Cour d'appel d'Angers, 1er décembre 2009, n° 08/02836

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Angers, 1er déc. 2009, n° 08/02836
Juridiction : Cour d'appel d'Angers
Numéro(s) : 08/02836
Décision précédente : Tribunal de grande instance d'Angers, 15 septembre 2008

Sur les parties

Texte intégral

COUR D’APPEL

D’ANGERS

1re CHAMBRE A

HR/IM

ARRET N° 408

AFFAIRE N° : 08/02836

Jugement du 16 Septembre 2008

du Tribunal de Grande Instance d’ANGERS

n° d’inscription au RG de première instance 07/0197

ARRET DU 01 DECEMBRE 2009

APPELANTE :

L’ASSOCIATION GENERALE DE PREVOYANCE MILITAIRE – AGPM

Rue G Appert – Sainte Musse – 83000 TOULON

représentée par la SCP GONTIER-LANGLOIS, avoués à la Cour

assistée de Me Patrick BARRET, avocat au barreau d’ANGERS

INTIME ET INCIDEMMENT APPELANT :

Monsieur G Z

XXX

représenté par la SCP CHATTELEYN ET GEORGE, avoués à la Cour

assisté de Me Cyrille GUILLOU, avocat au barreau d’ANGERS

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 786 et 910 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 19 Octobre 2009 à 14 H 00, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Madame X, conseiller .

Ce Magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Madame VERDUN, conseiller faisant fonction de président en application de l’ordonnance du 7 septembre 2009, Madame X et Madame K-L, conseillers.

Greffier lors des débats : Madame Y

ARRET : contradictoire

Prononcé publiquement le 1er décembre 2009 par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de procédure civile.

Signé par Madame VERDUN, président, et par Madame Y, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

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EXPOSE DU LITIGE

Le 13 novembre 2002, monsieur G Z, militaire de carrière affecté au 6e régiment du Génie d’Angers, a souscrit auprès de l’association générale de Prévoyance militaire (AGPM), un contrat d’assurance Prima 2000 à effet du 1er février 2003 au titre de ses activités de parachutiste et de plongeur. Le 12 février suivant, il a été victime d’un accident de plongée dans le cadre d’un exercice d’entraînement, à la suite duquel il a été déclaré inapte définitivement à la plongée sous-marine.

Le 18 mai 2004, l’AGPM a refusé sa garantie à monsieur Z au motif que les lésions ne seraient pas la conséquence de l’accident de plongée mais d’une maladie préexistante.

Contestant la décision de l’assureur, monsieur Z a saisi le juge des référés du tribunal de grande instance d’Angers d’une demande d’expertise médicale. Le docteur A, désigné par une ordonnance du 30 septembre 2004, a déposé son rapport le 1er avril 2005.

Par acte d’huissier en date du 11 janvier 2007, monsieur Z a fait assigner l’AGPM devant le tribunal de grande instance d’Angers pour la voir condamner à prendre en charge les conséquences de l’accident de plongée du 12 février 2003 et à régler l’indemnité d’assurance prévue par le contrat Prima 2000, outre 3 000 euros à titre de dommages-intérêts.

Par jugement du 16 septembre 2008, le tribunal a :

— dit que monsieur Z est bien fondé à obtenir l’application des dispositions du contrat Prima 2000 souscrit auprès de l’AGPM au titre de l’accident de plongée du 12 février 2003,

— condamné l’AGPM à lui payer la somme de 11 520 euros avec intérêts au taux légal à compter du jugement et 2 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

— rejeté le surplus des demandes de monsieur Z,

— condamné l’AGPM aux dépens comprenant ceux du référé et de l’expertise.

L’AGPM a interjeté appel le 18 novembre 2008. Monsieur Z a relevé appel incident.

Les parties ont conclu. L’ordonnance de clôture a été rendue le 15 octobre 2009.

PRETENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

Par conclusions du 15 octobre 2009, l’association générale de Prévoyance militaire demande à la cour d’infirmer le jugement et de :

— débouter monsieur Z de toutes ses demandes,

— constater n’y avoir lieu à garantie,

— subsidiairement, ordonner une nouvelle expertise afin de déterminer si l’état actuel de monsieur Z est dû à un accident de plongée ou à un état préexistant,

— très subsidiairement, dire que l’indemnité ne saurait être supérieure à 4 715,52 euros,

— condamner monsieur Z à lui payer 3 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile et aux dépens de première instance et d’appel.

