Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 3-1, 16 décembre 2021, n° 21/05062

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Chronologie de l’affaire

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Conseil Constitutionnel · Conseil constitutionnel · 26 mai 2023

Commentaire Décision n° 2023-1049 QPC du 26 mai 2023 Société Nexta 2022 (Exclusion des opérations portant sur les titres et contrats financiers du champ de la révision pour imprévision) Le Conseil constitutionnel a été saisi le 15 mars 2023 par la Cour de cassation (chambre commerciale, arrêt n° 328 du même jour) d'une question prioritaire de constitutionnalité (QPC) posée par la société Nexta 2022, portant sur la conformité aux droits et libertés que la Constitution garantit de l'article L. 211-40-1 du code monétaire et financier (CMF), dans sa rédaction issue de la loi n° 2018-287 du 20 …

 

Conseil Constitutionnel · Conseil constitutionnel · 26 mai 2023

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Sur la décision

Référence :
CA Aix-en-Provence, ch. 3-1, 16 déc. 2021, n° 21/05062
Juridiction : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Numéro(s) : 21/05062
Décision précédente : Tribunal de commerce de Salon-de-Provence, 23 mars 2021, N° 2020003910
Dispositif : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Texte intégral

COUR D’APPEL D’AIX-EN-PROVENCE

Chambre 3-1

ARRÊT

DU 16 DECEMBRE 2021

N° 2021/358

N° RG 21/05062 – N° Portalis DBVB-V-B7F-BHHP5

S.A.R.L. SARL X Y

C/

SARL COFICIEL SOLUTIONS MODULAIRES VENANT AUX DROITS DE LA SOCIETE COFICIEL BUNGALOWS

Copie exécutoire délivrée

le :

à : Me Joseph MAGNAN

Me Patrick CAGNOL

Décision déférée à la Cour :

Ordonnance de référé du Tribunal de Commerce de Salon-de-Provence en date du 24 Mars 2021 enregistrée au répertoire général sous le n° 2020003910.

APPELANTE

S.A.R.L. X Y, dont le siège social est sis […]

représentée par Me Joseph MAGNAN de la SCP MAGNAN PAUL MAGNAN JOSEPH, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE, assisté de Me Pierre LACROIX, avocat au barreau de GRENOBLE

INTIMEE

S.AR.L. COFICIEL SOLUTIONS MODULAIRES venant aux droits de la Société COFICIEL BUNGALOWS prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège, sis 215 rue Mayor de Montricher – ZI LES MILLES – 13290 AIX-EN-PROVENCE

représentée par Me Patrick CAGNOL, avocat au barreau de MARSEILLE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L’affaire a été débattue le 08 Novembre 2021 en audience publique. Conformément à l’article 804 du code de procédure civile, Madame Marie-Christine BERQUET, Conseillère, a fait un rapport oral de

l’affaire à l’audience avant les plaidoiries.

La Cour était composée de :

Monsieur Pierre CALLOCH, Président

Madame Marie-Christine BERQUET, Conseillère

Madame Stéphanie COMBRIE, Conseillère

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : M. Alain VERNOINE.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 16 Décembre 2021.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 16 Décembre 2021,

Signé par Monsieur Pierre CALLOCH, Président et M. Alain VERNOINE, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

EXPOSE DE L’AFFAIRE

La société X Y qui a une activité de maçonnerie et gros 'uvre et une activité secondaire de charpente a fait appel aux services de la société COFICIEL BUNGALOWS aux droits de laquelle est venue la société COFICIEL SOLUTIONS MODULAIRES pour la location de bungalows de chantier et divers matériels.

Par lettre recommandée du 31 mars 2020, la société X Y a formulé auprès de la société COFICIEL BUNGALOWS la suspension de la facturation des matériels loués jusqu’au déconfinement, en référence aux articles du code civil relatifs à la force majeure et l’imprévision, les chantiers ayant été mis à l’arrêt à compter du 17 mars 2020

Après mises en demeure infructueuses du 16 juillet 2020 et du 1er octobre 2020 de payer les sommes dues selon elle au titre de services fournis, la société COFICIEL BUNGALOWS, par acte du 30 novembre 2020, a fait assigner la société X Y devant le tribunal de commerce de Salon de Provence.

