Cour d'appel de Grenoble, 1ere chambre, 10 novembre 2020, n° 19/04862

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Grenoble, 1re ch., 10 nov. 2020, n° 19/04862
Juridiction : Cour d'appel de Grenoble
Numéro(s) : 19/04862
Sur renvoi de : Cour de cassation, 10 septembre 2019
Dispositif : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée

Sur les parties

Texte intégral

N° RG 19/04862 – N° Portalis DBVM-V-B7D-KINT

VL

N° Minute :

Copie exécutoire délivrée le :

à :

Me Johanna ABAD

la SELARL LEXAVOUE GRENOBLE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE GRENOBLE

1eRE CHAMBRE CIVILE

ARRÊT SUR RENVOI DE CASSATION

DU MARDI 10 NOVEMBRE 2020

DÉCLARATION DE SAISINE DU 05 Décembre 2019

sur un arrêt de cassation du 11 septembre 2019

Recours contre un Jugement (N° R.G. 13/1992)

rendu par le Tribunal de Grande Instance d’ANNECY

en date du 19 mars 2015

ayant fait l’objet d’un arrêt rendu le 10 janvier 2017

par la Cour d’Appel de CHAMBÉRY

APPELANT:

POLE EMPLOI AUVERGNE RHÔNE ALPES pris en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

[…]

[…]

Représenté par Me Johanna ABAD, avocat au barreau de GRENOBLE postulant et plaidant par Me Aymen DJEBARI avocat au barreau de LYON

INTIMÉ:

M. Y X

né le […] à […]

de nationalité Française

[…]

[…]

Représenté par Me Alexis GRIMAUD de la SELARL LEXAVOUE GRENOBLE, avocat au barreau de GRENOBLE et ayant pour avocat plaidant Me Johan MARENDAZ avocat au barreau d’ANNECY

COMPOSITION DE LA COUR : LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :

Mme Hélène COMBES, Président de chambre

Mme Véronique LAMOINE, Conseiller

M. Frédéric DUMAS, Vice président placé par ordonnance de madame la première présidente en date du 17 juillet 2020,

Assistés lors des débats de Mme Anne BUREL, Greffier

DÉBATS :

A l’audience publique de renvoi de cassation tenue le 5 octobre 2020, Mme LAMOINE, Conseiller, a été entendue en son rapport,

Et l’affaire a été mise en délibéré à la date de ce jour à laquelle l’arrêt a été rendu.

RAPPEL DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE

M. X, qui était salarié de la société EDIP, a été licencié pour faute grave le 8 novembre 2003.

L’ASSEDIC des Alpes lui a versé des allocations de chômage à compter du 25 décembre 2003, prenant en compte un différé de versement de 37 jours équivalent à la durée des congés payés compensés par indemnité de son employeur, ainsi que le délai de carence de 7 jours applicable à tous les allocataires.

Après un jugement du conseil de prud’hommes de Lyon saisi par M. X qui contestait son licenciement, jugement infirmé par un arrêt de la cour d’appel de Lyon cassé le 12 novembre 2008, la cour d’appel de Chambéry cour de renvoi a, par arrêt du 6 janvier 2011 aujourd’hui définitif :

— dit le licenciement sans cause réelle et sérieuse,

— fixé au passif de la société EDIP en procédure collective des créances au bénéfice de M. X aux titres d’une indemnité compensatrice de préavis et de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Le 22 mars 2012, l’établissement Pôle Emploi Rhône-Alpes venu aux droits de l’ASSEDIC, à qui l’arrêt de la cour d’appel de Chambéry avait été transmis, a notifié à M. X un trop perçu avec demande de remboursement de la somme de 25'460,17 € à la suite de la régularisation de ses droits relativement au différé d’indemnisation.

Par lettre recommandée distribuée le 20 novembre 2012, Pôle Emploi Rhône-Alpes a mis M. X en demeure de lui régler la somme de 22 277,71 € après imputation de sommes perçues à hauteur de 3 182,46 €.

