Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 4-5, 17 mars 2022, n° 21/01224

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Aix-en-Provence, ch. 4-5, 17 mars 2022, n° 21/01224
Juridiction : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Numéro(s) : 21/01224
Décision précédente : Conseil de prud'hommes de Cannes, 13 mars 2019, N° 15/00633
Dispositif : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Sur les parties

Texte intégral

COUR D’APPEL D’AIX-EN-PROVENCE

Chambre 4-5

ARRÊT AU FOND

DU 17 MARS 2022

N° 2022/

MS

Rôle N° RG 21/01224 – N° Portalis DBVB-V-B7F-BG3BD

Z X


C/

S.A. SNCF RESEAU


Copie exécutoire délivrée

le : 17/03/22

à :


- Me Mireille DAMIANO, avocat au barreau de NICE


- Me Philippe- laurent SIDER, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE,

Décision déférée à la Cour :


Jugement du Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de CANNES en date du 14 Mars 2019 enregistré(e) au répertoire général sous le n° 15/00633.

APPELANT

Monsieur Z X, demeurant […]

représenté par Me Mireille DAMIANO, avocat au barreau de NICE substitué par Me Patricia BOUGHANMI-PAPI, avocat au barreau de NICE

INTIMEE

S.A. SNCF RESEAU, prise en sa délégation juridique territoriale Méditerranée sise […], dont le siège social est sis 15-17, rue Jean-Philippe Rameau – CS 80001 – 93418 LA PLAINE SAINT DENIS CEDEX

représentée par Me Philippe-Laurent SIDER, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE,

et Me Nicolas FRANCOIS, avocat au barreau de MARSEILLE

*-*-*-*-* COMPOSITION DE LA COUR


En application des dispositions des articles 804 et 805 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 16 Novembre 2021, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Madame Michelle SALVAN, Président de Chambre, chargé du rapport, qui a fait un rapport oral à l’audience, avant les plaidoiries.


Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Michelle SALVAN, Président de Chambre

Madame Mariane ALVARADE, Conseiller

Monsieur Antoine LEPERCHEY, Conseiller

Greffier lors des débats : Mme Nadège LAVIGNASSE.


Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 03 Mars 2022, prorogé au 17 mars 2022.

ARRÊT

contradictoire,


Prononcé par mise à disposition au greffe le 17 Mars 2022.


Signé par Madame Michelle SALVAN, Président de Chambre et Mme Pascale ROCK, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

FAITS ET PROCÉDURE


Le 3 janvier 1983, M. Z X a été engagé par l’établissement SNCF et affecté à des fonctions techniques, puis, à compter de 2015, il a occupé des fonctions d’agent de circulation, moyennant en dernier lieu une rémunération de 2.019.43 €.


Le 31 mai 2014, le médecin du travail l’a placé en restriction médicale d’horaires à titre provisoire, puis à titre permanent, le 19 décembre 2014.


Par la suite, M. X a fait l’objet de divers arrêts de travail pour maladie et le 15 septembre 2016, le médecin du travail l’a déclaré définitivement inapte à son poste de travail.


A compter du 27 septembre 2016, il a été admis au bénéfice de la longue maladie.


Il a ensuite fait l’objet d’une procédure de mise à la réforme, engagée le 18 janvier 2017 par la SNCF, qui a saisi la commission de réforme au préalable.


Le 2 octobre 2017, M. X a été informé que son dossier serait examiné lors de la commission de réforme du 7 novembre 2017 et le 8 novembre 2017, la SNCF a notifié à M. X sa mise à la réforme.


Par requête en date du 15 décembre 2015, M. X a saisi la juridiction prud’homale afin qu’il soit jugé, d’une part, qu’il a été victime de faits de harcèlement moral et d’autre part, que la SNCF aurait méconnu son obligation de reclassement à son égard. Compte tenu de sa réforme prononcée par la SNCF en novembre 2017, il a modifié ses demandes en cours d’instance.


