Cour d'appel de Colmar, 10 mai 2016, n° 14/05970

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Colmar, 10 mai 2016, n° 14/05970
Juridiction : Cour d'appel de Colmar
Numéro(s) : 14/05970
Décision précédente : Conseil de prud'hommes de Colmar, 12 novembre 2014

Sur les parties

Texte intégral

DA/IK

MINUTE N° 657/16

NOTIFICATION :

Pôle emploi Alsace ( )

Copie aux parties

Clause exécutoire aux :

— avocats

— délégués syndicaux

— parties non représentées

Le

Le Greffier

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D’APPEL DE COLMAR

CHAMBRE SOCIALE – SECTION B

ARRET DU 10 Mai 2016

Numéro d’inscription au répertoire général : 4 B 14/05970

Décision déférée à la Cour : 13 Novembre 2014 par le CONSEIL DE PRUD’HOMMES – FORMATION PARITAIRE DE COLMAR

APPELANT :

Monsieur C X

XXX

XXX

Comparant, assisté de Me Audrey INFANTES, avocat au barreau de STRASBOURG

INTIMEE :

SAS Z A INDUSTRIE, prise en la personne de son représentant légal,

N° SIRET : 915 722 011

XXX

XXX

Non comparante, représentée par Me Nicolas FREZARD de la SCP LEXOCIA, avocat au barreau de MULHOUSE

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l’article 945-1 du Code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 29 Mars 2016, en audience publique, les parties ne s’y étant pas opposées, devant M. ADAM, Président de Chambre, et M. ROBIN, Conseiller, chargés d’instruire l’affaire.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

M. ADAM, Président de Chambre,

M. ROBIN, Conseiller,

Mme FERMAUT, Conseiller,

qui en ont délibéré.

Greffier, lors des débats : Mme THOMAS, Greffier

ARRET :

— contradictoire

— prononcé par mise à disposition au greffe par M. C ADAM, Président de Chambre,

— signé par M. C ADAM, président de chambre et Mme Martine THOMAS, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Faits et procédure :

Monsieur C X a été embauché à compter du 9 avril 1990 en qualité d’ouvrier qualifié par la SA RUDLOFF par contrat de travail à durée déterminée.

Les relations contractuelles se sont poursuivies dans le cadre d’un contrat de travail à durée indéterminée.

La SA RUDLOFF a été rachetée par la SA SOMMER INDUSTRIES puis par la société Z A INDUSTRIE.

En dernier lieu Monsieur X exerçait les fonctions d’opérateur de fabrication coefficient 190 de la convention collective des textiles.

Monsieur X avait pour mission de veiller à ce que les opérateurs aient à disposition des caisses vides, de stocker les produits frais, de retirer les caisses pleines, et conduisait à ces fins un train sur lequel il chargeait les caisses.

Monsieur X a fait l’objet d’un avertissement le 17 mars 2011 puis d’une mise à pied disciplinaire le 15 septembre 2011.

Par lettre recommandée avec avis de réception en date du 11 mai 2012 la société Z A INDUSTRIE a convoqué Monsieur X à un entretien préalable à un éventuel licenciement fixé au 16 mai 2012 et lui a notifié une mise à pied conservatoire.

Par lettre recommandée avec avis de réception en date du 25 mai 2012 la société Z A INDUSTRIE a notifié à Monsieur X son licenciement pour faute grave au motif qu’il a commis une violation grave et répétée de son obligation de sécurité, caractérisée par le non-respect des règles de sécurité en matière de conduite d’engin de circulation ayant entraîné la mise en danger de collègues de travail.

