Cour d'appel de Lyon, 27 novembre 2014, n° 13/05796

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Lyon, 27 nov. 2014, n° 13/05796
Juridiction : Cour d'appel de Lyon
Numéro(s) : 13/05796
Décision précédente : Conseil de prud'hommes de Lyon, 16 juin 2013, N° F10/04083

Sur les parties

Texte intégral

AFFAIRE PRUD’HOMALE : COLLÉGIALE

R.G : 13/05796

SAS EXAPROBE

C/

Y

APPEL D’UNE DÉCISION DU :

Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de LYON

du 17 Juin 2013

RG : F 10/04083

COUR D’APPEL DE LYON

CHAMBRE SOCIALE B

ARRÊT DU 27 NOVEMBRE 2014

APPELANTE :

SAS EXAPROBE

XXX

XXX à XXX

XXX

représentée par Me Marc FORIN, avocat au barreau de PARIS

INTIMÉE :

C Y

née le XXX à XXX

XXX

69120 VAULX-EN-VELIN

représentée par Me Sophie MAYOL-GRÜTTER, avocat au barreau de LYON

PARTIES CONVOQUÉES LE : 16 Janvier 2014

DÉBATS EN AUDIENCE PUBLIQUE DU : 18 Septembre 2014

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :

Jean-Charles GOUILHERS, Président de chambre

Christian RISS, Conseiller

Vincent NICOLAS, Conseiller

Assistés pendant les débats de Evelyne DOUSSOT-FERRIER, Greffier.

ARRÊT : CONTRADICTOIRE

Prononcé publiquement le 27 Novembre 2014, par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l’article 450 alinéa 2 du code de procédure civile ;

Signé par Jean-Charles GOUILHERS, Président de chambre, et par Evelyne DOUSSOT-FERRIER, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

*************

Madame Y a été engagée pour une durée indéterminée à compter du 08 septembre 2008 en qualité d’assistante commerciale et d’administratrice de ventes par la société EXAPROBE ayant pour activité l’audit, le conseil et la fourniture de solutions technologiques en matière de systèmes d’information d’entreprises. En contrepartie de son travail, elle percevait sur 12 mois une rémunération mensuelle fixe d’un montant de 2.160 € brut.

Elle prétend que son embauche s’est inscrite dans le cadre d’un démarchage effectué par la société EXAPROBE auprès de l’un de ses clients au service duquel elle travaillait alors, au vu de son expérience dans l’exercice de fonctions similaires où elle avait été considérée particulièrement efficace.

Elle ajoute que, si les premiers mois de la relation de travail se sont agréablement déroulés, elle a rapidement fait l’objet d’une très lourde charge de travail imposée par son nouvel employeur, devant en outre assurer la formation au quotidien d’une nouvelle salariée recrutée, ce qui l’a amenée à alerter à différentes reprises sa hiérarchie sur sa surcharge de travail sans toutefois être écoutée, puis, épuisée, à être placée en arrêt maladie du 09 au 28 février 2010 pour « surmenage professionnel, anxio dépression » selon le certificat médical qu’elle verse aux débats.

La société EXAPROBE soutient pour sa part que Madame Y a manifesté des lacunes récurrentes dans la réalisation des différentes tâches qui lui étaient confiées, et que ses mises en garde n’ont pas permis d’y remédier.

Lors de sa reprise de travail, elle s’est vue remettre une convocation à un entretien préalable fixé au 10 mars 2010 en vue de son licenciement, accompagnée d’une dispense immédiate d’activité.

Elle précise avoir constaté, lorsqu’elle s’est présentée à cet entretien assistée d’un salarié de l’entreprise, que son poste de travail était occupé et que son caisson personnel, pourtant fermé à clé, avait été ouvert, vidé de son contenu et mis à la disposition d’une autre salariée.

Lors de l’entretien, son employeur a porté à sa connaissance de nombreuses erreurs prétendument commises dans son travail et ainsi relevées dans le compte-rendu rédigé à cette occasion par le conseiller salarié qui l’assistait :

— un mauvais suivi des commandes et des factures,

— un mauvais suivi ou une absence de suivi des réassurances,

— des erreurs de saisie des commandes dans le cadre de projets,

— un retour d’information insuffisant aux commerciaux sur les commandes projets,

— des erreurs « administratives » sur certaines factures,

— une absence de suivi sur les renouvellements de contrats de maintenance et l’absence d’action corrective.