Elle sollicite la confirmation du jugement qui a retenu que les articles 8 et 14 du contrat relatifs à l’exclusion de garantie des maladies détectées au cours du délai d’attente de six mois sont opposables à l’intimé.

Elle soutient qu’il n’existe pas de lien de causalité entre l’impossibilité de plonger et l’accident du 12 février 2003. Elle considère que le tribunal a renversé la charge de la preuve en écrivant que c’est à l’AGPM de rapporter la preuve de l’état pathologique préexistant alors que c’est à l’assuré, qui réclame le bénéfice de l’assurance, de démontrer que c’est l’accident, et que le premier juge a dénaturé les conclusions du docteur B en disant qu’elle a émis une hypothèse alors qu’elle a clairement affirmé que les lésions ne sont pas dues à l’accident mais à un état préexistant, comme trois autres médecins avant elle. Contrairement à ce qui est soutenu, l’accident n’a été qu’un révélateur de cet état antérieur, jusque là inconnu et asymptomatique, l’excellent état de santé de l’intimé démontrant qu’il n’aurait pas dû avoir cet accident. Elle fait observer que les médecins sollicités par l’intimé concluent à l’accident en faisant référence au doute.

Elle indique que le nouveau rapport d’expertise du docteur C, déposé dans le cadre d’une autre procédure à laquelle elle n’est pas partie, lui est inopposable. En outre, l’expert ne fait pas référence à l’hypothèse d’un état préexistant.

A titre subsidiaire, elle fait valoir que l’intimé ne justifie pas de ses pertes de revenus après le mois de décembre 2003. En outre, la période de référence pour le calcul des revenus est celle allant du 1er au 12 février 2003, ce qui représente 196,48 euros sur 24 mois, soit 4 715,22 euros.

Par conclusions du 13 octobre 2009, monsieur G Z demande à la cour de débouter l’AGPM de son appel, de confirmer le jugement et de la condamner à lui payer 3 000 euros à titre de dommages-intérêts pour résistance abusive et 3 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile et aux dépens de la procédure d’appel.

Il expose qu’il s’est rapidement rétabli après l’accident mais que les examens de contrôle complémentaires ont révélé la présence d’une lésion oblongue d’environ 10 mm siégeant en regard du disque C6-C7, donnant lieu à des interprétations contradictoires de la part des médecins, les uns concluant en faveur d’une lésion pré-existante de type syringomyélique expliquant l’accident, les autres, d’une séquelle d’un accident ischémique médullaire récent.

Il précise qu’il était en excellente santé et avait subi avec succès les examens médicaux pour devenir parachutiste et plongeur et que l’accident est survenu lors d’un exercice où il jouait le rôle de l’accidenté, le stagiaire qui jouait celui du sauveteur n’ayant pas respecté les paliers lors de la remontée. Cet accident répond à la définition de l’article 3 du contrat, à savoir une atteinte corporelle non intentionnelle provenant de l’action soudaine d’une cause extérieure. Il indique que le dernier rapport d’expertise déposé dans le cadre de la procédure devant la cour administrative d’appel le 27 avril dernier tranche en faveur d’une séquelle cavitaire d’un accident ischémique médullaire.

Il soutient que le débat médical sur l’état préexistant est un faux débat puisque c’est bien cet accident qui l’a privé de la possibilité de continuer à exercer ses activités rémunératrices et que la jurisprudence a tranché depuis 1980 la question de l’apparition concomitante d’une maladie et d’un accident en retenant qu’un éventuel état antérieur n’enlève rien au caractère accidentel du sinistre.

Il précise que la liste des exclusions prévue à l’article 14 est limitative et ne prévoit pas le caractère syringomyélique de la pathologie et que la maladie est apparue au moment de l’expertise, postérieurement au délai de six mois.

Sur le montant de la garantie, il estime que l’assureur fait preuve de mauvaise foi en calculant la prime sur 12 jours au lieu d’un mois entier, vidant le contrat de sa substance au seul motif que l’accident est survenu dans les premiers jours de l’activité. Il demande à la cour de retenir les éléments constants de la rémunération perçus avant l’accident.

MOTIFS

Monsieur Z ne critiquant pas la disposition du jugement qui a rejeté le moyen tiré de l’inopposabilité de la clause d’exclusion prévue par l’article 4 du contrat, celle-ci sera confirmée.