Le 3 mai 2013 Monsieur C X a saisi le Conseil de prud’hommes de COLMAR pour contester son licenciement ainsi que les sanctions disciplinaires, et solliciter la condamnation de la société Z A INDUSTRIE à lui verser les sommes suivantes :

—  1465,97 € à titre de rappel de salaire pour la période de mise à pied conservatoire,

—  4590,44 € à titre d’indemnité compensatrice de préavis,

—  459,04 € au titre des congés payés sur préavis,

—  5000 € à titre de dommages et intérêts pour non respect des obligations de sécurité,

—  50494,82 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

—  2235,22 € à titre de dommages et intérêts pour non respect de la procédure de licenciement,

—  2000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Par le jugement entrepris en date du 13 novembre 2014 le Conseil de prud’hommes de Colmar a dit et jugé :

— que le licenciement pour faute grave de Monsieur C X est justifié,

— condamné la SAS Z A INDUSTRIE à payer à Monsieur C X la somme de 200 € à titre de dommages et intérêts pour non respect de la procédure de licenciement avec les intérêts au taux légal sur cette somme à compter du jugement,

— condamné la SAS Z A INDUSTRIE à payer à Monsieur C X la somme de 400 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

— dit n’y avoir lieu à exécution provisoire du jugement,

— débouté Monsieur C X du surplus de ses demandes,

— débouté la SAS Z A INDUSTRIE de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

— condamné la SAS Z A INDUSTRIE aux dépens.

Les premiers juges ont essentiellement retenu que Monsieur X n’avait pas respecté les règles de sécurité les plus élémentaires, que les incidents des 10 et 11 mai 2012 démontraient amplement qu’il n’avait pas respecté ces règles de sécurité, que ni la fatigue ni d’éventuels manquements de l’employeur ne pouvaient justifier l’état colérique de Monsieur X, lequel malgré plusieurs sanctions avait récidivé dans la conduite dangereuse, qu’il n’était pas démontré que l’employeur n’avait pas satisfait à ses obligations en matière de sécurité au travail et enfin, s’agissant de la procédure de licenciement, que l’employeur n’avait pas respecté le délai de 5 jours prévu par l’article L.1232-2 du code du travail.

Monsieur C X a régulièrement interjeté appel de ce jugement le 5 décembre 2014.

Par conclusions déposées le 26 août 2015 Monsieur C X conclut à la recevabilité de son appel, à la confirmation du jugement entrepris en ce qu’il a jugé irrégulier son licenciement, à l’infirmation pour le surplus et demande à la Cour de :

— dire et juger que la société Z A INDUSTRIE a manqué gravement à son obligation de sécurité de résultat envers lui, travailleur handicapé, en l’obligeant à conduire un chariot élévateur sans CACES et en ne respectant pas les préconisations du médecin du travail,

— dire et juger que ces manquements graves de la société sont de nature à retirer toute gravité aux manquements qui lui sont reprochés,

— annuler l’avertissement du 17 mars 2011 ainsi que la mesure de mise à pied disciplinaire du 15 septembre 2011,

— dire et juger que son licenciement ne repose pas sur une faute grave,

— condamner la société Z A INDUSTRIE à lui verser les sommes suivantes :

—  166,39 € brut au titre de la retenue sur salaire pendant la mise à pied disciplinaire injustifiée,

—  16,64 € brut au titre des congés payés y afférents,

—  1332,70 € brut à titre de rappel de salaire pour la période de mise à pied conservatoire,

—  133,27 € brut au titre des congés payés y afférents,

—  6885,66 € brut à titre d’indemnité compensatrice de préavis,

—  688,57 € brut au titre des congés payés y afférents,

—  14078 € à titre d’indemnité de licenciement,

—  55000 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

—  5000 € à titre de dommages et intérêts pour le non-respect par l’employeur de son obligation de sécurité,

—  1500 € à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice causé par la mise à pied disciplinaire abusive,

et à titre subsidiaire dans l’hypothèse où la Cour devait considérer que le licenciement repose sur une faute grave,

— de condamner la société Z A INDUSTRIE à lui payer la somme de 2295,22 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement irrégulier,

— de dire et juger que la société Z A INDUSTRIE a manqué gravement à son obligation de sécurité de résultat envers lui, travailleur handicapé et de la condamner à lui verser la somme de 5000 € à titre de dommages et intérêts, et enfin de condamner la société Z A INDUSTRIE à lui verser la somme de 2000 € au titre des frais irrépétibles de première instance et la somme de 3000 € au titre des frais irrépétibles d’appel.