Madame Y a immédiatement contesté de nombreuses informations qui lui étaient ainsi données, précisant toutefois qu’elle ne disposait d’aucun élément pour se justifier car ses accès au système informatique avaient été suspendus, qu’elle avait été « débordée » et qu’elle avait privilégié les saisies de commandes par rapport à la maintenance, réalisant ainsi toutes les facturations afin de « faire rentrer de la trésorerie dès le début de sa mission et qu’elle n’en a eu aucune reconnaissance ».

La société EXAPROBE a finalement procédé à son licenciement pour insuffisance professionnelle selon lettre recommandée avec accusé de réception du 17 mars 2010.

Après avoir contesté par lettre du 09 avril 2010 la rupture de son contrat de travail et dénoncé l’ouverture en son absence de son casier personnel, puis s’être vu répondre que son caisson, dont elle possédait la clé, n’avait jamais été forcé et qu’elle disposait de la possibilité de venir récupérer ses affaires personnelles si nécessaire, Madame Y a saisi le 17 juin 2013 la juridiction prud’homale de demandes tendant à faire déclarer son licenciement pour insuffisance professionnelle dépourvu de cause réelle et sérieuse et condamner la société EXAPROBE à lui payer les sommes de 35.000 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, 2.000 € à titre de dommages-intérêts en réparation de son préjudice consécutif à la violation de son casier personnel et 1.500 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

La société EXAPROBE s’est opposée à ses demandes et a sollicité reconventionnellement l’octroi d’un montant de 3.000 € en application de l’article 700 du code de procédure civile.

Par jugement rendu le 17 juin 2013, le conseil de prud’hommes de Lyon, section commerce, a :

Dit et jugé que le licenciement de Madame Y est sans cause réelle et sérieuse,

Condamné la société EXAPROBE à lui payer les sommes de :

—  13.000 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et pour le préjudice subi du fait de la violation de son casier;

—  850 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile;

Fixé la moyenne de ses salaires à 2.160 €;

Ordonné l’exécution provisoire de droit dans la limite maximum de neuf mensualités calculées sur la moyenne des trois derniers mois de salaire brut;

Ordonné le remboursement par l’employeur aux organismes intéressés des indemnités de chômage versées à la salariée du jour de son licenciement au jour du jugement dans la limite de trois mois d’indemnités de chômage;

Débouté la société EXAPROBE de sa demande reconventionnelle et condamné cette dernière aux dépens.

Par lettre recommandée en date du 10 juillet 2013 enregistrée le lendemain au greffe, la société EXAPROBE a interjeté appel de ce jugement dont elle demande l’infirmation par la cour en reprenant oralement à l’audience du 18 septembre 2014 par l’intermédiaire de son conseil les conclusions récapitulatives qu’elle a fait déposer ce jour et auxquelles il est expressément renvoyé pour l’exposé de ses prétentions et moyens en application de l’article 544 du code de procédure civile, et tendant à :

— Débouter Madame Y de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions;

— La condamner au paiement de la somme de 3.000 € en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens.

Madame Y a pour sa part fait reprendre à cette audience par l’intermédiaire de son conseil les conclusions en réponse qu’elle a fait déposer le 22 juillet 2014 et auxquelles il est pareillement référé pour l’exposé de ses prétentions et moyens, aux fins de voir :

— Confirmer le jugement attaqué en ce qu’il a jugé que le licenciement pour insuffisance professionnelle prononcé à l’encontre de Madame Y ne repose pas sur une cause réelle et sérieuse,

— Condamner la société EXAPROBE à verser à Madame Y la somme de 35.000 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement dénué de cause réelle et sérieuse,

— Constater que Madame Y rapporte la preuve que le caisson contenant ses effets personnels fermé à clé et mis à sa disposition par la société EXAPROBE a été forcé et vidé par cette dernière afin de le mettre à la disposition de la salarié la remplaçant dans ses fonctions,

— Réformer le jugement attaqué en ce qu’il a rejeté sa demande de dommages-intérêts pour violation du casier privatif,

— Condamner la société EXAPROBE à verser à Madame Y la somme de 2.000 € à titre de dommages-intérêts pour le préjudice subi du fait de la violation de son casier,

— Confirmer le jugement attaqué en ses autres dispositions,

Y ajoutant,

— Condamner la société EXAPROBE à verser à Madame Y la somme de 2.000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

— Condamner la société EXAPROBE aux entiers dépens.