Il sollicitait :

« -80.000 € à titre de dommages et intérêts au titre du préjudice lié au harcèlement moral ;


-1.796,65 € outre les congés payés afférents au titre de l’indemnité de réserve ;


-286,72 € outre les congés payés au titre de la perte de rémunération sur les dimanches et

jours fériés ;


-6.550,54 € outre les congés payés à titre de rappels de salaire sur longue maladie ;


-6.956,30 € outre les congés payés à titre de prime de travail pendant la longue maladie ;


-28.874,56 € à titre d’indemnité de licenciement ;


-5.680,32 € à titre d’indemnité compensatrices de préavis ;


-102.245,76 € à titre de dommages et intérêts ;


-3.000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile.»


Par jugement du 14 mars 2019, le conseil de prud’hommes de Cannes, section commerce, a débouté M. Z X et la société SNCF de l’ensemble de leurs demandes et l’a condamné aux dépens.


Le 22 janvier 2021, M. X a relevé appel de cette décision dans des formes et délais qui ne sont pas critiqués.

MOYENS ET PRÉTENTIONS DES PARTIES


Aux termes de ses dernières écritures transmises par voie électronique, le 14 janvier 2021, M. Z X, appelant, soutient en substance :


Sur la mise à la réforme


- qu’une procédure de mise à la réforme ne pouvait être initiée à son encontre sans reclassement préalable ;


- qu’en conséquence, la mise à la réforme doit être requalifiée en licenciement sans cause réelle et sérieuse, voire en licenciement nul ;


- que l’employeur a fait preuve de déloyauté contractuelle à son égard ;


Sur le harcèlement moral qu’il a subi divers agissements, en particulier :


- mise à la réforme abusive ;


- absence volontaire de reclassement, contrôles médicaux aléatoires et changements intempestifs de planning ;


- privation de rémunération pendant 9 mois durant sa maladie ;
- privation de l’indemnité de réserve et des roulements du dimanche et des jours fériés ;


- refus d’attribution du régime de la longue maladie à compter d’avril 2016

M. Z X demande à la cour de :

'- Dire et juger l’appel recevable et bien fondé,


En conséquence :


- Infirmer le jugement du conseil des prud’hommes de Cannes du 14 mars 2019 en toutes ses dispositions et, statuant à nouveau :


- Condamner la SNCF à lui verser : :


- au titre de l’indemnité de réserve 1.796,65 € outre 179,66€ au titre des congés payés

afférents,


- au titre de la perte de rémunération sur dimanche et jour férié : 286,72 € outre 28,67 € au titre des congés payés afférents,


- Dire et juger que M. X a été victime de harcèlement moral,


- Condamner en conséquence la SNCF à lui verser, à titre de dommages intérêts pour préjudice moral de ce chef une somme de 80.000 €,


- Dire et juger que la mise à la réforme doit s’analyser en un licenciement nul et produire les effets d’un licenciement sans cause réelle ni sérieuse,


- Condamner en conséquence la SNCF à payer à M. X,


- au titre de l’indemnité de licenciement une somme de 28.874,56,


- au titre de l’indemnité compensatrice de préavis une somme de 5.680,32 € outre 568 € au titre des congés payés afférents,


- à titre de dommages intérêts une somme de 102.245,76 €.


Subsidiairement,


- Dire et juger qu’en tout état de cause, la SNCF n’a pas exécuté loyalement le contrat de travail, a manqué à son obligation de sécurité et que son comportement doit être dit fautif, affectant tant la relation de travail que le licenciement qui sera qualifié de sans cause réelle et sérieuse.


En conséquence,


- Condamner en conséquence la SNCF à lui verser, à titre de dommages intérêts pour comportement fautif et non observation de l’obligation de sécurité la somme de 80.000 €,


- Condamner en conséquence la SNCF à payer à M. X,


- au titre de l’indemnité de licenciement une somme de 28.874,56 €,
- au titre de l’indemnité compensatrice de préavis une somme de 5.680,32 € outre 568 € au

titre des congés payés afférents


- à titre de dommages intérêts une somme de 102.245,76 €.


- Condamner encore la SNCF à délivrer à M. X fiche de paie, certificat de travail et attestation pôle emploi conformes sous astreinte de 150 € par jour de retard à compter de la décision à intervenir,


- Condamner enfin la SNCF à verser à Monsieur X, au titre de l’article 700 du code de procédure civile, une somme de 3000 € ainsi qu’aux entiers dépens de l’instance.'


