Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 1 2, 28 avril 2022, n° 21/02880

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Aix-en-Provence, ch. 1 2, 28 avr. 2022, n° 21/02880
Juridiction : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Numéro(s) : 21/02880
Importance : Inédit
Décision précédente : Tribunal judiciaire de Marseille, 18 février 2021, N° 20/02754
Dispositif : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée
Date de dernière mise à jour : 29 septembre 2022
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Sur les parties

Texte intégral

COUR D’APPEL D’AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-2

ARRÊT

DU 28 AVRIL 2022

N° 2022/ 325

Rôle N° RG 21/02880 – N° Portalis DBVB-V-B7F-BHAFT

S.A.R.L. IMMAC DEVELOPPEMENT

C/

[S] [E]

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

Me Thomas HUGUES

Me Benjamin AYOUN

Décision déférée à la Cour :

Ordonnance de référé rendue par le Président du tribunal judiciaire de Marseille en date du 19 Février 2021 enregistrée au répertoire général sous le n° 20/02754.

APPELANTE

S.A.R.L. IMMAC DEVELOPPEMENT

prise en la personne de son représentant légal,

dont le siège social est situé [Adresse 2]

représentée par Me Thomas HUGUES, avocat au barreau de MARSEILLE, plaidant

INTIME

Monsieur [S] [E]

né le 20 février 1967 à [Localité 3], demeurant [Adresse 1]

représenté par Me Benjamin AYOUN, avocat au barreau de MARSEILLE, plaidant

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L’affaire a été débattue le 08 mars 2022 en audience publique. Conformément à l’article 804 du code de procédure civile, Mme PEREZ, Conseillère, a fait un rapport oral de l’affaire à l’audience avant les plaidoiries.

La Cour était composée de :

M. Gilles PACAUD, Président

Mme Sylvie PEREZ, Conseillère

Mme Angélique NETO, Conseillère

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Mme Julie DESHAYE.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 28 avril 2022.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 28 avril 2022,

Signé par M. Gilles PACAUD, Président et Mme Julie DESHAYE, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

EXPOSÉ DU LITIGE :

Par un contrat préliminaire de vente en l’état futur d’achèvement, Monsieur [S] [E] s’est engagé à acheter, à la SARL IMMAC Développement, un bien immobilier à l’adresse sise [Adresse 1].

Cette société a été constituée le 27 septembre 2013 par la SARL [W]-Immo, prise en la personne de Monsieur [B] [W], chirurgien dentiste, la SARL [P] Sud, prise en la personne de Monsieur [O] [P] et la SARL H2 HOME HUNTER, prise en la personne de Monsieur [S] [E], chacun des associés détenant 1000 parts du capital social.

À la suite de désaccords, la SARL [W]-Immo va, le 18 novembre 2014, racheter les parts sociales des deux autres associés.

La SARL IMMAC Développement expose qu’elle va s’apercevoir, courant mars 2020, que Monsieur [S] [E] a forgé un faux procès-verbal d’assemblée générale daté du 17 juillet 2018 donnant tout pouvoir à un membre de l’étude notariale de Maître [V] [F], notaire en charge de la vente, afin de pouvoir légalement la représenter lors de la vente du bien sis [Adresse 1] devant être vendu à Monsieur [S] [E].

Elle expose que sur la base dudit faux procès-verbal d’assemblée générale du 17 juillet 2018 ' par deux actes notariés en date du 5 septembre 2018 et du 1er mars 2019 ', elle se verra vendre ce bien immobilier à Monsieur [S] [E] pour une valeur de 305 000 euros soit une valeur nettement en deçà de la somme initialement prévue au contrat préliminaire de vente en l’état futur d’achèvement en date du 12 novembre 2016 prévoyant un prix de 505 000 euros.

Considérant que la vente du bien à Monsieur [S] [E] a été réalisée frauduleusement, la SARL IMMAC Développement expose avoir déposé une plainte pénale des chefs de faux, usage de faux, d’escroquerie au jugement et d’escroquerie à la vente.

