Cour d'appel de Bordeaux, 1re chambre civile, 17 décembre 2019, n° 18/03044

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Bordeaux, 1re ch. civ., 17 déc. 2019, n° 18/03044
Juridiction : Cour d'appel de Bordeaux
Numéro(s) : 18/03044
Importance : Inédit
Décision précédente : Cour d'appel de Bordeaux, 1er juin 2016, N° 13/00344
Dispositif : Déboute le ou les demandeurs de l'ensemble de leurs demandes
Date de dernière mise à jour : 15 octobre 2022
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Sur les parties

Texte intégral

COUR D’APPEL DE BORDEAUX

PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE

— -------------------------

ARRÊT DU : 17 DECEMBRE 2019

(Rédacteur : Marie-Hélène HEYTE, président,)

N° RG 18/03044 – N° Portalis DBVJ-V-B7C-KONF

Association SEPANSO DORDOGNE

c/

[T] [H]

[K] [P] épouse [H]

[E] [G] épouse [Y]

[Q] [Y]

Nature de la décision : AU FOND

SUR TIERCE OPPOSITION

Grosse délivrée le :

aux avocats

Décisions déférées à la cour : arrêt rendu le 02 juin 2016 par le Cour d’Appel de BORDEAUX (chambre : 1, RG : 14/02570) suivant assignations en tierce opposition en date du 17 mai 2018, et jugement rendu le 25 mars 2014 par le Tribunal de Grande Instance de PERIGUEUX (RG : 13/00344) suivant deux déclarations d’appel du 30 avril 2014 (RG: 14/02570 et 14/02584)

DEMANDERESSE SUR TIERCE OPPOSTION :

Association SEPANSO DORDOGNE agissant en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social sis [Adresse 1]

représentée par Maître François RUFFIE, avocat au barreau de LIBOURNE

DEFENDEURS SUR TIERCE OPPOSITION et Appelants :

[T] [H]

né le [Date naissance 1] 1943 à [Localité 1] (ALGERIE)

de nationalité Française

demeurant [Adresse 2]

[K] [P] épouse [H]

née le [Date naissance 2] 1952 à [Localité 2] (24)

de nationalité Française

demeurant [Adresse 2]

représentés par Maître Murielle NOEL de l’ASSOCIATION GRAND-BARATEAU-NOEL, avocat au barreau de PERIGUEUX

DEFENDEURS SUR TIERCE OPPOSITION et Intimés :

[E] [G] épouse [Y]

née le [Date naissance 3] 1955 à [Localité 3] (24)

de nationalité Française

demeurant [Adresse 2]

[Q] [Y]

né le [Date naissance 4] 1950 à [Localité 2] (24)

de nationalité Française

demeurant [Adresse 2]

représentés par Maître Dominique LAPLAGNE, avocat au barreau de BORDEAUX

COMPOSITION DE LA COUR :

L’affaire a été débattue le 05 novembre 2019 en audience publique, devant la cour composée de :

Marie-Hélène HEYTE, président,

Jean-Pierre FRANCO, conseiller,

Catherine BRISSET, conseiller,

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Véronique SAIGE

ARRÊT :

— contradictoire

— prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l’article 450 alinéa 2 du code de procédure civile.

* * *

EXPOSE DU LITIGE

L’ensemble immobilier situé [Adresse 2]) d’une superficie totale de 43 ares et 32 centiares appartenant aux époux [H] jouxte celui appartenant aux époux [Y] d’une contenant totale de 15 ha 83 ares 35 centiares.

Par acte du 20 février 2012, les époux [H] ont fait assigner leurs voisins devant le tribunal de grande instance de Périgueux afin de faire cesser le trouble anormal de voisinage qu’ils estimaient subir notamment par la présence de batraciens introduits dans une mare créée au pied de leur immeuble.

Par jugement du 25 mars 2014, le tribunal de grande instance de Périgueux a :

— constaté le désistement des époux [H] de leurs demandes concernant le noisetier,

— déclaré recevables mais non fondées les demandes présentées par les époux [H] tant en principal qu’en dommages-intérêts,

— condamné les époux [H] à payer aux époux [Y] la somme de 1.000 € à titre de dommages,

— condamné les époux [H] à verser aux époux [Y] la somme de 2.000 € sur le fondement des dispositions de l’article l’article 700 du code de procédure civile,

— condamné les époux [H] aux entiers dépens,

— ordonné l’exécution provisoire.