Aux termes de ses dernières écritures transmises par voie électronique, le 29 octobre 2021, l’établissement SNCF, intimée, soutient :


Sur la procédure de mise à la réforme :


- que M. X n’a pas fait l’objet d’un licenciement pour inaptitude mais d’une procédure ad hoc de mise à la réforme sur avis du médecin conseil ;


- que M. X n’est pas un agent contractuel mais un agent du cadre permanent soumis au statut de la SNCF et qu’il n’est pas soumis aux seules dispositions de l’article L 1226-11 et l 1226-4 du code du travail ;


- qu’elle n’a pas méconnu l’obligation de reclassement prévue à l’article L 1226-2 du code du travail dès lors que ces dispositions sont inapplicables ;


Subsidiairement, sur l’indemnisation d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse :


-que l’indemnité devrait être estimée entre 6.068,29 € et 40.388,60 €.


Sur le harcèlement moral :


- que les faits invoqués par M. X ne sont pas démontrés et en tous cas sont insuffisants à laisser présumer l’existence d’un harcèlement moral ;


- qu’elle a respecté les prérogatives de M. X, de même que ses obligations à son égard,


- qu’elle a démontré que ses actions étaient justifiées par des éléments professionnels objectifs étrangers à tout harcèlement,


- que M. X ne rapporte pas la preuve de faits caratérisant une exécution déloyale et fautive de son contrat de travail par la SNCF.

L’établissement SNCF demande à la cour de :


- Confirmer le jugement du conseil de prud’hommes de Cannes du 14 mars 2019 en ce qu’il a débouté M. X de l’ensemble de ses demandes ;


Et statuant à nouveau,


- Dire et juger les demandes de M. X non fondées,
- Débouter M. X de l’ensemble de ses demandes,


- Condamner M. X à payer à la société SNCF Réseau la somme de 1.500 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile.


L’ordonnance de clôture a été prononcée le 4 novembre 2021.


L’affaire a été fixée à l’audience du 16 novembre 2021.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la procédure de mise à la réforme


Par lettre recommandée avec demande d’avis de réception du 8 novembre 2017, la SNCF a notifié à M. Z X, agent du cadre permanent, sa mise à la réforme sur avis du médecin conseil. Cette mesure a pris effet à l’issue du délai de préavis de deux mois à compter de la date de la première présentation de cette notification. La pension de réforme versée à M. X depuis lors est d’un montant brut mensuel de 2.024.24 € soit 1.827.19 € nets.


La SNCF a fait application de l’article 7§4 alinéa 1er du Chapitre 12 du Statut et de l’article 30 du RH0359 relatif au « Règlement d’assurance maladie, longue maladie, maternité, réforme et décès des agents du cadre permanent ».


Ces textes sont applicables à l’agent en arrêt maladie pour lequel le médecin conseil de la Caisse émet un avis prescrivant la mise à la réforme de l’agent estimant que l’état de santé ne permet plus à celui-ci de tenir un emploi à la SNCF.

M. X prétend qu’une procédure de mise à la réforme ne pouvait être initiée à son encontre sans qu’un reclassement préalable prévu par le code du travail ne soit recherché en application de l’article 7§2 du chapitre 12 du Statut ; qu’en conséquence, sa mise à la réforme doit être requalifiée en un licenciement sans cause réelle et sérieuse.


La SNCF répond qu’en présence d’un agent du cadre permanent pour lequel le médecin conseil préconise l’application de l’article 7§4 du chapitre 12 du Statut, soit une mise à la réforme sans reclassement préalable, l’entreprise n’a d’autres choix que de suivre la procédure applicable, et ne peut en aucune manière choisir la voie du licenciement pour inaptitude de droit commun.


Les dispositions relatives à l’inaptitude au poste de travail sont régies par les dispositions du Règlement RH 00360 selon lequel, au terme de la procédure de reclassement,les agents du cadre permanent sont soumis à la procédure de réforme (RH001 chapitre 12 et RH 0359) et les agents contractuels sous contrat à durée indéterminée à la procédure de licenciement.


