Cour d'appel de Bordeaux, 30 juin 2015, n° 13/06312

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Bordeaux, 30 juin 2015, n° 13/06312
Juridiction : Cour d'appel de Bordeaux
Numéro(s) : 13/06312
Décision précédente : Tribunal de grande instance de Bordeaux, 14 octobre 2013, N° 12/03990

Texte intégral

COUR D’APPEL DE BORDEAUX

PREMIERE CHAMBRE CIVILE – SECTION B


ARRÊT DU 30 JUIN 2015

(Rédacteur : Monsieur C BARRAILLA, Président)

N° de rôle : 13/06312

Monsieur C A

c/

LA S.C.I. TOUR DU GOLF

LA S.C.I. DU GOLF

LA S.A.S. Y ET ASSOCIES

LA S.A.R.L. FIDEREX

LA S.A. SOGEFIMUR

Nature de la décision : AU FOND

Grosse délivrée le :

aux avocats

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 15 octobre 2013 (R.G. 12/03990) par le Tribunal de Grande Instance de BORDEAUX suivant déclaration d’appel du 28 octobre 2013,

APPELANT :

Monsieur C A, né le XXX à PONT DE L’ARNE, demeurant11 Rue I M Rousseau 81200 AUSSILLON,

Représenté par la S.E.L.A.R.L. LEXAVOUE BORDEAUX, Avocat au barreau de BORDEAUX, et assisté de Maître B TOSI, Avocat au barreau de BORDEAUX,

INTIMÉES :

1°/ LA S.C.I. TOUR DU GOLF, inscrite au RCS de Bordeaux sous le numéro 381 142 330, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social, sis XXX,

2°/ LA S.C.I. DU GOLF, inscrite au RCS de Bordeaux sous le numéro 433 407 079, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social, sis XXX,

3°/ LA S.A.S. Y ET ASSOCIES, inscrite au RCS de Bordeaux sous le numéro 463 200 725, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social, sis XXX,

4°/ LA S.A.R.L. FIDEREX, inscrite au RCS de Bordeaux sous le numéro 423 624 253, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social, sis XXX,

Représentés par Maître Thierry BURAUD, membre de la S.E.L.A.R.L. RACINE, Avocats Associés au barreau de BORDEAUX,

5°/ LA S.A. SOGEFIMUR, inscrite au RCS de Paris sous le numéro B 339 993 214, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social, sis XXX,

Représentée par Maître Marc DUFRANC, membre de la S.C.P. AVOCAGIR, Avocats Associés au barreau de BORDEAUX, et assistée de Maître Emmanuelle LECRENAIS, substituant Maître Bertrand CHAMBREUIL, Avocats au barreau de PARIS,

COMPOSITION DE LA COUR :

L’affaire a été débattue le 30 mars 2015 en audience publique, devant la Cour composée de :

Monsieur C BARRAILLA, Président,

Madame Catherine FOURNIEL, Président,

Madame Catherine COUDY, Conseiller,

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Madame Marceline LOISON

ARRÊT :

— contradictoire

— prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l’article 450 alinéa 2 du code de procédure civile.

Messieurs I-M Y, C A, E Z et I-J B exerçaient la profession d’expert comptable au sein de la société Y et associés.

Le 18 février 1991, ils ont créé entre eux la Sci Tour du Golf, laquelle a conclu le 5 juin 1991 un contrat de crédit-bail avec la société Sogefimur, sur un immeuble à usage de bureaux sis à Mérignac, centre Innolin, pour une durée de quinze ans assorti d’une promesse unilatérale de vente à partir de la 7e année.

Les 12 novembre 1991 et 15 juillet 1999, la Sci Tour du Golf a sous-loué les locaux de l’immeuble à la société Y et associés et à la société Fiderex, filiale de cette dernière.

Les associés de la Sci Tour du Golf ont décidé à l’unanimité de lever l’option d’achat pour le 31 décembre 2000, ce dont la société Sogefimur a été informée.

Un conflit est alors survenu entre monsieur A et les autres associés. Alors qu’il venait d’être révoqué de ses fonctions de directeur général et d’administrateur de la société Y et associés, il a refusé lors de l’assemblée générale du 21 octobre 2000 de ratifier la levée d’option et d’autoriser monsieur Y, représentant légal de la Sci Tour du Golf, à contracter l’emprunt nécessaire à l’acquisition de l’immeuble.