Les époux [H] ont relevé appel de ce jugement par déclaration au greffe de leur avocat le 30 avril 2014.

Par arrêt du 2 juin 2016, la cour d’appel de Bordeaux a :

— infirmé le jugement rendu le 25 mars 2014 par le tribunal de grande instance de Périgueux à l’exception des dispositions relatives au débouté des demandes des époux [H] concernant l’arrachage des bambous, la clôture du périmètre de la mare, l’indemnisation de leur préjudice moral et l’édification d’un mur à l’emplacement de la haie mitoyenne,

Statuant à nouveau sur le surplus :

— ordonné aux époux [Y] de combler leur mare située à moins de 10 mètres de l’habitation [H] sous un délai de 4 mois après le prononcé de l’ arrêt, ce sous astreinte provisoire de 150 € par jour de retard et pendant un délai de 2 mois,

Y ajoutant :

— débouté les époux [H] de leur demande d’arrachage de deux leylandis,

— condamné solidairement les époux [Y] à payer aux époux [H] la somme de 3.000 € sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

— dit que les époux [Y] supporteront la charge des dépens de première instance et d’appel.

Les époux [Y] ont formé un pourvoi en cassation contre cet arrêt.

Par arrêt du 14 décembre 2017, la deuxième chambre civile de la Cour de cassation a rejeté le pourvoi, condamné les époux [Y] aux dépens et à payer la somme de 3.000 € aux époux [H] sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

****

Par actes du 17 mai 2018, l’association Sepanso Dordogne a fait assigner les époux [H] et les époux [Y] aux fins de tierce opposition sur l’arrêt de la cour d’appel de Bordeaux du 2 juin 2016.

Dans cette assignation du 17 mai 2018, l’association Sepanso Dordogne expose qu’elle a a pour objet la protection de la nature dans le département de la Dordogne et est agrée au titre de la protection de la nature par arrêté du Préfet de la Dordogne du 3 décembre 2012.

Elle demande, aux termes du dispositif de son acte, à la cour :

Vu l’arrêt de la Cour d’appel du 02 juin 2016

Vu les articles 582 et suivants du code de procédure civile,

— dire que les époux [Y] seront tenus de procéder au déplacement des espèces protégées amphibiens se trouvant dans la mare située à 10 mètres de l’habitation [H] dans un site permettant le repos et la reproduction des dites espèces protégées.

— Condamner les époux [Y] et les époux [H] aux entiers dépens.

Dans les motifs de son assignation, elle expose que l’association Cistude Nature bureau d’études Naturalistes a effectué une expertise de la mare litigieuse le 16 juin 2016 et a constaté la présences sur place de cinq espèces protégées au sens de l’arrêté du 19 novembre 2007 ;

que « dans la mesure où en application de l’article 580 du code de procédure civile la tierce-opposition ne rétracte ou ne réforme le jugement attaqué que sur les chefs préjudiciables au tiers opposant le jugement définitif conservant ses effets entre les parties, il convient que soit mis fin au trouble anormal de voisinage dont les époux [H] prétendaient être victimes.

La Sepanso est fondée à demander à ce que les dispositions de la cour d’appel de Bordeaux soient réformées en ce qu’elles ordonnent le comblement de la mare et qu’à cette mesure soit substituée l’obligation pour les époux [Y] de procéder au déplacement des espèces protégées sur un autre site. »

Par conclusions récapitulatives n°3 transmises par RPVA le 12 décembre 2018, les époux [H] demandent à la cour de :

Vu les articles 582 et suivants du code de procédure civile,

Vu la jurisprudence de la Cour de Cassation,

Vu l’arrêté du 19 novembre 2017,

Vu les articles L411-1 et L411-2 du code de l’environnement,

— juger la tierce opposition régularisée par l’Association Sepanso Dordogne recevable,

— débouter l’Association Sepanso Dordogne en ce qu’elle sollicite que le déplacement des espèces protégées amphibiens se trouvant dans la mare située à moins de 10 mètres de l’habitation [H] se substitue à l’obligation faite par l’arrêt du 2 juin 2016 de combler la mare,

