoignage de M. Z, qui a été en litige prud'homal avec son employeur, est remis en cause par la SARL KY WEST, il est toutefois corroboré par les autres témoignages versés par l'appelante) ;

-le travail de Madame X était critiqué par sa hiérarchie devant les autres employés (attestation de R S : "j'ai entendu pas mal de critiques injustifiées de la part de l'équipe de gestion et de Mr Y, ils étaient médisants sur cette personne et son travail et cela devant nous, les autres employés, alors qu'elle faisait correctement son travail. Il n'y avait plus de tabou quand il s'agissait de Me X...") ;

-le vestiaire de Madame X a été fouillé par le directeur du restaurant selon le témoignage de Madame Q A, qui déclare avoir "surpris également Mr J Y dans les vestiaires des femmes en train de fouiller dans le casier personnel de Mme E X", ce témoignage n'étant pas utilement contredit par celui de Monsieur J Y qui relate avoir "effectuer un contrôle des vestiaires femmes avec témoin... " K que ne soit précisé le nom du témoin ni versé d'attestation dudit témoin ;

-Madame X était victime d'une "inégalité dans les tâches à faire", devant faire plus souvent que les autres employés "les corvées à répétition" (attestation de T U), se retrouvant plus souvent que les autres employés affectée au poste "frites", "afin qu'elle ne soit pas en contact direct avec la clientèle et car c'était un poste très difficile et ingrat de par le poids des cartons de frites à porter pour réapprovisionner les congélateurs ainsi que par la chaleur des friteuses et des projections d'huiles" selon les attestations de Monsieur R S corroborées par les attestations de Monsieur M Z, qui en tant que "responsable opérationnel pendant 4 ans" témoigne avoir reçu l'ordre de son directeur, Monsieur Y, "ainsi que l'ensemble de l'équipe de direction... de posté Me X à des postes dévalorisant tel que les frites..." ;

Il convient de relever que Monsieur R S témoigne du "poids des cartons de frites à porter pour réapprovisionner les congélateurs" alors même que Madame E X bénéficiait d'un avis d'aptitude avec réserve émis le 26 avril 2010 par le médecin du travail, K "port de charges lourdes".

Seuls les agissements relatifs aux violences physiques exercées par Monsieur J Y et aux propos discriminatoires en L des origines de Madame E X ne sont pas suffisamment démontrés en l'état des pièces produites par les parties.

En conséquence, il convient de réformer le jugement et de reconnaître l'existence d'un harcèlement moral subi par Madame E X, ainsi que d'une discrimination en L de son âge.

Au vu des éléments médicaux versés par Madame X, la Cour accorde à cette dernière la somme de 15 000 euros à titre de dommages-intérêts pour harcèlement moral et la somme de 15 000 euros à titre de dommages-intérêts pour discrimination.

Sur le retard dans l'organisation de la visite médicale de reprise :

Madame E X soutient avoir informé son employeur, par courrier recommandé du 20 décembre 2012, de son classement en invalidité 2ème catégorie, que celui-ci devait K tarder prendre l'initiative d'organiser la visite de reprise, que le simple retard dans l'organisation de la visite de reprise est un grave manquement imputable à l'employeur, qui a gardé le silence durant deux mois à la réception du courrier de sa salariée, qu'il convient de noter que ce n'est qu'à la réception des écritures prises aux intérêts de Madame X que l'entreprise mettra en place la visite de reprise pourtant obligatoire, que la SARL KY WEST ne peut prétendre que la salariée aurait eu la volonté de ne pas reprendre son travail, qu'en effet, si Madame X a saisi le conseil de prud'hommes en résiliation judiciaire de son contrat, c'est justement pour laisser perdurer le contrat jusqu'à la décision du conseil et qu'au vu du grave manquement de l'employeur, il doit être accordé à la concluante 1000 euros de dommages et intérêts pour le préjudice distinct subi.