Il fait essentiellement valoir :

— que la société n’a pas respecté le délai de 5 jours prévu par l’article L.1232-2 alinéa 3 du code du travail, l’entretien préalable ne pouvant se tenir avant le vendredi 18 mai 2012 ;

— qu’il convient de l’exonérer de toute faute en raison des manquements de l’employeur à sa propre obligation de sécurité de résultat car lui-même n’était pas habilité à conduire un engin ;

— qu’en vertu de l’article R.4323-56 du code du travail la conduite de certains équipements présentant des risques particuliers est subordonnée à l’obtention d’une autorisation de conduite délivrée par l’employeur, un examen d’aptitude devant être réalisé par le médecin du travail, ce dont l’employeur n’a en l’espèce jamais justifié;

— qu’il s’est vu délivrer le 20 mars 2007 le permis CACES pour les engins de catégorie 3, soit pour des engins de moins de 6000kg ;

— qu’ainsi à la date des faits qui lui sont reprochés en mai 2012, il circulait avec un permis CACES périmé depuis le 15 février 2012 sans que l’employeur n’ait entrepris les diligences pour le lui faire repasser ;

— qu’alors même que l’employeur lui a infligé une mise à pied disciplinaire de deux jours pour non-respect des règles de sécurité, en septembre 2011 la société n’a pas jugé utile de lui faire repasser l’épreuve du CACES ou de saisir le médecin du travail;

— que la société a ainsi commis un manquement contractuel grave ;

— qu’en outre il était travailleur handicapé ;

— que de même la société Z n’a pas respecté les préconisations du médecin du travail qui avait clairement indiqué lors de la visite médicale du 6 mai 2011 que le poste de travail du salarié était à revoir ;

— que des préconisations d’adaptation du poste ont été précisées dans un courrier du 26 mai 2011 de l’association SAMETH ACTION et COMPETENCE ;

— qu’en tout état de cause les faits qui lui sont reprochés ne sont pas établis et ne sauraient constituer une faute grave autorisant son licenciement ;

— que les attestations produites par l’employeur ne démontrent pas la réalité des faits reprochés ;

— qu’il n’a par ailleurs fait preuve d’aucune agressivité envers ses collègues les 3 et 4 mai 2012 ;

— que les montants sollicités lui sont dus.

Par conclusions déposées le 3 septembre 2015 la SAS Z A INDUSTRIE conclut à l’irrecevabilité et au rejet de l’appel, à la confirmation du jugement entrepris et demande à la Cour, à titre subsidiaire, de fixer à 100 € le montant dû le cas échéant à Pôle Emploi en application de l’article L.1235-4 du code du travail et de condamner Monsieur X à lui verser la somme de 1000 € en application de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux dépens.

Elle fait essentiellement valoir :

— qu’elle ne conteste pas que le délai de 5 jours ouvrables prévu par l’article L.1232-2 du code du travail n’a pas été respecté en l’espèce et c’est dès lors à bon droit que le Conseil de prud’hommes a alloué au salarié la somme de 200 € à ce titre ;

— que la lettre de licenciement est particulièrement circonstanciée et fait clairement état de graves incidents survenus les 10 et 11 mai 2012 au cours desquels Monsieur X a conduit dangereusement son train en violation des règles élémentaires de sécurité ;

— qu’ainsi le 10 mai 2012 Monsieur X a conduit à vive allure son train et n’a pas freiné alors que plusieurs personnes se trouvaient dans l’allée piétonne, une salariée ayant dû se jeter sur le côté pour éviter le train, les caisses placées sur le train s’étant en outre déportées du fait de la vitesse ;

— que le lendemain 11 mai 2012 Monsieur X a heurté violemment divers éléments, un tableau d’affichage, un chariot et une tablette, un poteau de sécurité, le choc ayant été particulièrement bruyant ;

