Cour d'appel de Lyon, Chambre sociale a, 23 mars 2010, n° 09/01577

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Lyon, ch. soc. a, 23 mars 2010, n° 09/01577
Juridiction : Cour d'appel de Lyon
Numéro(s) : 09/01577
Décision précédente : Conseil de prud'hommes de Lyon, 23 février 2007
Dispositif : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée

Sur les parties

Texte intégral

AFFAIRE PRUD’HOMALE : COLLÉGIALE

R.G : 09/01577

SARL AVVENS AUDIT ET CONSEIL

C/

Y

APPEL D’UNE DÉCISION DU :

Conseil de Prud’hommes de LYON

du 24 Février 2007

RG : F 07/04096

COUR D’APPEL DE LYON

CHAMBRE SOCIALE A

ARRÊT DU 23 MARS 2010

APPELANTE :

SARL AVVENS AUDIT ET CONSEIL

XXX

XXX

XXX

représentée par Me Olivier LACROIX, avocat au barreau de LYON

INTIMÉE :

X Y

née le XXX à XXX

XXX

XXX

XXX

comparant en personne, assistée de Me Karine THIEBAULT, avocat au barreau de LYON substitué par Me Lionel THOMASSON, avocat au barreau de LYON

(bénéficie d’une aide juridictionnelle Totale numéro 2009/008919 du 28/05/2009 accordée par le bureau d’aide juridictionnelle de LYON)

DÉBATS EN AUDIENCE PUBLIQUE DU : 09 Février 2010

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :

Didier JOLY, Président

Danièle COLLIN-JELENSPERGER, Conseiller

Hervé GUILBERT, Conseiller

Assistés pendant les débats de Sophie MASCRIER, Greffier.

ARRÊT : CONTRADICTOIRE

Prononcé publiquement le 23 Mars 2010, par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l’article 450 alinéa 2 du code de procédure civile ;

Signé par Didier JOLY, Président, et par Sophie MASCRIER, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

*************

Le 9 octobre 2006, la S.A.S. SCIENCES-U et la S.A.R.L. AVVENS AUDIT et CONSEIL ont conclu en faveur d’X Y une convention de formation au B.T.S. 'comptabilité et gestion des organisations’ dans le cadre d’un contrat de professionnalisation.

Cette formation de 1 100 heures couvrait la période du 12 octobre 2006 au 30 juin 2008.

X Y a ensuite été engagée par la S.A.R.L. AVVENS AUDIT et CONSEIL, dans le cadre d’un contrat de professionnalisation du 11 octobre 2006, pour occuper un emploi d’aide-comptable (niveau 5, coefficient 160) pendant la période du 10 octobre 2006 au 30 juin 2008, moyennant un salaire mensuel brut de 1 005 € pour 35 heures hebdomadaires de travail.

Son tuteur était Gwladys PAULET qui a quitté l’entreprise en 2007 sans qu’un nouveau tuteur soit désigné.

Hors contrat de professionnalisation, X Y suivait également une formation destinée à lui permettre d’obtenir le diplôme préparatoire aux études comptables et financières (D.P.E.C.F.) à la Faculté de Lyon III.

Par lettre remise en main propre le 11 juin 2007, la S.A.R.L. AVVENS AUDIT et CONSEIL a convoqué X Y le 18 juin 2007 en vue d’un entretien préalable à la rupture anticipée de son contrat de professionnalisation et l’a mise à pied à titre conservatoire.

Par lettre recommandée du 25 juin 2007, elle lui a notifié la rupture anticipée de son contrat de travail pour faute grave en raison des faits suivants :

  • absence du poste de travail les mardi 30 et mercredi 31 mai 2007 sans autorisation d’absence préalable et sans justification a posteriori,
  • absence sans autorisation les 4, 5 et 6 juin 2007 en raison d’examens scolaires n’entrant pas dans le champ du contrat de professionnalisation, la salariée s’étant bornée à en informer verbalement une collègue le vendredi 1er juin et à laisser une note dans une 'bannettte',
  • infraction aux règles les plus élémentaires de discipline et de sécurité en venant sur son lieu de travail le 8 juin 2007 accompagnée de son concubin qui a agressé et menacé verbalement une salariée de la S.A.R.L. AVVENS AUDIT et CONSEIL.

