Cour d'appel de Grenoble, 2ème chambre, 28 mars 2017, n° 13/03900

  • Rachat·
  • Retraite·
  • Assurances·
  • Rente·
  • Faculté·
  • Pension d'invalidité·
  • Contrats·
  • Option·
  • Demande·
  • Construction métallique

Chronologie de l’affaire

Commentaire0

Augmentez la visibilité de votre blog juridique : vos commentaires d’arrêts peuvent très simplement apparaitre sur toutes les décisions concernées. 

Sur la décision

Référence :
CA Grenoble, 2e ch., 28 mars 2017, n° 13/03900
Juridiction : Cour d'appel de Grenoble
Numéro(s) : 13/03900
Décision précédente : Tribunal de grande instance de Valence, 26 juin 2013, N° 12/00571
Dispositif : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Sur les parties

Texte intégral

R.G. N° 13/03900

VL

N° Minute : Copie exécutoire délivrée

le :

à:

Me Frederic GABET

Me Alexandra WIEN

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE GRENOBLE 2EME CHAMBRE CIVILE ARRÊT DU MARDI 28 MARS 2017 Appel d’un Jugement (N° R.G. 12/00571)

rendu par le Tribunal de Grande Instance de X

en date du 27 juin 2013

suivant déclaration d’appel du 28 Août 2013

APPELANT :

Monsieur Y Z

né le XXX à XXX

de nationalité Française

XXX

XXX

Représenté par Me Frederic GABET, avocat au barreau de X

INTIMÉE :

SA SWISSLIFE ASSURANCE ET PATRIMOINE, prise en la personne de ses représentants légaux,

XXX

XXX Représentée par Me Alexandra WIEN, avocat au barreau de GRENOBLE, avocat postulant et ayant pour avocat plaidant Me Marianne VANDERSTUKKEN, avocat au barreau de PARIS, substituée par Me Nawale GASMI, avocat au barreau de GRENOBLE

COMPOSITION DE LA COUR :

LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :

Madame Marie-Françoise CLOZEL-TRUCHE, Président,

Madame Véronique LAMOINE, Conseiller,

Monsieur Olivier CALLEC, Vice-Président placé désigné par ordonnance du Premier Président en date du 21 décembre 2016

Assistés lors des débats de Madame Alexia LUBRANO, Greffier.

DÉBATS :

A l’audience publique du 07 Février 2017

Madame Véronique LAMOINE, Conseiller, a été entendue en son rapport,

Les avocats ont été entendus en leurs conclusions.

Puis l’affaire a été mise en délibéré pour l’arrêt être rendu ce jour.

Exposé des faits La SA CONSTRUCTIONS MÉTALLIQUES DE LA BIÈVRE a, le 13 novembre 1990, adhéré au profit de ses salariés dont Monsieur Y Z, au régime de retraite collectif « GARANTIE ENTREPRISES RETRAITE » proposé par la Société Suisse d’Assurances Générales sur la Vie Humaine aux droits de laquelle vient la SA SWISS LIFE ASSURANCE ET PATRIMOINE (SA SWISS LIFE). Monsieur Y Z a, le 14 novembre 1990, signé un bulletin individuel d’affiliation.

Le 29 avril 2000, Monsieur Y Z a subi un grave accident de la voie publique lui causant de multiples fractures du membre inférieur gauche.

Il a été placé en arrêt de travail jusqu’au 29 avril 2003, puis placé à compter de cette date en invalidité de catégorie 2 (invalidité réduisant d’au moins 2/3 sa capacité de travail).

A la suite des complications de ses blessures, il a dû subir une amputation fémorale avec appareillage en 2007.

Par lettre recommandée du 29 avril 2009, il a demandé le rachat total de son contrat pour la valeur nette disponible, en application de l’article L. 132-23 du Code des Assurances. La SA SWISS LIFE lui répondait en réclamant un décompte récent de paiement de sa pension d’invalidité.

Un nouvel échange de courriers est intervenu en juillet 2011, en septembre 2011 puis en janvier 2012, la SA SWISS LIFE réclamant à nouveau des justificatifs récents de paiement de la pension d’invalidité.

