Cour d'appel de Dijon, Chambre sociale, 7 octobre 2010, n° 10/00009

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Dijon, ch. soc., 7 oct. 2010, n° 10/00009
Juridiction : Cour d'appel de Dijon
Numéro(s) : 10/00009
Décision précédente : Conseil de prud'hommes de Dijon, 6 décembre 2009
Dispositif : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Sur les parties

Texte intégral

XXX

D E en sa qualité de représentante légale de son fils mineur Z Y

B POULIN (fils de F Y décédé)

C/

XXX

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE – AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE DIJON

CHAMBRE SOCIALE

ARRÊT DU 07 OCTOBRE 2010

RÉPERTOIRE GÉNÉRAL N° 10/00009

Décision déférée à la Cour : AU FOND du 07 DECEMBRE 2009, rendue par le CONSEIL DE PRUD’HOMMES DE DIJON

RG 1re instance : 09/00500

APPELANTS :

D E en sa qualité de représentante légale de son fils mineur Z Y

XXX

XXX

représentée par Monsieur H-I J, délégué syndical ouvrier en vertu de pouvoirs en date des 07 juin, 30 juillet et 10 septembre 2010

B POULIN (fils de F Y décédé)

XXX

XXX

représenté par Monsieur H-I J, délégué syndical ouvrier en vertu de pouvoirs en date des 07 juin, 30 juillet et 10 septembre 2010

INTIMEE :

XXX

XXX

XXX

XXX

représentée par Monsieur H-Louis SPENS, directeur juridique en vertu d’un pouvoir en date du 06 septembre 2010

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l’article 945-1 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 16 Septembre 2010 en audience publique, les parties ne s’y étant pas opposées, devant M. LIOTARD, président de chambre et Monsieur HOYET, conseiller, chargés d’instruire l’affaire. Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries lors du délibéré, la Cour étant alors composée de :

Bruno LIOTARD, président de chambre, président,

Philippe HOYET, conseiller,

Robert VIGNARD, conseiller,

GREFFIER LORS DES DEBATS : Françoise REBY,

ARRET : rendu contradictoirement,

PRONONCE publiquement par mise à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile,

SIGNE par Bruno LIOTARD, président de chambre, et par Françoise REBY, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS ET PROCÉDURE

Suivant contrat de travail à durée déterminée du 9 novembre 2005, la Société CILOMATE TRANSPORTS a embauché F Y en qualité de conducteur routier.

Par avenant du 24 mai 2006, les parties ont convenu de poursuivre le contrat de travail pour une durée indéterminée.

Par la suite, le contrat de travail de F Y a été transféré à la SAS TRANSADIS.

Le 4 juillet 2008, la SAS TRANSADIS a convoqué F Y à un entretien préalable à une sanction disciplinaire pouvant aller jusqu’à un licenciement et l’a mis à pied conservatoire.

Indisponible à la date de l’entretien préalable, F Y s’y est fait représenter par un délégué du personnel.

Le 29 juillet 2008, la SAS TRANSADIS a licencié F Y pour faute grave : abandon de poste caractérisé et non-respect de la réglementation sociale européenne.

Le 17 octobre 2008, F Y a contesté son licenciement devant le Conseil de prud’hommes de Dijon et a réclamé un rappel de salaire sur congé de paternité, les congés payés afférents, une indemnité pour non-respect de la procédure de licenciement, des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, des dommages et intérêts pour licenciement abusif et vexatoire, un rappel de salaire sur mise à pied conservatoire, les congés payés afférents, une indemnité compensatrice de préavis, les congés payés afférents, une indemnité de licenciement, un rappel d’heure de 151 heures 67 à 152 heures, les congés payés afférents, une indemnité pour frais irrépétibles de défense et la remise de documents de rupture rectifiés sous astreinte.

F Y est décédé accidentellement le XXX.

B X, fils de F Y, et D E, agissant en qualité d’administratrice légale d’Z Y, autre fils de l’intéressé, sont intervenus à l’instance prud’homale.

Par jugement du 7 décembre 2009, le conseil de prud’hommes a :

— confirmé que le licenciement de F Y reposait sur une faute grave,

— condamné la SAS TRANSADIS à payer aux ayants-droits de F Y :

. 114,58 € à titre de rappel de salaire et 11,45 € pour congés payés afférents,

. 236,35 € à titre de rappel de salaire sur congé de paternité et 23,63 € pour congés payés afférents,

— débouté les ayants-droits de F Y du surplus de leurs demandes,

— rappelé les règles de l’exécution provisoire et du calcul des intérêts sur les sommes allouées,

— fixé la moyenne des trois derniers mois de salaire à la somme de 2.411,67 €,

— condamné la SAS TRANSADIS aux dépens.