L’article 7§2 prévoit que pour des raisons médicales dûment constatées par le médecin du travail, si l’agent victime d’un accident du travail ou d’une maladie professionnelle est incapable de reprendre son ancien emploi, la SNCF met prioritairement en oeuvre une procédure de reclassement au cours de laquelle une commission de reclassement peut être appelée à formuler des propositions, tenant compte de l’avis du médecin du travail sur les aptitudes résiduelles de l’agent, et dans les conditions fixées par le règlement du personnel.


L’article 7§4 prévoit que lorsque le médecin du personnel de la SNCF estime que l’état de l’agent en longue maladie ne lui permet plus de tenir un emploi à la SNCF, celle-ci peut engager une procédure de réforme sans recherche de reclassement préalable.


L’agent ne doit pas être seulement inapte à son emploi mais inapte à tout emploi de la SNCF.
Le 10 janvier 2017, le médecin conseil a rendu l’avis selon lequel : « L’état de santé de l’agent relève de l’article 7§4 du chapitre 12 du statut des relations collectives entre la SNCF et son Personnel ». Cette disposition constitue une dérogation au principe de l’obligation de recherche de reclassement en cas d’inaptitude prévue par le code du travail, et pour la SNCF dans l’hypothèse d’une mise à la réforme de l’agent pour incapacité à reprendre son emploi.


L’article 14 §3 du Chapitre 12 du Statut dispose que : « La mise à la réforme est prononcée par la SNCF après avis de la commission de réforme définie au présent article. L’agent est informé de la saisine de la Commission et du déroulement de la procédure, y compris les recours possibles. ».


En l’espèce, lors de la séance du 7 novembre 2017, la commission de réforme, amenée à se prononcer sur la demande de mise à la réforme de la SNCF sur avis du médecin conseil a considéré que :


- M. X était dans l’incapacité de reprendre un emploi,


- la mise à la réforme était bien fondée,


- la réforme de M. X n’était pas consécutive à l’exercice de ses fonctions.

M. X a été informé de la saisine de ladite commission, du déroulement de la procédure et des recours possibles, il n’a fait aucune observation écrite dans le cadre de cette procédure et n’a pas demandé à faire entendre un médecin de son choix.


Se conformant à l’avis du médecin conseil du 10 janvier 2017, après attribution du régime longue maladie par celui-ci, la SNCF pouvait engager la procédure de réforme conformément à l’article 7§4 sans être tenue de mettre en oeuvre les dispositions réglementaires prévues en matière de reclassement. Dès lors elle n’a pas méconnu son obligation de reclassement prévue par l’article L1226-2 du code du travail ces dispositions étant inapplicables en l’espèce.


En conséquence, la SNCF ayant respecté la procédure de mise en réforme le jugement déféré sera confirmé et M. X sera débouté de ses demandes d’indemnisation par confirmation du jugement.

Sur le harcèlement moral


Selon l’article L. 1152-1 du code du travail « aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d’altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel ».


En application du même texte et de l’article L. 1154-1 du code du travail, lorsque survient un litige relatif à l’application des articles L. 1152-1 à L. 1152-3 et L. 1153-1 à L. 1153-4, le candidat à un emploi, à un stage ou à une période de formation en entreprise ou M. X présente des éléments de fait laissant supposer l’existence d’un harcèlement.


Au vu de ces éléments, il incombe à la partie défenderesse de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d’un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.


Le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d’instruction qu’il estime utiles.


En l’espèce, M. X présente les éléments de fait suivants :
Le médecin du travail l’ayant placé à compter du 31 janvier 2014, en restriction d’horaires, il était toujours soumis à ce régime en janvier 2015. Il effectuait son roulement en gare de Cannes Marchandise lorsque les horaires étaient compatibles ou bien il effectuait divers remplacements, ce qui implique qu’il était « à la réserve ». Le reste du temps, il se trouvait soit en formation en gare de Cannes Voyageurs soit occupait un poste d’assistant du DPX dans la journée. Par la suite, il a fait l’objet de plusieurs arrêts de travail à cause de ce rythme de travail. Le 27 avril 2016, la SNCF lui a notifié son refus de le placer en régime de longue maladie. Le 5 septembre 2016, il était déclaré inapte à son poste de travail. Le 26 septembre 2016, la SNCF lui indiquait qu’au regard de la réglementation interne, il avait épuisé ses droits au versement des prestations en espèce. Il invoque :

