Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 3-1, 12 mai 2021, n° 18/11181

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Aix-en-Provence, ch. 3-1, 12 mai 2021, n° 18/11181
Juridiction : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Numéro(s) : 18/11181
Décision précédente : Tribunal de commerce de Marseille, 1er mars 2018, N° 2017F00927
Dispositif : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Sur les parties

Texte intégral

COUR D’APPEL D’AIX-EN-PROVENCE

Chambre 3-1

ARRÊT AU FOND

DU 12 MAI 2021

N° 2021/124

N° RG 18/11181 – N° Portalis DBVB-V-B7C-BCWV5

SARL SARL S.R.M SOCIETE DE REMORQUAGE MEDITERRANEENNE

C/

SARL SARL ATELIER PHOCEEN DE MECANIQUE (APM)

SCP I. A & A. C – SOCIETE CIVILE PROFESSIO NNELLE DE MANDATAIRES JUDICIAIRES

SCOP DES CHANTIERS NAVALS DE BARRIOL

SA DE LA CALE DE HALAGE D’ARLES (SA C.H.A.) .C.H.A.)

Compagnie d’assurances AXA FRANCE GESTION SINISTRES IARD

D X

Copie exécutoire délivrée

le :

à : Me Marie-Anne COLLING

Me Marc BERNIE

Me Françoise BOULAN

Me Etienne ABEILLE

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal de Commerce de MARSEILLE en date du 02 Mars 2018 enregistrée au répertoire général sous le n° 2017F00927.

APPELANTE

SARL S.R.M SOCIETE DE REMORQUAGE MEDITERRANEENNE, dont le siège social est […]

représentée par Me Marie-Anne COLLING, avocat au barreau d’AIX-EN- PROVENCE, plaidant

INTIMEES

SARL ATELIER PHOCEEN DE MECANIQUE (APM) société en Liquidation Judiciaire, dont le siège social est sis […]

représentée par Me Marc BERNIE, avocat au barreau de MARSEILLE, plaidant

SCP I. A & A. C – SOCIETE CIVILE PROFESSIONNELLE DE MANDATAIRES JUDICIAIRES, prise en sa qualité de liquidateur de la société ATELIER PHOCEEN MECANIQUE, mandat conduit par Me O-P A, demeurant […]

représentée par Me Marc BERNIE, avocat au barreau de MARSEILLE, plaidant

SCOP DES CHANTIERS NAVALS DE BARRIOL, dont le siège social est sis […]

représentée par Me Françoise BOULAN de la SELARL LEXAVOUE BOULAN CHERFILS IMPERATORE, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE, assistée de Me Damien AYROLE, avocat au barreau de PARIS, plaidant

SA DE LA CALE DE HALAGE D’ARLES (SA C.H.A.) dont le siège social est […] (dans les locaux de la Chambre de commerce et d’industrie) – […]

représentée par Me Françoise BOULAN de la SELARL LEXAVOUE BOULAN CHERFILS IMPERATORE, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE, assistée de Me Damien AYROLE, avocat au barreau de PARIS, plaidant

Compagnie d’assurances AXA FRANCE GESTION SINISTRES IARD TSA 11112, demeurant […]

représentée par Me Etienne ABEILLE, avocat au barreau de MARSEILLE substitué par Me Ibrahima KA, avocat au barreau de MARSEILLE, plaidant

PARTIE INTERVENANTE

Monsieur D X, demeurant […] agissant en sa qualité de liquidateur amiable de la société SARL S.R.M. SOCIETE DE REMORQUAGE MEDITERRANEENNE

représenté par Me Marie-Anne COLLING, avocat au barreau d’AIX-EN- PROVENCE, plaidant

Intervenant volontaire

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L’affaire a été débattue le 08 Mars 2021 en audience publique. Conformément à l’article 804 du code de procédure civile, Madame Stéphanie COMBRIE, Conseillère, a fait un rapport oral de l’affaire à l’audience avant les plaidoiries.

La Cour était composée de :

Monsieur P CALLOCH, Président

Madame Marie-Christine BERQUET, Conseillère

Madame Stéphanie COMBRIE, Conseillère

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : M. Alain VERNOINE.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 12 Mai 2021.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 12 Mai 2021,

Signé par Monsieur P CALLOCH, Président et M. Alain VERNOINE, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

EXPOSE DE L’AFFAIRE

Monsieur X est propriétaire d’un remorqueur dénommé « L’Essor » affrété par la société de remorquage méditerranéenne (SRM) selon contrats d’affrètements coque nue des 29 décembre 2013 et 29 décembre 2014.