Par une ordonnance de référé rendue le 31 mai 2019, le tribunal de grande instance de Marseille a condamné la SARL IMMAC Développement « à procéder ou à faire procéder à l’achèvement des lots, 116, 124 et 138 de l’immeuble [Adresse 1] vendus à Monsieur [S] [E], sous astreinte de 100 € par jour de retard passé le délai d’un mois à compter de la signification de la présente ordonnance et ce, pendant un délai d’un an', décision signifiée le 7 juin 2019.

La SARL IMMAC Développement va s’acquitter d’une somme de 3 900 euros entre les mains de Monsieur [E] concernant la liquidation de l’astreinte du 8 juillet au 15 août 2019 en exécution des ordonnances définitives du 31 mai et du 6 décembre 2019.

Soutenant l’existence d’une fraude à la signature des actes de vente, la SARL IMMAC Développement a, par acte judiciaire signifié le 2 septembre 2020, fait assigner Monsieur [S] [E] ainsi que Maître [V] [F], notaire, en nullité de la vente notariée du 1er mars 2019.

Par acte d’huissier en date du 11 septembre 2020, Monsieur [E] a saisi le juge des référés aux fins de liquidation de l’astreinte pour la période du 8 juillet au 15 août 2019.

Dans le cadre de cette instance, la SARL IMMAC Développement a sollicité un sursis à statuer jusqu’à la décision au fond devant intervenir sur la demande en nullité de la vente des lots et voir rapporter les ordonnances du 31 mai et du 6 décembre 2019 en raison de circonstances nouvelles relatives à la découverte de la fraude

Par une ordonnance de référé n°21/206 du 19 février 2021, le juge des référés du tribunal judiciaire de Marseille a :

— dit n’y avoir lieu à surseoir à statuer,

— dit n’y avoir lieu à rétracter les ordonnances de référé des 31 mai 2019 et 6 décembre 2019,

— liquidé l’astreinte provisoire prononcée par l’ordonnance du 31 mai 2019 pour la période du 8 juillet 2019 au 30 juin 2020,

— condamné la SARL IMMAC Développement à payer la somme de 31 900 euros au titre de la liquidation d’astreinte,

— dit n’y avoir lieu de faire droit à la demande de provision,

— condamné la SARL IMMAC Développement à payer à Monsieur [E] la somme de 1 000 euros en application de l’article 700 du Code de procédure civile et aux dépens.

Par déclaration au greffe du 24 février 2021, la SARL IMMAC Développement a interjeté appel de cette ordonnance.

Par conclusions déposées et notifiées le 5 avril 2021, la SARL IMMAC Développement a conclu comme suit :

— infirmer intégralement l’ordonnance de référé n°21/206 rendue le 19 février 2021 par le tribunal judiciaire de Marseille ;

— débouter monsieur [S] [E] de l’ensemble de ses demandes ;

Y faisant droit et statuant à nouveau,

In limine litis,

— ordonner un sursis à statuer dans l’attente de l’issue de la procédure au fond en nullité de la vente pendante devant le tribunal judiciaire de Marseille (RG n°20/07950) et / ou des poursuites pénales qui pourraient être exercées concernant la plainte pénale déposée le 28 août 2020 au titre d’une bonne administration de la justice ;

À titre principal,

— constater que la SARL IMMAC Développement fait état de circonstances

nouvelles justifiant que les ordonnances de référé n°19/483 du 31 mai 2019 et n°19/1188 du 6 décembre 2019 rendues par le tribunal de grande instance de Marseille soient rapportées ;

En conséquence,

— ordonner la rétraction des ordonnances de référé n°19/483 du 31 mai 2019 et n°19/1188 du 6 décembre 2019 rendues par le tribunal de grande instance de Marseille ;

— débouter monsieur [E] de l’ensemble de ses demandes ;

À titre subsidiaire,

— dire et juger que la SARL IMMAC Développement justifie de causes étrangères

permettant d’ordonner la suppression ou la modification de l’astreinte de cent euros (100€) par jour de retard prononcée dans l’ordonnance de référé n°19/483 du 31 mai 2019 rendue par le tribunal de grande instance de Marseille ;

