Cour d'appel de Limoges, Chambre sociale, 25 novembre 2019, n° 18/01079

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Limoges, ch. soc., 25 nov. 2019, n° 18/01079
Juridiction : Cour d'appel de Limoges
Numéro(s) : 18/01079
Décision précédente : Conseil de prud'hommes de Tulle, 10 octobre 2018
Dispositif : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée

Sur les parties

Texte intégral

ARRÊT N° .

N° RG 18/01079 – N° Portalis DBV6-V-B7C-BH4BY

AFFAIRE :

SAS JELD-WEN FRANCE ayant établissement à […] représentée par son Président en exercice domicilié de droit audit siège

C/

B X

MV/MLM

Licenciement

G à Me Chabaud et Me Pagès le 25/11/19

COUR D’APPEL DE LIMOGES

CHAMBRE ECONOMIQUE ET SOCIALE

------------

ARRÊT DU 25 NOVEMBRE 2019

-------------

Le vingt cinq Novembre deux mille dix neuf, la Chambre économique et Sociale de la Cour d’Appel de LIMOGES a rendu l’arrêt dont la teneur suit par mise à la disposition du public au greffe :

ENTRE :

SAS JELD-WEN FRANCE ayant établissement à […] représentée par son Président en exercice domicilié de droit audit siège, dont le siège social est […]

représentée par Me Philippe CHABAUD, avocat au barreau de LIMOGES

APPELANTE d’un jugement rendu le 11 Octobre 2018 par le Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de TULLE

ET :

B X, demeurant […]

représenté par Me Patrick PAGES, avocat au barreau de BRIVE

INTIME

---==oO§Oo==---

L’affaire a été fixée à l’audience du 21 Octobre 2019, après ordonnance de clôture rendue le 11

septembre 2019, la Cour étant composée de Madame J K, Présidente de Chambre, de Monsieur L-Pierre COLOMER, Conseiller et de Madame Mireille VALLEIX, Conseiller, assistés de Monsieur H I, Greffier, Madame Mireille VALLEIX, Conseiller, a été entendue en son rapport oral, les avocats sont intervenus au soutien des intérêts de leurs clients.

Puis, Madame J K, Présidente de Chambre a donné avis aux parties que la décision serait rendue le 25 Novembre 2019, par mise à disposition au greffe de la Cour, après en avoir délibéré conformément à la loi.

LA COUR

EXPOSE DU LITIGE

Monsieur B X a été embauché à compter du 1er juillet 2015 par la SAS Jeld Wen France, spécialisée dans la fabrication de charpente et de menuiserie, dans le cadre d’un contrat de travail à durée déterminée renouvelé deux fois avant d’être modifié en contrat à durée indéterminée à compter du 1er janvier 2017, en qualité de cadre, «'group manager’ de production » du secteur entaillage sur la base d’une rémunération forfaitaire annuelle de 46.000 euros.

Il a été convoqué par courrier du 30 juin 2017 à un entretien préalable avant éventuel licenciement fixé au 10 juillet suivant, assorti d’une mesure de mise à pied à titre conservatoire.

Il a reçu notification de son licenciement pour faute grave par courrier du 13 juillet 2017.

Contestant la légitimité de cette sanction, il a saisi par requête du 12 septembre 2017 le conseil de prud’hommes de Tulle, lequel par jugement du 11 octobre 2018, a':

— dit le licenciement prononcé à son encontre sans cause réelle et sérieuse,

— condamné la SAS Jeld-Wen France en la personne de son représentant légal à lui payer les sommes suivantes :

* 11.694'euros au titre de l’indemnité compensatrice de préavis,

*1.169'euros au titre des congés payés sur préavis,

*1'.979,13'euros au titre du rappel de salaire consécutif à la mise à pied,

*197,91'euros au titre des congés payés sur rappel de salaire consécutif à la mise à pied,

*779,60'euros au titre de l’indemnité de licenciement conventionnelle,

*25.000'euros au titre de l’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

* 2'.500'euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

— dit ne pas avoir lieu à prononcer l’exécution provisoire,

— dit que chaque partie conservera la charge de ses dépens.

La SAS Jeld-Wen France a régulièrement interjeté appel de ce jugement par déclaration du 9 novembre 2018, son recours portant sur l’ensemble des chefs de jugement à l’exception de celui concernant l’exécution provisoire.