SUR CE,

La Cour,

Attendu que Madame Y a été licenciée par la société EXAPROBE pour insuffisance professionnelle selon lettre recommandée avec accusé de réception du 17 mars 2010 motivée par la persistance d’erreurs répétées dans l’exécution de sa mission d’administration des ventes en dépit des entretiens et des mises en garde qui lui avaient été adressées, ses erreurs ayant eu des répercussions tant internes qu’externes vis-à-vis des clients et des fournisseurs et généré d’importantes perturbations dans le bon fonctionnement de la société ;

Attendu que, dans les écritures qu’elle a fait déposer devant la cour, la société EXAPROBE reconnaît toutefois avoir recruté Madame Y en raison de son expérience dans des fonctions similaires au service d’un précédent employeur, admettant ainsi qu’elle avait pu apprécier ses qualités et compétences professionnelles alors qu’elle travaillait dans l’entreprise de l’un de ses fournisseurs ;

que si son contrat de travail comportait une période d’essai d’une durée d’un mois, celle-ci n’a pas été renouvelée, ce qui tend à démontrer que la société EXAPROBE n’avait, au début de la relation de travail, aucun reproche à formuler sur la qualité de son travail ;

qu’elle n’a ensuite été destinataire d’aucun avertissement écrit ou d’une seule mise en garde officielle que lui aurait adressé son employeur pendant les 18 mois de la relation de travail jusqu’à l’engagement de la procédure de licenciement ;

que sa convocation à l’entretien préalable à son licenciement fait immédiatement suite à son arrêt maladie pour surmenage et syndrome anxio dépressif selon les termes du certificat médical ;

Attendu que la société EXAPROBE reproche précisément à la salariée :

des erreurs dans le passage de commandes fournisseurs, la société EXAPROBE citant le renouvellement par Madame Y du matériel de maintenance du système d’information du Muséum d’Histoire Naturelle dont elle a fait l’acquisition tardivement et auprès d’un fournisseur qui a livré du matériel posant des problèmes d’installation, alors qu’elle aurait du le faire auprès d’un autre distributeur spécialisé de matériel pour réseaux informatiques avec lequel il existait un partenariat;

des erreurs répétées dans le suivi et la saisie de prises de commandes, ayant entraîné des retards dans l’exécution des contrats et des oublis de facturation qui ont affecté les commissionnements des ingénieurs commerciaux qui s’en sont plaints, et pour lesquelles le responsable des agences Rhône-Alpes de la société EXAPROBE a été contraint d’intervenir;

une absence de suivi de certains contrats, tels le renouvellement du contrat MBDA qui n’a pas été effectué dans le délai et a entraîné sa perte, ou celui PAGES JAUNES qui n’est intervenu qu’après que le client ait été confronté au blocage d’une partie de son système d’information;

des carences dans le suivi des affaires facturées, en commettant des erreurs sur les prix de vente unitaires et des oublis, ou en effectuant une facturation avec deux mois de retard, au détriment de la trésorerie de la société ;

des carences pour renseigner les commerciaux et les clients sur les délais de livraison des matériels commandés;

des erreurs de facturation signalées par les clients qui en étaient destinataires;

l’absence de suivi des échéances de renouvellement des contrats récurrents de maintenance de licences;

Attendu que, pour contester les griefs ainsi formulés à son encontre, Madame Y relève que les courriers électroniques prétendument justificatifs produits par la société EXAPROBE ne comportent jamais ses réponses, son employeur ne communiquant que ses propres envois alors qu’elle-même se trouve dans l’impossibilité d’y apporter la moindre contradiction ;

que la société EXAPROBE objecte pour sa part que la salariée ne saurait s’exonérer de la règle posée par l’article L. 1235-1 du code du travail et de la jurisprudence selon laquelle la preuve du caractère réel et sérieux du licenciement, ou la preuve contraire, n’incombe spécialement à l’une ou l’autre des parties, et que Madame Y est en mesure de répondre des faits énoncés dans la lettre de licenciement qui lui avaient été exposés préalablement lors de l’entretien du 10 mars 2010; qu’en outre, contrairement aux dires de la salariée, elle a produit aux débats plusieurs de ses courriers électroniques répondant aux demandes qui lui étaient présentées ;

