Cour d'appel de Bordeaux, 18 octobre 2012, n° 11/05133

  • Rupture conventionnelle·
  • Carburant·
  • Homologation·
  • Licenciement nul·
  • Contrat de travail·
  • Rétractation·
  • Indemnité·
  • Titre·
  • Employeur·
  • Délégation de pouvoir

Chronologie de l’affaire

Commentaire0

Augmentez la visibilité de votre blog juridique : vos commentaires d’arrêts peuvent très simplement apparaitre sur toutes les décisions concernées. 

Sur la décision

Référence :
CA Bordeaux, 18 oct. 2012, n° 11/05133
Juridiction : Cour d'appel de Bordeaux
Numéro(s) : 11/05133
Décision précédente : Conseil de prud'hommes de Bordeaux, 6 juillet 2011, N° F10/1605

Sur les parties

Texte intégral

COUR D’APPEL DE BORDEAUX

CHAMBRE SOCIALE – SECTION B


ARRÊT DU : 18 OCTOBRE 2012

fc

(Rédacteur : Monsieur Jean-Paul ROUX, Président)

PRUD’HOMMES

N° de rôle : 11/05133

Madame A X

c/

SARL LISA 'MAXIMUM CARBURANTS'

Nature de la décision : AU FOND

Notifié par LRAR le :

LRAR non parvenue pour adresse actuelle inconnue à :

La possibilité reste ouverte à la partie intéressée de procéder par voie de signification (acte d’huissier).

Certifié par le Greffier en Chef,

Grosse délivrée le :

à :

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 07 juillet 2011 (R.G. n°F10/1605) par le Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de BORDEAUX, Section Commerce, suivant déclaration d’appel du 29 juillet 2011,

APPELANTE :

Madame A X

XXX

représentée par Monsieur Serge MAZATS délégué syndical ouvrier muni d’un pouvoir régulier

INTIMÉE :

SARL LISA 'MAXIMUM CARBURANTS'

prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social,

XXX

représentée par Maître Bénédicte CAHOUR-BELLET, loco Maître Maryline LE DIMEET, avocates au barreau de BORDEAUX

COMPOSITION DE LA COUR :

L’affaire a été débattue le 27 juin 2012 en audience publique, devant la Cour composée de :

Monsieur Jean-Paul ROUX, Président de chambre,

Madame Myriam LALOUBERE, Conseiller,

Madame Katia SZKLARZ, Vice Présidente placée,

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Madame Florence CHANVRIT adjoint administratif faisant fonction de greffier

ARRÊT :

— contradictoire

— prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l’article 450 alinéa 2 du Code de Procédure Civile.

I. Saisine

1 – Madame A X a régulièrement relevé appel le 1er août 2011 du jugement qui, prononcé le 7 juillet 2011 par le Conseil de prud’hommes de Bordeaux, l’a déboutée de ses demandes à l’encontre de la SARL LISA 'Maximum Carburants',

Madame A X sollicite, outre l’allocation des sommes de 1.500 euros et de 2.000 euros en application, pour les procédures de première instance et d’appel, des dispositions de l’article 700 du Code de procédure civile,

— l’infirmation du jugement et, statuant à nouveau,

— la requalification de la rupture conventionnelle en licenciement nul ou, subsidiairement, en licenciement sans cause réelle et sérieuse,

— et la condamnation de la SARL LISA 'Maximum Carburants’ à lui verser

— la somme de 7.500 à titre de dommages et intérêts pour licenciement nul ou sans cause réelle et sérieuse,

— la somme de 12.039,50 euros à titre de complément de salaire du 3 février au 8 mars 2010 et celle de 1.203,95 euros au titre des congés payés afférents,

— la somme de 921,39 euros à titre d’indemnité compensatrice de préavis et celle de 92,14 euros au titre des congés payés afférents,

— la somme de 15,36 euros à titre de complément de l’indemnité de licenciement,

— la somme de 2.000 euros à titre de dommages et intérêts sur le fondement des dispositions de l’article 1382 du code civil,

et à lui remettre, sous astreinte, une attestation Pôle Emploi et un certificat conformes,

2 – La S.A.R.L. LISA 'Maximum Carburants’ sollicite pour sa part, outre l’allocation de la somme de 1.500 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile, la confirmation du jugement déféré,

II . Les faits et la procédure .

