Cour d'appel de Lyon, 18 décembre 2013, n° 13/01465

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Lyon, 18 déc. 2013, n° 13/01465
Juridiction : Cour d'appel de Lyon
Numéro(s) : 13/01465
Décision précédente : Conseil de prud'hommes de Lyon, 30 janvier 2013, N° F11/03139

Texte intégral

AFFAIRE PRUD’HOMALE

A

R.G : 13/01465

B

C/

XXX

APPEL D’UNE DÉCISION DU :

Conseil de prud’hommes – Formation de départage de LYON

du 31 Janvier 2013

RG : F 11/03139

COUR D’APPEL DE LYON

CHAMBRE SOCIALE A

ARRÊT DU 18 DECEMBRE 2013

APPELANT :

C B

né le XXX à XXX

XXX

69124 COLOMBIER-SAUGNIEU

comparant en personne, assisté de Me Marie -françoise TARRAZI de la SELARL QUARTES SOCIAL, avocat au barreau de LYON

INTIMÉE :

XXX

XXX

XXX

représentée par Me Marianne MALBEC de la SELARL CLEMENT MALBEC CONQUET, avocat au barreau de NARBONNE

DÉBATS EN AUDIENCE PUBLIQUE DU : 16 Octobre 2013

Présidée par Agnès THAUNAT, Conseiller magistrat A, (sans opposition des parties dûment avisées) qui en a rendu compte à la Cour dans son délibéré, assistée pendant les débats de Sophie MASCRIER, Greffier.

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

— Didier JOLY, président

— Mireille SEMERIVA, conseiller

— Agnès THAUNAT, conseiller

ARRÊT : CONTRADICTOIRE

Prononcé publiquement le 18 Décembre 2013 par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l’article 450 alinéa 2 du code de procédure civile ;

Signé par Didier JOLY, Président et par Sophie MASCRIER, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

********************

EXPOSE DU LITIGE :

M. C B a été engagé par la XXX en qualité de chauffeur', catégorie OQ2, au coefficient de 170 suivant contrat écrit à durée indéterminée du 7 septembre 2004, à compter du 13 septembre 2004 avec une reprise d’ancienneté à compter du 13 juin 2004.

La première page de ce contrat est imprimé sur du papier à en-tête de la société et en bas de page figurent la liste des 17 usines de la société':

XXX XXX

XXX

XXX

XXX

XXX XXX

XXX

28310 Le Puiset 02 37 90 11 18 13310 St-Martin-de-Crau 04 90 47 98 20

XXX

XXX 85240 St-Hilalre 02 51 52 25 12

XXX

XXX

Le premier paragraphe du contrat précise que la XXX engage M. C B ''à notre usine de VILLETTE D’ANTON (38)'.

En page deux du contrat, une clause est rédigée de la façon suivante':'«'la société se réserve le droit de muter M. Y dans toutes les usines où elle exerce son activité'».

La rémunération mensuelle brute moyenne de M. C B était fixée en dernier lieu à 1.800€.

Par lettres recommandées avec accusé de réception du 19 novembre 2009 , la XXX lui a fait connaître qu’en application de la clause de mobilité figurant dans son contrat de travail, à compter du 1er janvier 2010, ledit contrat était ''transféré à l’usine de THOUARS (79)'. Ce courrier précisait':'«'en effet, pour le bon fonctionnement de l’entreprise , nous devons adapter nos ressources entre les différents établissement. Après vous avoir proposé un poste en production à l’usine de VILETTE d’ANTHON, poste que vous avez refusé, nous n’avons pas d’autre solution que de transférer votre contrat sur une autre usine. Vous occuperez la fonction de chauffeur, et vos conditions de salaire et statuts actuels sont bien sûrs inchangés (…)'»

Par courrier en date du 2 décembre 2009, M. C B , a refusé cette mutation.

Par lettre recommandée avec accusé de réception du 8 décembre 2009', la XXX l’a convoqué à un entretien préalable à son éventuel licenciement fixé au 18 décembre 2009 suivant puis, par courrier recommandé avec accusé de réception en date du 22 décembre 2009, lui a signifié son licenciement dans les termes suivants :

«Comme suite à votre entretien du 18 décembre 2009 avec Monsieur Z, nous vous notifions par la présente votre licenciement au motif suivant : refus de respecter la clause de mobilité contenue dans votre contrat de travail.