— juger les époux [Y] irrecevables et en tous les cas mal fondés en leur demande tendant à voir statuer à nouveau sur l’existence du trouble de voisinage, demande portant atteinte à l’autorité et à la force de la chose jugée attachées à l’arrêt rendu le 2 juin 2016 par la Cour d’Appel de Bordeaux, et les en débouter,

— débouter les époux [Y] de leur demande tendant à voir construire un mur anti-bruit aux frais communs, comme inopérante,

— juger les époux [Y] irrecevables et en tous cas mal fondés en leur demande présentée à titre infiniment subsidiaire tendant à voir organiser une mesure d’expertise judiciaire aux fins de déterminer si la survie des batraciens sera assurée lors de leur déplacement et dans l’affirmative les conditions et le coût du déplacement des amphibiens, et les en débouter,

— condamner les époux [Y], sous astreinte de 150 € par jour de retard à compter du prononcé de l’arrêt à intervenir, à déplacer l’ensemble des espèces amphibiens protégées et non protégées peuplant la mare située à moins de 10 mètres de l’habitation [H] dans un site permettant le repos et la reproduction des dites espèces afin de permettre ensuite le comblement de la mare tel qu’ordonné par l’arrêt en date du 2 juin 2016, jusqu’à exécution effective,

— juger que chaque partie conservera la charge de ses propres dépens.

Par conclusions d’intimé n°2 transmises par RPVA le 13 décembre 2018, les époux [Y] demandent à la cour de :

Vu les articles 2 et 3 de l’arrêté du 19 novembre 2017,

Vu les articles L411-1, L411-2 et L415-3 du code de l’environnement,

Vu l’arrêté du ministre d’Etat, Ministre de l’écologie, du développement et de l’aménagement durable du 19 novembre (article 2 – paragraphe II),

A titre principal,

— juger qu’il n’est pas démontré que le bruit émis par les batraciens est constitutif, dans le cas d’espèce, d’un trouble du voisinage,

— réformer l’arrêt de la cour d’appel de Bordeaux du 2 juin 2016 dans ses dispositions ordonnant le comblement de la mare des époux [Y],

— débouter l’association Sepanso Dordogne de l’ensemble de ses demandes,

— débouter les époux [H] de l’ensemble de leurs demandes,

A titre subsidiaire,

— constater l’impossibilité juridique et matérielle à l’exécution de l’arrêt de la cour d’appel de Bordeaux du 2 juin 2016,

— débouter l’association Sepanso Dordogne de l’ensemble de ses demandes,

— débouter les époux [H] de l’ensemble de leurs demandes,

A titre infiniment subsidiaire, en cas de déplacement des amphibiens sur un autre site et comblement de la mare,

— ordonner, avant dire droit, une expertise judiciaire permettant de déterminer si la survie des batraciens sera assurée lors de leur déplacement et dans l’affirmative, les conditions et le coût du déplacement des amphibiens,

— débouter les époux [H] en ce qu’ils sollicitent que les époux [Y] soient condamnés sous astreinte de 150 € par jour de retard à compter du prononcé de l’arrêt à intervenir à déplacer l’ensemble des amphibiens et combler la mare,

En toute hypothèse,

— juger que chaque partie supportera ses propres dépens.

L’affaire, initialement fixée à l’audience du 15 janvier 2019, a été renvoyée à l’audience collégiale du 5 novembre 2019.

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, des moyens, des prétentions et de l’argumentation des parties, il est expressément renvoyé au jugement déféré et aux dernières conclusions écrites déposées en application de l’article 455 du code de procédure civile.

MOTIFS DE LA DÉCISION :

La tierce-opposition contre un arrêt de cour d’appel est formée par assignation et l’instance se déroule selon les règles de la procédure applicable devant la cour.

En application de l’article 954 alinéa 3 du code de procédure civile la cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif .

Il résulte du dispositif de l’assignation ci-dessus reproduit que la seule et unique demande de la Sepanso y figurant et sur laquelle la cour doit statuer est de 'dire que les époux [Y] seront tenus de procéder au déplacement des espèces protégées amphibiens se trouvant dans la mare située à 10 mètres de l’habitation [H] dans un site permettant le repos et la reproduction des dites espèces protégées'.