Mais attendu que Madame Y, qui avait été en arrêt maladie et s’est vue remettre une convocation pour l’entretien préalable à son licenciement le jour de sa reprise du travail, a été dispensée le même jour de toute activité professionnelle par son employeur, de sorte qu’elle n’a pu avoir accès à son ordinateur; que ses mots de passe ont en outre été changés ainsi que l’a reconnu son employeur au cours de l’entretien préalable à son licenciement, pour le motif allégué que « personne n’accède à son compte »,et par conséquent pas même elle ;

que, dans ces conditions, Madame Y a été privée par son employeur de tout moyen utile pour préparer sa défense, et à tout le moins démontrer l’existence du surmenage à l’origine de son arrêt de travail quand bien même le certificat médical d’arrêt de travail mentionne cette cause ;

qu’en outre, la lettre de convocation à l’entretien préalable ne contient l’énonciation d’aucun grief, ceux-ci n’ayant été portés à sa connaissance que verbalement au cours de l’entretien, ce qui l’a encore placée dans l’impossibilité matérielle de répondre sur le champ des nombreuses erreurs qui lui étaient reprochées ;

qu’elle n’a pas davantage été en mesure de le faire les jours suivants en raison de son état de santé déficient, de sa surprise devant l’événement, et de l’impossibilité dans laquelle elle s’est trouvée de pouvoir répondre aux différents griefs pour avoir été privée de l’accès à son poste de travail ;

que la seule communication par l’employeur de certains de ses courriers électroniques par lui sélectionnés ne saurait pallier l’empêchement dans lequel il a volontairement placé la salariée de pouvoir assurer en équité la défense de ses intérêts ;

Attendu en outre que plusieurs courriers électroniques versés aux débats par la société EXAPROBE ne concernent pas directement Madame Y :

— le courrier électronique du 8 janvier 2010 ayant trait à la commande destinée au Muséum National d’Histoire Naturelle a été adressé à Madame G H et seulement en copie pour information à Madame Y ;

— le courrier électronique du 13 janvier 2010 a été adressé à Monsieur A B et non à Madame Y , qui a en revanche été destinataire avec lui d’une autre correspondance datée du 13 janvier 2010;

— que les retards de livraison de la société DEVOTEAM, objet des courriers électroniques échangés avec Madame Y, ne lui sont pas nécessairement imputables;

Attendu que Madame Y soutient ensuite n’avoir pas été la seule assistante au sein de la société EXAPROBE, et prétend que les pièces versées aux débats par l’employeur n’identifient pas l’assistante ayant commis les erreurs reprochées ;

qu’il doit être observé à cet égard que les factures produites, comportant des erreurs de chronologie ou de date, ne mentionnent pas qu’elles auraient été établies par Madame Y; qu’en outre la société EXAPROBE ne rapporte pas cette preuve ;

que le bon de commande adressé le 13 janvier 2010 par erreur à la société WESTCON GROUP EUROP mentionne les noms de « G H ou C Y » de sorte que cette dernière n’est pas formellement identifiée ;

que Madame Y prétend encore que le courrier électronique qui lui a été adressé le 08 janvier 2010 par Monsieur I concerne un client qui n’était pas géré par elle mais par une assistante de vente basée à Paris; qu’elle ne peut toutefois en justifier en l’absence d’accès à son ordinateur, ce que son employeur ne saurait lui reprocher ;

Attendu enfin que Madame Y fait observer que les erreurs qui lui sont imputées se concentrent sur l’unique période du mois de janvier 2010 avant son arrêt maladie à compter du 09 février 2010 et la mise en oeuvre de la procédure de licenciement;

que la société EXAPROBE précise au contraire que plusieurs des griefs reprochés ont trait à des périodes antérieures au mois de janvier 2010 et se rapportent pour certains d’entre eux aux années 2008 et 2009 ;

Mais attendu que, pour les faits anciens, indépendamment même de leur prescription, la société EXAPROBE ne justifie d’aucun l’avertissement ou mise en garde qui aurait été adressé à la salariée pour attirer son attention sur ses fréquentes erreurs et lui demander une plus grande attention afin de les éviter ;

qu’enfin les derniers faits, répartis sur une courte période de temps, ne peuvent être constitutifs d’une insuffisance professionnelle de nature à justifier une mesure de licenciement quand bien même ils auraient été commis par Madame Y, alors qu’elle était surchargée de travail pour avoir été placée en arrêt de travail le mois suivant pour ce motif, qu’elle avait précédemment donné entière satisfaction, et que son employeur ne justifie d’aucune lettre antérieure qu’il lui aurait adressée pour lui signaler ses erreurs ;