— qu’un wagon tiré par son train a aussi heurté un mur non loin d’un opérateur et avec une violence telle qu’une caisse est tombée du wagon ;

— que ces manquements font suite à plusieurs avertissements verbaux et écrits dont il n’a pas tenu compte ;

— que la présence de Monsieur X au sein de l’entreprise ne pouvait plus être envisagée pour des raisons de sécurité évidentes ;

— que si le salarié soutient, pour justifier ses agissements, que l’employeur aurait manqué à son obligation de sécurité, notamment en matière de formation, Monsieur X était titulaire de diverses autorisations nécessaires à la conduite de chariots de manutention et a été déclaré apte par le médecin du travail sans réserve le 14 mars 2012 ;

— que la société a adapté le poste de travail de Monsieur X et a fait équiper son train d’un mécanisme lui permettant de relever sans effort le timon des wagons et a fait installer sur son parcours des rétroviseurs miroirs ;

— que Monsieur X a en outre suivi plusieurs formations relatives à la sécurité ;

— que les sanctions disciplinaires contestées par le salarié sont, elles aussi, justifiées.

Les parties ont développé oralement leurs conclusions devant la Cour.

Sur quoi, la Cour,

Vu le dossier de la procédure, les pièces versées aux débats et les conclusions des parties auxquelles il est référé pour un plus ample exposé de leurs moyens et arguments ;

Attendu que lorsque l’employeur invoque une faute grave du salarié pour prononcer un licenciement avec effet immédiat, il lui incombe d’apporter la preuve des griefs invoqués dans les termes énoncés dans la lettre de licenciement, à charge ensuite pour le juge d’apprécier le caractère réel et sérieux de ces griefs et de rechercher s’ils constituaient une violation des obligations découlant du contrat de travail ou des relations de travail d’une importance telle qu’elle rendait impossible le maintien du salarié dans l’entreprise ;

Attendu que la lettre recommandée avec avis de réception en date du 25 mai 2012 par laquelle la SAS Z A INDUSTRIE a notifié à Monsieur C X son licenciement pour faute grave est libellée dans les termes suivants :

'Suite à cet entretien, nous vous notifions par la présente votre licenciement pour fautes graves pour les motifs suivants :

Violation grave et répétée de votre obligation de sécurité caractérisée par le non respect des règles de sécurité en matière de conduite d’engin de circulation ayant entraîné la mise en danger de vos collègues de travail ce que nous ne pouvons tolérer.

En effet en date des 10 et 11 mai 2012, vous avez conduit dangereusement votre engin de conduite et ce en violation des règles de sécurité.

En premier lieu, en date du 10 mai 2012, vous avez eu un comportement dangereux en conduisant dangereusement votre train.

Ainsi, une salarié qui se trouvait dans l’allée piétonne, vers la maintenance et se dirigeait vers le réfectoire a failli être percutée par des caisses qui se trouvaient sur votre train sous le regard d’une autre collègue.

En effet, vous êtes arrivé à vive allure sur un petit train et vous n’avez pas freiné alors que ces personnes se trouvaient dans des allées piétonnes. Les caisses qui se trouvaient sur le train se sont déportées avec la vitesse sur l’allée piétonne. La salariée a du se mettre sur le côté pour les éviter. A aucun moment, vous n’avez ralenti ni ne vous êtes arrêté.

Encore plus grave, en date du 11 mai 2012, après avoir accrocher un wagon avec une caisse de X61 arrière, derrière deux autres wagons, vous avez eu une conduite dangereuse.

Dans le premier virage, devant le rack sommold, le wagon X61 arrière est venu taper violemment un tableau d’affichage ainsi que le chariot du rack porte moule tablette T8. Le choc a fait un bruit très fort, ce qui a alerté les personnes aux alentours. A aucun moment, vous n’avez jugé utile de vous arrêter et vous n’avez pas tourné la tête.

