Cour d'appel de Colmar, 29 octobre 2013, n° 12/01474

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Colmar, 29 oct. 2013, n° 12/01474
Juridiction : Cour d'appel de Colmar
Numéro(s) : 12/01474
Décision précédente : Conseil de prud'hommes de Saverne, 12 février 2012

Texte intégral

XXX

MINUTE N° 13/1236

NOTIFICATION :

Pôle J Alsace ( )

Copie aux parties

Clause exécutoire aux :

— avocats

— délégués syndicaux

— parties non représentées

Le

Le Greffier

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D’APPEL DE COLMAR

CHAMBRE SOCIALE – SECTION B

ARRET DU 29 Octobre 2013

Numéro d’inscription au répertoire général : 4 B 12/01474

Décision déférée à la Cour : 13 Février 2012 par le CONSEIL DE PRUD’HOMMES – FORMATION PARITAIRE DE SAVERNE

APPELANTE :

SARL GERSTAECKER FRANCE – LE GEANT DES BEAUX ARTS

prise en la personne de son représentant légal

XXX

XXX

Comparante en la personne de Monsieur A, co-gérant

représentée par Maître LEKIEFFRE, remplaçant Maître Dany KRETZ, avocats au barreau de STRASBOURG

INTIMEE et APPELANTE INCIDENTE :

Madame C F épouse X

XXX

XXX

Non comparante, représentée par Maître ZIMMERMANN, remplaçant Maître Michel REINHARDT, avocats au barreau de STRASBOURG

COMPOSITION DE LA COUR :

L’affaire a été débattue le 14 Juin 2013, en audience publique, devant la Cour composée de :

M. ADAM, Président de Chambre

M. DIE, Conseiller

Mme FERMAUT, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier, lors des débats : Mme MASSON,

assistée de Mme Marie NATUREL, greffier stagiaire

ARRET :

— contradictoire

— prononcé par mise à disposition au greffe par M. Dominique ADAM, Président de Chambre,

— signé par M. Dominique ADAM, Président de Chambre et Mme Linda MASSON, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS ET PROCEDURE

Mme C X a été embauchée par la SARL GERSTAECKER France (ci-après société GERSTAECKER) par contrat à durée déterminée du 01 juillet 2005 jusqu’au 30 novembre 2005 en qualité d’assistante commerciale statut non cadre coefficient 165, la convention collective applicable étant celle de l’import export.

Par un avenant du 08 novembre 2005, le contrat a été modifié en contrat à durée indéterminée à compter du 01 décembre 2005.

Par lettre recommandée avec avis de réception du 20 décembre 2008, la société GERSTAECKER a notifié à la salariée un avertissement pour un comportement désobligeant à l’égard de l’une de ses collègues le 29 octobre 2008.

Le 24 août 2010, la société GERSTAECKER a convoqué Mme X à un entretien préalable à un éventuel licenciement fixé au 02 septembre 2010 et par lettre recommandée avec avis de réception du 07 septembre 2010, l’employeur lui a notifié son licenciement lui reprochant d’avoir 'à nouveau en date du 04 août 2010, eu une attitude délibérément provocatrice'.

Le 18 octobre 2010, Mme C X a saisi le Conseil de Prud’hommes de SAVERNE pour contester son licenciement, faire constater l’existence d’une double sanction par avertissement et non paiement de prime, et obtenir le paiement de diverses sommes.

Par jugement du 13 février 2012, le Conseil de Prud’hommes de SAVERNE a :

— dit et jugé le licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse,

— fixé le salaire moyen de Mme C X à 1.738,23 €,

— condamné la société GERSTAECKER à payer à Mme Z la somme de 12.167,61 € pour licenciement sans cause réelle et sérieuse augmentée des intérêts légaux à compter du prononcé du jugement,

— débouté Mme X de sa demande au titre de la prime commerciale ainsi que de sa demande de chiffrage par la société,

— condamné la société GERSTAECKER aux dépens, y compris les frais liés à une éventuelle exécution de la décision par voie d’huissier, et à payer à Mme X une indemnité de 1.000 € en application de l’article 700 du Code de procédure civile.

Le Conseil de Prud’hommes a considéré que le licenciement reposait sur des faits réels mais que le motif n’était pas sérieux.

La société GERSTAECKER a régulièrement relevé appel par acte du 13 mars 2012 de la décision qui lui a été notifiée le 24 février 2012.

