Cour d'appel de Bourges, Chambre civile, 10 décembre 2009, n° 09/00477

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Bourges, ch. civ., 10 déc. 2009, n° 09/00477
Juridiction : Cour d'appel de Bourges
Numéro(s) : 09/00477
Décision précédente : Tribunal de commerce de Bourges, 19 janvier 2009

Texte intégral

BM/CL

XXX

Me Didier TRACOL

Me Jean-Charles LE ROY DES BARRES

Me N-André GUILLAUMIN

LE : 10 DECEMBRE 2009

COUR D’APPEL DE BOURGES

CHAMBRE CIVILE

ARRÊT DU 10 DECEMBRE 2009

N° – Pages

Numéro d’Inscription au Répertoire Général : 09/00477

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal de Commerce de BOURGES en date du 20 Janvier 2009

PARTIES EN CAUSE :

I – S.A.R.L. DEUTSCHE AUTOMOBIL TREUHAND GmbH, agissant sur les poursuites et diligences de son gérant, domicilié en cette qualité au siège social :

Helmut-Hirth-Strasse 1

XXX

représentée par Me Didier TRACOL, avoué à la Cour

assistée de Me Gilles PODEUR, avocat au barreau de PARIS

APPELANTE suivant déclaration du 19/03/2009

II – S.A.S. LACOUR CONCEPT, agissant sur les poursuites et diligences de son Président domicilié en cette qualité au siège social :

XXX

XXX

représentée par Me Jean-Charles LE ROY DES BARRES, avoué à la Cour

assistée de Me Arnaud SARLAT, avocat au barreau de BOURGES, membre de la SELARL ALCIAT-JURIS

INTIMEE

10 DECEMBRE 2009

N° /2

III – Me I D, agissant en sa qualité de mandataire liquidateur à la liquidation judiciaire de la S.A. LACOUR DAT FRANCE

XXX

XXX

représenté par Me N-André GUILLAUMIN, avoué à la Cour

assisté de Me Marie-Paule CHAMBOULIVE, avocat au barreau de BOURGES, membre de la SCP SOREL, PILLET, CHAMBOULIVE, P-Q, X, Y, Z, A et B

INTIME

10 DECEMBRE 2009

N° /3

COMPOSITION DE LA COUR :

L’affaire a été débattue le 30 Septembre 2009 en audience publique, la Cour étant composée de :

Mme S Présidente de Chambre,

entendue en son rapport

Mme LADANT Conseillère

M. LAVIGERIE Conseiller

***************

GREFFIERE LORS DES DÉBATS : Mme C

***************

ARRÊT : contradictoire

prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au Greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de Procédure Civile.

***************

Vu le jugement rendu le 20/01/2009 par le Tribunal de Commerce de BOURGES ;

Vu l’appel interjeté par la société DEUTSCHE AUTOMOBIL TREUHAND GmbH ;

Vu les conclusions qui ont été déposées devant la Cour, le 10/ 07/2009 par la société LACOUR DAT FRANCE( la société LDF) représentée par son liquidateur Maître D, le 25/08/2009 par la société DEUTSCHE AUTOMOBIL TREUHAND GmbH ( la société DAT) et le 09/09/2009 par la société LACOUR CONCEPT;

Vu les demandes et les moyens contenus dans ces écritures ;

Attendu que faisant valoir premièrement, que la société LDF , son ancien partenaire commercial avec qui elle avait conclu en 1995 un contrat de concession de licence pour l’exploitation en France de son logiciel de chiffrage de réparation automobile dénommé 'Silver DAT', et la société LACOUR CONCEPT, issue du groupe LACOUR, spécialisé dans la conception et la commercialisation de logiciels de gestion dans le secteur automobile, avaient mis gratuitement à la disposition de leurs clients, pendant plusieurs mois après la dénonciation du contrat de concession de licence et la cessation d’activité de la société LDF, dissoute le 22mars 2005 suite à la mésentente entre les deux groupes d’actionnaires égalitaires composant cette société, issus, l’un du groupe français LACOUR , et l’autre du groupe allemand DAT, son logiciel 'Silver DAT,' alors que celui-ci faisait l’objet à la même époque d’une licence payante et exclusive couvrant le territoire français, consentie à une société dénommée ETAI, et deuxièmement, que la société LACOUR CONCEPT avait bénéficié , grâce à la société LDF , de l’accès à son savoir faire pour développer un logiciel concurrent dénommé ' Diva', la société allemande DAT , spécialisée dans la commercialisation de données informatiques dans le secteur automobile, s’estimant victime d’actes de contrefaçon et de concurrence déloyale et parasitaire, a fait assigner la société LDF et la société LACOUR CONCEPT en paiement d’une somme de 3.899.000,00 € en réparation de son préjudice ;