Par acte du 21 novembre 2013, Pôle Emploi Rhône-Alpes a assigné M. X devant le tribunal de grande instance d’Annecy pour le voir condamner à lui payer la somme de 22 277,71 € au titre du solde des allocations de chômage indûment perçues entre le 25 décembre 2003 et le 3 septembre 2004.

M. X s’est opposé à cette demande, et a réclamé un complément d’allocation à hauteur de 12 791,22 € en se fondant sur une erreur dans le salaire de référence pris en compte par Pôle Emploi qui n’avait pas inclus l’intéressement résultant de son contrat de travail.

Par jugement du 19 mars 2015, le tribunal de grande instance d’Annecy a :

— dit que la créance de Pôle Emploi à l’égard de M. X s’élève à 13 615,08 €,

— dit que la créance de M. X à l’égard de Pôle Emploi s’élève à 26 406,30 €,

— condamné par conséquent Pôle Emploi à payer à M. X la différence soit 12 791,22 € ainsi qu’une indemnité de procédure de 2 000 € sous le bénéfice de l’exécution provisoire,

— rejeté toutes les autres demandes,

— condamné Pôle Emploi aux dépens.

Sur l’appel formé par Pôle Emploi, la cour d’appel de Chambéry a, par arrêt du 10 janvier 2017, infirmé le jugement en toutes ses dispositions et :

— condamné M. X à payer à Pôle Emploi la somme principale de 22 277,71 € outre intérêts,

— rejeté l’exception de prescription mais débouté M. X de sa demande reconventionnelle,

— statué sur l’article 700 du code de procédure civile et les dépens.

Sur un pourvoi formé par M. X, la Cour de cassation a, par arrêt du 11 septembre 2019, cassé et annulé l’arrêt du 10 janvier 2017 en toutes ses dispositions et renvoyé la cause et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant cet arrêt devant la cour d’appel de ce siège.

Par déclaration au Greffe en date du 5 décembre 2019, l’établissement Pôle Emploi Auvergne Rhône-Alpes (Pôle Emploi) a saisi la présente cour de ce renvoi.

Le 9 janvier 2020, les avocats des parties ont été avisés que l’affaire était fixée à plaider à l’audience du 18 mai 2020 en application des dispositions de l’article 905 du code de procédure civile. L’affaire a ensuite été renvoyée à l’audience du 3 octobre 2020 en raison de l’état d’urgence sanitaire.

Dans ses conclusions n° 2 notifiées le 4 mai 2020, Pôle Emploi demande la réformation du jugement déféré, et la condamnation de M. X à lui payer les sommes de :

—  22 277,71 € outre intérêts légaux à compter du 20 novembre 2012 date de réception de la mise en demeure et capitalisation à compter du 21 novembre 2013,

—  2 000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

Il fait valoir :

— qu’il dispose d’un droit autonome, distinct de celui de l’employeur, pour contester l’étendue de sa garantie,

— qu’à titre conservatoire, et au vu de la seule attestation initialement transmise par le liquidateur de l’entreprise, il a considéré que la somme de 26 937,48 € allouée au titre du préavis correspondait à six mois de rémunération et non pas trois mois,

— que, dès lors, la fin du contrat de travail de M. X était reportée au 7 mai 2004,

— que l’imputation des différents délais de carence (37+7+75) conduit donc à un point de départ de l’indemnisation réellement due au 4 septembre 2004, d 'où un trop-payé devant être calculé jusqu’au 3 septembre 2004,

— sur la demande reconventionnelle, que l’intéressement ne doit pas être pris en compte dans le calcul du salaire de référence faute de justification, par le salarié, qu’il ait été effectivement perçu par lui au cours de la période correspondante conformément à l’article 21 du règlement annexé à la convention du 1er janvier 2004.

M. X, par conclusions rectificatives n° 1 notifiées le 5 mai 2020, demande le rejet de toutes réclamations de Pôle Emploi et sa condamnation à lui payer la somme de 13 144,84 € après compensation avec le trop-versé, outre intérêts au taux légal à compter du 25 avril 2014 date de sa demande en justice et capitalisation des intérêts.