Le 9 juillet 2014 ce navire a été a été mis à terre pour effectuer des travaux et a été positionné par le chantier naval Barriol à Arles sur un chariot.

Les installations du chantier naval étaient mises à disposition par la société de la cale de halage d’Arles (CHA).

Le 15 juillet 2014 la société Atelier phocéen de mécanique (société APM) est intervenue pour effectuer différents travaux de mécanique sur l’arbre porte hélice.

Le navire qui reposait toujours sur un chariot, a été placé sur tins pour quelques jours puis replacé sur chariot.

Le navire a été remis à l’eau le 7 août pour rejoindre Marseille. Durant le trajet, un échauffement du palier avant étambot aurait été constaté.

La société APM est intervenue pour que le remorqueur soit tiré à terre et il a été entreposé dans les locaux de la société Composite Works à La Ciotat.

Le 1er septembre 2014, le navire a de nouveau appareillé mais immédiatement l’équipage a constaté une surchauffe identique du palier avant de l’étambot et un blocage de l’arbre porte hélice. Il a donc été remorqué chez la société Composite Works et il a été constaté que l’arbre porte hélice était soudé à la bague dans l’étambot. Il faudra trois jours et deux vérins de cinquante tonnes pour le sortir.

La société SRM a saisi Monsieur le Président du tribunal de commerce de Marseille, pour obtenir la désignation d’un expert et, par ordonnance du 25 septembre 2014, Monsieur F Z a été nommé en cette qualité.

Le 27 octobre 2014, et en parallèle de l’expertise judiciaire, trois experts amiables représentant le chantier naval BARRIOL, la société SRM et la société AXA assureur de la société APM ont convenu des travaux qui devaient être réalisés. Ces travaux ont été commandés à la société APM qui a émis une facture de 70.817 euros hors taxe.

Le 30 octobre 2014, le navire a repris la mer mais le 22 juin 2015, une surchauffe du palier avant de l’étambot est survenue ce qui a nécessité son remorquage chez Sud Marine Shipyard , la réparation ayant été effectuée par la société Sud Moteurs.

Aucune panne n’est survenue ultérieurement.

Par ordonnance de Monsieur le Président du tribunal de commerce de Marseille du 24 décembre 2014, la société APM a été autorisée à saisir le navire « L’Essor » pour sûreté et garantie de sa créance établie provisoirement à la somme de 75.000 euros.

Cette décision a été rétractée par ordonnance du 8 janvier 2015 qui a été confirmée par arrêt de cette présente cour du 9 avril 2015.

Par jugement du 11 janvier 2016, le Tribunal de Commerce de Marseille a prononcé l’ouverture d’une procédure de redressement judiciaire à l’encontre de la société APM. Le 18 janvier 2017, le redressement judiciaire a été converti en liquidation judiciaire et la SCP J. P A & A. C, a été désignée comme liquidateur judiciaire.

Par acte du 16 décembre 2016 la SRM a fait assigner son assureur, la SAMAP devant le tribunal de Grande instance de Montpellier et a appelé en garantie la société APM.

La société SRM a fait assigner le 14 mars 2017, la société anonyme de calage et de halage d’Arles (société CHA), la société APM, la SCP I. A et A. C ès qualité de liquidateur de cette société, Les chantiers navals de Barriol, la la société de Remorquage méditerranéenne, et la société Axa France IARD (société AXA) assureur de la société APM devant le tribunal de commerce de Marseille qui, par décision du 2 mars 2018, a statué ainsi :

— Met hors de cause, sans dépens la société anonyme de la cale de halage d’Arles SACHAS.A. et en conséquence, déboute la Société de Remorquage Méditerranéenne (SRM) de toutes ses demandes, fins et conclusions à l’encontre de la société anonyme de la cale de halage d’Arles SACHA S.A. ;

— Condamne la société de Remorquage Méditerranéenne (SRM) à payer à la société anonyme de la cale de halage d’Arles SACHA S.A., la somme de 1.500 euros en application des dispositions de l’article 700 du Code de Procédure Civile ;

— Condamne la S.C.O.P. DES Les chantiers navals de Barriol à payer à la société de Remorquage méditerranéenne la somme de 65.422,97 euros, au titre des préjudices matériels dus à la déformation du remorqueur L’Essor sur le chantier d’Arles ;

— Vu les dispositions d’ordre public des articles L 622-21 et L. 622-22 du Code de Commerce,