Par conclusions du 17 juillet 2019, la SAS appelante demande à la Cour':

— à titre principal, d’infirmer le jugement déféré, de constater que le licenciement de M. X repose sur une faute grave et de débouter en conséquence le salarié de l’intégralité de ses demandes,

— à titre subsidiaire, de constater que les demandes présentées par le salarié ne sont pas justifiées dans leur montant et de l’en débouter,

— en tout état de cause, de le condamner aux entiers dépens en accordant pour ces derniers à Maître Chabaud, avocat, le bénéfice de l’article 699 du code de procédure civile et à lui verser une indemnité de 2'500'euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

La SAS appelante fait principalement valoir que le licenciement pour faute grave de M. X est parfaitement justifié eu égard aux graves manquements de ce dernier dans l’exercice de ses fonctions, liés aux problèmes de sécurité et à l’inobservation des règles d’organisation interne concernant notamment la réalisation des fiches de poste et l’optimisation de la défonceuse; elle précise que le salarié, qui avait des fonctions d’encadrement, a suivi des formations dès sa prise de poste et avait une parfaite connaissance des règles de sécurité applicables au sein de la SAS employeur, qu’ il a toujours été soutenu par la direction dans l’exercice de ses fonctions mais n’a pas tenu compte des reproches qui avaient été antérieurement formulés à son encontre.

Elle ajoute par ailleurs que les demandes en paiement présentées par le salarié ne sont en tout état de cause pas justifiées et qu’il n’établit pas notamment l’existence d’un préjudice à l’appui de sa demande de dommages et intérêts portant sur 15 mois de salaire alors qu’il avait tout juste deux ans d’ancienneté au sein de l’entreprise au moment de son licenciement.

Aux termes de ses écritures du 23 avril 2019, M. X demande à la Cour de confirmer le jugement entrepris sauf en ce qui concerne le montant des dommages et intérêts qui lui ont été octroyés en réparation du caractère non fondé du licenciement qu’il entend voir porter à la somme de 50.000'euros et de condamner la SAS employeur, outre aux entiers dépens, à lui verser une indemnité de 3.000'euros au titre de ses frais irrépétibles.

Il soutient essentiellement qu’il a été contraint d’assurer la charge de plusieurs secteurs de production avant d’être contraint lui-même de cesser ses activités pour arrêt de travail pour maladie, qu’il a tenté toutefois de faire face à ses responsabilités, qu’aucun des griefs à lui reprochés n’est en réalité fondé, que le licenciement pour faute grave avec mise à pied conservatoire est intervenu dans des conditions d’une particulière brutalité, que son préjudice a été sous-estimé par le conseil de prud’hommes, qu’après cinq ans de recherche d’emploi suite à un précédent licenciement pour motif économique, il avait dû quitter sa région d’origine pour venir travailler en Corrèze et a du subir après deux ans d’installation, un nouveau transfert de domicile, qu’âgé de 55 ans et malgré sa qualification d’ingénieur, il lui a été impossible de retrouver un emploi équivalent et a du se résigner à entamer une reconversion professionnelle.

L’ordonnance de clôture a été rendue le 11 septembre 2019.

Pour un plus ample exposé des faits, procédure, moyens, prétentions et argumentation des parties, il est expressément renvoyé au jugement déféré et aux écritures déposées.

MOTIFS DE L’ARRET

Sur la cause du licenciement

L’article L.1232-1 du code du travail subordonne la légitimité du licenciement à une cause réelle et sérieuse.

Selon l’article L. 1235-1 du code du travail, en cas de litige, le juge, à qui il appartient d’apprécier la régularité de la procédure suivie et le caractère réel et sérieux des motifs invoqués par l’employeur, forme sa conviction au vu des éléments fournis par les parties après avoir ordonné, au besoin, toutes les mesures d’instruction qu’il estime utiles. Si un doute subsiste, il profite au salarié.

La faute grave résulte d’un fait ou d’un ensemble de faits imputable au salarié qui constitue une violation des obligations résultant du contrat de travail d’une importance telle qu’elle rend impossible le maintien de l’intéressé dans l’entreprise pendant la durée du préavis. Il incombe à l’employeur qui l’invoque d’en apporter la preuve.

Par ailleurs aux termes de l’article L1332-4 du même code, aucun fait fautif ne peut donner lieu à lui seul à l’engagement de poursuites disciplinaires au-delà d’un délai de deux mois à compter du jour où l’employeur en a eu connaissance, à moins que ce fait ait donné lieu dans le même délai à l’exercice de poursuites pénales.

Les griefs énoncés dans la lettre de licenciement fixent les limites du litige.