En conséquence,

— supprimer l’astreinte de cent euros (100€) par jour de retard prononcée dans l’ordonnance de référé n°19/483 du 31 mai 2019 rendue par le tribunal de grande instance de Marseille ou bien ramener l’astreinte à une somme symbolique de zéro un centime d’euro (0,01€) par jour de retard ;

— débouter monsieur [E] de l’ensemble de ses demandes ;

En tout état de cause,

— condamner monsieur [E] à verser à la SARL IMMAC Développement la somme de six mille euros (6 000€) en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;

— condamner monsieur [E] aux entiers dépens de l’instance.

L’appelante sollicite qu’il soit sursis à statuer sur les demandes dans l’attente de la procédure pendante devant le tribunal judiciaire de Marseille (RG n°20/07950) et / ou de la procédure pénale suite à la plainte pénale déposée le 28 août 2020 pour faux, usage de faux et escroquerie au jugement.

Elle fait valoir que l’issue de ces 2 procédures est déterminante à la résolution du litige sur le sort de l’astreinte provisoire qui a été prononcée dans le cadre de l’ordonnance de référé n°19/483 du 31 mai 2019.

Concernant sa demande de rétractation des ordonnances de référé n°19/483 du 31 mai 2019 et n°19/1188 du 6 décembre 2019, au visa de l’article 488 du Code de procédure civile, elle expose que le fait nouveau est tout simplement la fraude découverte ' postérieurement aux ordonnances de référé n°19/483 du 31 mai 2019 et n°19/1188 du 6 décembre 2019 ' lorsque le nouveau conseil de la société a pris connaissance des actes notariés avec leurs annexes et notamment du faux procès-verbal d’assemblée générale du 17 juillet 2018.

L’appelante précise que ce n’est qu’à partir du 2 mars 2020 qu’elle a été en mesure de comprendre l’ampleur de la fraude dont elle a été victime, date à laquelle elle a été destinataire, de la part de Maître [V] [F], notaire, des actes notariés litigieux (avec leurs annexes) dont ce dernier avait eu le ministère d’authentifier.

Elle fait valoir que ces éléments sont confirmés par le retour de la sommation de communiquer délivrée à Maître [V] [F], le 19 novembre 2020, dans laquelle ce dernier va déclarer à Maître [A] [I], huissier de justice: « Je n’ai jamais été en possession du procès-verbal de l’assemblée générale qui est réclamé ; ce procès-verbal d’assemblée générale a été adressé par Monsieur [C] à ma collaboratrice au terme d’un e-mail en date du 18 juillet 2018 dont je vous remets la copie (du mail) » ; que l’e-mail remis (comportant l’adresse e-mail de Monsieur [S] [E] en tant qu’expéditeur) mentionnera les termes suivants :

« De : [S] [C] [mailto :[Courriel 4]]

Envoyé : mardi 17 juillet 2018 22:37

À : [Z] [J]

Objet : PV AG

J’ai modifié le pv en retirant le nom de [P] qui n’est plus du tout concerné par cette opération ».

La SARL IMMAC Développement considère que le clerc de notaire de l’étude de Maître [V] [F] ne pouvait valablement la représenter lors de la signature de l’acte notarié du 1er mars 2019, puisque le procès-verbal du 17 juillet 2018 lui donnant tout pouvoir était frauduleux, la nullité de l’acte notarié du 1 er mars 2019 étant encourue pour défaut de tout pouvoir.

Concernant sa demande formée à titre subsidiaire, au visa de l’article L. 131-4 du Code des procédures civiles d’exécution, l’appelante considère que la rédaction frauduleuse et la signature frauduleuse de l’acte notarié du 1er mars 2019 à son insu, par le biais d’un faux procès-verbal d’assemblée générale du 17 juillet 2018, constitue la cause étrangère visée à cet article ainsi qu’une faute de Monsieur [S] [E], demandeur à la liquidation d’astreinte.