A l’audience de la Cour, la société GERSTAECKER, par l’intermédiaire de son conseil, reprend oralement ses conclusions parvenues le 03 septembre 2012. Elle demande à la Cour d’infirmer le jugement entrepris en tant qu’il a déclaré le licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse, de débouter Mme X de toutes ses prétentions et de la condamner aux frais d’exécution de l’arrêt à intervenir ainsi qu’à lui verser une indemnité de 3.000 € en application de l’article 700 du Code de procédure civile.

Mme X, par l’intermédiaire de son conseil, reprend oralement ses conclusions en réplique et au soutien d’un appel incident parvenues le 02 novembre 2012. Elle demande à la Cour de confirmer le jugement entrepris sauf à :

— porter à 20.858,76 € le montant des dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse en application de l’article L1235-3 du Code du travail ,

— condamner la société GERSTAECKER à rembourser aux organismes sociaux les indemnités de chômage dans la limite de six mois conformément à l’article L1235-4 du Code du travail,

— condamner la société GERSTAECKER aux dépens, y compris les frais de l’exécution éventuelle, et à lui verser une indemnité de 2.000 € en application de l’article 700 du Code de procédure civile.

SUR CE,

Vu le dossier de la procédure, les pièces versées aux débats et les conclusions des parties auxquelles il est référé pour un plus ample exposé de leurs moyens et arguments,

Attendu que selon l’article L1232-1 du Code du travail, tout licenciement pour motif personnel doit être justifié par une cause réelle et sérieuse ;

Que l’article L1232-6 du même code oblige l’employeur à énoncer le ou les motif(s) qu’il invoque dans la lettre de licenciement qui circonscrit le débat sur la cause du licenciement ;

Que la charge de la preuve du caractère réel et sérieux du motif n’incombe pas spécialement à l’une ou à l’autre des parties ; que selon l’article L1235-1 du Code du travail, le juge forme sa conviction au vu des éléments fournis par les parties et si un doute subsiste, il profite au salarié ;

Attendu que la lettre recommandée avec avis de réception en date du 07 septembre 2010 par laquelle la société GERSTAECKER a notifié à Mme C X son licenciement est libellée dans les termes suivants :

'Entrée à notre service le 1er juillet 2005, en qualité d’Assistante Commerciale dans le cadre d’un CDD de remplacement, vous avez bénéficié d’un CDI à compter du 1er décembre 2005.

A la suite de propos tout à fait inadmissibles, à l’égard de collègues de travail, et d’autres dénigrant l’entreprise, notamment l’aménagement des bureaux, nous vous avions mise en garde fin 2008. Nous vous avions alors adressé un avertissement que vous aviez réceptionné le 20 décembre 2008.

Or vous avez à nouveau, en date du 4 août, eu une attitude délibérément provocatrice.

Vous avez en effet à cette date lu un roman à votre bureau et pendant vos heures de travail! Votre responsable, constatant ce fait, vous a priée de cesser et de reprendre le travail.

Or vous n’avez tenu aucun compte de cette remarque et après avoir rangé le livre, vous l’avez peu de temps après ressorti et avez repris votre lecture!

A l’occasion de notre entretien précité, vous avez confirmé ces faits et vous avez prétendu:

— que vous ne saviez pas qu’il était interdit de lire durant les heures de travail! ce qui n’est évidemment pas sérieux, votre contrat de travail ayant été conclu pour exécuter les tâches qui vous sont confiées et non pour vaquer à vos occupations privées,

— que vous n’aviez plus rien à faire, ce qui n’est pas davantage recevable au double motif :

que dans ce cas il vous appartenait de demander du travail à votre responsable

qu’un mail de la responsable du service en date du 19 juillet dernier listait les nombreux travaux de fond à réaliser durant la période estivale, travaux qui n’étaient nullement terminés le 4 août

— que d’autres salariés surferaient sur le net pendant les heures de travail, ce qui n’excuse pas davantage votre manquement.

Un tel comportement, délibérément provocateur, n’est pas compatible avec une poursuite de notre collaboration.' ;

Attendu que, dans la lettre de licenciement, l’employeur fonde le licenciement sur le comportement délibérément provocateur de la salariée qu’il estime constitutif d’insubordination ;

Que Mme X réfute avoir adopté un tel comportement soutenant ne’s'être nullement rebellée au moment où sa responsable lui indiquait qu’elle ne devait plus lire’ ;

Attendu qu’au soutien de ses prétentions, l’employeur produit l’attestation de Mme Y, responsable adjointe du service commercial, qui relate les faits reprochés à la salariée en ces termes : 'Le 04 août 2010, Mme X C, assistante commerciale, a lu un livre pendant ses heures de travail.