Le 14 novembre 2007, X Y a saisi le Conseil de prud’hommes de LYON.

* * *

LA COUR,

Statuant sur l’appel interjeté le 9 mars 2009 par la S.A.R.L. AVVENS AUDIT et CONSEIL du jugement rendu le 24 février 2009 par la formation de départage du Conseil de prud’hommes de LYON (section activités diverses) qui a :

1°) dit et jugé le licenciement d’X Y abusif,

2°) condamné la S.A.R.L. AVVENS AUDIT et CONSEIL à payer à X Y les sommes suivantes :

— rappel de salaire pour heures supplémentaires 402, 95 €

— congés payés afférents 40, 27 €

lesdites sommes avec intérêts au taux légal à compter du 14 novembre 2007,

— dommages-intérêts pour rupture abusive du contrat de professionnalisation 12 000, 00 €

3°) ordonné l’exécution provisoire du jugement dans toutes ses dispositions,

4°) débouté les parties de leurs autres demandes ;

Vu l’ordonnance de référé du 20 avril 2009 par laquelle le délégué du premier président a débouté la S.A.R.L. AVVENS AUDIT et CONSEIL de sa demande d’arrêt de l’exécution provisoire,

Vu les conclusions régulièrement communiquées au soutien de ses observations orales du 9 février 2010 par la S.A.R.L. AVVENS AUDIT et CONSEIL qui demande à la Cour de :

— réformer le jugement entrepris,

— statuant à nouveau, constater que la rupture du contrat de professionnalisation d’X Y est justifiée par une faute grave,

— débouter en conséquence X Y de l’intégralité de ses demandes, fins et prétentions,

— constater qu’X Y ne justifie pas des heures supplémentaires qu’elle allègue tant sur le principe que sur le quantum,

Infiniment subsidiairement :

— dire et juger qu’X Y ne saurait être créancière au titre de ses prétendues heures supplémentaires d’une somme supérieure à 136, 74 € brut outre 13, 67 € brut à titre de congés payés afférents,

— débouter cette dernière de ses plus amples demandes,

En toute hypothèse :

— condamner X Y au paiement de la somme de 2 000 € en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;

Vu les conclusions régulièrement communiquées au soutien de ses observations orales par X Y qui demande à la Cour de confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions, sauf à porter à :

—  486, 68 € le montant des sommes allouées à X Y à titre de rappel d’heures supplémentaires,

—  48, 66 € la somme allouée à titre de congés payés sur heures supplémentaires,

outre intérêts de droit au taux légal à compter de la demande ;

Sur les motifs de la rupture anticipée du contrat de professionnalisation :

Attendu qu’il résulte des dispositions de l’article L 1243-1 du code du travail, que sauf accord des parties, le contrat à durée déterminée ne peut être rompu avant l’échéance du terme qu’en cas de faute grave ou de force majeure ;

Attendu qu’il résulte des dispositions combinées des articles L 1232-1, L 1232-6, L 1234-1 et L 1235-1 du code du travail que devant le juge, saisi d’un litige dont la lettre de rupture fixe les limites, il incombe à l’employeur qui a notifié à un salarié la rupture anticipée d’un contrat à durée déterminée pour faute grave, d’une part d’établir l’exactitude des faits imputés à celui-ci dans la lettre, d’autre part de démontrer que ces faits constituent une violation des obligations découlant du contrat de travail ou des relations de travail d’une importance telle qu’elle rend impossible le maintien de ce salarié dans l’entreprise ;