Par conclusions déposées et notifiées le 22 avril 2021, monsieur [E] a fait appel incident et a conclu comme suit :

A titre principal

— confirmer la décision querellée en ce qu’elle :

— n’a pas fait droit à la demande de sursis à statuer de la SARL IMMAC Développement,

— a dit n’y avoir lieu à rétracter les ordonnances des 31 mai 2019 et 6 décembre 2019,

— a liquidé l’astreinte courue du 16 août 2019 au 30 juin 2020,

— a condamné la SARL IMMAC Développement à lui payer la somme de 31 900 euros, y ajoutant que c’est à lui que cette somme doit être payée,

— sur les dispositions relatives à l’article 700 du Code de procédure civile et celles des dépens,

A titre incident

— infirmer la décision querellée en ce qu’elle l’a débouté de sa demande de provision à titre de dommages et intérêts pour les préjudices subis du fait de la non-livraison de son bien,

Et statuant à nouveau

— condamner à titre provisionnel, la SARL IMMAC Développement à lui payer la somme de 20 000 euros pour le retard de livraison et la privation de jouissance de son bien pendant 135 jours, soit à compter du 1er juillet 2020 et jusqu’au 12 novembre 2020, date de la prise de possession, ainsi que ses frais de garde meubles courus à compter du 31 janvier 2020 et jusqu’au 12 novembre 2020,

— condamner la SARL IMMAC Développement au paiement de la somme de 4 000 euros sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile,

— condamner la SARL IMMAC Développement aux entiers dépens de l’instance d’appel, qui seront liquidés entre les mains de me [U] [N] qui affirme y avoir pourvu.

Monsieur [E] se prévaut d’un contrat de réservation daté du 22 juin 2018 et d’un prix de 305 000 euros pour le bien à l’adresse sise [Adresse 1], qui mentionne une date de livraison au plus tard au 3ème trimestre 2018.

Monsieur [E] expose qu’en cours de procédure devant le 1er juge, il a pris possession de son bien le 4 novembre 2020 et ainsi modifié sa demande de fixation d’une nouvelle astreinte par une demande provisionnelle de dommages et intérêts pour les préjudices subis, savoir la privation de jouissance du 1er juillet 2020 au 4 novembre 2020, et le préjudice financier (déménagement et garde meubles).

Concernant la demande de sursis à statuer, il fait valoir que la procédure au fond en nullité de la vente est irrecevable notamment en ce que :

— l’article 54 du Code de Procédure Civile n’a pas été respecté en l’absence de diligences entreprises en vue d’une résolution amiable du litige lorsque la demande doit être précédée d’une tentative de conciliation, de médiation ou de procédure participative ou la justification de la dispense d’une telle tentative ;

— le pénal ne tient plus le civil en l’état.

Quant à la demande de rétractation des ordonnances des 31 mai 2019 et 6 décembre 2019, l’intimé conteste la fausseté du procès-verbal en faisant observer qu’il a bien été signé par Monsieur [B] [W], document qui ne porte que la signature et les paraphes du seul Monsieur [W].

Il fait valoir que sa signature n’est présente sur ce document que pour certifier conforme le procès-verbal qu’il a adressé à Me [F], à sa demande, pour la rédaction des actes authentiques, lui-même ne disposant que d’une copie en sa qualité de mandataire désigné par assemblée de la SARL IMMAC Développement.

L’intimé expose qu’aujourd’hui, tous les propriétaires de ce programme immobilier ayant signé leur acte de vente respectif, avec la SARL IMMAC Développement représentée par lui, sous la plume de Maître [F], notaire, en 2018, ont pris possession de leur appartement tout récemment où d’ailleurs ils résident pour la plupart, M. [W] ne pouvant faire croire qu’il ignorait l’existence de cette assemblée de 2018 alors qu’il ne s’est jamais présenté aux signatures des actes de vente, sauf celle à son profit personnel.

Il fait observer que toutes les ventes du programme immobilier signées en 2018 sont toutes signées par lui, mandataire de SARL IMMAC Développement.