Le 30 octobre 2000, messieurs Y, Z et B ont alors créé entre eux la Sci du Golf et par acte authentique du 27 décembre 2000, la Sci Tour du Golf a cédé à la Sci du Golf le contrat de crédit-bail moyennant le prix de 10.000,00 F. Le même jour, la Sci du Golf a procédé à l’acquisition de l’immeuble auprès de la société Sogefimur.

Considérant que les conditions de cette cession au profit d’une Sci dans laquelle il n’était pas associé lui avaient été préjudiciables, monsieur A a obtenu en référé la désignation d’un expert, monsieur X, qui a évalué le contrat de crédit bail cédé à la Sci du Golf à la somme de 1.629.822 F.

Par actes des 30 mai et 1er juin 2005, monsieur A a assigné devant le tribunal de grande instance de Bordeaux la Sci Tour du Golf, la Sci du Golf, la société Y et associés, la société Fiderex et la société Sogefimur aux fins de voir déclarer nulle la cession de crédit bail, voir ordonner la restitution à la Sci Tour du Golf des fruits perçus à compter du 27 décembre 2000 et voir déclarer l’immeuble propriété de la Sci Tour du Golf.

Par jugement du 13 mars 2007, le tribunal de grande instance de Bordeaux a':

— annulé pour vileté du prix et absence de cause la cession du crédit-bail immobilier intervenue entre la Sci Tour du Golf et la Sci du Golf,

— dit que la valeur du crédit-bail fixée à 1.629.822,00 F soit 248 464,76 € reviendrait dans le patrimoine de la Sci Tour du Golf sous déduction du prix payé de 10 000,00 F, soit 1.524,49 €,

— sursis à statuer sur les autres demandes dont il était saisi jusqu’au résultat définitif de la plainte avec constitution de partie civile déposée par monsieur A contre messieurs Y, B et Z.

Ce jugement a été confirmé en toutes ses dispositions par un arrêt de la cour d’appel de Bordeaux du 17 juillet 2009, devenu irrévocable par suite du rejet en date du 16 novembre 2010 du pourvoi formé contre cette décision par monsieur A.

Parallèlement, par arrêt de cassation sans renvoi du 1er décembre 2010, messieurs Y, B et Z ont été définitivement relaxés des poursuites dont ils avaient fait l’objet du chef d’abus de confiance, visant les faits de cession du contrat de crédit bail à la Sci du Golf, la constitution de partie civile de monsieur A étant quant à elle déclarée irrecevable.

L’affaire qui avait été radiée après le prononcé du jugement mixte a été remise au rôle à l’initiative de monsieur A.

Par jugement du 15 octobre 2013, le tribunal de grande instance de Bordeaux a':

— rejeté comme irrecevables les demandes de monsieur A':

à titre principal, aux fins de restitution en nature à la Sci Tour du Golf de l’immeuble acquis par la Sci du Golf auprès de la société Sogefimur, ainsi que des fruits tirés de l’exploitation de l’immeuble à compter du 27 décembre 2000, évalués à 1.200.000,00 € ;

à titre subsidiaire, aux fins de condamnation de la Sci du Golf à lui verser la somme de 250.000,00 € au titre de la valeur de ses parts sociales, 25,5 % des loyers perçus en contrepartie de la jouissance de l’immeuble depuis le 27 décembre 2000, 297 173,00 € au titre d’une perte de chance de percevoir les dividendes attachés à ses parts dans la Sci Tour du Golf et 42.887,00 € correspondant à la dépréciation de la valeur du capital social de la Sci Tour du Golf,

— débouté monsieur A de son action subsidiaire en responsabilité dirigée contre la Sci du Golf et rejeté en conséquence l’intégralité de ses demandes indemnitaires,

— débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires,

— dit n’y avoir lieu à application de l’article 700 du code de procédure civile,

— condamné la Sci du Golf aux dépens, en ce compris les frais de référé et d’expertise.

Monsieur A a relevé appel de ce jugement le 28 octobre 2013.