La SARL KY WEST réplique qu'elle a bien organisé la visite de reprise et que Madame X a refusé les propositions de reclassement, qu'après avoir tenté de faire reconnaître par la Sécurité Sociale le caractère professionnel du prétendu accident déclaré par Madame X, celle-ci a multiplié les arrêts de travail, qu'elle n'a jamais eu l'intention de reprendre son activité, que son désir de ne pas reprendre est confirmé par sa saisine du conseil de prud'hommes le 6 novembre 2012, bien antérieurement à la lettre du 20 décembre 2012 adressée à son employeur pour lui faire part de sa mise en invalidité, que Madame X ne démontre pas la gravité suffisante du manquement de l'employeur pour justifier la résiliation de son contrat et qu'elle doit être déboutée de sa demande d'indemnisation.

Il n'est pas discuté que Madame E X a informé son employeur, par courrier recommandé du 20 décembre 2012, de son classement en invalidité 2ème catégorie, K manifester la volonté de ne pas reprendre, et que la SARL KY WEST n'a pas immédiatement organisé la visite médicale de reprise de la salariée, la première visite par la médecine du travail ayant été fixée le 19 mars 2013, soit plus de deux mois postérieurement au courrier de la salariée.

Toutefois, Madame E X ne précise pas quel serait son préjudice résultant du retard apporté dans l'organisation de la visite médicale de reprise et ne verse aucun élément justificatif quant à l'existence ou l'étendue de son préjudice.

À défaut de tout élément probant sur son préjudice, la Cour déboute Madame E X de sa demande d'indemnisation de ce chef.

Sur la résiliation judiciaire du contrat de travail :

Madame E X sollicite que soit prononcée la résiliation judiciaire de son contrat de travail en invoquant la carence fautive de l'employeur en matière d'organisation de la visite de reprise à la suite de son placement en invalidité 2ème catégorie, le harcèlement moral et la discrimination dont elle a été victime, le manquement de l'employeur à son obligation de sécurité en ce qu'il n'a pris aucune mesure pour protéger la salarié et les manquements de l'employeur en matière de temps partiel, résiliation judiciaire qui doit produire les effets d'un licenciement nul car fondée sur des motifs de discrimination et de harcèlement moral.

La SARL KY WEST réplique qu'elle a bien organisé la visite de reprise de la salariée, que Madame X ne justifie pas la gravité suffisante du grief nécessaire à justifier la résiliation, que les autres griefs ne sont pas établis et que Madame X doit être déboutée de ses demandes.

Au vu des graves manquements de l'employeur, averti dès 2009 des agissements discriminatoires et du harcèlement moral subis par Madame X et qui n'a pas ordonné de mesure aux fins d'assurer la protection de la santé et de la sécurité de sa salariée, ni même ordonné une enquête, il

convient de faire droit à la demande de l'appelante et d'ordonner la résiliation judiciaire de son contrat de travail aux torts exclusifs de l'employeur.

Alors que Madame E X, a subi pendant plusieurs années des agissements discriminatoires et un harcèlement moral de sa hiérarchie, l'ayant conduite à être placée en arrêt de travail à partir du 6 avril 2011 pour un état dépressif en lien avec des problèmes professionnels, nécessitant un traitement médical et un suivi psychiatrique toujours en cours fin 2017, à être placée en invalidité fin 2012 et à être déclarée par le médecin du travail le 19 mars 2013 inapte à son poste avec préconisation d'un reclassement "dans un autre établissement", avant d'être déclarée inapte définitivement à tous postes dans l'entreprise le 2 avril 2013, il s'ensuit que la rupture de son contrat de travail est nulle en vertu des dispositions des articles L.1132-4 et L.1152-3 du code du travail.

Sur la base du salaire mensuel brut de 1045 euros de Madame X au titre de 110 heures mensuelles de travail, il convient d'accorder à celle-ci la somme brute de 2090 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis et la somme de 209 euros au titre des congés payés sur préavis.

Madame E X réclame le paiement de la somme de 2786,66 euros à titre d'indemnité légale de licenciement, sur la base d'une ancienneté de 12 ans.