1°) Sur la demande d’indemnisation

L’accident est défini par l’article trois du contrat du 13 novembre 2002 comme 'toute atteinte corporelle, non intentionnelle de la part de l’assuré, provenant de l’action soudaine d’une cause extérieure'.

Il ressort du dossier que :

— le 12 février 2003, monsieur Z a ressenti des douleurs à la suite d’un exercice de plongée sous-marine, lesquelles ont nécessité le placement dans un caisson hyperbare ; la fiche médicale mentionne un accident de désaturation de type neurologique après une remontée rapide de 26 mètres à 9 mètres ;

— lors des examens de contrôle, a été révélée la présence d’une lésion médullaire d’environ 10 mm de hauteur en regard du disque C6-C7 ;

— monsieur Z a été déclaré définitivement inapte à la plongée sous-marine.

Il n’existe pas de litige sur l’existence d’une atteinte corporelle, sur la cause extérieure provenant d’une action soudaine et sur l’absence de volonté de l’assuré, mais sur le lien de causalité entre l’accident et la lésion.

En effet, le docteur D, neurologue, a dit qu’il existait une lésion préexistante ancienne et a conclu à une causalité de type syringomyélique cervicale (le docteur E ne faisant que se référer à son avis) tandis que les docteurs M N O et F, également neurologues, ont conclu que la lésion était imputable à l’accident de plongée (accident ischémique).

L’expert judiciaire, le docteur A, indique que 'la lésion découverte lors de l’accident de plongée est de type syringomyélique et non de type ischémique et qu’elle était vraisemblablement préexistante au barotraumatisme', et ce après avoir relevé qu’il n’existait pas chez monsieur Z d’autres malfaçons associées telles qu’une anomalie de la charnière cervico-occipitale ou d’I J et qu’il s’agissait donc d’une syringomyélie asymptomatique dont les cas sont très rares, un seul autre cas étant connu selon l’expert.

C’est à juste titre que le premier juge a dit qu’une hypothèse ne permet pas d’établir la preuve que le demandeur souffrait d’une prédisposition. Il n’a pas dénaturé le rapport d’expertise, contrairement à ce qui est prétendu, le rapport n’affirmant nullement que la lésion n’est pas due à l’accident.

La cour ajoute qu’outre la conclusion hypothétique de l’expert, le docteur M N O et le docteur F ont motivé leur avis par l’absence d’antécédents de pathologie néonatale, traumatique ou familiale pouvant expliquer la lésion, par l’absence de pathologies associées à une lésion de type syringomyélique et par la description clinique ainsi que l’évolution favorable sous caisson hyperbare de monsieur Z.

Devant la cour, un nouveau rapport d’expertise est versé aux débats par ce dernier, déposé par le docteur C le 27 avril dernier devant la cour administrative d’appel de Nantes dans le cadre d’un litige l’opposant à l’Etat.

Ce rapport a été régulièrement communiqué à la partie adverse qui a été en mesure de faire connaître ses observations, peu important qu’il n’ait pas été établi contradictoirement à son égard.

Il résulte de ce rapport que 'l’image est compatible avec une lésion de type ischémique en rapport avec l’accident de décompression et représentatif d’un trouble neurologique, que 77% des accidents neurologiques liés à une décompression intéressent la moelle, que l’IRM du 17 septembre 2007 montre une augmentation franche de la largeur de l’image sans augmentation de la hauteur, évoquant tout à fait une séquelle cavitaire d’un accident ischémique médullaire'. Il conclut à un lien de causalité entre l’accident du 12 février 2003 et l’accident ischémique médullaire.

Contrairement à ce qu’indique l’appelante, l’expert a examiné l’hypothèse d’une syringomyélie pour la réfuter : 'il n’existe pas de malformation de la charnière cervico-occipitale, ni de malformation du névraxe et en particulier, pas de malformation d’I J, il n’existe pas d’image évocatrice de syringomyélie'.

La cour estime, au vu de l’ensemble de ces éléments, qu’il n’y a pas lieu d’ordonner une nouvelle expertise médicale et posséder les éléments suffisants pour conclure, comme l’a fait le tribunal, à l’origine accidentelle de la lésion.