Madame A X, qui est entrée au service de la S.A.R.L. LISA 'Maximum Carburants’ le 25 août 2008, en qualité d’employée de station, selon contrat de travail à durée indéterminée à temps partiel, a, le 14 octobre 2009, signé, avec son employeur, une rupture conventionnelle de son contrat de travail,

L’homologation de cette rupture conventionnelle a été refusée par courrier du 16 novembre 2009 de la DDTEFP de la Gironde au motif d’une indemnité de rupture conventionnelle inférieure au minimum,

Madame X, qui a signé avec son employeur le 20 novembre 2009 une nouvelle rupture conventionnelle de son contrat, qui a été homologué le 2 décembre 2009 par la DDTEFP de la Gironde, a saisi le Bureau de conciliation du Conseil de prud’hommes de Bordeaux le 27 mai 2010 en demandant la requalification de cette rupture en licenciement sans cause réelle et sérieuse,

SUR QUOI LA COUR

Vu les conclusions contradictoirement échangées, déposées à l’audience par Madame A X et par la SARL LISA 'Maximum Carburants’ , alors visées par le greffier et développées oralement,

Attendu que Madame A X fait plaider, à l’appui de son appel,

— que, tout d’abord, la rupture conventionnelle est nulle comme n’ayant pas été signée par le gérant de la S.A.R.L. LISA mais par un tiers à cette société dont la délégation de pouvoir produite devant le bureau de jugement du Conseil de Prud’hommes apparaît avoir été faite pour les besoins de la cause,

— que, à titre subsidiaire, la rupture conventionnelle homologuée le 2 décembre 2009 est également nulle dés lors que, signée en réalité, sous la pression de l’employeur, le 20 novembre 2009 et non pas le 14 octobre 2009 comme faussement indiqué sur l’imprimé de rupture, elle indiquait la date du 29 octobre 2009 comme date de fin du délai de rétraction, ce qui la privait de toute possibilité de rétractation,

— et qu’elle est ainsi fondée à demander les conséquences pécuniaires d’un licenciement nul ainsi que le montant des salaires qu’elle aurait dû percevoir jusqu’au 8 mars 2011, jour de l’audience du bureau de jugement,

Attendu que la SARL LISA 'Maximum Carburants’ fait valoir, pour sa part,

— que, tout d’abord, Monsieur Y Z disposait bien, pour la signature de la rupture conventionnelle, d’une délégation de pouvoir établie par la gérante de la S.A.R.L. LISA en matière de gestion du personnel et notamment de licenciement,

— que, ensuite, il n’y a pas eu de seconde rupture conventionnelle mais seulement, à la suite du rejet de l’homologation de la rupture conventionnelle signée le 14 octobre 2009, établissement, avec l’accord libre et éclairée de la salariée, d’un second formulaire rectifiant le montant de l’indemnité spécifique de rupture conventionnelle, cause du rejet de la première demande d’homologation, et modifiant, eu égard aux nouveaux délais, la date de fin de contrat et la mention des 12 derniers mois,

— que, par ailleurs, il n’existait aucun litige entre les parties concomitant à la rupture conventionnelle à laquelle la salariée a consenti librement,

— et que, enfin, à titre subsidiaire, l’annulation de la rupture conventionnelle ne pourrait avoir les effets d’un licenciement nul mais uniquement ceux d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse,

Attendu, tout d’abord, qu’il convient de confirmer le jugement déféré en ce qu’il a retenu que Monsieur Y Z avait, en raison d’une délégation de pouvoir de la gérante de la société notamment en matière de gestion du personnel (recrutement, pouvoir disciplinaire, licenciement), qualité pour signer, pour l’employeur, la convention de rupture d’un commun accord du contrat de travail de Madame X,

Attendu, sur la validité de la rupture conventionnelle du contrat de travail,

— que, selon l’article L.1237-11 du code du travail, l’employeur et le salarié peuvent convenir en commun des conditions de la rupture du contrat de travail qui les lie, que cette rupture conventionnelle, exclusive du licenciement ou de la démission, ne peut être imposée par l’une ou l’autre des parties et résulte d’une convention signée par les parties au contrat soumise aux dispositions des articles L1237-12 à L1237-16 du même code destinées à garantir la liberté du consentement des parties,

— et que, en applications des dites dispositions,

+ la convention doit être librement négociée au cours d’un ou plusieurs entretiens préalables, pendant lesquels elles peuvent se faire assister, doit définir le montant de l’indemnité de rupture, qui ne peut être inférieur à celui de l’indemnité légale de licenciement, et fixer la date de la rupture, qui ne peut intervenir avant le lendemain du jour de l’homologation.