Je lui ai demandé de cesser et de reprendre son travail.

Après avoir, dans un premier temps, obtempéré, Mme X a repris sa lecture et ce malgré le travail à faire.',

ainsi que l’attestation de M. A relatant le déroulement de l’entretien préalable au licenciement du 02 septembre 2010 ;

Mais attendu que la première attestation ne caractérise pas le comportement délibérément provocateur de la salariée et est par ailleurs contredite par celle de M. B conseiller de la salariée, en présence duquel, lors de l’entretien préalable, Mme X a affirmé que sa supérieure ne lui avait 'pas dit que je dois le ranger [le livre]' et a précisé que 'les mois de juillet et août sont très calmes. … elle était à jour de toutes les tâches habituelles et avait son casque sur la tête prête à décrocher en cas d’appel client’ ;

Que la seconde attestation émane du gérant de la société qui a prononcé le licenciement en sorte qu’elle doit être écartée ;

Attendu que le comportement délibérément provocateur de Mme X ne peut être déduit du seul fait qu’elle ait repris la lecture de son ouvrage quelques minutes après l’avoir reposé à la demande de Mme Y, sa supérieure hiérarchique ;

Attendu qu’il en découle que le grief invoqué par l’employeur n’est pas précisément caractérisé ;

Qu’il y a donc lieu de confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a dit le licenciement de Mme X dépourvu de cause réelle et sérieuse ;

Attendu que l’entreprise ayant plus de onze salariés et Mme X plus de deux ans d’ancienneté, celle-ci est dès lors fondée à obtenir, en application de l’article L1235-3 du Code du travail, l’indemnisation de son préjudice résultant de la rupture du contrat de travail et ce, pour un montant qui ne peut être inférieur aux six derniers mois de salaire ;

Qu’elle était âgée de 39 ans à la date de son licenciement et justifiait d’une ancienneté de 5 ans et deux mois ; que son salaire moyen mensuel à prendre en compte était de 1.738,23 € ;

Que si elle s’estime fondée à demander le versement d’une indemnité s’élevant à 12 mois de salaire 'au regard des conditions de la rupture du contrat et de son ancienneté dans l’entreprise', elle ne fait pas la démonstration qui lui incombe de circonstances entourant la rupture justifiant une indemnisation spécifique ;

Que dans ces conditions, au vu des éléments dont dispose la Cour sur l’étendue de son préjudice, il convient de fixer à la somme de 13.000 € le montant des dommages-intérêts qui le répareront exactement ;

Attendu que par application de l’article L1235-4 du Code du travail, l’employeur doit être tenu de rembourser les indemnités de chômage servies au salarié, et ce dans la limite de six mois d’indemnités ;

Attendu qu’eu égard à l’issue du litige, la société GERSTAECKER qui succombe, supportera les dépens de première instance et d’appel ;

Que l’équité commande qu’en sus de l’indemnité déjà justement fixée par les premiers juges, elle contribue à concurrence de 1.000 € aux frais irrépétibles qu’elle a contraint la salariée à encore exposer ;

Qu’elle ne peut elle-même prétendre à l’octroi d’une indemnité de ce chef et sera déboutée de sa demande fondée sur l’article 700 du Code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant par mise à disposition au greffe, par arrêt contradictoire, en dernier ressort, après en avoir délibéré conformément à la Loi,

DECLARE l’appel recevable ;

CONFIRME le jugement en date du 13 février 2012 du Conseil de Prud’hommes de SAVERNE sauf en ce qui concerne le montant des dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

statuant à nouveau sur ce point,

CONDAMNE la société GERSTAECKER France à verser à Mme C X la somme de 13.000 € (treize mille euros) à titre de dommages-intérêts en application de l’article L1235-3 du Code du travail ;

et ajoutant audit jugement,

ORDONNE le remboursement à I J, à la charge de la société GERSTAECKER France des indemnités de chômage servies à Mme C X, et ce dans la limite de six mois d’indemnités ;

CONDAMNE la société GERSTAECKER France à verser à Mme C X une indemnité de 1.000 € (mille euros) en application de l’article 700 du Code de procédure civile ;

CONDAMNE la société GERSTAECKER France aux dépens de première instance et d’appel.

Le Greffier, Le Président,

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