— Déclare irrecevable la demande de la société de Remorquage méditerranéenne (SRM) à l’encontre de la société atelier phocéen de mécanique et tendant à la fixation de sa créance au passif de cette société ;

— Condamne la société Axa France IARD S.A. à payer à la Société de Remorquage Méditerranéenne (SRM) la somme de 8.257,93 euros au titre des préjudices matériels dus aux conséquences de l’absence de véri’cation du lignage du remorqueur L’ESSOR par la société atelier phocéen de mécanique (APM) S.GR.L. ;

— Condamne conjointement la S.CO.P. Les chantiers navals de Barriol et la Société Axa France IARD S.A. à payer à la Société de Remorquage Méditerranéenne (SRM) la somme de 3.000 euros, au titre de l’article 700 du Code de Procédure Civile ;

— Condamne reconventionnellement la société de Remorquage Méditerranéenne (SRM) S.GR.L. à payer à la SCP I. A et Y mandat conduit par Maître O-P A ès qualités, la somme de 54.965,51 euros au titre de la facture n° 06432 du 31 octobre 2014, avec intérêts au taux légal et capitalisation des intérêts depuis le 9 avril 2015, la somme de 5 000 euros pour résistance abusive et celle de 1 500 euros au titre de l’article '700 du Code de Procédure Civile.

La société SRM a relevé appel de cette décision et du fait de la dissolution de cette société, le 15 décembre 2018, Monsieur D X agissant en sa qualité de liquidateur amiable de cette société est intervenu aux débats.

Ils exposent :

— que les assignations délivrées à la société CHA et à la société Les chantiers navals de Barriol sont valables,

— qu’ils ne présentent pas de nouvelles demandes en appel,

— que la déclaration de créance entre les mains du liquidateur de la société APM a été régulièrement effectuée,

— qu’ils ont intérêt à agir en application de l’article R 5423-7 du code des transports,

— que l’intervention volontaire de Monsieur D X, agissant en sa qualité de liquidateur amiable de la société de Remorquage méditerranéenne, est à la fois recevable et fondée.,

— que la responsabilité contractuelle de la société APM est engagée en totalité pour toutes les conséquences de la réalisation défectueuse de sa prestation,

— que la responsabilité quasi délictuelle est engagée puisque l’opération de pose et de dépose des tins chez la société CHA a été réalisée effectivement par le personnel des chantiers Barriol qui a mal positionné « L’Essor » lors de cette opération,

— que la condamnation au profit de la société APM doit être réformée,

La société SRM et Monsieur D X ès qualité sollicitent ainsi la réformation du jugement attaqué et demandent de :

— Condamner in solidum la société anonyme de la cale de halage d’Arles et la SCOP des Chantiers navals de Barriol à payer à la société de Remorquage méditerranéenne l’intégralité des préjudices résultant de la déformation de la structure, soit la somme de 156.482,31 euros en principal.

— Condamner in solidum la société anonyme de la cale de halage d’Arles et la SCOP des Chantiers navals de Barriol à payer à la société de remorquage Méditerranéenne la somme de 15.000,00 euros sur le fondement de l’article 700 du CPC, outre les dépens, y compris les frais d’expertise de Monsieur Z,

— Constater que la société de Remorquage méditerranéenne a régulièrement déclaré sa créance entre les mains de Maître O-P A et fixer sa créance au passif de la liquidation de la société atelier phocéen de mécanique à la somme de

91.059,34 euros.

— Limiter toute condamnation de la société de Remorquage méditerranéenne au profit de Maître O-P A, es qualité de liquidateur de la société atelier phocéen de mécanique, à la somme de 29.782,16 euros.

— Constater que ces créances sont connexes et ordonner la compensation entre la créance de Maître A et celle de la Société de Remorquage méditerranéenne.

— Confirmer la condamnation de la société Axa France IARD à payer à la société de Remorquage Méditerranénne la somme de 8.257,93 euros en garantie du remorquage du 7 août 2014 et de l’intervention de la société atelier phocéen de mécanique du 9 août au 1er septembre 2014.

Y ajoutant,

— Condamner la société Axa France IARD à garantir également la responsabilité de la société atelier phocéen de mécanique dans l’avarie du 22 juin 2015 et à payer à la société de Remorquage méditerranéenne la somme de 62.464,42 euros.

— La condamner à payer à la société de Remorquage méditerranéenne la somme de 15.000,00 sur le fondement de l’article 700 du CPC.

