Cour d'appel de Douai, Sociale c salle 3, 29 mai 2020, n° 17/01107

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Douai, soc. c salle 3, 29 mai 2020, n° 17/01107
Juridiction : Cour d'appel de Douai
Numéro(s) : 17/01107
Décision précédente : Conseil de prud'hommes de Lille, 11 janvier 2017, N° 15/00970
Dispositif : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée

Sur les parties

Texte intégral

ARRÊT DU

29 Mai 2020

351/20

N° RG 17/01107 – N° Portalis DBVT-V-B7B-QUUT

ML/CH

RO

Jugement du

Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de LILLE

en date du

12 Janvier 2017

(RG 15/00970 -section )

GROSSE :

aux avocats

le 29 Mai 2020

République Française

Au nom du Peuple Français

COUR D’APPEL DE DOUAI

Chambre Sociale

— Prud’Hommes-

APPELANTE :

Mme C Y

[…]

[…]

Représentée par Me Nicolas THOMAS, avocat au barreau de LILLE

INTIMÉE :

Mutuelle MUTUELLE INTERIALE

[…]

[…]

Représentée par Me Aurore SUTY, avocat au barreau de LILLE

DÉBATS : à l’audience publique du 12 Février 2020

Tenue par E F

magistrat chargé d’instruire l’affaire qui a entendu seul les plaidoiries, les parties ou leurs représentants ne s’y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la cour dans son délibéré,

les parties ayant été avisées à l’issue des débats que l’arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe.

GREFFIER : Aurélie DI DIO

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ

Soleine HUNTER-FALCK : PRÉSIDENT DE CHAMBRE

H I

: CONSEILLER

E F

: CONSEILLER

Le prononcé de l’arrêt a été prorogé du 27 mars 2020 au 29 mai 2020 en raison de la crise sanitaire en France

ARRÊT : Contradictoire

prononcé par sa mise à disposition au greffe le 29 Mai 2020,

les parties présentes en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l’article 450 du code de procédure civile, signé par Soleine HUNTER-FALCK, Président et par Valérie COCKENPOT, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

ORDONNANCE DE CLÔTURE : rendue le 14 février 2019, avec effet différé au 29 janvier 2020

Par contrat de travail à durée indéterminée en date du 13 septembre 2010 faisant suite à un contrat à durée déterminée du 10 décembre 2009, Mme C Y a été engagée par Intériale Mutuelle en qualité de conseillère téléphonique, statut employée niveau E3 suivant la classification de la convention collective de la mutualité.

Par avenant du 13 décembre 2013, elle a été affectée à compter du 1er janvier 2014 au pôle relation adhérents en qualité de gestionnaire, employé N3, moyennant une rémunération brute annuelle de 22.380 euros correspondant à 1.865 euros par mois.

M. X, responsable des moyens généraux de la mutuelle, a rappelé par courriel du 25 mars 2015 que seuls les attributaires de place de parking étaient autorisés à y entrer et a été destinataire d’un courriel venant de l’adresse de messagerie G.Z@. rédigé comme suit:

' je vous trouve vraiment chiant avec vos places de parking vous croyez trop que c’est la société a vos parent. Et arrêter d’attribuer les places en fonction de vos préférences je vais faire une remonter a qui de droit sur vos attributions des places de parking sois disant vous les attribuer au hasard mais le hasard fait que sa soit toujours les mêmes, comme vous par exemple vous en avait toujours une. On en reparlera bientôt vous verrez'.

En réponse à un message de M. X demandant dans quel service son interlocuteur travaille, un nouveau courriel a été rédigé comme suit:

'je ne discuter pas avec les personnes comme vous et vous pouvez chercher et demander mon nom dans tous l’étage vous trouverez pas. Ce n’est pas mon adresse mail je préfère rester anonyme. Mais je vais envoyer un mail salé a la vrai direction sur vos agissements en matière d’attribution des places.'

Mme Y a été convoquée à un entretien préalable à un licenciement par lettre du 27 mars 2015 fixé au 13 avril 2015. Elle a ensuite été licenciée pour cause réelle et sérieuse par lettre recommandée du 16 avril 2015 aux motifs suivants:

'vous avez adressé à l’un de vos collègues un mail en réaction à l’attribution des places de parking. Dans le cadre de ce mail, le ton que vous employez est inacceptable, irrespectueux voire même menaçant dans sa conclusion.

Les explications que vous nous avez fournies au cours de l’entretien n’ont pas été de nature à modifier notre appréciation des faits, compte tenu de leur incohérence.

Ces faits constituent donc un réel frein à la collaboration et au bon fonctionnement des équipes et ne peuvent être tolérés'.

Contestant le bien-fondé de son licenciement, Mme Y a saisi le 15 juillet 2015 le conseil de prud’hommes de Lille d’une demande d’indemnisation pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Par jugement du 12 janvier 2017 notifié aux parties le 10 avril 2017, le conseil de prud’hommes a débouté Mme Y de ses demandes.

Mme Y a interjeté appel de ce jugement le 26 avril 2017. Par ordonnance du 17 juillet 2017, la cour a, au visa des articles 905, 760 à 762 du code de procédure civile, fixé un calendrier de procédure et différé la clôture des débats à la date du 3 avril 2019. Suite à la révocation de cette ordonnance, la clôture des débats a été fixée au 29 janvier 2020 et l’affaire fixée à la date du 12 février 2010.