Par conclusions remises et notifiées le 25 avril 2014, il demande à la cour de :

— réformer le jugement en ce qu’il l’a débouté de ses demandes et déclaré irrecevable à solliciter la restitution en nature de l’immeuble litigieux,

— le dire à titre principal recevable à agir au nom et pour le compte de la Sci Tour du Golf en nullité de la cession du contrat de crédit-bail,

— dire et juger que la fraude commise par la Sci du Golf justifie la substitution de la Sci Tour du Golf dans les droits de cette dernière,

— à titre subsidiaire, dire et juger efficace la levée d’option par la Sci Tour du Golf ayant pour conséquence de lui transférer la propriété de l’immeuble en application du contrat de crédit-bail,

— sur les restitutions complémentaires, à titre principal, ordonner la restitution en nature de l’immeuble acquis par la Sci du Golf auprès de la société Sogefimur le 27 décembre 2000,

— ordonner toutes transcriptions, notamment auprès de la conservation des hypothèques, pour que la Sci Tour du Golf soit substituée comme propriétaire à la Sci du Golf,

— ordonner la restitution par la Sci du Golf à la Sci Tour du Golf de la somme de 1.200.000,00 € au titre des fruits tirés de l’exploitation de l’immeuble à compter du 27 décembre 2000,

— dire la Sci du Golf irrecevable en son action de in rem verso et la débouter en conséquence de sa demande de remboursement du prix d’acquisition de l’immeuble et des frais afférents,

— débouter la Sci du Golf, la société cabinet Y et associés et la société Fiderex de l’intégralité de leurs demandes,

— condamner la Sci du Golf à indemniser la Sci Tour du Golf du surcoût fiscal entraîné par la réintégration de l’immeuble au sein du patrimoine de la société lésée,

— à titre subsidiaire sur l’indemnisation du préjudice non réparé par les restitutions ordonnées, s’il était décidé du retour en valeur du contrat de crédit-bail dans le patrimoine de la Sci Tour du Golf, constater qu’une faute commise par la Sci du Golf cause un préjudice à monsieur A, dire que la valeur des parts sociales de ce dernier doit être évaluée en fonction de la valeur de l’immeuble censé lui appartenir et condamner la Sci Tour du Golf à lui verser la somme de 250.000,00 €,

— dire et juger qu’à l’égard de monsieur A, la Sci Tour du Golf est censée être restée bailleresse de l’immeuble et avoir perçu les loyers dus par la société Y et la société Fiderex,

— condamner en conséquence la Sci du Golf à lui verser 25,5 % des loyers perçus en contrepartie de la jouissance de l’immeuble à compter du 27 décembre 2000 et tant qu’il restera associé au sein de la Sci du Golf,

— condamner la Sci du Golf à l’indemniser de la perte de chance de percevoir des revenus du fait de ses parts dans la Sci Tour du Golf,

— condamner la Sci du Golf à lui verser à ce titre la somme de 297.173,00 € et celle de 42.887,00 € en conséquence de la dépréciation de la valeur du capital social de la Sci du Golf,

— à titre plus subsidiaire, dire et juger inopposables à monsieur A l’ensemble des actes ayant pour but et pour résultat frauduleux la substitution de la Sci du Golf dans les droits de la Sci Tour du Golf,

— dire et juger qu’à son égard, la Sci Tour du Golf est censée avoir acuis la propriété de l’immeuble le 27 décembre 2000,

— dire en conséquence que la valeur de ses parts sociales dans la Sci Tour du Golf doit être évaluée en fonction de la valeur de l’immeuble censé lui appartenir,

— condamner en conséquence la Sci du Golf à lui verser la somme de 250.000,00 €,

— dire et juger qu’à l’égard de monsieur A, la Sci Tour du Golf est censée être restée bailleresse de l’immeuble et avoir perçu les loyers dus par la société Y et la société Fiderex,

— condamner en conséquence la Sci du Golf à lui verser 25,5 % des loyers perçus en contrepartie de la jouissance de l’immeuble à compter du 27 décembre 2000 et tant qu’il restera associé au sein de la Sci du Golf,

— condamner la Sci du Golf à l’indemniser de la perte de chance de percevoir des revenus du fait de ses parts dans la Sci Tour du Golf,

— condamner la Sci du Golf à lui verser à ce titre la somme de 297.173,00 €,

— en tout état de cause, condamner la Sci du Golf à transférer la valeur du crédit-bail fixé par l’expert judiciaire à la somme de 248.464,00 € assortie du TMOP, soit la somme de 485.000,00 € au mois de juillet 2013, au sein de la Sci Tour du Golf,

— condamner la Sci du Golf à procéder au remboursement effectif de la somme de 485.000,00 € et à procéder au virement des fonds sous astreinte de 500,00 € par jour de retard à compter de la signification de l’arrêt à intervenir,

— condamner la Sci du Golf au paiement de la somme de 45.000,00 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile et aux dépens.