Monsieur [E] relève que l’ordonnance de référé du 31 mai 2019 n’a pas été frappée d’appel par la SARL IMMAC Développement, qui l’a exécutée instamment en payant l’article 700 du Code de procédure civile auquel elle a été condamnée, et quant à l’ordonnance de référé du 6 décembre 2019 liquidant partiellement l’astreinte ordonnée, celle-ci a été exécutée également volontairement, dès sa signification, la SARL IMMAC Développement en payant le montant objet de la liquidation, sans contester quoi que ce soit, et sans en relever appel non plus.

Par ordonnance du 22 février 2022, l’affaire a été clôturée.

MOTIFS DE LA DÉCISION :

Communication de pièces:

Les dispositions de l’article 15 du code de procédure civile prévoient que les parties doivent se faire connaître mutuellement en temps utile les moyens de faits sur lesquels elles fondent leurs prétentions, les éléments de preuve qu’elles produisent et les moyens de droit qu’elles invoquent, afin que chacune soit à même d’organiser sa défense.

En faisant déposer des pièces (57 et 58) le 21 février 2022, la veille de l’ordonnance de clôture et à quelques jours de l’audience prévue le 8 mars 2022, date dont les parties étaient informées depuis plusieurs mois, M. [E] n’a pas permis à l’adversaire de répondre utilement avant cette audience, sauf à en demander le renvoi, celui-ci ne disposant pas du temps nécessaire pour en prendre connaissance et les discuter utilement, de sorte que les pièces numérotées 57 et 58 de l’intimé, de nature à compromettre les droits de la partie adverse et à porter atteinte au principe du contradictoire doivent être rejetées.

Le sursis à statuer :

C’est par une juste motivation adoptée par la cour que le premier juge a rejeté la demande de sursis à statuer motivée par l’instance au fond en nullité de la vente intervenue entre la SARL IMMAC Développement et Monsieur [E], alors qu’un simple dépôt de plainte n’impose pas la suspension des actions exercées devant la juridiction civile.

Les ordonnances des 31 mai et 6 décembre 2019:

Aux termes de l’alinéa 2 de l’article 488 du code de procédure civile, l’ordonnance de référé ne peut être modifiée ou rapportée en référé qu’en cas de circonstances nouvelles.

La première de ces ordonnances a condamné la SARL IMMAC Développement à procéder ou faire procéder à l’achèvement des lots 116, 124, et 138 de l’immeuble [Adresse 5] vendus à M. [S] [E], sous astreinte de 100 euros par jour de retard passé le délai d’un mois à compter de la signification de la présente ordonnance et ce, pendant un délai d’un an. Le juge s’est réservé le contentieux de la liquidation de l’astreinte.

La seconde ordonnance a fait droit à la demande de M. [E] et a liquidé à titre provisionnel, l’astreinte pour un montant de 3 900 euros sur la période du 8 juillet 2019 au 15 août 2019.

Pour solliciter le rapport desdites ordonnances, la SARL IMMAC Développement soutient que le procès-verbal d’assemblée générale du 17 juillet 2018, sur la base duquel elle est indiquée comme représentée à l’acte de vente intervenue entre elle et M. [E], est un faux, expliquant n’avoir jamais eu connaissance tant de ce procès-verbal que de l’acte notarié du 1er mars 2019 et de ses annexes.

Pourtant, c’est bien au regard d’un contrat préliminaire de vente en l’état futur d’achèvement daté du 22 juin 2018 produit par Monsieur [E], et d’un acte de vente du 1er mars 2019, annulant l’acte vente établi le 5 septembre 2018, que la première ordonnance a été rendue, de sorte que la SARL IMMAC Développement ne peut prétendre pour exciper d’une fraude à ses droits, avoir ignoré l’existence de l’acte de vente au moins porté à sa connaissance dans le cadre des débats de l’instance relative à l’achèvement des travaux et ayant donné lieu à la prévision d’une astreinte.

Il est rappelé que ne constitue pas une circonstance nouvelle, au sens de l’article 488 du Code de procédure civile, un fait antérieur à la date de l’audience et connu de celui qui sollicite la rétractation de l’ordonnance.