Le juge doit rechercher si les faits reprochés au salarié, à défaut de caractériser une faute grave, ne constituent pas néanmoins une cause réelle et sérieuse.

En l’espèce aux termes de la lettre de licenciement notifiée à M. X le 13 juillet 2017, il lui est fait les six reproches suivants, lesquels, selon l’employeur caractérisent une violation des règles de sécurité, des dispositions contractuelles et des règles internes en matière de politique de sécurité et constituent un abus de pouvoir et un abus d’autorité:

1°- l’absence de mise en oeuvre du projet de plaque sur le transcorrézien,

2°-l’absence de mise en oeuvre de trois actions de sécurité suite à l’audit Gold de mars 2017,

3°-l’absence de mise en oeuvre des 74 actions d’amélioration de la sécurité depuis janvier 2017,

4°-l’état des lieux sécurité,

5°-l’absence d’intégration du risque,

6°-l’absence d’optimisation de la défonceuse,

Sur le 1er grief lié à l’absence de mise en oeuvre du projet de plaque sur le Transcorrèzien :

La lettre de licenciement énonce à ce titre : ' L’absence de mise en oeuvre du projet de plaque sur le Transcorrézien avec pour objectif d’aménager un passage sur les rails pour faciliter le passage des chariots élévateurs et du gerbeur porte à faux et ce, malgré nos relances.

En effet suite à l’audit Gold Report de mars 2016, l’absence d’aménagement des rails a été identifiée comme un risque potentiel d’accident.

Or malgré cet audit, aucune action n’a été mise en oeuvre et en juillet 2016, un accident bénin est survenu, l’opérateur s’étant blessé en soulevant un carton.

L’utilisation du gerbeur porte à faux aurait pu éviter cet accident puisqu’il avait pour objet de limiter la manutention manuelle.

La commande et la livraison du gerbeur a été effectuée en février 2017, sachant que vous étiez responsable de sa mise en service.

Toutefois, vous n’avez pas agi et en mai 2017, un nouvel accident est survenu, une conductrice d’un chariot élévateur s’étant coincé le dos au passage d’un seuil.

Ce dernier accident a justifié une relance et vous deviez mettre en service à effet immédiat le projet de plaque sur Transcorrèzien.

Toutefois malgré deux demandes vous n’avez pas agi.

Plus grave, cet aménagement n’est toujours pas en cours et n’a même pas été mis en oeuvre'.

La SAS employeur produit à l’appui de ce grief :

— le contrat de travail de M. X qui précise en son article 3 intitulé 'fonctions et attributions : , 'le salarié effectuera les tâches suivantes : assurer la sécurité de son équipe, contrôler l’application du règlement intérieur, des règles et consignes, communiquer pour orienter les actions et en vérifier la réalisation',

— une attestation de M. Y, ancien responsable du service maintenance Jeld Wen Ussel, qui certifie avoir 'été chargé de mettre en oeuvre l’implantation qui avait été définie par le chef de projet, que la maintenance avait en charge de mettre en place des passages de chariot élévateur ce qui a commencé à être fait en octobre 2016, aucune priorité n’ayant été fixée sur le sujet, y avoir travaillé pendant les rares moments de creux que nous avions dans notre planning, ce mode de fonctionnement est resté en l’état jusqu’à fin décembre, j’ai passé le relais début janvier 2017 au nouveau responsable maintenance',

— un mail adressé par Mme Z à M. A le 30 juin 2017 en ces termes : ' comme suite à l’AT de la semaine dernière l’action concernant les passages au-dessus des rails de transco est chez B qui ne sera pas là pour un moment, qui a les données techniques’ qui reprend l’action pour déterminer tous les passages et faire commande du Matos'.',

— un mail adressé par Mme Z à Mme F G le 9 juin 2017 en ces termes : ' Salut’ Où en es tu’ Merci',

— un mail adressé par M. X à Mme Z le 9 juin 2017 en ces termes : 'je commence à y voir clair sur mon retard suite à absence, je gère les validations SOP ce jour et je refais un point sur tous les SAS qui sont tombés sur mon bureau cet après-midi.

Les plaques sont pour le début de la semaine prochaine.

Mon objectif étant de finaliser les plans et de donner tous les éléments pour les appros à L-M pour fin de semaine prochaine'.

L’analyse de ces documents ne permet pas toutefois de retenir une quelconque faute à ce titre à l’encontre de M. X, au regard des conditions de travail du salarié en début d’année 2017.