La SAS TRANSADIS a changé de dénomination pour devenir la SAS TRANSALLIANCE DISTRIBUTION BOURGOGNE (désignée sous son sigle TD BOURGOGNE).

Appelants du jugement prud’homal dont il sollicitent l’infirmation partielle, B X et D E, es-qualité, demandent à la Cour de :

— juger que le licenciement de F Y est dépourvu de cause réelle et sérieuse,

— condamner la SAS TD BOURGOGNE au paiement de :

. 2.411,67 € à titre d’indemnité pour non-respect de la procédure de licenciement,

. 15.000 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

. 4.500 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement abusif et vexatoire et pour préjudice moral,

. 1.178 € à titre de rappel de salaire sur mise à pied conservatoire et 117,78 € pour congés payés afférents,

. 4.823,24 € à titre d’indemnité de préavis et 482,33 € pour congés payés afférents,

. 241,17 € à titre d’indemnité de licenciement,

. 800 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

— ordonner la remise de bulletins de paye et d’une attestation destinée à l’Assedic rectifiés, d’un certificat de travail portant la date d’embauche du 14 novembre 2005 au 29 septembre 2008, sous astreinte de 30 €, par document et par somme, passé le délai de huit jours à compter du prononcé de l’arrêt, la Cour se réservant le droit de la liquider,

— débouter la SAS TD BOURGOGNE de sa demande fondée sur les dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

— la condamner aux dépens, y compris ceux d’exécution.

La SAS TD BOURGOGNE prie la Cour de confirmer le jugement entrepris, de débouter B X et D E, es-qualité, de leurs demandes et de les condamner aux dépens d’appel.

DISCUSSION

La procédure de licenciement :

Les appelants estiment que la procédure de licenciement est triplement viciée :

— l’entretien préalable a été fixé à une date où F Y ne pouvait pas être présent puisqu’il se trouvait en congés,

— la date de cet entretien a été modifiée,

— l’employeur ne pouvait pas accepter que F Y, absent, y soit représenté.

Sur le premier point, il doit être rappelé que la convocation du salarié à l’entretien préalable en dehors du temps de travail, ne constitue pas une irrégularité de procédure, l’employeur n’ayant pas à se préoccuper de la disponibilité du salarié lorsqu’il en arrête la date.

Sur le deuxième point, il ressort des productions des parties que l’employeur a d’abord fixé l’entretien préalable à la date du 15 juillet 2008, que F Y a refusé la remise en mains propres du courrier qui était destiné à l’en informer et qu’une autre convocation a été adressée au salarié par lettre recommandée avec avis de réception pour la date du 18 juillet 2008 tenant compte des délais légaux ainsi que des délais postaux. En ce qu’elle ne porte aucune atteinte aux droits du salarié, une telle façon de procéder n’est pas contraire aux exigences légales.

Sur le troisième point, il ne doit pas être perdu de vue que F Y a lui-même sollicité la possibilité de se faire représenter par un délégué du personnel lors de l’entretien préalable. L’employeur a accepté cette modalité. L’entretien s’est déroulé en présence d’un représentant du salarié régulièrement désigné. La procédure de licenciement a été régulièrement suivie.

Les premiers juges doivent être approuvés d’avoir débouté B X et D E, es-qualité, de leur demande de dommages et intérêts pour non-respect de procédure.

Le licenciement :

La lettre de licenciement qui fixe les limites du litige fait grief à F Y d’avoir commis d’une part, un abandon de poste caractérisé, le 4 juillet 2008, et d’autre part, cinq infractions à la réglementation sociale européenne au cours du mois de juin 2008.

La SAS TD BOURGOGNE, à qui incombe la charge de la preuve de la faute grave, explique que F Y a été informé le 3 juillet 2008, à 13 heures 12, de ce qu’il devait se rendre à Maiche (25) pour prendre un chargement à livrer le lendemain à Bourgueil (37), qu’après chargement, il a quitté Maiche à 16 heures 45, qu’il a laissé son poids-lourd au dépôt de l’entreprise à Ouches (21) à 19 heures 37, que le 4 juillet 2008, il a pris la route en direction de Bourgueil à 5 heures 34, qu’à 8 heures 40, après un repos d’une durée de 27 minutes, il a rebroussé chemin sans avoir effectué sa livraison, qu’il est arrivé au dépôt d’Ouches à 8 heures 40 et qu’il a vidé son camion de ses affaires personnelles en indiquant au responsable de site qu’il partait en vacances le lendemain matin.

En eux-mêmes, les faits énoncés dans la lettre de licenciement ne font l’objet d’aucune contestation.