[…] :

— que l’assignation du 15 mars 2017 est nulle puisque le fondement juridique des demandes n’est pas indiqué, ce qui lui cause un grief,

— que la société SRM, qui n’est pas propriétaire du navire n’a pas intérêt à agir et que le contrat d’affrètement ne lui permet pas de revendiquer cette qualité,

— que la société SRM a présenté en cause d’appel une demande nouvelle pour un total de 156.482,31 euros alors que dans son acte introductif d’instance du 15 mars 2017 elle réclamait 65.422,97 euros,

— que cette demande est donc irrecevable,

— que l’action de Monsieur X est prescrite depuis le 17 mai 2017 puisque le rapport d’expertise a été déposé le 17 mai 2016,

— qu’elle conteste toute responsabilité dans les dégâts survenus au navire,

La SCOP Les chantiers navals de Barriol conclut à la réformation de la décision déférée et au rejet des réclamations présentées à son encontre.

La SCP A et Y ès qualité de liquidateur judiciaire de la société Atelier phocéen de mécanique (société APM), fait valoir :

— que la société SRM n’a pas qualité pour agir,

— qu’elle n’a pas non plus intérêt puisque la société SRM n’a pas payé les travaux et ne peut en demander le remboursement,

— que la société SRM n’a pas déclaré se créance dans les délais,

— que l’intervention de Monsieur X est irrecevable et en outre prescrite,

— que la responsabilité du sinistre incombe à la société Barriol et est une cause d’exonération de sa propre responsabilité,

— qu’elle ne pouvait imaginer que la société Barriol mettrait sur tins le navire et que cela occasionnerait une telle déformation de structure que l’expert qualifie d’exceptionnelle.

La SCP A Y ès qualité demande de confirmer le jugement en ce qu’il a :

— Déclaré irrecevable la demande de SRM à l’encontre de la société APM tendant à la fixation de sa créance au passif de cette société,

— Jugé que seul le chantier Barriol était responsable de l’avarie n°1,

— Jugé qu’il n’y avait pas lieu de retenir la responsabilité d’APM au titre de l’avarie n°4, – condamné reconventionnellement la société SRM à payer à la SCP I A ET A. C ès qualité la facture n°06432 du 31 octobre 2014, avec intérêts au taux légal et capitalisation des intérêts depuis le 9 avril 2015, outre la somme de 5.000 euros pour résistance abusive et celle de 1.500 euros au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

De l’infirmer pour le surplus.

La société Axa France (société AXA) assureur de la société APM adopte les arguments de son assuré et compte tenu des conditions générales du contrat demande la confirmation du jugement.

La société de la cale de halage d’Arles (société CHA) soutient :

— que l’assignation du 15 mars 2017 est nulle,

— que la société SRM n’a ni qualité ni intérêt à agir,

— que la demande de la société SRM pour obtenir paiement d’une somme de 156 482,31 euros est nouvelle en cause d’appel et donc irrecevable,

— que l’intervention volontaire de Monsieur X est irrecevable,

— que l’action de Monsieur X est prescrite,

— qu’aucune responsabilité ne peut être retenue à son endroit.

Cette société conclut à la confirmation du jugement en ce qu’il l’a mise hors de cause.

La cour renvoie, pour l’exposé complet des moyens et prétentions des parties à leurs écritures précitées.

Le conseiller de la mise en état a prononcé la clôture de l’instruction par ordonnance du 21 septembre 2020 et a fixé l’examen de l’affaire à l’audience du 19 octobre 2020.

A cette date l’affaire a été renvoyée et la clôture reportée au 8 février 2021.

L’affaire a été retenue le 8 mars 2021 et mise en délibéré au 12 mai 2021.

MOTIFS

Sur la validité des assignations délivrées aux sociétés de la cale de halage d’Arles et les chantiers navals de Barriol.

L’article 56 alinéa 2 prévoit que l’assignation contient à peine de nullité «L’objet de la demande avec un exposé des moyens en fait et en droit ».

En l’espèce, il n’est pas contestable que l’assignation délivrée par la société SRM devant le tribunal de commerce ne précise pas le fondement juridique de ses demandes, en contradiction avec les dispositions précitées.

Pour autant, les conclusions en réponse prises par la société de Remorquage Méditerranéenne ont rectifié cette omission. Par ailleurs, les sociétés de la cale de halage d’Arles et des Chantiers de Barriol, étant assistées d’un avocat, elles ont pu, dans le cadre des échanges entre les parties, être renseignées sur les dispositions invoquées par la société de Remorquage Méditerranéenne.