Dans le deuxième virage devant le cadre, le même wagon a glissé et a tapé le poteau de sécurité jaune avec la même puissance sonore. Encore une fois, vous avez continué votre course sans prendre soins de savoir s’il y avait des dégâts matériels ou humains.

Enfin dans le 3e virage, devant le broyeur où se trouvait un opérateur, le 3e wagon a tapé à nouveau sur le mur, risquant de percuter l’opérateur et provoquant toujours un bruit très fort mais cette fois la caisse est tombée du wagon. Avec un tel choc, qui s’est entendu très fortement, et qui a provoqué un choc dans l’ensemble du train, vous avez continué votre route en laissant dans l’allée de circulation une caisse.

Les trains suivant ont du contourner cette caisse en passant dans les zones piétonnes et zone de travail. Les conducteurs de train ont prévenu la gare pour qu’un cariste vienne récupérer la caisse en chariot élévateur.

Compte tenu de la gravité des faits, nous vous avons signifié le 11 mai 2012 votre mise à pied à titre conservatoire.

Nous ne pouvons tolérer un tel comportement parfaitement inacceptable qui constitue une violation grave de votre obligation de sécurité telle que fixée par l’article L4122-1 du Code du Travail selon laquelle il vous incombe de prendre soin de votre santé et de votre sécurité mais également de celles des autres personnes concernées par vos actes ou vos omissions au travail.

Ainsi par deux fois, vous avez mis en danger la sécurité de collègues de travail en méconnaissance des règles les plus élémentaires de sécurité.

Nous vous rappelons qu’en date du 15 septembre 2011, vous aviez fait l’objet d’une mise à pied disciplinaire pour non respect des règles de sécurité et conduite dangereuse.

Vous n’avez manifestement pas daigné en tenir compte.

Par ailleurs, nous ne pouvons plus également toléré votre agressivité envers vos collègues. En effet, nus avons à vous reprocher votre comportement agressif envers vos collègues en date du 3 et 4 mai 2012.

Nous vous rappelons qu’en date du 17 mars 2011, vous aviez fait l’objet d’un avertissement écrit pour agression verbale sur un de vos collègues.

Vous n’avez manifestement pas daigné en tenir compte.

Cette situation ne nous permet pas d’envisager la poursuite de nos relations contractuelles.

La date d’envoi de la présente lettre marquera la rupture de votre contrat de travail sans préavis ni indemnités …'.

Attendu en premier lieu que l’employeur n’apporte aucun élément de nature à démontrer la réalité du grief relatif à l’agressivité de Monsieur C X à l’encontre de ses collègues de travail en sorte que ce grief doit être écarté ;

Attendu ensuite que Monsieur C X ne conteste pas la matérialité des faits qui se sont produits les 10 et 11 mai 2012 alors qu’il conduisait au sein de l’usine un engin de type train, ce qu’il a expressément admis par l’intermédiaire de son conseil, à l’audience de la Cour ;

Que s’agissant des faits du 10 mai 2012, il résulte de l’attestation de Madame H I, établie le 10 mai 2012, que ce jour là Monsieur C X conduisait à vive allure son petit train sans prêter attention aux salariés qui circulaient sur l’allée piétonne de l’usine, soit elle-même et Madame F G, et sans freiner à leur approche alors même que ceux-ci manifestaient leur volonté de traverser la voie, le salarié prenant ainsi le risque de les percuter, Madame H I précisant que : 'lors de son virage il n’a pas ralenti, ni regardé derrière lui pour voir si les chariots ne se déportaient pas et passaient correctement le virage. Si ceux-ci avaient été déportés, F aurait été coincée contre le mur et embarquée par les chariots’ ;

Que de même, dans son attestation établie le 10 mai 2012, Madame F G a déclaré : 'le jeudi 10 mai 2012, je regarde à gauche et à droite au stop, à l’angle du broyeur, ne voyant personne je m’engage. Mais C X arrive à vive allure à ma droite. Vu la vitesse je recule d’un pas pour passer la barrière jaune. Il ne ralenti pas et ne se retourne pas pour voir si les caisses ne se déportent pas’ ;