* l’absence volontaire de reclassement, des contrôles médicaux aléatoires et des changements intempestifs de planning :


- alors que la réglementation spécifique de la SNCF prévoit des contrôles médicaux d’aptitude obligatoires pour certaines fonctions et que son poste supposait une aptitude vérifiée par le médecin du travail après un mois d’arrêt, l’employeur ne prévoyait jamais de visite médicale ;


- son employeur profitait de son absence pour changer son planning et modifier ses repos, congés, horaires de travail et un tel ce changement pouvait lui être notifié deux ou trois jours avant la prise de fonction ;


- l’employeur l’a humilié en affectant un autre agent à son poste, sans le prévenir ;


- il avait prévenu depuis des années le médecin du travail qu’il avait des difficultés avec le rythme de travail en 3X8 ;


-l’employeur aurait dû procéder à des recherches de reclassement et consulter les représentants du personnel, ce qu’il n’a pas fait ;

* la privation de rémunération pendant 9 mois :


- du fait de son employeur, il s’est trouvé privé de l’intégralité de ses rémunérations ; il s’est vu notifier son passage en demi-solde alors qu’il aurait dû être placé en longue maladie,

* la privation de l’indemnité de réserve et des roulements du dimanche et jours fériés :


- il n’a jamais touché l’indemnité de réserve alors qu’il y avait droit ; cette prime ne lui a pas été réglée alors qu’il occupait différents postes et qu’il pouvait être affecté à différentes missions ;

le seul fait de remplacer un agent à la demande le place en position de réserve ; cette situation a été créée volontairement par l’employeur ; un agent, dans la même situation que lui, touche la prime de réserve ;

* le refus d’une mise en longue maladie à compter d’avril 2016 :


- le bénéfice du régime longue maladie devait lui être accordé à compter d’avril 2016 ; la décision appartient au directeur de région, après avis du médecin conseil de la caisse, qui peut prendre cette décision de manière rétroactive ; sa situation de santé n’ayant pas évolué depuis avril 2016, ce régime aurait dû lui être accordé dès cette date alors qu’il ne lui a été accordé

* sa mise à la réforme doit être assimilée à un licenciement abusif :


- la mise à la retraite d’office par l’employeur, dans le but de se soustraire à son obligation de reclassement et financières découlant de l’inaptitude constatée du salarié, est constitutive d’un licenciement nul ;


- depuis le dernier avis d’inaptitude définitive à son poste, l’employeur n’a pris aucune mesure, ni pour rechercher un autre poste ; ni pour faire des offres de reclassement, ni pour consulter les délégués du personnel ;


- à partir du moment où un salarié est déclaré inapte à son poste, les obligations de l’employeur en matière d’inaptitude s’appliquent quand bien même M. X serait par la suite replacé en situation de maladie ;


Au soutien de son allégation d’un harcèlement moral M. X produit :


- un récapitulatif de ses commandes avec une liste des modifications intervenues en 2014 et 2015 divers plannings, déroulés prévisionnels et tableaux de travail effectifs afin de démontrer qu’il avait bien le statut d’agent de la réserve et aurait du percevoir l’indemnité y afférente,


- sa note comportant des décomptes et ses fiches de paie 2013/2014/2015, tendant à démontrer que le seul passage à la réserve aurait dû l’amener à « gagner plus qu’avant »,


- la notification de son passage en demi-solde alors qu’il aurait dû se trouver en longue maladie,


- une attestation de M. A B, cheminot, du 8 mai 2016, relatant que lors d’un comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail il a été évoqué le fait que la situation de M. X était suspecte, notamment, parce que d’autres cheminots dans d’autres services identiques touchaient une prime de réserve, et concluant : « Mon ressenti sur cette histoire est que la direction refuse de trouver une solution à cette affaire et, espère qu’il va craquer et quitter l’entreprise de lui-même »,


- le procès verbal du comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail du 31/03/2015, notant un manque de communication avec la direction, le fait que le roulement de l’agent a été modifié à de nombreuses reprises et ses repos décalés et modifiés avec des restrictions d’horaires d’abord temporaires puis devenues permanentes sans avoir de réponse,


- la décision du directeur de région d’attribution du régime de la longue maladie, dont la rétroactivité au 27 septembre 2016 et non au 20 avril 2016 ne s’explique pas alors que sa situation médicale était inchangée entre ces deux dates.