Attendu que pour la débouter de ses demandes, le tribunal , après avoir prononcé la nullité des opérations de saisies contrefaçon pratiquées à la requête de la société DAT, a d’abord considéré que le fait pour la société LACOUR CONCEPT d’avoir continué à offrir gratuitement à ses clients un accès au logiciel 'Silver DAT’ après le 31/12/2005, date de cessation de l’activité de la société LDF , 'servait l’intérêt commun des deux parties dès lors que (cette mesure) était temporaire et surtout qu’elle permettait de conserver une clientèle qui aurait pu être tentée de s’adresser à la concurrence’ ;

Qu’il en a déduit qu’il n’y avait aucune atteinte aux droits définis à l’article L.122-6 du Code de la Propriété Intellectuelle ,et de surcroît qu’il n’était pas démontré que la société DAT avait subi un préjudice commercial en raison du maintien de cet accès ;

Que s’agissant du logiciel ' Diva’ , les premiers juges ont retenu ,d’une part, que le groupe LACOUR n’était tenu contractuellement par aucune clause de non concurrence, et d’autre part, qu’il résultait d’un 'audit informatique', que ' Diva’ était fondamentalement différent de 'Silver DAT’ , aucun des éléments utilisés ne leur étant commun';

Attendu que la société DAT a interjeté appel de cette décision ; qu’elle reproche aux premiers juges d’avoir fait une mauvaise appréciation des éléments qui leur ont été soumis, tandis que la société LDF et la société LACOUR CONCEPT concluent à la confirmation du jugement; qu’à titre subsidiaire la société DAT sollicite l’organisation d’une mesure d’expertise judiciaire;

SUR CE :

— sur la nullité des saisies contrefaçon

Attendu que les intimées maintiennent que les saisies- contrefaçon pratiquées le 8 mars 2006 dans les locaux des sociétés LDF et LACOUR CONCEPT ainsi que dans les locaux du garage MCS à Créteil, sont nulles, tant au regard des dispositions de l’article L 332-4 du Code de la Propriété Intellectuelle et de l’article 6§1 de la Convention Européenne de Sauvegarde des Droits de l’Homme, qu’au regard des fautes commises par l’huissier instrumentaire ;

— sur le placement de l’assignation

Attendu que selon les dispositions de l’article L 332-4 du Code de la Propriété Intellectuelle ' A défaut d’assignation ou de citation dans la quinzaine de la saisie, la saisie-contrefaçon est nulle';

Que la saisie ayant eu lieu le 8 mars 2006 , alors que l’assignation qu’elle a fait délivrer le 23 mars 2006 aux sociétés LACOUR CONCEPT et LACOUR DAT FRANCE n’ a pas été enrôlée , et que la seconde assignation qu’elle leur a fait délivrée , en date du 14 avril 2006 , a été enrôlée le 20 avril 2006 pour l’audience du 9 mai 2006 , le délai de quinzaine prévu par l’article L 332-4 du Code de la Propriété Intellectuelle n’a pas été respecté ;

Attendu toutefois que la seconde assignation étant intervenue 'aux fins et sur les suites’ de la première , la nullité de la saisie n’est pas encourue, d’autant que la société LACOUR CONCEPT ne justifie d’aucun grief :

— sur la désignation de l’expert

Attendu que nonobstant les dispositions de l’alinéa 2 de l’ article L 332-4 du Code de la Propriété Intellectuelle qui stipulent que l’huissier instrumentaire ou le commissaire de police peut être assisté d’un expert désigné par le requérant, cet expert doit être une personne indépendante des parties afin de respecter le droit à un procès équitable consacré par l’article 6§1 de la Convention Européenne de Sauvegarde des Droits de l’Homme ;

Que la société LACOUR CONCEPT soutient que la désignation en qualité d’ experts pour assister les huissiers instrumentaires, des représentants de l’Agence pour la Protection des Programmes (APP) choisis par la société DAT ne répond pas à cette exigence d’indépendance ;

Attendu cependant que l’intimée ne démontre pas en quoi les représentants de cette association qui ne sont ni les salariés ni les préposés de la société DAT devraient être écartés ; que le seul fait d’avoir été choisi par la demanderesse est insuffisant à caractériser un lien de dépendance ;

— sur la saisie opérée à Créteil

Attendu que la société LACOUR CONCEPT fait observer que n’ayant pas été informée de la procédure de saisie contrefaçon réalisée au siège de la société GARAGE MCZ à Créteil, elle n’a pas pu faire valoir ses observations ;

Mais attendu qu’aucun texte du Code de la Propriété Intellectuelle ne prévoit que l’absence du saisi rend nulle la procédure de saisie-contrefaçon ;

— sur l’application de l’article de l’article 495 du Code de procédure civile

Attendu qu’il résulte de cet article, qu’avant de commencer ses opérations, l’huissier doit remettre une copie de l’ordonnance à la personne à laquelle elle est opposée ;

Attendu que la société LACOUR CONCEPT fait valoir que les opérations de saisie contrefaçon se sont déroulées hors la présence de Maître D , mandataire ad hoc chargé de la liquidation de la société LDT, et qu’elles ont en outre commencé dès l’arrivée sur place de l’huissier à 14 heures 30,alors que M. E , directeur informatique de la société LACOUR CONCEPT n’est arrivé qu’à 16 heures 20 et que M. F, dirigeant de la société LACOUR DAT FRANCE n’est arrivé qu’à 18 heures 10 ;