Attendu que pour ce qui concerne les faits du 11 mai 2012, Monsieur J K a déclaré dans son attestation 'Aujourd’hui, vendredi 11 mai 2012 à 8h20, je me trouvais à l’entrée du broyeur lorsque Monsieur B C, conduisait le petit train, arrivait de la Carde vers le broyeur à une allure trop vive. J’ai crié pour lui signaler que les deux caisses arrières déviaient vers moi. Mais le temps qu’il arrête le train, les 2 chariots sont venus taper contre le mur du broyeur. Une caisse est tombée et a écrasé le poteau de sécurité, a glissé et a percuté le mur. Le dernier chariot s’est détaché et est venu contre la porte du broyeur. J’ai eu très peur.';

Attendu qu’il résulte ainsi de ces attestations que les faits reprochés à Monsieur C X, la conduite de son engin au sein de l’usine à une vitesse excessive sans se préoccuper de la présence de salariés aux abords de la voie de circulation ni des conséquences de cette vitesse excessive sur ses chargements, violation grave et répétée de son obligation de sécurité, ayant ainsi mis en danger ses collègues de travail, sont ainsi établis ;

Attendu que Monsieur C X soutient à cet égard que l’employeur ne peut légitimement lui reprocher de tels faits dès lors que lui-même aurait manqué à son obligation de sécurité en ce qu’il n’a pas suivi les prescriptions du médecin du trvail pour ce qui concerne l’adaptation de son poste de travail au regard notamment de sa situation de travailleur handicapé et en ce que son certificat d’aptitude à la conduite en sécurité était périmé depuis le 15 février 2012, soit plus de deux mois avant les dates des faits reprochés ;

Attendu que le salarié a versé aux débats les bulletins de visite du médecin du travail dont il ressort qu’à la date du 10 février 2012 le médecin du travail l’a déclaré 'apte à la reprise. Mettre le rétroviseur comme prévu lors de l’étude de poste en 2011" et qu’à la date du 14 mars 2012 ce même médecin du travail a émis l’avis suivant : 'apte à la reprise';

Qu’ainsi à la date du 14 mars 2012 le médecin du travail a émis un avis d’aptitude à la reprise sans aucune réserve, et cela moins d’un mois avant la date des faits reprochés, le Dr Y, médecin du travail ayant lui-même constaté dans un courrier daté du 3 novembre 2011, intitulé 'synthèse de l’intervention du SAMETH 68-67", produit par l’employeur, que les aménagements qu’il a préconisés, un miroir panoramique et un abaisse timon, ont été réalisés et sont adaptés au handicap de Monsieur C X qui souffre d’une problématique motrice localisée au dos ;

Attendu que dans ces conditions Monsieur C X ne peut légitimement faire état d’un défaut de respect par l’employeur des préconisations du médecin du travail ;

Attendu que s’agissant de la péremption du certificat d’aptitude à la conduite en sécurité (CACES) à la date du 15 février 2012, laquelle n’est par ailleurs pas contestée par l’employeur, celle-ci est sans lien avec les fautes reprochées au salarié qui s’est abstenu de respecter les consignes de l’employeur en matière de sécurité dans la conduite de son engin par une vitesse excessive et un manque d’adaptation de sa conduite par un ralentissement ou un freinage aux abords de la circulation des piétons au sein de l’usine;

Que l’obtention du certificat d’aptitude à la conduite en sécurité depuis le 20 mars 2007 est de nature à démontrer qu’il était apte à la conduite de l’engin qui lui a été confié par l’employeur et qu’il a ainsi reçu la formation nécessaire pour conduire celui-ci en toute sécurité, conduite qu’il a assurée pendant les années précédant son licenciement ;

Attendu que Monsieur C X ne peut ainsi reprocher à l’employeur un quelconque manquement à cet égard à son obligation de sécurité, susceptible de justifier ses propres fautes ;