Ces sociétés ne prouvent dès lors pas l’existence d’un grief résultant de l’irrégularité invoquée.

C’est donc à juste titre que le tribunal a rejeté le moyen de nullité invoquée.

Sur la qualité à agir de la société SRM

L’acte de francisation mentionne que le propriétaire du navire « L’Essor » est Monsieur X lequel a conclu avec la société SRM un contrat d’affrètement.

Selon l’article L.5423-8 du code des transports :

« Par le contrat d’affrètement coque nue, le fréteur s’engage, contre paiement d’un loyer, à mettre à la disposition d’un affréteur un navire déterminé, sans armement ni équipement ou avec un équipement et un armement incomplet pour un temps défini. »

L’article R.5423-5 du code des transports indique que :

« Le fréteur a la charge des réparations et des remplacements dus au vice propre du navire. Si le navire est immobilisé par suite d’un vice propre, aucun loyer n’est dû pendant l’immobilisation, si celle-ci dépasse vingt-quatre heures. »

L’article R.5423-7 du code des transports précise que l’affréteur devra pourvoir à l’entretien du navire ainsi que les réparations et remplacements courantes. Il supporte tous les frais d’exploitation et doit assurer le navire. Enfin, l’affréteur devra restituer le navire « en fin de contrat dans l’état où il l’a reçu, sauf l’usure normale du navire et des appareils ».

Le contrat d’affrètement reprend les dispositions précitées et stipule que «La Société de Remorquage Méditerranéen s’engage à maintenir le navire en bon état de marche et en bonne condition générale ».

Il résulte de ces dispositions que la société SRM a qualité à agir pour obtenir réparation des conséquences du sinistre survenu au navire « L’Essor ».

Le jugement est confirmé à ce titre.

Sur l’intérêt à agir de la société SRM.

La société APM soutient que la société SRM ne dispose pas d’un intérêt à agir puisque les travaux n’ont pas été payés.

Ce moyen est inopérant puisque malgré l’absence de règlement par l’appelante, celle-ci peut agir pour qu’il soit statué sur la responsabilité de la société APM dans la survenance des avaries.

Le tribunal a donc jugé à juste titre que la société SRM avait intérêt à agir.

Sur la recevabilité à agir de Monsieur D X

Celui-ci est intervenu en sa qualité de liquidateur amiable de la société S.R.M. et non, comme le prétendent la SCOP Les chantiers navals de Barriol et la société CHA, à titre personnel, ainsi que cela ressort des conclusions du 18 septembre 2020 prises par la société S.R.M et son liquidateur.

Du fait de la dissolution de la société SRM intervenue le 15 décembre 2018, l’intervention du liquidateur amiable est recevable, et continuant l’action engagée par la société dissoute, aucune prescription ne peut lui être opposée.

Sur l’existence d’une demande nouvelle de la société SRM en cause d’appel.

La SCOP Les chantiers navals de Barriol et la société CHA indiquent qu’aux termes de son acte introductif d’instance du 15 mars 2017, la société SRM sollicitait la condamnation de la société de la cale de halage d’Arles et de la SCOP Les chantiers navals de Barriol à lui régler une somme de 65 422,97 euros et que dans ses conclusions devant la cour, elle réclame la somme de 156.482,31 euros en principal.

Si l’article 564 du code de procédure civile prévoit que « A peine d’irrecevabilité relevée d’office,les parties ne peuvent soumettre à la cour de nouvelles prétentions si ce n’est pour opposer compensation, faire écarter les prétentions adverses ou faire juger les questions nées de l’intervention d’un tiers, ou de la survenance ou de la révélation d’un fait.», l’article 565 précise que « Les prétentions ne sont pas nouvelles dès lors qu’elles tendent aux mêmes fins que celles soumises au premier juge même si leur fondement juridique est différent. »

Ne sont pas nouvelles les prétentions par lesquelles les parties élèvent le montant de leurs réclamations dès lors qu’elles tendent à la même fin d’indemnisation du préjudice subi ce qui est le cas en l’espèce, puisque le liquidateur de la société SRM ne fait que demander une somme supérieure à celle sollicitée en première instance pour l’indemnisation des mêmes avaries invoquées devant le tribunal.

Sur l’existence d’une déclaration de créance de la société SRM au passif de la procédure collective de la société APM.