Par ordonnance du 24 mars 2021, le juge des référés du tribunal de commerce de Salon de Provence a :

— débouté la société X Y de toutes ses demandes,

— constaté la résiliation de plein droit du contrat de location à compter du 1er octobre 2020,

— condamné la société X Y à payer à la société COFICIEL BUNGALOWS la somme provisionnel de 5.208,45 euros , outre les intérêts au taux légal majoré de 10 points à compter du 16

juillet 2020, date de la mise en demeure,

— ordonné à la société X Y de restituer le matériel à la société COFICIEL BUNGALOWS, sous astreinte de 200 euros par jour de retard à compter d’un délai de quinze jours de la décision,

— condamné la société X Y à payer à la société COFICIEL BUNGALOWS la somme de 1.500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

La société X Y a relevé appel de cette décision par déclaration enregistrée au greffe le 7 avril 2021.

L’affaire a été clôturée par ordonnance du président de la chambre du 11 octobre 2021 et renvoyée à l’audience du 8 novembre 2021.

Par dernières conclusions notifiées par RPVA le 17 mai 2021, auxquelles il est expressément référé en application de l’article 455 du code de procédure civile, la société X Y fait valoir l’absence d’urgence et l’existence de contestations sérieuses au titre de la force majeure, de l’imprévision et de la bonne foi contractuelle, de sorte qu’il ne rentrait pas dans les pouvoirs du juge des référés de statuer ainsi qu’il l’a fait. A cet égard, elle soutient que :

— la société COFICIEL BUNGALOWS a attendu le 30 novembre 2020 pour assigner puis a sollicité des reports d’audience devant le tribunal de commerce, de sorte que l’urgence n’était pas caractérisée,

— les chantiers sur lesquels elle travaillait ont été interrompus du 17 mars 2020 au 10 mai 2020 en raison de la crise sanitaire par l’effet du décret n°2020-260 du 16 mars 2020 , que la société COFICIEL BUNGALOWS n’a pas pu non plus exécuter ses propres obligations, de sorte que l’exécution du contrat a été empêché par la force majeure,

— des circonstances imprévisibles lors de la conclusion des contrats et rendant l’exécution excessivement onéreuse justifient la révision des contrats, laquelle relève du juge du fond,

— il y a manquement à l’obligation de bonne foi contractuelle, les parties étant tenues de vérifier si les circonstances exceptionnelles ne rendaient pas nécessaire une adaptation des modalités d’exécution de leurs obligations respectives.

A titre subsidiaire, elle fait valoir que l’ordonnance doit être infirmée en ce qu’elle a prononcé la résiliation judiciaire des contrats et la restitution des matériels dès lors que la société COFICIEL BUNGALOWS après avoir envoyé chacune des mise en demeure, loin de prendre acte de la résiliation des contrats, a continué de les appliquer, de facturer et d’encaisser les paiements, de sorte qu’elle a implicitement renoncé à la résiliation desdits contrats dont les deux parties ont poursuivi l’exécution.

Elle souligne l’imprécision des demandes de résiliation, la société COFICIEL BUNGALOWS sollicitant le paiement de l’addition des factures portant sur quatre chantiers distincts ayant donné lieu chacun à un contrat distinct, certains chantiers étant arrivés à terme depuis le litige et d’autres ayant été ouverts de sorte que le juge des référés ne pouvait prononcer « la résiliation de plein droit du contrat ».

Elle demande à la cour de :

CONSTATER l’existence d’un cas de force majeure.

CONSTATER de circonstances imprévisibles lors de la conclusion du contrat rendant l’exécution excessivement onéreuse.