Celui-ci justifie en effet avoir assumé la charge de deux secteurs de production (entaillage et montage) du 17 au 26 février 2017, de 3 secteurs de production du 26 février au 13 mars 2017, de deux secteurs de production du 13 mars au 3 avril 2017, avoir du cesser ses fonctions pour raison de santé pendant les périodes allant du 5 au 11 avril, du 21 avril au 6 mai et du 15 au 31 mai, n’avoir été effectivement présent dans l’entreprise que durant 4 à 5 mois, n’avoir été en charge de la mise en place du transcorrèzien initialement confié au service maintenance qu’à partir du mois de janvier 2017, avoir conçu et transmis au service maintenance la charge de la mise en oeuvre des plans de réalisation des passages de chariots validés avant le mois de mai 2017, avoir établi les plans détaillés définitifs à son retour d’arrêt de maladie début juin et transmis à M. C responsable maintenance

pour mise en oeuvre le 27 juin 2017.

Il est par ailleurs fondé à se prévaloir du fait que l’accident survenu au mois de juillet 2016 ne peut être imputable à l’absence de passage incriminé alors que le transcorrèzien n’a été installé qu’au mois d’août suivant et du fait que le second accident survenu au mois de mai 2017 à Mme D est intervenu au niveau de l’entrée de l’usine dans le secteur du refendeur, soit hors de sa responsabilité et pour un motif étranger au problème du passage des rails du transcorrèzien.

Sur le second grief lié à l’absence de mise en oeuvre des trois actions de sécurité suite à l’audit Gold de mars 2017

La lettre de licenciement énonce à ce titre : 'Dans le même ordre d’idée, suite à l’audit Gold de mars 2017, 3 actions sécurité ne sont toujours pas réalisées, au mépris des règles de sécurité.

La SAS employeur produit seulement à l’appui de ce grief un tableau intitulé 'plan d’action HSE usine -Ussel' établi et mis à jour le 30 juin 2017 par ses soins, identifiant 3 types d’action qui n’auraient pas été réalisées par le salarié dans les temps à lui impartis fixés à avril ou mai 2017.

M. X reconnaît ne pas avoir eu le temps de mettre en place les actions susvisées relatives au désencombrement de certains secteurs.

Ce plan d’action ayant été toutefois élaboré à partir de constats réalisés le 28 mars 2017 et M. X ayant été absent du 5 avril au 31 mai à l’exception de deux brèves périodes, ce grief ne peut être retenu comme fondé à son encontre.

Sur le 3e grief lié à l’absence de mise en oeuvre des 74 actions d’amélioration de la sécurité depuis janvier 2017

La lettre de licenciement énonce à ce titre : ' Depuis janvier 2017, sur 87 suggestions d’amélioration de la sécurité SAS seulement 13 ont été réalisées.

Or ces suggestions, demandées par le personnel font partie intégrante de vos attributions et missions'.

La SAS employeur produit à l’appui de ce grief le plan d’action HSE usine D’ussel listant les 74 actions de sécurité à entreprendre par l’atelier piloté par M. X sur la base de constats effectués du 1 er janvier au 21 juin 2017 et précise que le niveau de disponibilité du service de maintenance et les périodes d’absence pour maladie de M. X ne peuvent justifier le manquement de ce dernier à ses obligations contractuelles consistant principalement à s’assurer du respect des règles de sécurité.

Si M. Denis reconnaît ne pas avoir réussi à mener à bien l’ensemble des actions susvisées il indique sans être contesté sur ce point que 40% des SAS ont été émises au cours de la semaine du 'safety week’ du 20 au 24 mars 2017, que 30 SAS ont été émises postérieurement au mois de mars 2017 dont 20 au cours du mois de juin 2017 et précise que nonobstant les problèmes qu’il a rencontrés en devant remplacer les autres responsables et en étant ensuite absent pour maladie à compter du mois d’avril, le taux global de traitement des SAS du secteur entaillage jusqu’au 21 juin 2017 est de 21% comparé au taux de 38% et de 28% des deux autres secteurs de production sur la même période, de sorte qu’aucun fait fautif ne peut être retenu à son encontre de ce chef.

Sur le 4e grief lié à l’état des lieux sécurité

La lettre de licenciement énonce à ce titre :

En outre encore, un état des lieux sécurité sur votre secteur a été établi, mettant en évidence 3 points sensibles, à savoir :

la réalisation de 37 % des fiches de poste (SIO),

le rappel de l’aménagement des rails restant à réaliser,

le rappel du traitement à effectuer des suggestions d’amélioration de la sécurité

Là encore ce rappel n’a pas été suivi d’effet'.

