Cour d'appel d'Angers, Troisième chambre, 15 juin 2020, n° 18/00754

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Angers, troisième ch., 15 juin 2020, n° 18/00754
Juridiction : Cour d'appel d'Angers
Numéro(s) : 18/00754
Décision précédente : Tribunal des affaires de sécurité sociale de Maine-et-Loire, 19 septembre 2018, N° 21500624
Dispositif : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Sur les parties

Texte intégral

COUR D’APPEL

d’ANGERS

Chambre Sociale

ARRÊT N°

Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 18/00754 – N° Portalis DBVP-V-B7C-ENPB.

Jugement Au fond, origine Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de MAINE ET LOIRE, décision attaquée en date du 20 Septembre 2018, enregistrée sous le n° 21500624

ARRÊT DU 15 Juin 2020

APPELANTE :

Société ADIATE EVOLUTION

[…]

[…]

représentée par Me Emmanuel RANDOUX de la SCP GUYARD NASRI, avocat au barreau de NANTES

INTIMEE :

URSSAF DE MAINE ET LOIRE

[…]

[…]

représentée par Maître ROGER, avocat au barreau de NANTES

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l’article 945-1 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 13 Février 2020 à 9 H 00, en audience publique, les parties ne s’y étant pas opposées, devant Monsieur Yannick BRISQUET, conseiller chargé d’instruire l’affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Président : Madame Estelle GENET

Conseiller : Monsieur Yannick BRISQUET

Conseiller : Marie-Christine DELAUBIER

Greffier lors des débats : Madame Viviane BODIN

Le prononcé de la décision a été initialement fixé à la date du 9 avril 2020. Par communiqué de la cour d’appel d’Angers en date du 17 mars 2020, les parties ont été avisées qu’il serait prorogé au mois

de septembre 2020 en raison de la période de confinement en vigueur à compter du 16 mars 2020. Par avis en date du 5 juin 2020 les parties ont été informées que le délibéré sera finalement rendu le 15 juin 2020.

ARRÊT :

prononcé le 15 Juin 2020, contradictoire et mis à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

Signé par Monsieur BRISQUET, conseiller pour le président empêché, et par Madame Viviane BODIN, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

*******

FAITS ET PROCÉDURE

L’URSSAF des Pays de la Loire a procédé à un contrôle de la société par actions simplifiées Adiate, aux droits de laquelle intervient la SAS Adiate Evolution, relatif à l’application des législations de sécurité sociale, d’assurance chômage et de garantie des salaires pour la période du 1er janvier 2012 au 31 décembre 2013.

La société Adiate disposait de plusieurs établissements en France dont un situé à Saint X de Linières.

Une lettre d’observations faisant état de trois chefs de redressement lui a été notifiée par pli recommandé avec accusé de réception en date du 11 février 2015 pour un redressement total de 157 204 euros.

La société Adiate a saisi la commission de recours amiable le 24 avril 2015 qui a rejeté son recours en raison de son caractère prématuré.

Ensuite des observations émises et pièces produites par la société Adiate, l’URSSAF a, le 27 mai 2015, ramené le montant du redressement opéré à la somme de 9 327 euros.

Le 19 juin 2015, une mise en demeure d’un montant total de 10 680 euros, majorations de retard comprises, a été adressée à la société Adiate qui a saisi la commission de recours amiable le 16 juillet 2015.

En l’absence de décision de la commission de recours amiable dans le délai d’un mois, la société Adiate a saisi le tribunal des affaires de sécurité sociale de Maine et Loire par lettre recommandée du 19 octobre 2015.

La commission de recours amiable a statué postérieurement en confirmant le redressement en sa séance du 31 octobre 2017, décision également contestée par la société Adiate qui a saisi le même tribunal par lettre recommandée du 1er février 2018.

Les deux instances ont été enrôlées sous les numéros 21500624 et 21800086.

Par jugement en date du 20 septembre 2018, le tribunal des affaires de sécurité sociale a :

— ordonné la jonction des deux recours n° 21500624 et 21800086 ;

— débouté la société Adiate de son recours et de l’ensemble de ses demandes ;

— validé le redressement opéré par l’URSSAF par lettre d’observations en date du 11 février 2015 ;

— validé la mise en demeure en date du 19 juin 2015 ;

— condamné la société Adiate à payer à l’URSSAF la somme de 9 327 euros en principal et la somme de 1353 euros en majorations de retard.

Par lettre recommandée avec accusé de réception expédiée le 27 novembre 2018 et reçue au greffe le 29 novembre suivant, la société Adiate Evolution a interjeté appel de cette décision.

L’affaire a été appelée à l’audience du 13 février 2020 à laquelle les parties ont comparu.