Il demande encore condamnation de Pôle Emploi à lui payer la somme de 10 000 € en application de l’article 700 du code de procédure civile.

Il fait valoir :

— qu’il reconnaît devoir à Pôle Emploi la somme de 13 310,91 € au titre du trop payé jusqu’au 5 juin 2004,

— qu’en revanche Pôle Emploi lui est redevable de 26 455,75 €,

— qu’en effet la cour d’appel de Chambéry a fixé définitivement son salaire brut mensuel à 8 979,16 €, montant qui a servi de base au calcul de l’ensemble des indemnités légales.

L’instruction a été clôturée par une ordonnance rendue le 2 octobre 2010.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la demande de Pôle Emploi

Il est constant que M. X a perçu des allocations de chômage d’un montant journalier de 101,19 € à partir du 25 décembre 2003, le point de départ de cette indemnisation tenant compte, aux termes de la notification d’admission de l’ASSEDIC du 8 décembre 2003, d’un différé de versement de 37 jours équivalent à la durée des congés payés compensés par indemnité de son employeur, ainsi que du délai de carence de 7 jours applicable à tous les allocataires à partir du jour du licenciement marquant alors la fin du contrat de travail pour faute grave.

Ainsi que l’a justement retenu le tribunal dans le jugement du 19 mars 2015 objet de l’appel, il y a lieu d’appliquer aussi le délai de carence spécifique de 75 jours du paragraphe 2 de l’article 30 du règlement annexé à la convention du 1er janvier 2004 relative à l’aide au retour à l’emploi et à

l’indemnisation du chômage, prévue en cas de rupture de contrat de travail ayant donné lieu au versement d’une indemnité inhérente à cette rupture dont le montant ou les modalités de calcul ne résultent pas directement de l’application de dispositions législatives, correspondant en l’espèce aux dommages-intérêts alloués pour licenciement sans cause réelle et sérieuse par la cour d’appel de Chambéry dans son arrêt du 6 janvier 2011.

Enfin, dès lors que, dans ce même arrêt, la cour a estimé que M. X aurait dû bénéficier d’un préavis de trois mois, la fin de son contrat de travail a été reportée à l’expiration de ce délai de préavis soit au 8 février 2004, Pôle Emploi étant mal fondé à se prévaloir sur ce point d’un préavis de six mois ne reposant, selon ses propres termes, que sur une estimation faite par ses soins à titre conservatoire au vu de l’attestation initiale établie par le liquidateur de l’entreprise alors qu’il ressort des motifs de l’arrêt du 6 janvier 2011, non contesté sur ce point, que le préavis applicable à ce salarié était de trois mois.

Dès lors, il en résulte que M. X a trop perçu l’allocation de chômage pendant une durée de 165 jours soit :

—  46 jours du 25 décembre 2003 au 8 février 2004,

—  119 jours (soit 37 + 7 + 75) du 9 février 2004 au 7 juin 2004 inclus.

M. X est donc redevable envers Pôle Emploi de la somme de :

165 x 101,19 € = 16 696,35 € sous déduction des retenues déjà pratiquées soit 3 182,46 €, soit un solde de 13 513,89 €.

Cette somme produira intérêts au taux légal à compter du 20 novembre 2012 date de réception de la mise en demeure.

Sur la demande de M. X

L’indemnité journalière de 101,19 € qui a été allouée à M. X par l’ASSEDIC a été calculée sur la base d’un salaire journalier de 180,13 € aux termes de la lettre de notification d’admission du 8 décembre 2003.

Or aux termes de l’article 21 paragraphe 1 du règlement annexé à la convention du 1er janvier 2004 déjà cité, le salaire de référence est établi à partir des rémunérations des 12 mois civils précédant le dernier jour de travail payé entrant dans l’assiette des contributions, en ce compris les gratifications et primes aux termes de l’article 22.