Par jugement du 11 janvier 2016, le tribunal de commerce de Marseille a prononcé l’ouverture d’une procédure de redressement judiciaire à l’encontre de la société APM. Ce jugement a été publié au BODACC le 24 janvier 2016.

Par application de l’article R622-24 du code de commerce, la société SRM devait déclarer sa créance avant le 24 mars 2016 ce dont elle s’est abstenue.

Le 18 janvier 2017, le redressement judiciaire a été converti en liquidation judiciaire et la SCP J. P A & A. C, a été désignée comme liquidateur judiciaire.

Sauf action en relevé de forclusion, aucune possibilité de rattrapage n’est possible pour le créancier ayant omis de déclarer sa créance dans le délai légal. La conversion en liquidation judiciaire ne lui permet pas de bénéficier d’un nouveau délai de déclaration de sa créance si celle-ci est née antérieurement au jugement d’ouverture de la première procédure.

En l’absence de déclaration de la créance dans les délais légaux, la créance dont se prévaut la société SRM est inopposable à la procédure collective et le jugement est confirmé sur ce point.

Sur la demande d’indemnisation présentée par la société SRM envers les sociétés des chantiers navals de Barriol et société anonyme de la cale de halage d’Arles :

L’expert judiciaire a rendu son rapport d’expertise et constaté la survenance des quatre avaries suivantes :

— une première avarie relative à « la déformation de la charpente et plus particulièrement du tube étambot du remorqueur dû aux manutentions du remorqueur en Arles » survenue lors de l’attinage du navire, c’est-à-dire lors de sa mise hors d’eau et sa pose sur tins (cales) .

Pour l’expert : « ce défaut structurel majeur ne peut provenir que d’un appui anormal entre les couples 9 à 12, et plus particulièrement au niveau du 11. La pression d’un vérinnage et/ou d’un appui à cet endroit permet de déformer comme constaté le tube étambot. En effet, l’appui du tin n°2 alors que la portée vers la partie arrière du remorqueur n’était plus soutenue, produit 5200 mm de porte à faux. Nous devons également rappeler que le tin n°1 situé sous la crapaudine ne pouvait pas soutenir la voûte (…) »

— une deuxième avarie survenue le 7 août 2014 et ayant nécessité le remorquage du navire à la Ciotat suite à une surchauffe des paliers du tube d’étambot

— une troisième avarie survenue le 2 septembre 2014 et ayant nécessité le remorquage du navire au chantier naval de la CIOTAT suite à une nouvelle surchauffe du palier du tube d’étambot

— une quatrième avarie a eu lieu le 22 juin 2015 suite à une surchauffe du palier du tube d’étambot et le grippage de l’arbre port hélice.

La société anonyme de la cale de halage d’Arles (société CHA) a conclu une convention avec la société Barriol aux termes de laquelle cette dernière société effectuerait les opérations de hissage, attinage et de remise à l’eau des bateaux.

La société CHA avait pour seule obligation de s’assurer du bon fonctionnement des installations mises à disposition mais n’a pris aucune part dans la man’uvre effectuée par la société Barriol.

Compte tenu des termes du rapport d’expertise, aucune responsabilité ne peut retenue envers la société CHA que le tribunal a mis à juste titre hors de cause.

C’est à juste titre que le tribunal a condamné la société SRM à payer à la société CHA la somme de 1.500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

L’expert a admis catégoriquement que « la cause de ce défaut de lignage rare et extrêmement important fait suite à une déformation structurelle du navire (déformation de la charpente) apparue lors de l’opération de mise à terre, pose et dépose des tins, remise à flot du navire en cale d’Arles ».

Il ajoute que les règles de l’art non pas été respectées lors de la mise hors d’eau.

Les arguments développés par la société Barriol pour s’exonérer de toute responsabilité ne sont que des suppositions qui ne sont étayées par aucune explication sérieuse et qui ne peuvent infirmer les conclusions de l’expert.

La société Barriol qui a procédé aux opérations de hissage est responsable des dégâts survenus au

navire.

L’expert a chiffré à 65.422,97 euros le montant des préjudices matériels dus à la déformation du remorqueur L’Essor sur le chantier d’Arles. Cette somme doit être payée par la société Chantiers Navals de Barriol, seule à l’origine du premier sinistre.

La société APM est intervenue pour effectuer différents travaux de mécanique sur l’arbre porte hélice.

L’expert a relevé que la déformation structurelle est celle qui est à l’origine de l’avarie du 22 juin 2015. Il précise qu’il ne peut être reproché à la société APM un travail mal exécuté mais qu’après toute mise à terre d’un navire les opérations de contrôle de lignage font partie des bons usages.

