Cour d'appel de Bordeaux, 17 décembre 2013, n° 13/01642

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Bordeaux, 17 déc. 2013, n° 13/01642
Juridiction : Cour d'appel de Bordeaux
Numéro(s) : 13/01642
Décision précédente : Conseil de prud'hommes, 14 février 2013, N° F11/00083

Sur les parties

Texte intégral

COUR D’APPEL DE BORDEAUX

CHAMBRE SOCIALE – SECTION A


ARRÊT DU : 17 DÉCEMBRE 2013

(Rédacteur : Madame F-Luce Grandemange, Conseiller)

(PH)

PRUD’HOMMES

N° de rôle : 13/01642

Madame A, F, G Z

(bénéficie d’une aide juridictionnelle Partielle numéro 2013/005619 du 25/04/2013 accordée par le bureau d’aide juridictionnelle de Bordeaux)

c/

SNC Nutrimetics France

Nature de la décision : AU FOND

Notifié par LRAR le :

LRAR non parvenue pour adresse actuelle inconnue à :

La possibilité reste ouverte à la partie intéressée de procéder par

voie de signification (acte d’huissier).

Certifié par le Greffier en Chef,

Grosse délivrée le :

à :

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 15 février 2013 (RG n° F 11/00083) par le Conseil de Prud’hommes – formation de départage – de Libourne, section Encadrement, suivant déclaration d’appel du 13 mars 2013,

APPELANTE :

Madame A, F, G Z, née le XXX à

XXX, de nationalité française, profession VRP, demeurant XXX

Représentée par Maître Isabelle Pais, avocat au barreau de Libourne,

INTIMÉE :

SNC Nutrimetics France, siret XXX, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social, XXX

Représentée par Maître Arnaud Moquin, avocat au barreau de Paris,

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l’article 945-1 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 12 novembre 2013 en audience publique, les parties ne s’y étant pas opposées, devant Madame F-Luce Grandemange, Conseiller chargé d’instruire l’affaire,

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Madame Maud Vignau, Présidente,

Madame F-Luce Grandemange, Conseiller,

Madame Isabelle Lauqué, Conseiller,

Greffier lors des débats : Monsieur Tridon de Rey.

ARRÊT :

— contradictoire

— prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l’article 450 alinéa 2 du code de procédure civile.

RAPPEL DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE

Le 18 octobre 1999 Mme A Z a signé avec la SNC Nutrimetics France, société de vente de produits de beauté et de diététique, un contrat l’agréant en tant que consultante vendeuse à domicile indépendante lui donnant mandat de la représenter en vue de la vente à domicile de ses produits et de lui présenter des candidatures de nouvelles consultantes.

Le 1er avril 2001 la société Nutrimetics embauchait Mme Z en qualité de représentante exerçant une activité réduite à temps choisi. La rémunération prévue consistait en commissions sur les commandes transmises par elle incluant l’indemnité de congés payés. Elle devenait directrice de district, animant une équipe de consultantes, et signait en avril 2001 un avenant bénéficiant aux directeurs suivant les règles du Plan de Rémunérations et de Progression prévoyant deux clauses de non débauchage, non sollicitation et de confidentialité, discrétion.

Par lettre en date du 30 janvier 2004 Mme Z démissionnait de ses fonctions de directrice.

Le 31 août 2010 Mme Z donnait sa démission, après respect d’un délai de préavis de deux mois conformément à son contrat de consultante de vente à domicile, soit pour le 31 octobre 2010.

Le 29 avril 2011, Mme Z a saisi le Conseil de Prud’hommes de Libourne en requalification de son contrat en contrat de travail à temps complet en paiement d’un rappel de salaires, de congés payés, en requalification de sa décision en prise d’acte de la rupture de son contrat de travail aux torts de l’employeur en paiement d’une indemnité de clientèle et de dommages intérêts.

Par décision en date du 15 février 2013, le Conseil de Prud’hommes a dit que Mme Z a été embauchée en qualité de VRP non exclusif à temps choisi l’a déboutée de l’ensemble de ses demandes et a rejeté la demande reconventionnelle de la SNC Nutrimetics France.

Le 13 mars 2013, Mme Z a interjeté appel de cette décision.

Par conclusions déposées le 09 novembre 2013, développées oralement et auxquelles il est expressément fait référence, elle conclut à la réformation du jugement entrepris.

Elle demande à la Cour de dire que son contrat de travail est à temps complet et que sa démission s’analyse en une prise d’acte de la rupture imputable à l’employeur et forme, dès lors, les demandes en paiement des sommes suivantes à l’encontre de la SNC Nutrimetics :

—  38.875,92 € à titre de rappel de salaires,

—  3.887,60 € au titre des congés payés afférents,

—  7.678,70 € au titre des congés payés,

—  37.440,00 € au titre de l’indemnité de clientèle,

—  20.000,00 € en application de l’article 1147 du code civil,

—  10.000,00 € en réparation de la clause de non-concurrence nulle.