Qu’en l’espèce, il est indifférent qu’X Y ait eu ou non connaissance de la note interne de janvier 2002 relative aux demandes d’absence dès lors que toute absence prévisible du salariée pendant ses heures habituelles de travail implique une autorisation préalable de son employeur, et toute maladie un justificatif produit a posteriori, dans le délai prévu par la convention collective applicable ; que l’article 7.2 de la convention collective nationale des cabinets d’experts-comptables a fixé ce délai à trois jours ; qu’X Y met en relation son absence des 30 et 31 mai 2007 avec une pathologie oculaire pour laquelle elle avait été reçue en consultation le 14 mai à l’hôpital Z A ; qu’elle communique une attestation en ce sens de son concubin H-I J qui certifie qu’il a contacté la S.A.R.L. AVVENS AUDIT et CONSEIL pour l’avertir du motif de l’absence d’X Y ; que le lien entre l’absence litigieuse et les pièces médicales n°16 et n°17 de l’intimée reste cependant à confirmer ; qu’en effet, la proximité de H-I J par rapport à X Y, et sa propension à s’immiscer dans la vie professionnelle et universitaire de sa compagne, le cas échéant en se faisant passer pour son tuteur, conduisent la Cour à écarter l’attestation qui constitue la pièce n°12 de l’intimée ; qu’il est d’ailleurs difficile d’admettre que les troubles visuels allégués n’aient pas connu pendant deux jours une rémission permettant à celle-ci de téléphoner à son employeur ; que l’absence des 30 et 31 mai est donc fautive, même si elle ne pouvait justifier à elle seule la rupture du contrat de professionnalisation ; que pour ce qui concerne les absences des 4, 5 et 6 juin 2007 pour des examens universitaires sans relation avec la formation ayant donné lieu à la conclusion du contrat de professionnalisation, X Y ne justifie pas de l’autorisation préalable et nécessaire de la S.A.R.L. AVVENS AUDIT et CONSEIL ; que la salariée s’est bornée à donner avis au cabinet AVVENCE, oralement puis par écrit, de son absence prochaine ; qu’elle produit seulement la photocopie du recto de sa convocation aux examens, ce qui ne permet pas de connaître la date de réception de celle-ci, en tout cas très antérieure à l’information qu’elle en a donnée le 1er juin au cabinet AVVENS AUDIT et CONSEIL ; que le 8 juin 2007 à 16 heures 30, X Y est revenue chercher ses tickets-restaurant et, comme B C, en mission d’intérim au cabinet, lui reprochait de n’avoir pas communiqué ses dates d’examen, elle a quitté les lieux après avoir vainement tenté de rencontrer H-K L, expert-comptable ; que peu après, elle est revenue en compagnie de H-I J ; qu’il ressort d’une mention faite en main-courante par B C et de l’attestation de D E, responsable d’agence MANPOWER, à laquelle B C s’est confiée, que H-I J a pénétré avec X Y dans le bureau de B C, a bloqué la porte et a déclaré à celle-ci sur un ton menaçant que la prochaine fois, cela se passerait mal ; que l’agitation provenant du hall d’entrée a fait sortir de son bureau H-K L qui a dû recevoir X Y et son compagnon pour tenter d’apaiser la situation ; que le Conseil de prud’hommes a exonéré à tort X Y de toute responsabilité dans l’esclandre du 8 juin 2007 ; qu’en effet, selon l’attestation de F G, responsable pédagogique au centre de formation Sciences-U, un incident similaire s’était produit à l’automne 2006 ; qu’à la suite de son exclusion d’un cours de comptabilité, X Y avait quitté l’établissement, puis elle était revenue en fin de matinée avec son compagnon ; qu’une discussion animée s’était ensuivie avec le professeur concerné et le responsable pédagogique de l’époque ; que la répétition d’incidents similaires ne laisse pas de doute sur le fait qu’X Y cherche le renfort intempestif de son ami lorsqu’elle se trouve en difficulté, aggravant ainsi les conséquences de sa faute initiale ;