L’effet dévolutif de la tierce-opposition est limité à la remise en question relativement à son auteur ( ici la Sepanso ) des points jugés qu’elle critique, ce qui n’autorise pas à instaurer un nouveau litige devant la juridiction saisie du recours. En outre ,le défendeur n’est pas recevable à présenter d’autres prétentions que celles tendant à faire écarter celles du tiers opposant

(cassation 2ème civile 9 octobre 2008 N° 17-12409).

Il en résulte que les prétentions des époux [Y] tendant à la réformation de l’arrêt du 2 juin 2016 sont irrecevables et se heurtent à l’autorité de chose jugée.

S’agissant de l’association Sepanso, elle produit un rapport 'd’expertise’ réalisée le 16 juin 2016 de 22 heures à 23 heures à la demande de Mme et M.[Y] pour mener un inventaire des espèces éventuellement présentes dans et autour de la mare, selon lequel 'l’inventaire a permis l’observation de têtards d’Alyte accoucheur, de Grenouille rieuse et de larves de Triton palmé attestant la reproduction de ces espèces dans la mare. Des adultes d’Alyte accoucheur, de Rainette méridionale et de crapaud commun ont été contactés dans ou à proximité immédiate de la propriété des époux [Y].'

Ce document mentionne que la rainette méridionale et l’alyte accoucheur sont protégés par l’article 2 de l’arrêté du 19 novembre 2007, la grenouille rieuse, le crapaud commun et le triton palmé par l’article 3 du même arrêté.(sa pièce 4). Ce rapport est signé de [H] [E] directeur de l’association Cistude Nature et de [M] [R], responsable Etudes à Cistude Nature.

L’association Sepanso produit également l’attestation de M. [H] [E] du 20 décembre 2018 ayant pour objet : 'attestation déplacement d’espèces protégées’ mentionnant : « je soussigné Monsieur [H] [E], directeur de l’association Cistude Nature sise (..) certifie que l’association Cistude nature possède toute l’expérience technique pour le déplacement d’espèces protégées en l’occurrence amphibiens sous réserve d’une demande d’autorisation par les autorités concernées. » (pièce Sepanso N°9).

Or, l’arrêt du 2 juin 2016 dans son dispositif se borne à 'ordonner aux époux [Y] de combler leur mare située à moins de 10 m de l’habitation [H] sous un délai de quatre mois après le prononcé de l’arrêt ce sous astreinte provisoire de 150 € par jour de retard pendant un délai de deux mois.'

Ni le dispositif ni même les motifs de cet arrêt et encore moins les demandes des époux [Y] n’évoquent l’éventualité d’espèces protégées ni ne font interdiction aux époux [Y] de procéder au déplacement des dites espèces avant de combler la mare.

Il en résulte que la demande de l’association n’a pas pour objet la remise en question relativement à son auteur ( ici la Sepanso ) de points jugés qu’elle critique ; elle a pour seul objet de s’assurer que lorsque les époux [Y] procéderont à l’exécution de l’arrêt devenu définitif, ils veilleront à déplacer au préalable dans les conditions requises les espèces protégées d’autant que l’association Cistude Nature a attesté de la faisabilité technique d’un tel déplacement.

Dès lors, les conditions et modalités de l’exécution de l’arrêt du 2 juin 2016 constituant un sujet totalement distinct de celui jugé par ledit arrêt, la tierce opposition de l’association Sepanso doit être déclarée malfondée et les parties seront déboutées de l’ensemble de leurs prétentions.

Chacune des parties conservera la charge de ses dépens.

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

Déclare l’association Sepanso Dordogne recevable mais mal fondée en sa tierce opposition

LA REJETTE,

Déboute les parties de l’ensemble de leurs prétentions,

Dit que chacune des parties conservera la charge de ses dépens.

Le présent arrêt a été signé par Madame Marie-Hélène HEYTE, président, et par Madame Véronique SAIGE, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le Greffier,Le Président,

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Cour d'appel de Bordeaux, 1re chambre civile, 17 décembre 2019, n° 18/03044