De plus, et à titre surabondant, il doit être observé que l’appelante se prévaut d’un contrat préliminaire de vente en l’état futur d’achèvement daté de 2016 par lequel Monsieur [S] [E] s’est engagé à lui acheter un bien immobilier à l’adresse sise [Adresse 1], contrat qui, s’il est distinct de celui produit par le réservataire notamment quant à sa date et au prix convenu entre les parties, mentionne un délai d’achèvement des travaux et de livraison au plus tard à la fin du troisième trimestre 2017, soit des délais bien plus contraignants que ceux mentionnés au contrat de réservation daté de 2018 produit par Monsieur [E] et dont l’inobservation a été sanctionnée par l’ordonnance du 31 mai 2019

L’astreinte :

L’article L. 131-4 du Code des procédures civiles d’exécution dispose que l’astreinte provisoire ou définitive est supprimée en tout ou partie s’il est établi que l’inexécution ou le retard dans l’exécution de l’injonction du juge provient, en tout ou partie, d’une cause étrangère.

Pour conclure à la suppression de l’astreinte ordonnée, la SARL IMMAC Développement soutient l’existence d’une cause étrangère tenant à la fraude dénoncée ci-dessus qui n’a pu avoir d’incidence sur les délais de livraison auquel l’appelante s’est engagée aux termes du contrat préliminaire de réservation qu’elle produit.

L’argument par ailleurs développé par l’appelante, tiré de l’impossibilité de livrer l’appartement le 7 février 2020 au motif du refus du plombier d’intervenir sur les lieux en raison d’un litige et M. [E] ne saurait sérieusement constituer une cause étrangère en ce qu’il n’établit pas une impossibilité du débiteur de se conformer à l’injonction du juge.

Enfin, il convient de relever que la crise sanitaire liée au Covid-19 comme invoquée par la SARL IMMAC Développement est largement postérieure à l’ordonnance du 31 mai 2019 et il n’est aucunement justifié de circonstances liées à la pandémie ayant empêché l’appelante de procéder à la livraison définitive du bien.

Il n’y a pas lieu dans ces conditions de supprimer voire de minorer l’astreinte d’ores et déjà prévue.

L’appel incident:

M. [E] a formé appel incident sur le rejet par le premier juge de sa demande de provision pour absence de livraison du bien et préjudice de jouissance au-delà du 1er juillet 2020, expliquant en avoir pris possession le 4 novembre 2020.

Il est rappelé que l’instance initiée par M. [E] est une demande en référé de liquidation de l’astreinte prononcée par ordonnance du 31 mai 2019 laquelle a prévu que le juge des référés se réservait le pouvoir de la liquider en application de l’article L. 131-3 du code des procédures d’exécution.

Dès lors, le juge saisi a les seuls pouvoirs du juge de l’exécution qui ne lui permettent pas de statuer sur une demande de provision.

Au regard des développements qui précèdent, l’ordonnance déférée à la cour sera confirmée à ces dispositions, sauf à préciser que la condamnation de la SARL IMMAC Développement au titre de la liquidation de l’astreinte est à payer à Monsieur [E].

Il y a lieu enfin de condamner la SARL IMMAC Développement au paiement de la somme de 2 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS :

La Cour,

Ecarte les pièces numérotées 57 et 58 produites au bordereau notifié le 21 février 2022 par Monsieur [E] ;

Déboute la SARL IMMAC Développement de sa demande de suppression voir de minoration de l’astreinte ;

Confirme l’ordonnance du 19 février 2021 prononcée par le juge des référés du tribunal judiciaire de Marseille, sauf à préciser que la SARL IMMAC Développement est condamnée à payer à Monsieur [E] la somme de 31'900 euros au titre de la liquidation d’astreinte ;

Y ajoutant :

Condamne la SARL IMMAC Développement à payer à M. [E] la somme de 2 000 euros au titre de l’article 700 du Code de procédure civile ;

Condamne la SARL IMMAC Développement aux dépens d’appel, qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l’article 699 du Code de procédure civile.

La greffière Le président

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