Par conclusions remises et notifiées le 5 mars 2014, la société Y et associés, la Sci Tour du Golf, la Sci du Golf et la société Fiderex demandent à la cour de :

— dire et juger que monsieur A n’a pas qualité pour ester en justice pour le compte de la Sci Tour du Golf à l’encontre d’un tiers,

— dire et juger qu’il est irrecevable en son action ut singuli qui n’est pas dirigée contre les dirigeants sociaux,

— dire et juger qu’il n’a pas d’intérêt personnel distinct du préjudice de la Sci Tour du Golf,

— dire et juger en conséquence monsieur A irrecevable en son action intentée à titre personnel contre la Sci du Golf,

— constater que la réintégration dans le patrimoine de la Sci Tour du Golf de la valeur du crédit-bail cédé a mis fin au préjudice de cette société,

— dire et juger irrecevable l’action paulienne de monsieur A faute d’intérêt né et actuel, faute de qualité de créancier et faute d’être dirigée contre son débiteur,

— confirmer en conséquence le jugement,

— subsidiairement, dire et juger mal fondée l’action de monsieur A en l’absence de fraude commise à son préjudice par les société Y et associés, Tour du Golf, du Golf et Fiderex,

— confirmer le jugement,

— plus subsidiairement, ordonner avant dire droit une expertise à l’effet de reconstruire les comptes de la Sci Tour du Golf, dans l’hypothèse où la cession du crédit-bail n’aurait pas eu lieu, en tenant compte des charges, impositions et situation locative de l’immeuble, entre 2000 et 2013, ainsi que des frais financiers afférents aux besoins de trésorerie de la société,

— en tout état de cause, ordonner la mainlevée de l’hypothèque judiciaire provisoire et la radiation de l’inscription prise le 27 décembre 2012 sur le bien immobilier appartenant à la Sci du XXX

— condamner monsieur A au paiement d’une somme de 15.000,00 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux dépens.

Par conclusions remises et notifiées le 28 février 2014, la société Sogefimur demande à la cour de :

— lui donner acte de ce qu’en l’absence de demande tendant à voir prononcer la nullité de la vente de l’immeuble et plus généralement en l’absence de toute demande à son encontre, elle s’en rapporte à justice sur les mérites de l’appel de monsieur A,

— en toute hypothèse, prononcer sa mise hors de cause et condamner monsieur A au paiement d’une somme de 1.000,00 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

— condamner toute partie succombante aux dépens de l’instance.

L’ordonnance de clôture a été prononcée le 16 mars 2015.

Motifs :

Il a été définitivement jugé par les décisions successives intervenues que la cession du crédit-bail entre la Sci Tour du Golf et la Sci du Golf était nulle pour vileté du prix et absence de cause, et que sa valeur de 248.464,76 € était réintégrée dans le patrimoine de la Sci Tour du Golf sous déduction du prix de cession de 1.524,49 €.

Par ailleurs, la société Y et associés, la Sci Tour du Golf, la Sci du Golf et la société Fiderex n’ont pas relevé appel incident de la disposition du jugement déféré qui a écarté leur fin de non-recevoir tirée de l’autorité de la chose jugée qu’elles prétendaient être attachée à l’arrêt de la cour d’appel de Bordeaux du 17 juillet 2009 dont les motifs mentionnaient qu’il n’y avait pas lieu de dire que l’immeuble acquis par la Sci du Golf en vertu de la levée d’option deviendrait la propriété de la Sci Tour du Golf.