—  3.000,00 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Subsidiairement, elle demande que soit ordonnée une mesure d’expertise afin de déterminer le montant de l’indemnité de clientèle due et de voir ordonnée, sous astreinte de 150 € par jour de retard, la communication des relevés de commissions et des relevés des ventes.

Par conclusions déposées le 31 octobre 2013 développées oralement et auxquelles il est expressément fait référence, la SNC Nutrimetics demande la confir-mation du jugement entrepris le rejet de la demande nouvelle formée par Mme Z au titre de la clause de non-concurrence et la condamnation de celle-ci à lui payer la somme de 1.000 € à titre de dommages-intérêts pour procédure à caractère abusif et celle de 3.000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

MOTIVATION

* Sur l’application du statut de VRP et sur la demande en paiement d’un rappel de salaires et des congés payés afférents :

Mme Z revendique le statut de voyageur, représentant, ou placier (VRP) exclusif soumis à l’accord national interprofessionnel du 03 octobre 1975.

Le contrat de travail ne dépend ni de la volonté exprimée par les parties ni de la dénomination de leur convention mais des conditions dans lesquelles la prestation de travail s’est exécutée.

L’article L.7311-3 du code du travail définit comme VRP, toute personne qui :

1er travaille pour le compte d’un ou plusieurs employeurs ;

2e exerce en fait d’une façon exclusive et constante une profession de représentant ;

3e ne fait aucune opération commerciale pour son compte personnel ;

4e est liée à l’employeur par des engagements déterminants :

a – la nature des prestations de service ou des marchandises offertes à la vente ou à l’achat ;

b – la région dans laquelle il exerce son activité ou les catégories de clients qu’il est chargé de visiter ;

c – le taux de rémunération.

Le bénéfice du statut suppose un exercice exclusif de l’activité de représentant et ne peut prétendre au bénéfice du statut légal celui qui exerce parallèlement une activité salariée libérale ou commerciale. De plus, l’existence d’un secteur fixe de prospection est un des éléments essentiels du contrat de VRP.

Mme Z ne peut invoquer l’avenant d’avril 2001 aux termes duquel, en qualité de directrice, elle s’était engagée à ne représenter aucune autre entreprise sans autorisation écrite de la société Nutrimetics France. En effet, en raison de sa démission de ses fonctions de directrice, cet avenant, qui, sans ambiguïté, ne s’applique qu’aux directeurs de district, à compter du 30 janvier 2004 est devenu sans objet.

Le contrat de représentant à temps choisi qui lie les parties prévoit en son article 5 qu’aucun secteur déterminé, a fortiori exclusif, n’est confié à la consultante en droit de prospecter où bon lui semblera ; la consultante pouvant exercer toute autre activité compatible avec sa profession, dès lors qu’elle ne fait pas concurrence à la société, sans l’accord écrit de celle-ci.

Ainsi, la SNC Nutrimetics produit un extrait K bis qui démontre que Mme A Z a été immatriculée en qualité de commerçante au registre du commerce du 6 janvier 2005 au 30 décembre 2006 pour une activité de vente d’objets de décoration vaisselles etc… ambulante et Mme X atteste lui avoir acheté ce type de produits. Il est à relever que contrairement à ses affirmations Mme Z ne produit pas ses déclarations de revenus pour les années 2005 et 2006.

Il s’en déduit qu’en l’absence de secteur géographique de prospection, d’exclusivité et alors qu’elle a eu une activité commerciale propre Mme Z ne peut se prévaloir du statut de VRP exclusif.

Elle a conservé un poste de représentante salariée à temps choisi, ainsi que mentionné sur ses bulletins de salaire qui comportent la mention VDS soit vendeuse à domicile salariée et non VRP exclusif.

Mme Z ne peut donc prétendre au paiement de la ressource minimale prévue par l’article 5.1 de l’accord national interprofessionnel des VRP du 03 octobre 1975.

Par ailleurs, ainsi que l’a justement relevé le premier juge, l’employeur justifie par la production des bordereaux de commandes adressés par Mme Z, confortés par les relevés du chiffre d’affaires annuel qu’elle réalisait, que son activité s’exerçait bien à temps partiel.

En conséquence, il convient de débouter Mme Z de sa demande en requalification de son contrat de travail en contrat de travail à temps complet et en paiement d’un rappel de salaires et des congés payés afférents.

* Sur la demande au titre des congés payés :

L’article 7 du contrat de travail du 1er avril 2001 liant les parties précise expressément que la rémunération de Mme Z se fera sous forme de commissions figurant sur un document intitulé plan de rémunérations et de progression révisé périodiquement, les commissions incluant l’indemnité de congés payés de 10 %.

En conséquence, il apparaît que les indemnités de congés payés inclues dans les commissions ont bien été payées à Mme Z ; la décision entreprise sera confirmée en ce qu’elle l’a également déboutée de ce chef.

* Sur la demande en paiement d’une indemnité de clientèle :

Mme Z qui ne relève pas du statut des VRP, régi par l’accord national interprofessionnel du 03 octobre 1975 est mal fondée à se prévaloir des dispositions de celui-ci.