La SAS employeur fait grief à M. Denis d’avoir manqué aux règles d’organisation interne en ne réalisant que 27 fiches de poste sur les 73 qui lui avaient été demandées.

Elle produit à l’appui de ce grief une copie du mail envoyé le 9 mai 2017 à M. A concernant 'la prépa demain-entaillage', ainsi libellé :

'SIO- 73 ouvertes, 27 traitées (37%) difficulté à absorber le flux et du coup prioriser/ piloter Messaoud, pas de dispo'.

M. Denis conteste ce grief en faisant valoir, sans être contredit sur ce point, ne pas avoir été en charge de l’élaboration de ces fiches mais seulement de leur validation au titre de laquelle il ne lui est rien reproché.

Ce grief n’est pas matériellement établi.

Sur le 5e grief lié à l’absence d’intégration du risque

La lettre de licenciement énonce à ce titre : 'l’absence d’intégration du risque en lien avec l’organisation à mettre en place suite à un problème d’approvisionnement et à la réception d’huisseries non jointes,

Ainsi, pour pouvoir produire nous avons été contraints de mettre en place une équipe pour poser les joints manquants, sachant qu’avant la mise en place de cette équipe, il fallait procéder à une analyse de risque dynamique car c’est une activité que nous ne réalisons pas habituellement.

Là encore le risque n’a pas été identifié au mépris des règles élémentaires de sécurité et de formation à la sécurité au poste de travail'.

La SAS employeur reproche à M. X de ne pas avoir anticipé et mis en place les actions de sécurité nécessaires à la suite de la livraison au mois de mai 2017 d’huisseries exceptionnellement non jointées.

Elle ne produit toutefois aucune pièce à l’appui de ce grief contesté par M. Denis qui justifie s’être immédiatement préoccupé de la difficulté par la production aux débats de deux mails en date des 12 mai 2017 et 15 mai 2017 (alors même qu’il était en congé de maladie) dans lesquels il pose les questions concernant le nombre d’huisseries concernées pour 'dimensionner les équipes et les postes de travail en conséquence’ et alerte sur le fait que 'ses ateliers en sont pas prévus pour ça', et avoir été ensuite dans l’impossibilité de finaliser la mise en oeuvre de ce processus industriel d’intégration des joints.

Aucun manquement contractuel ne peut dés lors être retenu à l’encontre du salarié à ce titre.

Sur le 6e grief lié à l’absence de l’optimisation de la défonceuse

La lettre de licenciement énonce à ce titre :

'S’agissant de l’optimisation de la défonceuse, le bureau méthodes était intervenu à partir de novembre 2016 pour apporter son expertise sur l’optimisation de cette machine pour le rainurage des panneaux Groove.

Il vous incombait de finaliser l’organisation, ce qui n’est toujours pas réalisé, malgré l’urgence qu’il y avait d’agir'.

M. Denis indique en défense qu’il est à l’initiative de l’intervention du bureau Méthode et du plan d’action l’optimisation de la production de la machine existante et le développement d’une réflexion sur la mise en place d’une machine double avec retournement qui devait remplacer la défonceuse en place, au début de l’année 2017.

S’il ne justifie pas des actions qu’il dit avoir entreprises en ce sens depuis cette date, la SAS employeur n’allègue ni ne justifie elle-même ni de relances à ce titre ni du préjudice qui en aurait résulté pour le bon fonctionnement de l’entreprise.

Le grief invoqué à l’encontre du salarié, outre qu’il est prescrit n’est en tout état de cause pas constitutif d’une faute susceptible de justifier une mesure de licenciement et encore moins un licenciement pour faute grave.

Il résulte de l’ensemble de ces éléments que la SAS employeur ne justifie pas d’agissements fautifs susceptibles de justifier un licenciement disciplinaire et encore moins un licenciement pour faute grave.

Le jugement déféré sera par conséquent confirmé en ce qu’il a dit le licenciement prononcé à l’encontre de M. Denis dépourvu de cause réelle et sérieuse.

Sur les conséquences financière du licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse

Sur le salaire de référence

Le salaire de référence correspond à la moyenne des salaires bruts d’un travailleur primes et bonus inclus sur les douze derniers mois.