Par conclusions responsives et récapitulatives notifiées le 13 février 2019, Mme Y demande à la cour d’infirmer le jugement déféré, de dire que son licenciement est sans cause réelle et sérieuse et de condamner la Mutuelle Intériale à lui verser les sommes suivantes:

—  30.000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

—  3.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Elle expose que M. X, responsable des moyens généraux, qui a procédé à l’attribution des places de parking par tirage au sort, a adressé au personnel un rappel de la liste des personnes autorisées à y entrer après s’être étonné de sa présence dans l’ascenseur venant du parking, alors qu’elle utilisait la place de son supérieur hiérarchique avec son accord. Elle explique s’en être émue auprès de son compagnon, M. Z, qui a envoyé à son insu à M. X le mail qui lui est reproché, comme il l’atteste. Elle fait valoir que ce mail ne lui est pas imputable contrairement à ce que soutient l’employeur contre l’évidence, qu’elle n’aurait pas utilisé l’adresse mail de son compagnon pour rédiger un message de manière anonyme, qu’il ne peut lui être reproché de ne pas avoir indiqué lors de l’entretien préalable qui en était l’auteur et rappelle que la lettre de licenciement fixe les limites du litige. Elle considère avoir subi un préjudice résultant de la perte de son emploi et de l’espoir d’un avancement dans sa carrière et n’avoir retrouvé un emploi qu’après 18 mois de chômage.

Par conclusions en réplique notifiées le 29 septembre 2018, Intériale Mutuelle sollicite de la cour la confirmation du jugement déféré et la condamnation de Mme Y à lui verser la somme de 2.500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

La mutuelle fait valoir que Mme Y a manifestement utilisé l’adresse mail de son compagnon pensant rester ainsi anonyme, que le premier mail est venu en réaction quasi-immédiate au message de M. X, qu’elle se contredit en soutenant lors de l’entretien préalable que son compte a été piraté puis que le message a été transféré à son compagnon, que l’attestation de celui-ci est de complaisance et que les propos utilisés sont inacceptables et caractérisent un manquement à son obligation de respect et de loyauté.

SUR CE

En application de l’article L1235-1 du code du travail, la lettre de licenciement de Mme Y, qui fixe les limites du litige, motive celui-ci par une cause réelle et sérieuse caractérisée par l’envoi à un collègue d’un message d’un ton inacceptable, irrespectueux et menaçant.

Il est constant que M. X, qui venait d’envoyer le 25 mars 2015 à 8h45 un message à ses collègues relatif à l’attribution des places de parking et les autorisations d’y entrer, a reçu le message litigieux le même jour à 9h57 provenant de la boîte de messagerie de M. G Z, compagnon de Mme Y, suivi d’un deuxième message à 10h36 précisant que l’adresse mail utilisée n’est pas celle de l’auteur qui 'préfère rester anonyme'.

Mme Y produit une attestation de M. Z qui témoigne être l’auteur du mail litigieux envoyé depuis sa propre boîte de messagerie et explique son geste réalisé à son insu par le fait qu’elle se plaignait du comportement désagréable de M. X à son égard et lui avait transféré son message relatif à l’attribution des places de parking pour qu’il en prenne connaissance.

Or, l’employeur, qui prétend que Mme Y est en réalité l’auteur du message litigieux envoyé par le biais de l’adresse mail de M. Z pour rester anonyme, produit uniquement des attestations de Mme A, directrice des ressources humaines, et de M. B, directeur exécutif, selon lesquelles elle leur a soutenu lors de l’entretien préalable que sa messagerie avait été piratée, ce qui, selon la lettre de licenciement, a été considéré comme incohérent.

Ces pièces ne venant pas contredire le témoignage de M. Z se déclarant l’auteur des faits reprochés à Mme Y, il y a lieu de constater, en absence de toute autre élément probatoire, que le licenciement de cette dernière fondé sur des faits qui ne lui sont pas imputables est dépourvu de cause réelle et sérieuse.

Par la perte de son emploi, Mme Y a subi un préjudice qui, au regard de son ancienneté de plus de trois ans, de son âge comme étant née en 1987, de sa rémunération contractuelle et de son retour à l’emploi sera indemnisé par le versement d’une somme de 14.000 euros à titre de dommages et intérêts en application de l’article L1235-3 du code du travail en sa version alors applicable.

Par ailleurs, conformément à l’article L1235-4 du code du travail s’appliquant d’office, Intériale Mutuelle sera condamnée à rembourser à Pôle Emploi des indemnités de chômage versées à Mme Y dans la limite de six mois.

Il paraît inéquitable de laisser à la charge de Mme Y les frais irrépétibles de la procédure.

Il lui sera en conséquence accordé la somme de 2.500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour statuant après débats en audience publique par arrêt contradictoire mis à disposition au greffe,

INFIRME le jugement déféré,

STATUANT à nouveau,

DIT le licenciement de Mme C Y sans cause réelle et sérieuse,

CONDAMNE Intériale Mutuelle à verser à Mme C Y la somme de 14.000 euros à titre de dommages et intérêts,

CONDAMNE Intériale Mutuelle à rembourser à Pôle Emploi les indemnités chômage versées à Mme C Y dans la limite de six mois,

CONDAMNE Intériale Mutuelle à verser à Mme C Y la somme de 2.500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

CONDAMNE Intériale Mutuelle aux dépens qui comprendront ceux de première instance.

LE GREFFIER LE PRESIDENT

V. COCKENPOT S. HUNTER-FALCK

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