Vous avez signé le 7 septembre 2004 un contrat de travail à durée indéterminée à compter du 13 septembre 2004.

Ce contrat contenait une clause de mobilité aux termes de laquelle vous pouvez être muté dans toutes les usines où la SEAC exerce son activité au jour de la signature du contrat de travail, c’est à dire sur les sites que liste le contrat (page 1 du contrat).

Par courrier du 19 novembre 2009, nous vous avons informé de votre transfert en tant que chauffeur sur le site de THOUARS (79), à compter du 1" janvier 2010.

Le poste de chauffeur était vacant depuis le mois de juillet 2009.

Compte tenu des difficultés à recruter un chauffeur, nous avons activé votre clause de mobilité afin d’équilibrer les besoins des sites de Villette et de Thouars.

Ce transfert était rendu nécessaire au bon fonctionnement de l’entreprise, et ne modifiait en rien vos conditions de salaire et de statut, aucun élément de votre contrat n’était modifié.

Par courrier du 2 décembre 2009, vous nous avez informé de votre refus d’accepter ce transfert.

Lors de l’entretien du 18 décembre 2009, vos explications n’ont pas permis de modifier notre appréciation concernant les faits ci dessus exposés.

Nous considérons que vous refusez de respecter une clause prévue dans votre contrat de travail, et pour ce motif, nous vous notifions votre licenciement.

Votre préavis d’une durée de 2 mois, commencera à courir à réception de ce courrier.

Nous attirons votre attention sur le fait que pendant votre préavis vous restez tenu de l’ensemble des obligations de votre contrat de travail.

A la fin de votre contrat de travail nous vous ferons parvenir votre solde de tout compte, votre certificat de travail et votre attestation d’ASSEDIC.

Vous bénéficiez au titre du DIF d’un volume de 112 heures qui peut se traduire par le versement sur justificatifs d’une allocation qui devra être utilisée pour financer, en tout ou en partie et à votre initiative une action de bilan de compétences, de validation des acquis de l’expérience ou de formation.

Contestant cette mesure, M. C B a saisi le Conseil de prud’hommes de Lyon, section industrie qui en formation de départage, par jugement du 31 janvier 2013, a :

Déclaré le licenciement de Monsieur C B fondé sur une cause réelle et sérieuse,

En conséquence, l’a débouté de l’ensemble de ses demandes,

Débouté les parties de leurs demandes au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

Mis les dépens à la charge de Monsieur C B,

M. C B a interjeté appel de cette décision par déclaration du 22 mai 2013 .

Aux termes de ses conclusions régulièrement communiquées au soutien de ses observations orales du 16 octobre 2013 , il demande à la Cour de :

REFORMER le jugement de première instance rendu par le Conseil de prud’hommes de Lyon le 31 janvier 2013 ;

CONDAMNER la société SEAC GUIRAUD FRERES à payer à Monsieur B la somme de 20 000 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement abusif ;

CONDAMNER la société SEAC GUIRAUD FRERES à verser à Monsieur B la somme de 10 000 € à titre de dommages et intérêts supplémentaires pour le préjudice moral subi par Monsieur B ;

CONDAMNER la société SEAC GUIRAUD FRERES à la somme de 3 000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNER la société SEAC GUIRAUD FRERES aux entiers dépens.

Dans ses écritures régulièrement communiquées au soutien de ses observations orales du 16 octobre 2013, la XXX conclut ainsi :

CONFIRMER le jugement du 31 janvier 2013 en toutes ses dispositions;

CONDAMNER Monsieur B à régler à la SA SEAC GUIRAUD FRERES la somme de 2 000 € par application des dispositions de l’article 700 du CPC et DIRE qu’il supportera les entiers dépens de l’ instance.

MOTIFS DE LA DECISION :

Sur la validité de la clause de mobilité

Il est constant que pour être valable une clause de mobilité doit définir de façon précise la zone géographique dans laquelle elle doit s’appliquer.

En l’espèce, la clause de mobilité figurant en page 2 du contrat qui stipule que le salarié peut être muté «'dans toutes les usines où elle exerce son activité'», doit s’interpréter par rapport à la liste des usines de la société, inscrite en bas de la première page du dit contrat.