Par acte du 6 février 2012, Monsieur Y Z a assigné la SA SWISS LIFE devant le Tribunal de Grande Instance de X pour la voir condamner à lui payer la somme de 46 640,44 € au titre du rachat du contrat d’assurance valeur 2012, sauf à parfaire au vu de la valeur exacte de ce rachat, outre des dommages-intérêts pour résistance abusive et une indemnité de procédure.

Par jugement du 27 juin 2013, le Tribunal de Grande Instance de X a :

* débouté Monsieur Y Z de l’intégralité de ses demandes,

* donné acte à la SA SWISS LIFE de ce qu’elle offre de verser à Monsieur Y Z les rentes de retraite qui lui reviennent à charge pour ce dernier de fournir les informations nécessaires,

* débouté les parties du surplus de leurs prétentions,

* condamné Monsieur Y Z aux dépens.

Le Tribunal a considéré :

* qu’il résulte des énonciations de l’article L. 123-23 du Code des Assurances que la faculté de rachat est réservée au salarié invalide qui n’atteint pas l’âge de la retraite,

* que Monsieur Y Z, qui a poursuivi son activité salariée jusqu’à l’âge de 60 ans nonobstant son invalidité, ne saurait bénéficier de la faculté de rachat.

Par déclaration au Greffe en date du 28 août 2013, Monsieur Y Z a interjeté appel de ce jugement. Dans ses dernières conclusions notifiées le 18 décembre 2013, il demande la réformation du jugement déféré, et la condamnation de la SA SWISS LIFE à lui payer les sommes de :

* 48 180 € (valeur au 31 décembre 2012), sauf à parfaire au vu de la valeur exacte du rachat du contrat d’assurance à la date de sa liquidation effective,

* 5 000 € à titre de dommages-intérêts pour résistance abusive,

* 3 000 € sur le fondement de l’article 700 du Code de Procédure Civile.

Subsidiairement, au cas où la Cour jugerait que la liquidation de ses droits ne peut intervenir que sous forme d’une rente, il demande la condamnation de la SA SWISS LIFE à lui payer une somme de 20 000 € à titre de dommages-intérêts pour défaut d’information.

Dans tous les cas, il demande la condamnation de la SA SWISS LIFE à liquider le contrat dans le mois de la signification de l’arrêt sous astreinte de 200 € par jour de retard à compter du trentième jour.

Il fait valoir :

* que l’article L. 132-23 dont il demande le bénéfice ne prévoit pas la condition que l’option de rachat soit exercée avant l’âge de la retraite contrairement à ce qu’a retenu le Tribunal,

* que c’est par erreur que le Tribunal a retenu qu’il avait poursuivi son activité salariée jusqu’à la retraite nonobstant son invalidité ; qu’en réalité son contrat de travail a été suspendu, mais il n’a jamais repris son activité ;

* qu’il n’avait pas non plus opté pour le régime de la rente au moment de l’ouverture de ses droits à la retraite, que le courrier de la SA SWISS LIFE du 26 février 2009 qui porte en objet « départ à la retraite », a été généré automatiquement à l’ouverture de ses droits, mais ne fait pas suite à une demande de sa part ; qu’il a opté deux mois plus tard pour le rachat de son contrat ;

* que, si la Cour considérait que seule une rente pouvait lui être versée, le défaut d’information par la SA SWISS LIFE quant à ses droits et à la façon de les mettre en oeuvre l’a privé de la faculté d’opter pour le rachat en temps utile, et donc d’une partie des gains escomptés sachant que son espérance de vie est réduite compte-tenu de ses graves ennuis de santé (handicap moteur majeur, dégradation arthrosique sur le genou valide sur utilisé, insuffisance rénale chronique et complications cardio-vasculaires associées engageant son pronostic vital ainsi qu’il ressort de deux certificats médicaux de décembre 2013) ;

* que, d’ailleurs, entre l’option qu’il a exprimée en avril 2009 et la saisine du Tribunal, la SA SWISS LIFE ne lui a jamais dénié ses droits à exercer l’option de rachat, se contentant de lui réclamer indûment des justificatifs récents des versements de la pension d’invalidité.