Mais attendu , d’une part, que la société LDT n’a soulevé aucune exception de nullité , et d’autre part, qu’il résulte du procès-verbal de saisie dressé le 8 mars 2006 par Maître G, que celle-ci a attendu l’arrivée de M. E , directeur informatique de la société LACOUR CONCEPT, pour procéder à l’examen des logiciels Silver DAT et DIVA , après lui avoir remis une copie de l’ordonnance rendue le 24 février 2006 par le président du tribunal de grande instance de BOURGES ; que M. E n’a peut être pas lu l’ordonnance que l’huissier indique avoir posé sur la table , mais qu’il n’a pas nié être habilité à recevoir l’acte, contrairement à Mme H, également employée de la société ;

— sur la remise immédiate des procès-verbaux de saisie contrefaçon

Attendu que lorsqu’il a terminé ses opérations, l’huissier doit remettre une copie de son procès- verbal au détenteur des objets saisis , conformément aux dispositions de l’article R 615-2 alinéa 2 in fine du Code de la Propriété Intellectuelle ;

Qu’en l’espèce les procès-verbaux n’ont été remis que le 10 mars 2006 soit 48 heures après la clôture des opérations de saisies , mais que la société LACOUR CONCEPT ne justifie pas du grief que ce retard lui a causé ;

— sur les mentions de l’acte de signification

Attendu que la société LACOUR CONCEPT prétend que l’acte de signification se réfère à tort aux articles 496 et 497 du Code de procédure civile ;

Mais attendu qu’ayant exercé dans les délais la voie de recours qui lui était ouverte , l’irrégularité invoquée est sans portée ;

Attendu qu’il convient par conséquent d’infirmer le jugement en ce qu’il a prononcé la nullité des opérations de saisies contrefaçon ;

— Sur le fond

Attendu qu’il convient de constater que les parties sont contraires en fait et qu’elles produisent aux débats devant la cour, divers rapports d’expertise établis de manière non contradictoire par M. J K, expert en informatique inscrit sur la liste de la Cour d’appel d’Orléans , et par M. L M, expert en comptabilité et en informatique inscrit sur la liste de la Cour d’appel de Paris , agréé auprès de la Cour de Cassation, le premier étant mandaté par la société LACOUR CONCEPT et le second par la société DAT, lesquels experts ont une opinion divergente sur la question de savoir si le logiciel DIVA est ou non une contrefaçon du logiciel SILVER DAT, et si la société LACOUR CONCEPT s’est ou non rendue coupable d’actes de concurrence déloyale et parasitaire au préjudice de la société DAT;

Attendu qu’au vu de ces éléments, la cour ne s’estime pas suffisamment informée pour statuer ; qu’il y a lieu par conséquent, avant dire droit au fond, d’ordonner une mesure d’expertise judiciaire aux frais avancés de la société DAT;

PAR CES MOTIFS :

La Cour ;

Statuant publiquement, contradictoirement, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Infirme le jugement en ce qu’il a prononcé l’annulation des opérations de saisies contrefaçon ;

Pour le surplus, et avant dire droit au fond ;

Ordonne une expertise ;

Commet pour y procéder M. N O, XXX. 08 79 35 24 23, lequel, après avoir réuni contradictoirement les parties et leurs conseils, et pris connaissance de l’ensemble des documents nécessaires à l’accomplissement de sa mission, devra procéder à une analyse comparative des logiciels 'Silver DAT’ et 'Diva’ , et dire, si à son avis, le logiciel 'Diva’ constitue ou non une contrefaçon du logiciel 'Silver DAT’ ;

Dit que l’expert devra en outre rechercher si pour créer son logiciel de chiffrage ' DIVA’ , la société LACOUR CONCEPT a eu recours à des procédés déloyaux , en usurpant notamment le savoir faire de la société DAT afin de la concurrencer et se mettre dans son sillage ;

Dit que l’expert qui pourra s’adjoindre tout spécialiste de son choix, devra de manière plus générale recueillir tous éléments propres à éclairer la Cour sur les agissements invoqués par la société DAT, ainsi que sur le préjudice financier allégué par cette dernière ;

Dit que l’expert devra déposer son rapport au greffe de la cour d’appel de Bourges dans un délai de 4 mois à compter de sa saisine ;

Fixe la provision à valoir sur la rémunération de l’expert à la somme de 3 000 €, laquelle devra être consignée au greffe de la cour, dans un délai d’un mois à compter du présent arrêt, par la société DAT ;

Sursoit à statuer sur les autres demandes en attendant les résultats de cette mesure d’expertise ;

Réserve les dépens et renvoie l’affaire à la mise en état du mercredi 02 juin 2010.

L’arrêt a été signé par Mme S, Présidente, et par Mme C, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LA GREFFIERE, LA PRESIDENTE,

V. C C. S

.

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Cour d'appel de Bourges, Chambre civile, 10 décembre 2009, n° 09/00477