Attendu que la conduite de son engin à une vitesse excessive et dans les conditions sus décrites au sein de l’usine de manière réitérée, de nature à mettre en danger la sécurité de ses collègues de travail caractérise la faute grave rendant impossible le maintien du salarié dans l’entreprise ;

Que par suite les demandes du salarié relatives au rappel de salaire pendant la mise à pied conservatoire avec les congés payés y afférents, à une indemnité compensatrice de préavis avec les congés payés y afférents, à une indemnité de licenciement et à des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ne peuvent qu’être rejetées ;

Que doit aussi être rejetée la demande de dommages et intérêts pour non-respect par l’employeur de son obligation de sécurité dès lors qu’ainsi qu’il a été dit ci-dessus il n’a été constaté aucun manquement par l’employeur de son obligation de sécurité ;

Attendu que Monsieur C X sollicite aussi l’annulation de l’avertissement du 17 mars 2011 et de la mise à pied disciplinaire du 15 septembre 2011 ainsi que la condamnation de la SAS Z A INDUSTRIE à lui verser la somme de 1500 € à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice causé par la mise à pied disciplinaire abusive ;

Attendu que les faits reprochés dans la lette en date du 15 septembre 2011 par laquelle la société Z A INDUSTRIE a notifié une mise à pied disciplinaire de 2 jours sont établis par les 'constats de fait’ datés du 30 août 2011 et du 1er septembre 2011, et faisant état, d’une part, de 'standard de travail non respecté – suivre le tableau de marche, partir à l’heure, noter l’heure de départ du train – rangement de la gare en fin d’équipe', constat pour lequel le salarié s’est abstenu de tout commentaire, à l’inverse d’autres 'constats de faits ' produits par l’employeur, et, d’autre part, de feuilles de batonnage non remplies, de passage en force avec sa locomotive pour pousser le chariot d’un train sans vérifier la présence d’un collègue de travail derrière le chariot sur l’allée piétonne, fait pour lequel il s’est borné à faire le commentaire suivant : 'ça passait', et enfin du jet d’une caisse sur son chariot, au travers de l’allée, ladite caisse ayant percuté d’autres caisses ;

Que la sanction infligée au salarié pour les faits reprochés n’est pas disproportionnée en sorte que tant sa demande d’annulation de la sanction que sa demande de condamnation de l’employeur à lui verser des dommages et intérêts doivent être rejetées ;

Attendu que pour ce qui concerne l’avertissement du 17 mars 2011, le salarié ne conteste pas les faits qui lui sont imputés mais soutient qu’ils ne sont que la conséquence des manquements de l’employeur ;

Que cependant, ainsi qu’il a été dit ci-dessus aucun manquement de l’employeur n’a été constaté en sorte que la demande d’annulation de l’avertissement du 17 mars 2011 ne peut qu’être rejetée ;

Attendu enfin que l’employeur a reconnu expressément n’avoir pas respecté le délai de 5 jours ouvrables pour la convocation à l’entretien préalable prévu par l’article L.1232-2 du code du travail ;

Que c’est à bon droit que les premiers juges ont alloué au salarié à ce titre la somme de 200 € à titre de dommages et intérêts ;

Attendu que l’équité ne commande pas l’application en cause d’appel de l’article 700 du code de procédure civile ni au profit de l’employeur ni au profit du salarié ;

Attendu qu’eu égard à l’issue du litige Monsieur C X qui succombe pour l’essentiel supportera les dépens de première instance et d’appel.

PAR CES MOTIFS

La Cour statuant par mise à disposition au greffe, par arrêt contradictoire et en dernier ressort, après en avoir délibéré conformément à la loi,

Déclare l’appel recevable ;

Confirme le jugement du 13 novembre 2014 du Conseil de prud’hommes de COLMAR ;

Dit n’y avoir lieu à application de l’article 700 du code de procédure civile en cause d’appel ;

Condamne Monsieur C X aux dépens de première instance et d’appel.

Le Greffier, Le Président,

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Cour d'appel de Colmar, 10 mai 2016, n° 14/05970