*

La société Adiate Evolution, venant aux droits de la société Adiate, dans ses dernières conclusions adressées au greffe le 1er octobre 2019, régulièrement communiquées et reprises oralement à l’audience, conclut à l’infirmation du jugement et demande à la cour d’annuler la mise en demeure du 19 juin 2015 et les décisions de rejet de la commission de recours amiable et de condamner l’URSSAF à lui verser la somme de 2 000 euros au titre des frais irrépétibles.

Elle fait valoir en substance que le redressement est nul faute d’avoir été signifié au véritable débiteur des cotisations, la société Adiate Nord-Ouest, filiale créée par apport partiel d’actif.

Elle ajoute que le principe du contradictoire a été violé, précisant que le redressement ne repose pas sur des bases réelles puisque tous les documents mis à sa disposition n’ont pas été examinés.

*

L’URSSAF des Pays-de-la-Loire, dans ses dernières conclusions adressées au greffe le 22 janvier 2020, régulièrement communiquées et reprises oralement à l’audience, ici expressément visées, conclut à la confirmation du jugement en toutes ses dispositions.

Elle fait valoir principalement que la convention d’apport partiel d’actif datée du 29 juillet 2013 signée par la société Adiate et la société Adiate Nord Ouest ne lui est pas opposable. Elle ajoute qu’en tout état de cause, il incombe à l’employeur qui transfère des apports d’actif de s’acquitter des obligations édictées par les articles R. 243-7 et R. 243-14 du code de la sécurité sociale, étant précisé que la convention d’apport prévoit expressément que la société Adiate conserverait les activités de support juridique, financier et comptable au niveau de la holding. Enfin, elle relève que pendant toute la procédure, la société Adiate Evolution s’est comportée comme le débiteur des cotisations.

Par ailleurs, elle affirme que le principe du contradictoire a bien été respecté, rappelant que la réduction du montant de la créance d’un organisme de recouvrement décidée à la suite des observations formulées par le cotisant n’est pas susceptible d’entraîner la nullité de la mise en demeure, dès lors que celui-ci garde connaissance de la nature, de la cause et de l’étendue de l’obligation.

Enfin, elle indique que la contestation du redressement opéré relatif au calcul de la réduction Fillon n’est pas recevable faute d’avoir été présentée devant la commission de recours amiable. En tout état de cause, elle relève que la réduction du montant du redressement après examen des pièces adressées par l’employeur, atteste de la prise en compte de ces éléments dans la limite de ce qui avait été fourni. Elle rappelle ainsi qu’il ne lui revient pas de calculer elle-même la réduction Fillon.

Le prononcé de la décision a été initialement fixé à la date du 9 avril 2020. Par communiqué de la cour d’appel d’Angers en date du 17 mars 2020, les parties ont été avisées qu’il serait prorogé au mois de septembre 2020 en raison de la période de confinement en vigueur à compter du 16 mars 2020. Par avis en date du 5 juin 2020 les parties ont été informées que le délibéré sera finalement rendu le 15 juin 2020

MOTIFS DE LA DÉCISION

1-Sur la validité de la lettre de mise en demeure du 19 juin 2015 :

Aux termes de l’article L. 244-2 du code de la sécurité sociale, toute action aux fins de recouvrement de cotisations de sécurité sociale doit être précédée, à peine de nullité, d’une mise en demeure adressée au redevable.

Il est de principe que la mise en demeure doit, à peine de nullité, être notifiée au débiteur même des cotisations réclamées, sans que soit exigée la preuve d’un préjudice pour celui-ci.

Il est constant que le 27 juillet 2013, les sociétés Adiate et Adiate Nord Ouest ont conclu une convention d’apport partiel d’actif aux termes de laquelle la première société apportait à la seconde l’activité de transport rattachée à son établissement situé à Saint-X Y. Cet acte stipule expressément que l’opération est placée sous le régime juridique des scissions conformément aux dispositions de l’article L. 236-22 du code du commerce.

Cette convention a été déposée au greffe du tribunal de commerce d’Angers le 2 août 2013 et publiée au Bulletin officiel des annonces civiles et commerciales le 14 août 2013, date à laquelle elle est devenue opposable aux tiers.

C’est donc à juste titre que les premiers juges ont considéré que la dite convention d’apport partiel d’actif datée du 29 juillet 2013 était opposable à l’URSSAF en application de l’article R. 236-2 du code du commerce.

Il a certes été relevé par ailleurs, que si la convention prévoyait sa soumission au régime des fusions, l’apport partiel d’actif n’avait pas eu pour effet de faire disparaître la société Adiate ; il est aussi vrai que la convention ne contient aucune stipulation concernant précisément l’acquittement de cotisations et contributions sociales dues antérieurement à la convention et réclamées postérieurement.