Qu’il résulte des pièces et des débats que les fautes visées dans la lettre de rupture du 25 juin 2007 sont établies ; qu’en s’inscrivant dans la continuité des absences non autorisées des 30, 31 mai, 4, 5 et 6 juin, le trouble apporté dans le fonctionnement du cabinet AVVENS AUDIT et CONSEIL par l’irruption tapageuse d’X Y et de H-I J dans le bureau de B C le 8 juin 2007, conduit au constat définitif de l’incapacité de la salariée à se plier aux contraintes qu’implique l’exécution d’un contrat de travail ; que l’employeur était donc fondé à considérer que la rupture anticipée du contrat de professionnalisation était justifiée par un ensemble de faits, constitutif d’une faute grave ; que le jugement entrepris sera par conséquent infirmé ;

Sur la demande de rappel d’heures supplémentaires :

Attendu qu’aux termes de l’article L 3171-4 du code du travail, en cas de litige relatif à l’existence ou au nombre d’heures de travail accomplies, le juge forme sa conviction au vu des éléments que l’employeur doit lui fournir pour justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié et de ceux fournis par le salarié à l’appui de sa demande ; que le moyen pris de ce qu’X Y ne justifie pas, tant sur le principe que sur le quantum, des heures supplémentaires qu’elle allègue est donc inopérant ;

Qu’en l’espèce, X Y avait fondé en première instance sa demande de rappel de salaire pour heures supplémentaires sur une extrapolation à l’ensemble de la relation de travail d’un décompte moyen de son temps de travail à partir de son journal d’activité du 1er janvier au 31 mars 2007 ; qu’en cause d’appel, après avoir exploité les données tirées du journal d’activité du 25 octobre 2006 au 11 juin 2007, la S.A.R.L. AVVENS AUDIT et CONSEIL a établi et communiqué un tableau de la durée hebdomadaire de travail d’X Y (pièce n°19) ; que ce tableau intègre, pour l’ensemble de la période, tous les paramètres d’appréciation du temps de travail effectif de la salariée, tant au centre de formation (cours, pauses, absences) qu’au cabinet (jours fériés, jours de réduction du temps de travail, absences) ; qu’X Y ne trouve rien à opposer à ce décompte ;

Qu’en conséquence, le montant du rappel de salaire pour heures supplémentaires alloué par le Conseil de prud’hommes sera réduit à 136, 74 € ; que les congés payés incidents s’élèvent à 13, 67 € ;

Sur les frais irrépétibles :

Attendu qu’il est équitable de laisser chacune des parties supporter les frais qu’elle a exposés, tant en première instance que devant la Cour, et qui ne sont pas compris dans les dépens ;

PAR CES MOTIFS,

Reçoit l’appel régulier en la forme,

Confirme le jugement entrepris en ce qu’il a dit et jugé qu’X Y n’avait pas été rémunérée de la totalité de ses heures supplémentaires et condamné la S.A.R.L. AVVENS AUDIT et CONSEIL aux dépens de première instance, à recouvrer suivant les règles qui régissent l’aide juridictionnelle,

Infirme le jugement entrepris pour le surplus,

Statuant à nouveau :

Condamne la S.A.R.L. AVVENS AUDIT et CONSEIL à payer à X Y :

  • la somme de cent trente-six euros et soixante-quatorze centimes (136, 74 €) à titre de rappel de salaire pour heures supplémentaires,
  • la somme de treize euros et soixante-sept centimes (13, 67 €) au titre des congés payés afférents,

ces sommes avec intérêts au taux légal à compter du 27 novembre 2007, date de réception de la convocation devant le bureau de conciliation ;

Dit que la rupture anticipée du contrat de professionnalisation d’X Y par la S.A.R.L. AVVENS AUDIT et CONSEIL est justifiée par une faute grave,

En conséquence, déboute X Y du surplus de ses demandes,

Dit qu’il n’y a pas lieu de faire application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

Condamne X Y aux dépens d’appel.

Le greffier Le Président

S. MASCRIER D. JOLY

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