L’expert judiciaire ajoute que la société APM a commis une erreur de diagnostic en ne contrôlant pas le lignage, aussi bien au départ d’Arles, qu’ensuite au départ de la Ciotat. Il précise en effet qu’après toute mise à terre le contrôle du lignage doit être effectué, et que ce type de vérification est préconisé par la société Baudoin dont la société APM est agent.

La société APM interviendra à deux reprises pour des pannes sans toutefois vérifier le lignage.

Cette société ne peut arguer que la cause exclusive des dommages se trouve dans les opérations effectuées par la société Barriol, alors qu’elle a failli à ses obligations en ne procédant pas aux vérifications précitées.

C’est donc à juste titre que le tribunal a jugé que la société APM, actuellement représentée par son liquidateur, était responsable à hauteur de 20% des dommages subis par la société SRM soit la somme de 209,80 euros, le coût total du remorquage étant de l 048,98 euros.

Au titre du troisième sinistre, l’expert chiffre le préjudice à la somme de 27.541,94 euros. Il estime que celui-ci est dû aux conséquences de la non vérification du lignage lors des premiers travaux correctifs effectués à la Ciotat.

La responsabilité de ce nouveau sinistre doit être partagée par moitié entre la société APM qui n’a pas rempli sa mission de vérification et la société Barriol.

L’assureur de la société APM a versé la somme de 10.335,59 euros au titre de la réparation de ces dommages.

En conséquence, après avoir défalqué cette somme du préjudice total, la société APM est tenue pour la moitié soit la somme de 8.603,18 euros.

Selon l’expert, l’avarie survenue le 22 juin 2015 a pour origine encore une fois, la surchauffe des paliers du tube étambot.

Le coût total du remorquage et des réparations s’est élevé à la somme de 62.464,42 euros.

L’expert relève que selon facture du 30 octobre 2014, la société APM a effectué des travaux comportant le lignage de l’APH. Cette facture fait état d’un ré-usinage des bagues paliers du tube étambot. Il explique avoir constaté le grippage de l’APH sur les deux bagues paliers.

Avant ce sinistre, la navire avait repris la mer pendant plusieurs mois sans rencontrer de problème.

Il n’est donc pas prouvé que cette avarie proviendrait d’une faute commise par la société APM.

La créance de la société SRM envers la société APM d’un montant de 8.812,98 euros est inopposable à la procédure collective, comme indiquée supra.

Sur les demandes de la Société de Remorquage méditerranéenne (SRM) à l’encontre de la Société Axa France IARD, assureur de la société Atelier phocéen de mécanique (APM)

Selon les conditions générales du contrat souscrit auprès de la société AXA « ne sont pas garantis :

4.28. Le prix du travail effectué et/ou du produit livré par l’assuré et/ou ses sous-traitants

4.29. Les frais engagés pour :

— réparer, parachever ou refaire le travail,

— remplacer tout ou partie du produit. »

Le contrat prévoit que la garantie concernant les préjudices matériels et immatériel consécutifs, est limitée à la somme de 1.650.000 euros par année d’assurance avec une franchise de 10% par sinistre avec un minimum de 4.402 euros et un maximum de 8.804 euros.

Compte tenu de ces dispositions contractuelles, la société AXA est condamnée à payer à la société SRM la somme de 8.257, 93 euros.

Le jugement est confirmé à ce titre.

Sur les demandes reconventionnelles de la SCP A et Y ès qualité de mandataire à la liquidation judiciaire de la société Atelier phocéen de mécanique (APM) :

Le 27 octobre 2014, et en parallèle de l’expertise judiciaire, trois experts amiables (Monsieur K L désigné par B, pour le compte du Chantier Naval Barriol, Monsieur M. P M, désigné par AXA assureur de la société APM, et Monsieur M. A N, désigné par la SRM, ont trouvé un accord sur les travaux à réaliser.

Ceux-ci ont été commandés et réalisés par la société APM qui a émis une facture d’un montant de 70.817 euros HT, laquelle n’a jamais été payée malgré les nombreuses relances. Ce litige a donné lieu à une saisie conservatoire du navire, laquelle a été levée au motif que le propriétaire du navire était Monsieur X et non la société SRM.

La société SRM ou Monsieur X n’ont pas contesté cette facture, sollicitant l’intervention de leurs assureurs.