Cependant, la convention rappelle expressément en page 9 que 'les opérations de fusions et de scissions entraînent, conformément aux dispositions de l’article L. 236-2 du code de commerce, la transmission universelle du patrimoine de la société absorbée ou scindée au profit de la société absorbante ou bénéficiaire des apports ; en cas d’apport partiel d’actif soumis au régime des scissions, la transmission universelle du patrimoine s’opère sur la fraction du patrimoine de la société apporteuse correspondant à la branche d’activité faisant l’objet de l’apport.'

De surcroît, si le passif transmis pour un montant total de 115 707,83 euros est arrêté au 31 mai 2013, la convention stipule en pages 7-8 que 'toutes charges et dépenses quelconques afférentes aux biens apportés incomberont à Adiate Nord Ouest, la dite société acceptant dès maintenant de prendre, au jour où la remise des biens lui sera faite, les actifs et passifs qui existeront alors comme tenant lieu de ceux existant au 30 juin 2013. (…) elle supportera et s’acquittera, à compter du jour de son entrée en jouissance, de tous impôts, contributions, droits, taxes, primes (…) ainsi que toutes autres charges de toute nature ordinaires ou extraordinaires qui sont ou seront inhérents à l’exploitation des biens et droits objet des apports ci-dessus (…) Elle sera substituée à la société apporteuse dans les litiges et dans les actions judiciaires, actions judiciaires, tant en demandant qu’en défendant, devant toutes juridictions dans la mesure où ils concernent les biens et droits apportés.'

Par suite, le 19 juin 2015, date de la mise en demeure, le redevable des cotisations et majorations de retard était la société Adiate Nord Ouest en raison de la transmission universelle à son profit du patrimoine de la société apporteuse correspondant à la branche d’activité de transport rattachée à son établissement situé à Saint-X Y, en exécution de la convention d’apport partiel d’actif opposable à l’URSSAF à compter du 14 août 2013.

Aucune mise en demeure n’a été adressée à la société redevable des cotisations réclamées.

L’absence d’information donnée par la société contrôlée par l’URSSAF est un élément de fait sans incidence

sur le vice affectant la lettre de mise en demeure qui est substantiel et qui entraîne sa nullité.

En conséquence, sans qu’il soit nécessaire d’examiner les autres moyens et prétentions soulevés par les parties, il convient de prononcer la nullité de la mise en demeure qui a été délivrée à la société Adiate le 19 juin 2015 au titre des contributions et cotisations sociales dues pour l’année 2012.

En l’absence de mise en demeure au débiteur des cotisations, le redressement est également nul. Doivent être non pas annulées mais infirmées, la décision implicite de rejet puis la décision de rejet du 31 octobre 2017 prises par la commission de recours amiable.

Il y a donc lieu d’infirmer le jugement prononcé le 30 septembre 2018 par le tribunal des affaires de sécurité sociale du Maine et Loire.

2-Sur les demandes accessoires :

L’URSSAF des Pays de la Loire, partie qui succombe, sera condamnée aux entiers dépens de la procédure d’appel, la cour rappelant que la première instance n’a pas donné lieu à dépens conformément aux dispositions de l’article R.144-10 du code de la sécurité sociale abrogées au 1er janvier 2019.

L’équité ne commande pas de faire application de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS :

La COUR,

Statuant par arrêt contradictoire, prononcé publiquement et par mise à disposition au greffe,

INFIRME le jugement du tribunal des affaires de sécurité sociale de Maine et Loire du 20 septembre 2018, sauf en ce qu’il a ordonné la jonction des instances n° 21500624 et n° 21800086 ;

Statuant à nouveau des chefs infirmés,

ANNULE la mise en demeure notifiée le 19 juin 2015 par l’URSSAF des Pays de la Loire à la société Adiate, aux droits de laquelle intervient la société Adiate Evolution, ainsi que le redressement opéré par lettre d’observations du 11 février 2015, modifié par lettre recommandée du 27 mai 2015, pour une somme de 10 680 euros, majorations de retard comprises, et infirme par voie de conséquence la décision implicite de rejet et la décision explicite de rejet du 31 octobre 2017 prises par la commission de recours amiable à l’encontre de la dite société ;

DIT n’y avoir lieu à application de l’article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNE l’URSSAF des Pays de la Loire aux entiers dépens de l’instance d’appel.

LE GREFFIER, P/ LE PRÉSIDENT empêché,

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Cour d'appel d'Angers, Troisième chambre, 15 juin 2020, n° 18/00754