Contrairement à ce que soutient Pôle Emploi, ce texte n’édicte pas que ne devraient être prises en compte que les rémunérations que le salarié aurait effectivement perçues ; dès lors, exiger du salarié qu’il justifie cette perception effective ou qu’il produise les bulletins de salaires correspondants serait ajouter au texte une condition non prévue.

Dès lors que la cour d’appel de Chambéry a, dans son arrêt du 6 janvier 2011, retenu comme base du calcul des indemnités légales de fin de contrat un salaire mensuel brut de 8 979,16 € en ce compris l’intéressement résultant d’un avenant au contrat de travail du 5 novembre 2002 produit aujourd’hui aux débats, c’est à bon droit que le premier juge a considéré que ce montant devait être le salaire de référence du calcul des allocations, en retenant, par des motifs pertinents, que seules les sommes attribuées aux salariés en application d’un accord d’intéressement n’avaient pas le caractère d’élément du salaire pour l’application de la législation du travail et de la sécurité sociale aux termes de l’article L. 3312-4 du code du travail, ce qui n’était pas le cas en l’espèce puisque l’intéressement de M. X avait une origine contractuelle.

Le tribunal a donc justement fixé le montant de l’allocation que M. X aurait dû percevoir à 151,65 € par jour selon le mode de calcul de ce dernier non contesté par Pôle Emploi, au lieu des 102,20 € effectivement perçus durant la période d’indemnisation du 8 juin 2004 au 28 février 2006.

Dès lors, M. X est fondé à se voir allouer, au titre de complément sur les allocations déjà perçues pour cette période : (151,65 – 102,20) x 533 jours = 26 356,85 €.

Cette somme produira intérêts au taux légal à compter du 25 avril 2014 date de la demande devant le tribunal.

La demande de capitalisation des intérêts, dès lors qu’elle est formée pour les intérêts dus au moins pour une année entière conformément à l’article 1343-2 du code civil, s’impose au juge et il y a donc lieu d’y faire droit s’agissant des sommes respectivement allouées.

Pôle Emploi sera donc tenu du paiement de la différence entre les sommes dues de part et d’autre après compensation à la date du présent arrêt.

Sur les demandes accessoires

Pôle Emploi, qui succombe principalement en son appel, devra supporter les dépens conformément aux dispositions de l’article 696 du code de procédure civile. Pour les mêmes motifs, il n’y a pas lieu de faire application de l’article 700 du code de procédure civile en sa faveur.

Il serait inéquitable de laisser à la charge de M. X la totalité de ses frais irrépétibles ; il y a donc lieu de lui allouer la somme complémentaire de 2 000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire,

Confirme le jugement déféré seulement en ses dispositions relatives à l’article 700 du code de procédure civile et aux dépens.

L’infirme sur le surplus et, statuant de nouveau et y ajoutant :

Condamne M. X à payer à Pôle Emploi Auvergne Rhône-Alpes la somme de 13 513,89 € au titre d’un trop-perçu outre intérêts au taux légal à compter du 20 novembre 2012 et avec capitalisation des intérêts dans les conditions de l’article 1343-2 du code civil.

Condamne Pôle Emploi Auvergne Rhône-Alpes à payer à M. X la somme de 26 356,85 € à titre de complément d’allocation d’outre intérêts au taux légal à compter du 25 avril 2014 et avec capitalisation des intérêts dans les conditions de l’article 1343-2 du code civil.

Condamne Pôle Emploi Auvergne Rhône-Alpes au paiement à M. X de la différence après compensation entre les créances réciproques à la date de ce jour.

Condamne Pôle Emploi Auvergne Rhône-Alpes à payer à M. X la somme complémentaire de 2 000 € en application de l’article 700 du code de procédure civile.

Rejette toutes les autres demandes.

Condamne Pôle Emploi Auvergne Rhône-Alpes aux dépens avec droit de recouvrement direct au

profit de l’avocat constitué pour M. X, en application des dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.

Prononcé par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile,

Signé par Madame COMBES, président, et par Madame BUREL, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT

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