Une saisie-attribution auprès du Crédit Maritime a permis de recouvrer la somme de 15.851,88 euros et une somme de 9.252 euros a été récupérée auprès de l’Institut National de la Plongée Professionnelle (INPP) ce qui laisse un solde de 46.021,01 euros.

Compte tenu de l’avis des experts amiablement commis, il n’est pas démontré l’inutilité des travaux effectués au titre de l’intervention du 9 août au 1er septembre 2014.

Il convient en conséquence de fixer la créance de la société APM à la somme totale de 70.817 euros HT, et de condamner Monsieur X ès qualité de liquidateur amiable de la société SRM à payer à la SCP A et C, ès qualité de liquidateur judiciaire de la société APM la somme de 46.021,01 euros avec intérêts au taux légal et capitalisation des intérêts depuis le 9 avril 2015.

La SCP A et C ès qualité demande paiement d’une somme de 40.000 euros pour perte de

chance de se rétablir.

Il n’est produit aucune pièce comptable permettant d’établir que la procédure collective ouverte à l’encontre de la société APM serait imputable au non paiement de la facture réclamée d’un montant de 70.817,39 euros.

Il convient de relever que le tribunal a condamné la société SRM à payer à la SCP I. A ET A. C ès qualité la somme de 5.000 euros à titre de dommages-intérêts pour résistance abusive.

Aucuns dommages et intérêts ne peuvent être dus en sus des intérêts légaux, à la charge de la partie en retard pour l’exécution d’une obligation ayant pour objet le versement d’une somme d’argent, à moins que cette partie ait, par sa mauvaise foi causé au créancier un préjudice indépendant de celui qui résulterait du retard lui même ou d’une faute particulière du débiteur.

La SCP A et C, ès qualité ne prouvant pas que la société SRM aurait agi de mauvaise foi ou aurait commis une faute particulière à son encontre, il n’y pas a lieu de lui octroyer des dommages et intérêts.

Le jugement sera infirmé de ce chef.

Sur les mesures accessoires

La SCOP Les Chantiers Navals de Barriol conservera la charge des dépens de l’appel.

Il n’y a lieu à application de l’article 700 du code de procédure civile pour aucune des parties.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Constate l’intervention volontaire de Monsieur X ès qualité de liquidateur amiable de la société de Remorquage méditerranéenne (SRM),

Rejette les fins de non recevoir soulevées envers Monsieur X ès qualité,

Dit que Monsieur X ès qualité n’a pas présenté de demandes nouvelles en cause d’appel,

Confirme le jugement attaqué en ce qu’il a :

— rejeté l’exception de nullité des assignations délivrées devant le tribunal,

— rejeté les fins de non recevoir soulevées envers la société de Remorquage méditerranéenne (SRM),

— déclaré irrecevable la demande de la société de Remorquage méditerranéenne (SRM) à l’encontre de la société Atelier phocéen de mécanique (APM) et tendant à la fixation de sa créance au passif de cette société,

Sur le fond, confirme le jugement déféré sauf :

— en ce qu’il a condamné la société de Remorquage Méditerranéenne (SRM) à payer à la SCP A et C, ès qualités, la somme de 54.965,51 euros avec intérêts au taux légal et capitalisation des intérêts depuis le 9 avril 2015,

— en ce qu’il a condamné la société de Remorquage Méditerranéenne (SRM) à payer à la SCP A et

C ès qualité la somme de 5.000 euros à titre de dommages-intérêts pour résistance abusive,

L’infirmant de ces chefs et statuant à nouveau,

Fixe la créance de la société Atelier Phocéen de Mécanique (APM) à la somme de 70.817 euros HT au titre de la facture n° 06432 du 31 octobre 2014,

Condamne la société de Remorquage Méditerranéenne (SRM). à payer à la SCP A et C, ès qualités de liquidateur de la société Atelier Phocéen de Mécanique (APM), la somme de 46.021,01 euros avec intérêts au taux légal et capitalisation des intérêts depuis le 9 avril 2015, après déduction des sommes d’ores et déjà perçues par la société APM,

Déboute la SCP A et C, ès qualité, de sa demande de dommages-intérêts pour résistance abusive,

Déboute les parties de leurs demandes autres ou plus amples,

Condamne la SCOP Les Les chantiers navals de Barriol aux dépens de l’appel recouvrés conformément à l’article 699 du code de procédure civile,

Dit n’y avoir lieu à article 700 du code de procédure civile.

Le GREFFIER Le PRÉSIDENT

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Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 3-1, 12 mai 2021, n° 18/11181