Le rapprochement de ces éléments, permet au salarié dès la signature du contrat', de connaître avec précision, le contenu de sa clause de mobilité et les usines où il est susceptible d’être affecté'.

Pendant toute la durée de l’exécution du contrat, l’étendue de la clause de mobilité reste déterminée par la liste des usines figurant au contrat de travail signé par les parties.

Dans ces conditions, il importe peu, que depuis lors, le nombre des usines a été augmenté'. Ceci n’a pas pour effet de rendre la clause de mobilité nulle compte tenu de son indétermination, mais seulement de restreindre l’étendue de cette clause en cas de fermeture d’usine.

Dès lors, la clause de mobilité ne peut être annulée, et le jugement entrepris doit être confirmé sur ce point.

Sur la mise en 'uvre de cette clause

La clause de mobilité est présumée être mise en 'uvre de bonne foi'. Il en résulte, qu’il incombe au salarié d’établir qu’il n’en est pas ainsi et que la clause n’a pas été activée dans l’intérêt de l’entreprise.

Les besoins de l’entreprise devant être appréhendés dans la globalité de celle-ci, et envisagés, non seulement par rapport à ce qui était souhaitable pour le bon fonctionnement du site de départ, mais aussi en ce qui concerne celui d’arrivée.

En l’espèce M. C B fait valoir, que son employeur lui a notifié le 19 novembre 2009, sa mutation à l’usine de THOUARS, sise à 600 kms, au motif que le poste de chauffeur à THOUARS était vacant depuis le mois de juillet 2009 et que «'compte tenu des difficultés de recruter un chauffeur, (la clause de mobilité avait été activée) afin d’équilibrer les besoins des sites de Vilette et de Thouars'»', alors qu’il résulte du registre d’entrée et de sortie de l’usine de Thouars que le poste devenu vacant le 7 juillet 2009,(date du départ de E F), n’a été pourvu que le 5 septembre 2011 (date de l’embauche de M. G H), sans que la société ne justifie avoir proposé ce poste vacant à un autre chauffeur ou ne justifie de démarches pour chercher à recruter un chauffeur sur ce site.

L’employeur verse aux débats un courrier en date du 10 avril 2012 de Mme X, responsable des ressources humaines libellé de la façon suivante :'«'(') en 2009, l’usine de VILLETTE d’ANTHON comptait trois chauffeurs. Nous avons demandé à nos trois chauffeurs d’accepter l’alternative de ne pas conduire certains jours, et de renforcer les équipes de production ou sur le parc, selon les besoins. M. B a toujours refusé cette alternative contrairement à ses deux collègues. Il ne voulait pas avoir une autre activité que celle de chauffeur, même temporairement. En parallèle, sur l’usine de THOUARS, nous avions des difficultés à recruter un chauffeur': d’un point de vue national, nous avons constaté une pénurie de chauffeurs et des difficultés de recrutement importantes sur certaines régions, notamment sur l’usine de THOUARS'. Afin d’ajuster aux mieux les ressources, nous avons proposé le poste vacant à THOUARS à M. B, conformément à la clause de mobilité contenue dans le contrat de travail et compte tenu du fait qu’il n’acceptait pas même temporairement la non conduite. A ce jour l’usine de VILLETTE D’ANTHON ne compte plus qu’un seul chauffeur, l’usine de THOUARS également. Cet effectif est adapté au volume de transport actuel. (…)'».

Tout d’abord la cour constate que dans la liste des usines figurant en première page du contrat de travail, se trouvent les établissements de VILLETTE d’ANTON et de THOUARS'.

La cour relève qu’il résulte de ce courrier que le besoin en chauffeur de l’usine de VILETTE avait diminué, alors que l’usine de THOUARS avait besoin d’un chauffeur, car un poste restait non pourvu.

Cependant, c’est à juste titre que le salarié fait valoir que le poste de chauffeur vacant à THOUARS, et qui devait être pourvu par cette mutation au mois de janvier 2010, est resté près de vingt mois après cette date, vacant , sans que la XXX ne justifie de ses efforts pour le pourvoir, ainsi que le demandait M. C B'; et que dans ces conditions, la nécessité de pourvoir à bref délai le poste de THOUARS, n’existait pas.

En conséquence, M. C B établit que la clause de mobilité n’a pas été mise en 'uvre de bonne foi par la XXX'.