La SAS employeur soutient que M. Denis prend un salaire de référence erroné dans ses demandes dés lors que la moyenne des salaires perçus par ce dernier les douze derniers mois s’élève à la somme de 3.419 euros et non à celle de 3.898 euros brut comme il le prétend et comme retenu par le premier juge.

Il résulte des fiches de paye produites aux débats que la moyenne des rémunérations brutes perçues par M. Denis a été de 3.419 euros sur les douze derniers mois.

Il est toutefois fondé à se prévaloir de la fixation contractuelle à son profit d’un salaire forfaitaire annuel brut de 46.500 euros payable en douze mensualités égales, de sorte que c’est à bon droit que les premiers juges ont retenu un salaire mensuel brut de 3.898, 47 euros comme salaire de référence.

Sur la mise à pied conservatoire

Si les motifs de licenciement ne constituent pas une faute grave, l’employeur doit verser au salarié le salaire correspondant à la mise à pied prononcée à titre conservatoire.

La période de mise à pied conservatoire s’est étendue du 30 juin au 13 juillet 2017, soit 13 jours de

travail et il convient de confirmer l’allocation de la somme de 1.979, 13 euros au titre du rappel de salaire sur mise à pied et de celle de 197, 91 euros au titre des congés-payés y afférents.

En conséquence il convient de confirmer le jugement entrepris de ce chef.

Sur les indemnités de rupture

Il convient confirmer le jugement entrepris de ces chefs.

Sur le montant des dommages et intérêts

Aux termes de l’article L1235-3 du code du travail, dans sa version applicable au présent litige, si le licenciement d’un salarié survient pour une cause qui n’est pas réelle et sérieuse, le juge octroie au salarié une indemnité à la charge de l’employeur dont le montant ne peut être inférieur au salaire des six derniers mois.

Agé de 54 ans au moment de son licenciement, M. X bénéficiait d’une ancienneté de 2 ans et 6 mois dans une entreprise employant plus de onze salariés et percevait un salaire mensuel moyen brut de 3.

Il est fondé à se prévaloir de ce qu’il a du transférer son domicile familial de la Bretagne à la Corrèze pour occuper un emploi au sein de la SA Jeld Wen en 2015 après 5 années de recherches consécutives à un licenciement pour motif économique intervenu en 2010 et avoir du mettre fin à son installation après une période d’un peu plus de deux ans seulement.

Il justifie avoir perçu des allocations de retour à l’emploi de la part de Pôle emploi, du 1er octobre 2018 au 28 février 2019 à hauteur de 68, 34 euros par jour pendant 151 jours, correspondant à 2.050 euros par mois et à hauteur de 10.657, 08 euros pour la période allant du 3 octobre 2018 au 6 mars 2019, correspondant à 1.776 euros par mois.

Il produit également les pièces justificatives de ce que, ingénieur de formation, il n’a pas pu retrouver un emploi équivalent à celui qu’il a injustement perdu et de ce qu’il a été contraint d’entreprendre les démarches nécessaires à une troisième reconversion professionnelle en créant une SARL chargée de la gestion d’un terrain de camping, imposant ainsi à sa famille dont son épouse retraitée de l’artisanat, de nouveaux bouleversements générateurs d’un préjudice certain.

Compte tenu de l’ensemble de ces éléments son préjudice sera plus exactement réparé par une somme de 35.000 euros à titre de dommages et intérêts.

Le jugement déféré sera par conséquent réformé en ce sens.

Sur le sort des dépens et l’application de l’article 700 du code de procédure civile

L’issue du litige conduit à confirmer le jugement entrepris de ces chefs et à condamné la SAS employeur outre aux dépens d’appel, à verser à Monsieur B X une indemnité de 1.500 euros au titre de ses frais irrépétibles d’appel.

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

Statuant par arrêt contradictoire, en dernier ressort, par mise à disposition au greffe, après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Confirme le jugement rendu le 11 octobre 2018 par le conseil de prud’hommes de Tulle en toutes ses dispositions à l’exception de celle afférente au montant des dommages et intérêts alloués à Monsieur B X au titre de son licenciement sans cause réelle et sérieuse,

Statuant de nouveau de ce seul chef infirmé :

Condamne la SAS Jeld WEN France à payer à Monsieur B X la somme de 35.000 euros au titre de son licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

Déboute la SA Jeld Wen France de sa demande présentée au titre de l’article 700 du code de procédure civile;

La condamne, outre aux dépens d’appel, à verser à Monsieur B X une indemnité de 1.500 euros au titre de ses frais irrépétibles d’appel.

LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,

H I. J K

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