CONSTATER le manquement à la bonne foi contractuelle de la société COFICIEL BUNGALOWS,

CONSTATER le manquement à la bonne foi contractuelle de la société COFICIEL BUNGALOWS,

INFIRMER l’ordonnance du 24 mars 2021 en toutes ses dispositions, et en lieu et place,

DIRE ET JUGER que les demandes de la société COFICIEL BUNGALOWS se heurtent à des contestations sérieuses,

DEBOUTER la société COFICIEL BUNGALOWS de l’intégralité de ses demandes, fins et conclusions,

CONDAMNER la société COFICIEL BUNGALOWS à verser la somme de 1.800€ à la société X Y au titre de l’article 700 du CPC,

CONDAMNER la société COFICIEL BUNGALOWS aux dépens.

INFIRMER l’ordonnance du 24 mars 2021 en ce qu’elle a prononcé la résiliation des contrats et ordonné à la société X Y de restituer le matériel sous astreinte de 200€ par jour de retard,

A titre subsidiaire,

CONSTATER la continuation des contrats et l’imprécision de la demande de résiliation,

INFIRMER l’ordonnance du 24 mars 2021 en ce qu’elle a prononcé la résiliation des contrats et ordonné à la société X Y de restituer le matériel sous astreinte de 200€ par jour de retard.

Par dernières conclusions notifiées par RPVA le 21 juin 2021, auxquelles il est expressément référé en application de l’article 455 du code de procédure civile, la société COFICIEL SOLUTIONS MODULAIRES venant aux droits de la société COFICIEL BUNGALOWS fait valoir que :

— le débiteur d’une obligation contractuelle de somme d’argent inexécutée ne peut s’exonérer de cette obligation en invoquant un cas de force majeure,

— la société X ne démontre pas en quoi cette crise a rendu son obligation de payer la somme de 5.208,45 euros manifestement excessive,

— les conditions générales de location précisent en leur article 3 que tout arrêt , quelle qu’en soit la cause, ne suspendra pas la location et ne donnera lieu à aucune déduction à quelque titre que ce soit, l’article 5 lui faisant obligation de s’assurer.

Elle précise que les contrats CT 19/1204 et CT 19/0074 sont toujours en cours d’exécution et qu’elle n’entend pas solliciter la restitution du matériel de ce chef.

La société COFICIEL SOLUTIONS MODULAIRES demande à la cour de confirmer l’ordonnance de référé sauf à ne pas voir prononcer la résiliation des contrats de location n° CT 19/1204 et CT 19/0074, ni ordonner la restitution du matériel détenu en application de ces contrats. Elle sollicite la somme de 1.500 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

MOTIFS DE LA DECISION

Aux termes de l’article 872 du code de procédure civile, dans tous les cas d’urgence, le président du tribunal de commerce peut, dans les limites de la compétence du tribunal, ordonner en référé toutes les mesures qui ne se heurtent à aucune contestation sérieuse ou que justifie l’existence d’un

différend.

L’article 873 en son second alinéa dispose que dans les cas où l’existence de l’obligation n’est pas contestable, il peut accorder une provision au créancier ou ordonner l’exécution de l’obligation même s’il agit d’une obligation de faire.

Il est rappelé que l’application de l’article 873 du code de procédure civile n’est pas soumise à la démonstration d’un cas d’urgence.

En l’espèce, la société X Y fait valoir que l’existence de l’obligation est sérieusement contestable en raison (i) de l’existence d’une force majeure, les chantiers sur lesquels elle a loué les installations de la société COFICIEL BUNGALOWS ayant été interrompus du 17 mars 2020 au 10 mai 2020, en raison du décret n°2020-260 du 16 mars 2020, un confinement généralisé ayant été instauré sur le territoire français, (ii) de l’existence de circonstances relevant de l’imprévision, et (iii) d’un manquement à l’obligation de bonne foi contractuelle.

L’article 1218 du Code civil dispose qu'« il y a force majeure en matière contractuelle lorsqu’un événement échappant au contrôle du débiteur, qui ne pouvait être raisonnablement prévu lors de la conclusion du contrat et dont les effets ne peuvent être évités par des mesures appropriées, empêche l’exécution de son obligation par le débiteur.

Si l’empêchement est temporaire, l’exécution de l’obligation est suspendue à moins que le retard qui en résulterait ne justifie la résolution du contrat. Si l’empêchement est définitif, le contrat est résolu de plein droit et les parties sont libérées de leurs obligations dans les conditions prévues aux articles 1351 et 1351-1 ».