Dès lors, et sans qu’il soit nécessaire de se prononcer sur la requalification de la démission de Mme Z, il convient de dire cette demande mal fondée de confirmer la décision déférée en ce qu’elle l’a déboutée de ce chef.

* Sur la demande en paiement de dommages intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail :

C’est à tort que Mme Z reproche à l’employeur de ne pas lui avoir payé les salaires dus, de ne pas lui avoir permis de prendre ses congés payés.

La salariée lui reproche également d’avoir laissé s’installer, voire d’avoir provoqué des comportements de harcèlement moral à son encontre de la part de Mme X.

Cette dernière l’aurait insultée, menacée, aurait exercé des pressions sur elle et lui aurait adressé des appels téléphoniques malveillants.

En application de l’article L.1154-1 du code du travail, il incombe à Mme Z d’établir la matérialité de faits précis et répétés qui permettent, pris dans leur ensemble, de présumer l’existence d’un harcèlement moral. Dans cette hypothèse, il incombera à l’employeur de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d’un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.

Les attestations produites par Mme Z et un procès-verbal d’huissier qu’elle a fait réaliser le 14 octobre 2010 établissent que le 08 octobre M. Y, directeur régional de la société l’a appelée sur son téléphone portable à 15 heures 54 pour l’informer qu’il envisageait de déposer plainte à son encontre pour harcèlement au vu des enregistrements réalisés des propres appels téléphoniques de Mme Z ; antérieurement, le 03 septembre 2010 M. Y avait tenté de la joindre sans résultat à 0 heure.

Or, l’employeur démontre par la production d’un procès-verbal de constat d’huissier en date du 08 septembre 2010 que les 03 et 04 septembre 2010 Mme Z a, à plusieurs reprises, adressé des appels téléphoniques particulièrement grossiers et malveillants à Mme X.

Dans ces conditions les propos tenus par le directeur régional le 08 octobre 2010 n’ont rien de désobligeants ; au surplus il y a lieu de remarquer qu’ils ont été tenus après la démission de Mme Z le 30 août 2010 donc en tout état de cause après qu’elle ait porté à la connaissance de son employeur son intention de mettre un terme au contrat de travail.

Or, si cette démission peut être considérée comme une prise d’acte de la rupture du contrat de travail, des faits postérieurs à celle-ci ne peuvent être invoqués pour soutenir son imputabilité à l’employeur.

En conséquence, il y a lieu également de confirmer le jugement déféré en ce qu’il a débouté Mme Z de ce chef de demande.

* Sur la demande en paiement de dommages-intérêts au titre de la clause de non-concurrence :

L’article 10 du contrat de travail de Mme Z, intitulé 'non débauchage-non sollicitation', est rédigé comme suit :

'la consultante s’interdit, pendant le cours de contrat ou après cessation de celui-ci, de solliciter directement ou indirectement, personnellement ou par tiers interposé, en vue d’un travail salarié ou non salarié, d’une association ou d’une collaboration quelconque, au profit d’un tiers, une quelconque des personnes ayant travaillé ou collaboré avec Nutrimetics, que ce soit à titre de salarié ou non salarié, au cours des 12 derniers mois précédant la cessation de contrat. La présente clause demeurera en vigueur pendant une période d’un an à compter de la cessation effective du contrat. Elle s’applique sur tout le territoire national, quels que soient les produits ou services pour lesquels une sollicitation serait effectuée.'

Contrairement aux prétentions de Mme Z cette clause ne restreint pas sa liberté de travailler, elle ne lui interdit nullement d’avoir une activité, salariée ou non, concurrente de celle de la société. Elle a pour objet de lui interdire pendant un an le débauchage des salariés et des collaborateurs de la société et de protéger son réseau, il ne s’agit pas d’une clause de non concurrence.

Il y a donc lieu de rejeter cette demande formée pour la première fois en cause d’appel.

* Sur la demande reconventionnelle :

L’exercice d’une voie de recours ne saurait caractériser en elle-même une procédure abusive. L’intention de nuire de Mme Z n’étant pas démontrée il y a lieu de confirmer le jugement déféré en ce qu’il a rejeté la demande de la SNC Nutrimetics en paiement de dommages-intérêts.

* Sur les autres demandes :

L’équité et les circonstances de la cause commandent de faire application de l’article 700 du code de procédure civile au bénéfice de la SNC Nutrimetics qui se verra allouer la somme de 1.000 € à ce titre.

Mme Z qui succombe conservera la charge de ses frais irrépétibles et sera condamnée aux dépens de la procédure.

PAR CES MOTIFS,

LA COUR,

' Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions.

Y ajoutant :

' Rejette la demande en paiement de dommages intérêts formée par Mme Z au titre de la clause de non concurrence.

' Condamne Mme Z à verser à la SNC Nutrimetics France la somme de 1.000 € (mille euros) au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

' Condamne Mme Z aux dépens de la procédure de première instance et d’appel.

Signé par Madame Maud Vignau, Président, et par Madame A-F C-D, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

A-M C-D M. Vignau

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