Reprenant les explications fournies par F Y, B X et D E, es-qualité, soutiennent qu’aucun abandon de poste ne peut être imputé à leur auteur puisque ce dernier avait déjà effectué 58 heures 26 d’amplitude le 3 juillet 2008 à 19 heures 50, alors que le maximum hebdomadaire est limité à 56 heures, que s’il avait exécuté la mission qui lui avait été assignée pour la journée du 4 juillet 2008, il aurait exécuté, au total, 70 heures de travail au cours de la semaine, et qu’il était fondé à utiliser son droit de retrait.

L’article 6 du règlement (CE) n° 561/2006 du 15 mars 2006 relatif à l’harmonisation de certaines dispositions de la législation sociale dans le domaine des transports par route, dispose que la durée de conduite journalière ne dépasse pas neuf heures, que la durée de conduite journalière peut, toutefois, être prolongée jusqu’à dix heures maximum, mais pas plus de deux fois au cours de la semaine et que la durée de conduite hebdomadaire ne dépasse pas cinquante-six heures.

La durée de conduite ne doit pas être confondue avec l’amplitude de travail qui cumule les plages de conduite, de travail, de repos et d’attente.

L’histogramme des temps de travail de F Y pour la semaine du 29 juin 2008 au 5 juillet 2008, non contesté par les appelants, démontre que l’intéressé a effectué 8 heures 14 de conduite le 30 juin, 8 heures 28 le 1er juillet, 4 heures 54 le 2 juillet et 6 heures 30 le 3 juillet, soit au total, 28 heures 06 et non pas 58 heures 26 comme le prétendent les appelants.

La situation de travail de F Y ne présentait par conséquent aucun danger pour sa vie ou sa santé. Le simple désagrément lié à son départ en congés payés le 7 juillet 2008 était insusceptible de l’autoriser à user du droit de retrait.

La réalité de l’abandon de poste est démontrée.

Le second motif de licenciement a trait à cinq dépassements de la durée de conduite continue sans pause réglementaire constatés au mois de juin 2008.

L’article 7 du règlement (CE) n° 561/2006 du 15 mars 2006 dispose qu’après un temps de conduite de quatre heures et demie, un conducteur observe une pause ininterrompue d’au moins quarante-cinq minutes, à moins qu’il ne prenne un temps de repos, cette pause pouvant être remplacée par une pause d’au moins quinze minutes suivie d’une pause d’au moins trente minutes réparties au cours de la période.

La SAS TD BOURGOGNE produit cinq disques chronotachygraphes d’où il ressort que F Y a conduit le 3 juin 2008 pendant 4 heures 40 en observant une pause réduite à 4 minutes, le 11 juin 2008 pendant 5 heures 35 n’incluant qu’une pause de 9 minutes, le 13 juin 2008 pendant 4 heures 40 interrompues par différentes pauses dont la plus longue ne dépassait pas 6 minutes, le 23 juin 2008 pendant 4 heures 40 avec deux pauses de 3 minutes chacune et le 30 juin 2008 pendant 4 heures 45 avec plusieurs pauses toutes inférieures à 25 minutes.

B X et D E, es-qualité, font valoir que l’employeur est l’auteur des fautes qu’il impute au salarié par ses ordres et son laxisme alors qu’il lui est fait obligation d’organiser le travail des conducteurs de telle manière qu’ils puissent se conformer aux dispositions réglementaires.

Le contenu des disques chronotachygraphes qu’ils produisent ne confirme pas la thèse des appelants. En effet, les heures de conduite qui y sont retracées n’excèdent pas les limites horaires fixées dans le règlement européen précité.

De surcroît, les décomptes trimestriels des heures rémunérées d’avril 2007 à juin 2008 font apparaître des temps de conduite mensuels compris entre 88 heures 38 et 148 heures 23, la moyenne s’établissant à 127 heures 80, ce qui n’a rien d’excessif.

La réalité du second grief est établie.

L’abandon de poste commis sans motif légitime par F Y et ses infractions répétées à la réglementation sociale européenne qu’il avait tout le loisir de respecter constituent autant de manquements de nature à porter atteinte à l’autorité du chef d’entreprise et à engager sa responsabilité pénale. Comme tels, ils interdisaient la poursuite du contrat de travail pendant la durée du préavis.

Le jugement entrepris doit être confirmé en ce qu’il a validé le licenciement de F Y pour faute grave et rejeté les demandes indemnitaires présentées par B X et D E, es-qualité.

Les frais irrépétibles de défense :

B X et D E, es-qualité, succombent et devront supporter les dépens d’appel. Aucune indemnité ne peut leur être allouée au titre de l’article 700 du code de procédure civile. Leur demande de ce chef doit être rejetée.

PAR CES MOTIFS

La Cour,

Confirme le jugement déféré,

Ajoutant,

Déboute B X et D E, es-qualité, de leur demande fondée sur les dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

Condamne B X et D E, es-qualité, aux dépens d’appel.

Le greffier Le président

Françoise REBY Bruno LIOTARD

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