Le débiteur d’une obligation contractuelle de somme d’argent inexécutée ne peut s’exonérer de cette obligation en invoquant un cas de force majeure.

En l’espèce, la société X Y, débitrice d’une somme d’argent inexécutée ne peut s’exonérer de cette obligation en invoquant un cas de force majeure.

Aux termes de l’article 1195 du Code civil « si un changement de circonstances imprévisible lors de la conclusion du contrat rend l’exécution excessivement onéreuse pour une partie qui n’avait pas accepté d’en assumer le risque, celle-ci peut demander une renégociation du contrat à son cocontractant. Elle continue à exécuter ses obligations durant la renégociation. En cas de refus ou d’échec de la renégociation, les parties peuvent convenir de la résolution du contrat, à la date et aux conditions qu’elles déterminent, ou demander d’un commun accord au juge de procéder à son adaptation. À défaut d’accord dans un délai raisonnable, le juge peut, à la demande d’une partie, réviser le contrat ou y mettre fin, à la date et aux conditions qu’il fixe ».

Ces dispositions ont un caractère supplétif.

En l’espèce, les conditions générales de location acceptées par la société X Y prévoient en leur article 3 que « Tout arrêt, qu’elle qu’en soit la cause, ne suspendra pas la location et ne donnera lieu à aucune réduction à quelque titre que ce soit, de sorte que les dispositions de l’article 1195 du code civil ne sont manifestement pas applicables à l’espèce.

Dans ces conditions et au regard de ces dispositions contractuelles, il n’est pas démontré un manquement à l’obligation de bonne foi contractuelle.

C’est dès lors à juste titre que l’existence de l’obligation n’étant pas sérieusement contestable, le juge des référés a condamné la société X Y à régler la somme de 5.208,45 euros, cette somme étant certaine, liquide et exigible au regard des pièces versées aux débats, avec intérêt au taux majoré

en application de l’article 6 des conditions générales de vente.

Il n’est pas contesté que les contrats 19/1553, 19/0534 et 18/0505 ont été poursuivis par les parties après la période litigieuse jusqu’à leur terme, et que les contrats CT 19/1204 et- CT 19/0074 poursuivis au-delà du 1er octobre 2020, sont en cours, de sorte qu’il n’y avait pas lieu à prononcer la résiliation de plein droit des contrats de location à compter du 1er octobre 2020. Le jugement sera infirmé sur ce point. La société X Y devra restituer à la société COFICIEL SOLUTIONS MODULAIRES (anciennement COFICIEL BUNGALOWS) le matériel afférent aux contrats 19/1553, 19/0534 et 18/0505 arrivés à leur terme, sans qu’il y ait lieu de prononcer une astreinte.

Sur les demandes accessoires

La société X Y, partie perdante est condamnée à payer à la société COFICIEL SOLUTIONS MODULAIRES une somme de 2.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, et aux entiers dépens.

PAR CES MOTIFS, LA COUR :

— CONFIRME l’ordonnance rendue le 24 mars 2021 par le juge des référés du tribunal de commerce de Salon de Provence, en ce qu’elle a condamné la société X Y à payer à la société COFICIEL BUNGALOWS la somme provisionnelle de 5.208,45 euros, outre les intérêts au taux légal majoré de 10 points à compter du 16 juillet 2020, date de la mise en demeure, la somme de 1.500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens,

— L’INFIRME pour le surplus,

Statuant à nouveau sur les chefs infirmés,

— ORDONNE à la société X Y de restituer à la société COFICIEL SOLUTIONS MODULAIRES (anciennement COFICIEL BUNGALOWS) le matériel afférent aux contrats 19/1553, 19/0534 et 18/0505,

Y ajoutant,

— CONDAMNE la société X Y à payer à la société COFICIEL SOLUTIONS MODULAIRES une somme de 2.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

— DEBOUTE les parties de leurs demandes autres ou plus amples,

— CONDAMNE la société X Y aux dépens recouvrés conformément à l’article 699 du code de procédure civile.

Le GREFFIER Le PRÉSIDENT

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