L’ensemble des éléments ainsi produits par M. X, appréhendés dans leur ensemble, laisse supposer l’existence d’un harcèlement moral.


En réponse l’établissement SNCF démontre que :

* sur le défaut de reclassement et la cessation des fonctions de M. X :


- ainsi qu’il vient d’être démontré, elle a respecté la procédure de mise en réforme de M. X et aucun grief ne peut lui être fait à cet égard ;

* sur les contrôles médicaux aléatoires et les changements intempestifs de planning :


- les commandes ainsi que les convocations pour les visites médicales de reprise lui étaient habituellement adressées par courrier simple à son domicile ;


- c’est M. X qui l’avait sollicitée pour que les commandes ne lui soient plus envoyées à son domicile ;
- les modifications de plannings l’ont été au vu des restrictions médicales imposées à l’intéressé ;


- les contrôles de l’état de santé de M. X ont été effectués en temps utile pour adapter ses conditions de travail,

* sur la prétendue privation de la rémunération pendant 9 mois et le refus de passage en longue maladie :


- la rémunération du M. X a été octroyée sur la base des règles internes à la SNCF ;


- ce n’est pas le Dirigeant de l’Unité Opérationnelle (DUO) mais le médecin conseil qui a émis un avis défavorable quant à l’attribution du régime longue maladie en date du 15 mars 2016 ; le directeur d’établissement a donc suivi cet avis défavorable du médecin conseil ;


- les modalités de décompte du droit à prestations en espèces n’ont été modifiées statutairement qu’à compter du 1er juillet 2016 ; M. X n’a donc pas été payé à demi solde avant juillet 2016 puisque cette mesure n’existait pas à la SNCF avant cette date ;


- ce n’est qu’en octobre et décembre 2016 que le bulletin de paie du M. X fait mention d’un solde nul, la régularisation des montants dus ayant été faite en janvier 2017 ;


- l’obligation de reprise du paiement des salaires à l’issue du délai d’un mois en cas d’inaptitude (art. 2.3.4. du RH 00360) n’est pas applicable aux agents du cadre du permanent soumis à la procédure de réforme.

* sur la privation de l’indemnité de réserve et des roulements des dimanches et jours fériés :


- M. X n’a pas été affecté à la réserve conformément à un accord passé avec le responsable des ressources humaines et le Directeur d’Unité Opérationnelle aux termes duquel il était nécessaire que l’agent se forme sur les postes qu’il pouvait tenir en tant que réserviste ; il n’a jamais été en capacité de tenir les postes qui lui auraient permis d’être réserviste ;


- les plannings étaient établis selon ses restrictions et les horaires des roulements.


Ainsi, la SNCF démontre que ses agissements ne sont pas constitutifs d’un harcèlement et que les décisions prises à l’égard de M. X sont justifiées par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement à son encontre.


Le harcèlement moral n’est en conséquence pas caractérisé. Le jugement critiqué sera confirmé en ce qu’il déboute M. X de ses réclamations à ce titre.


Enfin, il n’est pas démontré que la SNCF aurait fait preuve à l’égard de M. X de déloyauté dans l’exécution du contrat de travail.


Le jugement critiqué sera en conséquence confirmé en ce qu’il déboute M. X de l’ensemble de ses demandes.

Sur les dépens et les frais non-répétibles


L’appelant qui succombe dans la présente instance, doit supporter les dépens et il y a lieu de le condamner à payer à la SNCF une indemnité au titre de l’article 700 du code de procédure civile, qu’il est équitable de fixer à 1.000 euros.

PAR CES MOTIFS
La Cour, après en avoir délibéré, statuant par arrêt contradictoire, prononcé par mise à disposition au greffe, en matière prud’homale,


Confirme le jugement entrepris,


Y ajoutant,


Condamne M. Z X à payer à l’établissement SNCF une somme de 1.000 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,


Déboute M. X de sa demande d’indemnité de procédure en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,


Condamne M. X aux dépens de la procédure d’appel,


Déboute les parties du surplus de leurs prétentions.


Et la présente décision a été signée par le Président et le Greffier.

LE GREFFIER LE PRESIDENT
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