Outre que l'ancienneté de Madame X était de 11 ans, 6 mois et 16 jours et que le calcul qu'elle présente est inexact, elle ne tient pas compte au surplus de l'indemnité légale de licenciement qu'elle a perçue lors de la rupture de son contrat de travail pour un montant de 2003,32 euros.

Il convient dès lors de rejeter la demande de Madame X de ce chef.

Madame E X ne verse aucun élément sur l'évolution de sa situation professionnelle.

En considération de son ancienneté de 11 ans et du montant de son salaire mensuel brut, la Cour accorde Madame E X la somme de 12 500 euros à titre de dommages-intérêts pour licenciement nul.

Sur les congés payés :

Madame E X réclame la somme de 2612,50 euros de congés payés au titre d'un reliquat de 39 jours de congés payés sur l'année N-1 "+ année en cours 39 jours", K développer aucun moyen de droit et de fait sur les jours qu'elle aurait acquis sur la période d'arrêt de travail pour maladie et K tenir compte de l'indemnité compensatrice de congés payés qu'elle a perçue lors de la rupture de son contrat de travail, pour un montant de 1601,51 euros au titre de 39 jours ouvrables.

Alors que la salariée n'a acquis aucun jour de congés payés sur sa période d'arrêt de travail pour maladie, elle a été remplie de ses droits au titre des jours de congés payés acquis sur la période "N-1". Elle est donc déboutée de sa demande de ce chef.

Sur la remise des documents sociaux :

Il convient d'ordonner la remise par la SARL KY WEST d'un bulletin de salaire mentionnant les sommes allouées de nature salariale et de l'attestation Pôle emploi rectifiée, en conformité avec le présent arrêt, K qu'il soit nécessaire d'assortir cette condamnation d'une astreinte.

Il n'y a pas lieu d'ordonner la régularisation de la situation de Madame X auprès des caisses de retraite et de prévoyance, régularisation qui est de droit, ni d'ordonner une astreinte.

Sur l'article 700 du code de procédure civile :

Il y a lieu de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile au bénéfice de Madame E X, tel que précisé au dispositif.

PAR CES MOTIFS

LA COUR, statuant par décision prononcée par mise à disposition au greffe, contradictoirement et en matière prud'homale,

Confirme le jugement en ce qu'il a rejeté les demandes de Madame E X en requalification de son contrat de travail à temps partiel en contrat à temps plein et en paiement de rappel de salaire, de congés payés afférents, de dommages-intérêts au titre d'une carence fautive de l'employeur en matière salariale et de dommages-intérêts pour retard dans l'organisation de la visite médicale de reprise,

Le réforme pour le surplus,

Statuant à nouveau sur les points réformés,

Ordonne la résiliation judiciaire du contrat de travail de Madame E X, à effet à la date de notification de son licenciement et produisant les effets d'un licenciement nul,

Condamne la SARL KY WEST à payer à Madame E X :

-15 000 euros de dommages-intérêts pour harcèlement moral,

-15 000 euros de dommages-intérêts pour discrimination en L de l'âge,

-12 500 euros de dommages-intérêts pour licenciement nul,

-2090 euros d'indemnité compensatrice de préavis,

-209 euros de congés payés sur préavis,

Dit que les sommes allouées de nature salariale produiront des intérêts au taux légal à compter de la citation devant le bureau de conciliation à la date du 29 novembre 2012, avec capitalisation des intérêts dus et échus pour plus d'une année à compter de la demande en justice formée devant le bureau de jugement à l'audience du 20 mars 2014, et dit que les sommes allouées de nature indemnitaire produiront des intérêts de droit à compter du présent arrêt,

Ordonne la remise par la SARL KY WEST d'un bulletin de salaire et de l'attestation Pôle emploi rectifiée, en conformité avec le présent arrêt,

Condamne la SARL KY WEST aux dépens de première instance et d'appel et à payer à Madame E X 3000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Rejette tout autre prétention.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT

AL AM faisant fonction

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Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 4-1, 24 juillet 2020, n° 17/13096