La SA SWISS LIFE, dans ses dernières conclusions notifiées le 13 décembre 2013, demande la confirmation du jugement déféré et la condamnation de Monsieur Y Z à lui payer la somme de 2 000 € en application de l’article 700 du Code de Procédure Civile.

Elle fait valoir :

* que le texte invoqué a pour objet de permettre à certains salariés devenus sans emploi pour diverses raisons dont celle d’une invalidité, d’opter pour le règlement anticipé du capital, ou bien d’attendre l’âge normal de la retraite et le versement des arrérages de rentes dont ils sont bénéficiaires,

* que tel n’a pas été le cas de Monsieur Y Z qui n’a pas opté pour le rachat avant l’âge de sa retraite, et qui a fait valoir ses droits à la retraite avant d’exercer cette option ;

* que malgré ses demandes de justificatifs, elle n’a pas été en mesure, jusqu’alors, de servir à Monsieur Y Z la rente à laquelle il a droit faute de fournir les informations nécessaires sur son choix entre réversibilité ou non, et sur sa situation matrimoniale,

* que c’est pourquoi elle offre de lui verser la rente due, en ce compris l’arriéré qu’il n’a pas voulu percevoir, dès qu’elle aura reçu ces informations.

L’ordonnance de clôture est intervenue le 10 janvier 2017.

Motifs de la décision Sur la demande principale

Aux termes de l’article L. 132-23 du Code des Assurances en vigueur du 19 décembre 2007 au 31 décembre 2009 :

« Les contrats d’assurance de groupe en cas de vie dont les prestations sont liées à la cessation d’activité professionnelle ne comportent pas de possibilité de rachat. Toutefois, ces contrats doivent prévoir une faculté de rachat intervenant lorsque se produisent l’un ou plusieurs des événements suivants :

— expiration des droits de l’assuré aux allocations chômage prévues par le code du travail en cas de licenciement (…)

— cessation d’activité non salariée de l’assuré à la suite d’un jugement de liquidation judiciaire en application des dispositions du livre VI du Code de commerce ;

— invalidité de l’assuré correspondant au classement dans les deuxième ou troisième catégories prévues à l’article L. 341-4 du Code de la sécurité sociale."

En l’espèce, la notice individuelle d’information remise à Monsieur Y Z (sa pièce n° 1) rappelle cette faculté ouverte à l’assuré en précisant que, pour exercer cette faculté, il lui appartient de fournir à l’assureur:

'' la photocopie d’une pièce d’identité officielle,

'le titre de pension d’invalidité versée par la Sécurité Sociale, ou l’attestation des ASSEDIC justifiant de l’expiration de ses droits avec une photocopie de sa lettre de licenciement, ou le jugement de liquidation judiciaire. '

Il ressort des pièces versées aux débats :

* que Monsieur Y Z, bénéficiaire depuis le 29 avril 2003 d’une pension d’invalidité après classement dans la catégorie 'deux’ (sa pièce n° 4), a atteint l’âge de 60 ans le 28 septembre 2008, et fait valoir ses droits à la retraite ;

* qu’il a, par lettre recommandée avec avis de réception du 29 avril 2009, demandé à la SA SWISS LIFE le rachat intégral de son contrat en application du texte sus visé, en joignant une photocopie de sa carte d’identité ainsi que le titre d’invalidité de la sécurité sociale conformément à la notice individuelle.

C’est en ajoutant au contrat que la SA SWISS LIFE a, après avoir reçu ce courrier et les pièces jointes, demandé à plusieurs reprises de Monsieur Y Z de lui adresser des justificatifs récents des versements de pension d’invalidité alors que ni la notice individuelle ni les conditions générales ne prévoyaient la production par l’assuré de tels justificatifs mais seulement celle d’un titre d’invalidité.