— Sur l’action l’action exercée par monsieur A sur le fondement de l’article 1167 du code civil :

Monsieur A forme au nom de la Sci Tour du Golf dont il est associé des prétentions à l’encontre de la Sci du Golf et tendant à la restitution par cette dernière de l’immeuble acquis auprès de la société Sogefimur et des fruits tirés de son exploitation, ainsi qu’à la condamnation de cette société à indemniser la Sci Tour du Golf du surcoût fiscal entraîné par la réintégration de l’immeuble dans son patrimoine. Monsieur A conclut par ailleurs au rejet de la demande de la Sci du Golf tendant au remboursement du prix d’acquisition de l’immeuble.

La société Y et associés, la Sci Tour du Golf, la Sci du Golf et la société Fiderex concluent à l’irrecevabilité de ces demandes en tant qu’elles interviennent dans le cadre de l’exercice de l’action ut singuli.

Aux termes de l’article 1843-5 du code civil, «'outre l’action en réparation du préjudice subi personnellement, un ou plusieurs associés peuvent intenter l’action sociale en responsabilité contre les gérants. Les demandeurs sont habilités à poursuivre la réparation du préjudice subi par la société; en cas de condamnation, les dommages et intérêts sont alloués à la société (…)'».

Il s’évince de ces dispositions qu’un associé peut engager individuellement l’action sociale, mais que cette dernière, destinée à obtenir réparation du préjudice découlant de la mise en jeu de la responsabilité de ses dirigeants, ne peut être exercée que contre ces derniers et non contre un tiers. Or en l’espèce, les demandes de monsieur A sont formées à l’encontre de la Sci du Golf et non des dirigeants de la Sci Tour du Golf, ce en quoi elles sont irrecevables sur le fondement de l’article sus-énoncé.

Si les prétentions de monsieur A ne sauraient être reçues au titre de l’action ut singuli, il sera toutefois constaté que l’appelant indique expressément dans ses écritures qu’il n’exerce pas l’action sociale aux fins de mise en jeu de la responsabilité des dirigeants de la société, mais qu’il agit en nullité d’un acte passé frauduleusement par les dirigeants au nom et pour le compte de la société.

Il sera donc retenu, comme l’a fait le tribunal, que monsieur A exerce l’action paulienne aux dispositions de laquelle il se réfère expressément par l’invocation de l’adage fraus omnia corrumpit et le visa de l’article 1167 du code civil.

L’action paulienne est ouverte aux créanciers à l’encontre de leurs débiteurs. En l’espèce, monsieur A qui intente cette action n’est créancier d’aucune des parties en cause, qu’il s’agisse de la Sci du Golf sur laquelle seule la Sci Tour du Golf dispose d’une créance indemnitaire, ou de la Sci Tour du Golf dont il est l’un des associés.

S’agissant de la Sci Tour du Golf, monsieur A ne justifie pas être créancier de sommes inscrites au crédit de son compte courant dont il lui aurait fait l’avance, ni de dividendes au titre de bénéfices distribuables constitués, selon les statuts, par les bénéfices nets de l’exercice diminué des pertes antérieures, puisque comme l’a relevé le tribunal, l’assemblée générale ordinaire statuant sur l’exercice clos au 31 décembre 2000 a constaté des pertes, exclusives de tout bénéfice distribuable.

Ainsi monsieur A ne justifie pas d’une créance certaine en son principe antérieurement à la passation de l’acte argué de fraude, et n’est dès lors pas recevable à exercer l’action paulienne dont la première des conditions fait défaut.

Ainsi qu’en a décidé à bon droit le tribunal, les demandes subsidiaires de monsieur A aux fins de paiement par la Sci du Golf de la somme de 250.000,00 € au titre de la valeur de ses parts sociales dans la Sci Tour du Golf, de 25,5 % des loyers perçus en contrepartie de la jouissance de l’immeuble à compter du 27 décembre 2000, de 297.173,00 € au titre de la perte de chance de percevoir les revenus attachés à ses parts dans la Sci Tour du Golf et la somme de 42.887,00 € au titre de la dépréciation du capital social de la Sci Tour du Golf, doivent être rejetées en ce qu’elles sont la conséquence de l’inopposabilité des actes passés en fraude de ses droits, ayant conduit à la substitution de la Sci du Golf dans les droits de la Sci Tour du Golf, et qu’elles ont donc pour fondement l’action paulienne déclarée irrecevable.