+ les parties remplissent un formulaire type de demande d’homologation et chacune d’entre elles à compter de la date de signature de celui-ci, peut se rétracter dans un délai de 15 jours,

+ le lendemain de la fin du délai de rétractation la partie la plus diligente adresse la convention et la demande d’homologation à l’autorité administrative chargée du travail dans le département où est établi l’employeur, l’administration disposant de 15 jours pour contrôler la régularité de l’accord et s’assurer du libre consentement des signataires.

+ la validité de la convention est subordonnée à son homologation,

Attendu qu’il résulte de tout ceci que, en la cause,

— la convention signée entre les parties le 14 octobre 2009 et transmise à la DDTEFP le 2 novembre 2009, ayant fait l’objet d’un refus d’homologation le 16 novembre 2009, est sans validité,

— et que les parties devaient, si elles persistaient dans leur intention de rompre d’un commun accord le contrat de travail, formuler une nouvelle demande d’homologation d’une nouvelle convention répondant aux dispositions rappelées ci-dessus qui forment un tout,

Attendu qu’il s’ensuit que la convention de rupture présentée à l’homologation le 23 novembre 2009, qui indiquait le 14 octobre 2009 comme date de signature et le 29 octobre 2009 comme date de fin du délai de rétractation, alors que, la véritable date de signature étant le 20 novembre 2009, le délai de rétractation s’achevait en réalité le 4 décembre 2009, soit après la date d''homologation de cette convention par la DDTEFP de la Gironde, est bien ainsi nulle comme n’ayant pas respecté les dispositions légales destinées à garantir la liberté du consentement des parties,

Attendu qu’une telle rupture devant s’analyser en un licenciement sans cause réelle et sérieuse, Madame X est ainsi bien fondée à demander le paiement d’une indemnité compensatrice de préavis dont l’employeur ne conteste pas, même subsidiairement, le montant ainsi qu’une indemnité en réparation du préjudice subi par la perte injustifiée de son emploi qui doit être fixée, au égard à son ancienneté et à son âge au jour de la rupture, à la somme de 5.000 euros,

Attendu, ensuite, que la rupture du contrat de travail n’étant pas la conséquence d’un licenciement nul et Monsieur Y Z n’ayant usurpé aucune fonction, Madame X sera déboutée de ses demandes en paiement de rappel de salaire et de dommages et intérêts de ces chefs,

Attendu enfin que ni l’équité ni des raisons économiques ne justifient de dispenser la S.A.R.L. LISA 'Maximum Carburants’ de l’application, pour la procédure de première instance et pour celle d’appel, des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

PAR CES MOTIFS

Reçoit Madame A X en son appel du jugement rendu le 7 juillet 2011 par le Conseil de prud’hommes de Bordeaux,

Infirme le jugement déféré en toutes ses dispositions,

Constate que la convention de rupture d’un commun accord du contrat de travail de Madame A X est nulle,

Dit que cette rupture doit produire les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse,

Condamne la SARL LISA 'Maximum Carburants’ à payer Madame A X :

— la somme de 5.000 à titre de dommages et intérêts pour rupture abusive du contrat de travail,

— la somme de 921,39 euros à titre d’indemnité compensatrice de préavis et celle de 92,14 euros au titre des congés payés afférents,

— la somme de 15,36 euros à titre de complément de l’indemnité de licenciement,

— la somme de 3.000 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile pour la procédure de première instance et pour celle d’appel,

Ordonne la délivrance par la SARL LISA 'Maximum Carburants’ à Madame A X, sous astreinte de 50 euros par jour de retard passé le délai d’un mois à compter de la notification du présent arrêt et par document, d’une attestation destinée à Pôle Emploi, de bulletins de salaire et d’un certificat de travail conformes,

Condamne la S.A.R.L. LISA 'Maximum Carburants’ aux entiers dépens de première instance et d’appel.

Signé par Monsieur Jean-Paul ROUX, Président, et par Chantal TAMISIER, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

C. TAMISIER Jean-Paul ROUX

Chercher les extraits similaires
highlight
Chercher les extraits similaires
Extraits les plus copiés
Chercher les extraits similaires
Inscrivez-vous gratuitement pour imprimer votre décision
Cour d'appel de Bordeaux, 18 octobre 2012, n° 11/05133