Le tribunal n’a nullement renversé la charge de la preuve, comme le soutient l’appelante. En effet, l’intimé avait à rapporter la preuve de l’accident, conformément à l’article 1315 alinéa premier du code civil, tandis que l’assureur avait à démontrer que le sinistre n’était pas le résultat d’un accident mais d’un état préexistant, conformément à l’article 1315 alinéa deux du même code. Le tribunal a estimé au vu de l’ensemble des pièces produites que la lésion était due à un accident au sens du contrat.

Le jugement sera donc confirmé en ce qu’il a dit que les dispositions du contrat Prima 2000 a vocation à s’appliquer au titre du risque accident, l’accident de plongée étant postérieur à la date d’effet du contrat.

2°) Sur le montant de l’indemnisation

Le contrat Prima 2000 avait pour but de garantir à monsieur Z le versement d’une indemnité mensuelle en cas de préjudice financier subi à la suite, notamment, d’un accident entraînant une perte partielle ou totale, temporaire ou définitive, d’éléments de rémunération.

L’article 6-5 du contrat distingue les éléments variables et constants de rémunération et précise que l’indemnité ne pourra jamais dépasser l’indemnité mensuelle indexée souscrite (480 euros selon la formule choisie par monsieur Z) et l’article 6-7 limite le versement à une durée de 24 mois.

L’intimé sollicite la confirmation du jugement qui a fixé l’indemnité d’assurance à 11 520 euros sur la base du montant maximum de l’indemnité mensuelle. L’appelante demande qu’elle soit réduite à la somme de 4 715,52 euros, considérant que l’accident ayant eu lieu le 12 février 2003, il n’a perçu que 196,48 euros pour le mois de février et n’a droit qu’à cette somme multipliée par 24.

Cependant, c’est à juste titre que l’intimé fait observer que l’article 6-5 du contrat ne permet pas de retenir la rémunération afférente au mois de l’accident, que les éléments de rémunération variables, auxquels l’appelante se réfère, concernent l’hypothèse où le militaire est affecté en opération extérieure, que l’indemnité de scaphandre est un élément constant de la rémunération ainsi que cela résulte de ses bulletins de solde, de même que l’indemnité versée au titre de l’activité de parachutiste, et que l’élément constant de rémunération ouvre droit à 'une indemnité mensuelle égale au montant des pertes constatées sur les éléments de rémunération couverts par la garantie dans la limite de l’indemnité mensuelle indexée souscrite. Vous devez, dans ce cas, justifier de la perception des éléments de rémunération à compenser au cours du mois précédent le premier mois à indemniser'.

Monsieur Z justifie qu’il a perçu l’indemnité de scaphandre d’octobre 2002 à octobre 2003 (et non en novembre comme indiqué par erreur par le premier juge). Il ne produit pas les bulletins de solde postérieurs à décembre 2003 mais ceux qui sont versés aux débats suffisent à démontrer qu’il a cessé de percevoir la prime en octobre 2003.

Les contestations de l’assureur sur les rémunérations servant de référence au calcul de l’indemnité d’assurance ne sont donc pas fondées.

Il convient, en conséquence, de confirmer le jugement en ce qu’il a dit que l’indemnité due à monsieur Z doit être calculée sur la base 480 euros X 24 = 11 520 euros.

3°) Sur les autres demandes

L’intimé réclame la somme de 3 000 euros à titre de dommages-intérêts pour résistance abusive et malicieuse de l’assureur.

Cependant, la position de ce dernier se fondait sur des avis médicaux et un rapport judiciaire d’expertise qui pouvaient le conduire à douter du caractère accidentel des lésions. La mauvaise foi dans l’exécution du contrat n’est donc pas établie et monsieur Z sera débouté de ce chef de demande.

Il lui sera alloué une somme de 3 000 euros au titre de ses frais irrépétibles d’appel.

L’appelante, qui succombe en ses prétentions, sera condamnée aux dépens de la procédure d’appel et déboutée de sa demande au titre de ses frais irrépétibles.

Le jugement sera confirmé sur l’article 700 du code de procédure civile et les dépens.

PAR CES MOTIFS

Statuant publiquement et contradictoirement,

CONFIRME le jugement déféré en toutes ses dispositions,

Y ajoutant,

CONDAMNE l’association générale de Prévoyance militaire à payer à monsieur G Z la somme de 3 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile en cause d’appel,

La CONDAMNE aux dépens d’appel qui seront recouvrés conformément à l’article 699 du code de procédure civile.

LE GREFFIER LE PRESIDENT

C. Y F. VERDUN

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