— Sur l’action en responsabilité exercée par monsieur A à titre personnel sur le fondement des articles 1382 et 1383 du code civil :

Subsidiairement, monsieur A forme une demande personnelle en indemnisation par la mise en jeu de la responsabilité délictuelle de la Sci du Golf, dans l’hypothèse où la cour considèrerait que la sanction adéquate serait le retour en valeur du contrat de crédit-bail dans le patrimoine de la Sci Tour du Golf. C’est toutefois par de justes motifs adoptés par la cour que les premiers juges ont déclaré l’action de monsieur A irrecevable sur ce fondement en retenant que le préjudice invoqué par ce dernier ne lui était pas personnel dans la mesure où il ne se distinguait pas de celui qui aurait atteint la société ; qu’en effet, ses demandes ne visaient pas à obtenir l’indemnisation d’un préjudice affectant directement et exclusivement son patrimoine personnel, mais la répercussion que lui aurait causé l’appauvrissement de la Sci Tour du Golf qui aurait été privée de recettes par la cession litigieuse. C’est donc à bon droit que le tribunal a considéré qu’a contrario, la reconstitution du patrimoine de la société du fait de l’annulation de la cession du contrat de crédit bail avait pour effet de faire disparaître le préjudice invoqué, et que les bénéfices attachés au maintien du contrat de crédit bail ne pouvaient qu’intégrer le patrimoine de la Sci Tour du Golf et non celui de monsieur A qui n’en aurait profité que par répercussion, et non de manière directe, et qu’il en était de même pour la dévalorisation alléguée des capitaux propres qui constituait un préjudice causé au premier chef à la personne morale, monsieur A n’étant indirectement affecté qu’en sa qualité de porteur de parts.

Le jugement sera donc également confirmé sur ce point.

— Sur la demande reconventionnelle en mainlevée de l’hypothèque judiciaire provisoire :

La Sci du Golf demande que soit ordonnée la mainlevée d’une inscription d’hypothèque judiciaire provisoire prise par monsieur A agissant «'ut singuli pour la compte de la Sci Tour du Golf'» sur les droits de la Sci du Golf sur l’immeuble objet du crédit-bail, monsieur A ayant été autorisé ès qualités et à cette fin par ordonnance du juge de l’exécution en date du 1er octobre 2012.

Monsieur A était irrecevable à prendre une telle sûreté dès lors qu’il ne pouvait agir «'ut singuli'» au nom de la Sci Tour du Golf à l’encontre d’une société tierce, une telle action étant exclusivement destinée à la recherche de la responsabilité des dirigeants de la société pour le compte de laquelle elle est exercée.

De surcroît, la sauvegarde des intérêts pécuniaires de la Sci Tour du Golf est désormais assurée par la réintégration de la valeur du crédit-bail dans son patrimoine.

La mainlevée sollicitée sera donc ordonnée.

Monsieur A, succombant en son appel, sera condamné à payer aux sociétés Tour du Golf, du Golf, Y et Fiderex la somme globale de 5.000,00 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, et à la société Sogefimur contre laquelle aucune demande n’est formée, la somme de 800,00 € en application de ces dispositions.

Il n’y a pas lieu de mettre la société Sogefimur formellement hors de cause, dès lors qu’elle a été régulièrement intimée et que le présent arrêt lui demeure opposable en tant que partie.

Par ces motifs ,

La cour,

Déclare l’appel de monsieur A recevable, mais non fondé.

Confirme en toutes ses dispositions le jugement prononcé le 15 octobre 2013 par le tribunal de grande instance de Bordeaux.

Y ajoutant,

Reçoit la société Y et associés, la Sci Tour du Golf, la Sci du Golf et la société Fiderex en leur demande reconventionnelle.

Ordonne la mainlevée de l’hypothèque judiciaire provisoire et la radiation de l’inscription prise à la deuxième conservation des hypothèques de Bordeaux, le 27 décembre 2012, sur le bien immobilier appartenant à la Sci du Golf, sis XXX ' XXX, cadastré sur ladite commune section XXX.

Condamne monsieur A à payer à la société Y et associés, à la Sci Tour du Golf, à la Sci du Golf et à la société Fiderex la somme globale de 5 000,00 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

Condamne monsieur A à payer à la société Sogefimur la somme de 800,00 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

Condamne monsieur A aux dépens de l’instance d’appel.

Signé par C Barrailla, Président et par Marceline Loison, Greffier, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LE GREFFIER LE PRESIDENT

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