Par ailleurs, c’est en ajoutant au contrat et à la loi que la SA SWISS LIFE soutient, pour s’opposer à la demande de Monsieur Y Z, que c’est avant d’avoir atteint l’âge de la retraite que ce dernier aurait dû exercer la faculté de rachat pour laquelle il remplit, par ailleurs, les conditions légales ; en effet, cette condition de temps ne figure pas dans le texte de la loi et ne s’en déduit pas nécessairement, la faculté de rachat, soumise à la volonté unilatérale du souscripteur en lui permettant d’interrompre le contrat avant son terme et de mettre fin, par là-même, à l’opération d’assurance, trouvant sa justification en l’espèce dans l’état d’invalidité d’au moins 2/3 dans lequel il se trouve pouvant le conduire à préférer le versement d’un capital plutôt que celui d’une rente, sans que cette situation induise qu’il doive exercer cette faculté dès l’apparition de l’état d’invalidité lui ouvrant ce droit, ou encore qu’il y procède avant de pouvoir faire valoir ses droits à la retraite.

Dès lors, le jugement sera réformé en toutes ses dispositions, et la SA SWISS LIFE condamnée à payer à Monsieur Y Z la somme principale de 44 632 € correspondant au montant de son épargne acquise au 31 décembre 2010 (pièce n° 12 de l’appelant), la SA SWISS LIFE n’alléguant ni a fortiori ne justifiant que les droits acquis aient été moindres à la date maximale où, en application de l’article L. 132-21 du code des assurances, elle devait payer le capital à l’assuré soit deux mois après la demande de ce dernier.

Il n’y a pas lieu d’assortir cette condamnation d’une astreinte, les intérêts moratoires, courant de plein droit depuis la sommation de payer en application de l’article 1153 du Code Civil alors en vigueur, constituant pour l’instant une contrainte suffisante. Sur les demandes accessoires

La SA SWISS LIFE, succombant en sa défense, devra supporter les dépens de première instance et d’appel en application de l’article 696 du Code de Procédure Civile et il n’y a pas lieu de faire application de l’article 700 du Code de Procédure Civile en sa faveur.

Il serait inéquitable de laisser à la charge de Monsieur Y Z la totalité de ses frais irrépétibles exposés dans le cadre de la présente et de l’instance devant le premier juge ; il y a donc lieu de lui allouer une indemnité de 3 000 € sur le fondement de l’article 700 du Code de Procédure Civile.

En revanche, il n’est démontré aucune résistance abusive ayant généré un préjudice non réparé par les intérêts moratoires, et la demande ainsi formée sera par conséquent rejetée.

Par ces Motifs La Cour, statuant publiquement par arrêt contradictoire mis à disposition au Greffe, après en avoir délibéré conformément à la loi,

INFIRME en toutes ses dispositions le jugement déféré.

Statuant à nouveau :

CONDAMNE la SA SWISS LIFE ASSURANCE ET PATRIMOINE venant aux droits de la Société Suisse d’Assurances Générales sur la Vie Humaine, à payer à Monsieur Y Z :

* la somme de 44 632 € au titre de la faculté de rachat de son adhésion individuelle du 14 novembre 1990 au régime de retraite collectif souscrit le 13 novembre 1990 par la SA CONSTRUCTIONS MÉTALLIQUES DE LA BIÈVRE,

* la somme de 3 000 € en application de l’article 700 du Code de Procédure Civile.

REJETTE toutes les autres demandes.

CONDAMNE la SA SWISS LIFE ASSURANCE ET PATRIMOINE aux dépens de première instance et d’appel.

Prononcé par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

Arrêt signé par le Président Marie-Françoise CLOZEL-TRUCHE et par le Greffier Alexia LUBRANO, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LE GREFFIER, LE PRESIDENT,

Chercher les extraits similaires
highlight
Chercher les extraits similaires
Extraits les plus copiés
Chercher les extraits similaires
Collez ici un lien vers une page Doctrine
Inscrivez-vous gratuitement pour imprimer votre décision
Cour d'appel de Grenoble, 2ème chambre, 28 mars 2017, n° 13/03900