Dès lors, le licenciement de M. C B est dépourvu de motif réel et sérieux et ouvre droit à l’octroi de dommages-intérêts pour licenciement abusif.

En application de l’article 1235-'3 du code du travail, en cas de licenciement pour une cause qui n’est pas réelle et sérieuse, le salarié ayant plus de deux ans d’ancienneté et travaillant dans une entreprise employant habituellement plus de 11 salariés, peut prétendre à une indemnité qui ne peut être inférieure aux salaires des six derniers mois.

Agé de 45 ans à la date de rupture après 5 ans et 8 mois passé dans l’entreprise,

M. C B', était marié et père de quatre enfants âgés alors de 22 ans (née en XXX), 19ans (née en XXX), XXX et 9 mois (née en XXX) et 7 ans et 5 mois (née en XXX). Inscrit à Pôle emploi, il a effectué diverses missions d’intérim puis a été embauché par contrats à durée déterminée par la SARL TRANS EUROP EXPRESS', comme chauffeur livreur du 9 novembre 2010 au 31 décembre 2010'; du 28 avril 2011 au 14 mars 2011,'; du 17 mars 2011 au 30 avril 2011, puis par contrat à durée indéterminée le 1er mai 2011comme chauffeur livreur, moyennant un salaire de 1.452,99 €.

Son préjudice sera évalué compte tenu de ces éléments à la somme de 11.000 €.

Selon l’article L 1235-4 du code du travail dans les cas prévus aux articles L 1235-3 et L 1235-11 du même code, le juge ordonne le remboursement par l’employeur fautif aux organismes intéressés de tout ou partie des indemnités de chômage versées au salarié licencié, du jour de son licenciement au jour du jugement prononcé, dans la limite de six mois d’indemnités de chômage par salarié intéressé.

Sur le préjudice subi par le salarié du fait des pratiques abusives de l’employeur

M. C B soutient que la société SEAC GUIRAUD FRERES aurait mis en 'uvre des pratiques particulièrement abusives, brutales et vexatoires lors de la procédure en mettant tout en 'uvre pour lui faire quitter ses fonctions avec':

— une proposition d’affectation dans un poste d’ouvrier de production,

— une tentative de signature d’une rupture conventionnelle,

— la mise en 'uvre dans des conditions inacceptables d’une clause de mobilité illégale.

La cour relève que M. C B a refusé, comme il était en droit de le faire, la modification de son contrat de travail', pour un changement de fonctions'; que les conditions de la signature d’une rupture conventionnelle demeurent indéterminées, chacune des parties prétendant que l’autre serait à l’initiative de cette tentative de rupture conventionnelle, sans qu’aucune ne justifie de ses dires par des éléments extérieurs'; quant à la mise en 'uvre de la clause de mobilité, elle ne présente aucun caractère vexatoire, le salarié ayant bénéficié d’un délai d’un mois et dix jours pour regagner son nouveau poste, ce qui bien que bref, est suffisant. Par ailleurs, lors de son licenciement, M. C B a pu effectuer normalement son préavis.

Dès lors, il n’y a pas lieu d’accorder à M. C B de dommages-intérêts compte tenu des conditions de la rupture , aucune faute n’étant retenue à l’encontre de l’employeur.

Sur les autres demandes

La XXX qui succombe dans ses prétentions doit être condamné aux entiers dépens. L’équité commande de mettre à sa charge une indemnité au profit de M. C B en application de l’article 700 du code de procédure civile'.

PAR CES MOTIFS :

La Cour,

Réforme le jugement entrepris ,

Dit le licenciement sans cause réelle et sérieuse,

Condamne la XXX à payer à M. C B la somme de 11.000 € à titre de dommages-intérêts,

Ordonne le remboursement par la XXX à Pôle Emploi des indemnités de chômage versées au salarié licencié, du jour de son licenciement au jour du jugement prononcé, dans la limite de deux mois d’indemnités de chômage ;

Condamne la XXX à payer à M. C B la somme de 2 000 € en application de l’article 700 du code de procédure civile,

Condamne la XXX aux dépens de première instance et d’appel.

Le greffier Le Président

S. MASCRIER D. JOLY

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Textes cités dans la décision

  1. Code de procédure civile
  2. Code du travail
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