Attendu en conséquence que c’est à bon droit que le conseil de prud’hommes a considéré que la société EXAPROBE n’apportait pas d’éléments matériellement vérifiables et imputables à Madame Y pour justifier son licenciement pour insuffisance professionnelle ;

qu’il importe dès lors de confirmer le jugement attaqué en ce qu’il a dit et jugé que son licenciement ne reposait sur aucune cause réelle et sérieuse ;

Attendu que Madame Y, qui disposait à la date de la rupture de son contrat de travail d’une ancienneté dans l’entreprise inférieure à deux ans, ne peut prétendre à l’indemnité visée à l’article L. 1235- 3 du code du travail, prévue en cas de licenciement irrégulier et abusif; qu’elle est toutefois en droit de percevoir une indemnité correspondant à la réparation du préjudice subi par application de l’article L. 1235-5 du code du travail ;

que la cour dispose d’éléments suffisants, eu égard à l’âge de la salariée, née en 1966, aux circonstances ayant entouré la rupture des relations contractuelles et aux difficultés de réinsertion professionnelle ensuite rencontrées, pour fixer en application de l’article précité les dommages et intérêts lui revenant en réparation de son préjudice de ce seul chef à la somme de 13.000 € ; que le jugement déféré doit dès lors être réformé sur ce point ;

Attendu que Madame Y soutient en outre que le caisson à roulettes fermé à clef mis à sa disposition par son employeur, où elle entreposait ses effets personnels, aurait été intégralement vidé en son absence et remis à la nouvelle salariée qui occupait désormais ses fonctions, ainsi qu’elle l’a constaté lorsqu’elle s’est présentée dans l’entreprise pour l’entretien préalable à son licenciement ; que Monsieur E Z, salarié de l’entreprise qui l’assistait à cette occasion, aurait également constaté la violation de son caisson ;

qu’à la suite de l’audience de conciliation du conseil de prud’hommes, la société EXAPROBE lui a fait remettre un carton contenant les effets qu’elle avait prélevés dans son casier privatif, mais que ceux-ci étaient incomplets, de sorte qu’elle se dit fondée à obtenir des dommages et intérêts en réparation de son préjudice ressortant de la violation de son casier privatif ;

Mais attendu qu’il n’apparaît pas du compte rendu de l’entretien préalable à son licenciement en date du 10 mars 2010 rédigé par Monsieur Z que Madame Y ait fait état de la violation de son casier personnel, ni que celui-ci ait été mis à la disposition de la salariée qui lui a succédé à son poste de travail ;

qu’elle ne s’est plainte pour la première fois de l’ouverture de son casier personnel et du fait qu’il aurait été vidé de son contenu, alors qu’elle était restée en possession de sa clef, que par lettre adressée à son employeur le 09 avril 2010 ;

que dans sa réponse à son Conseil en date du 23 avril 2010, la société EXAPROBE a fait connaître que le caisson n’avait jamais été forcé et que, si elle souhaitait récupérer des objets personnels, elle en avait la possibilité mais devait prévenir de sa visite ;

que plus de deux mois après l’entretien préalable, Monsieur X a attesté qu’à la date du 17 mai 2010 la salariée intérimaire qui occupait son poste de travail utilisait « le casier privatif 3 tiroirs , condamnable par clef, mis à disposition sur ce poste de travail » sans préciser toutefois qu’il s’agissait de celui de Madame Y ;

que la société EXAPROBE justifie en outre par l’attestation du gérant d’une société de serrurerie en date du 14 avril 2011 que le caisson à roulette mis à la disposition de Madame Y était équipé d’une serrure d’origine qui n’avait été ni forcée ni échangée ;

Attendu que Madame Y a finalement pu récupérer ses effets personnels le 19 avril 2011 selon compte rendu de restitution qu’elle a elle-même signé, prétendant que certains objets manqueraient tels une clef USB et de la petite monnaie, sans toutefois en rapporter la preuve ;

qu’en outre, le compte rendu de restitution ne comporte aucune indication sur le lieu où se seraient trouvés ses effets avant leur restitution, dans son casier personnel qu’elle aurait ou non elle-même ouvert, ou à l’intérieur d’un carton qui lui aurait été remis par son employeur ainsi qu’elle le prétend ;

Attendu en conséquence que Madame Y ne rapporte pas la preuve de la violation de son casier personnel par la société EXAPROBE ; qu’elle doit dès lors être déboutée de sa demande de dommages et intérêts présentée à ce titre et le jugement déféré ainsi réformé ;

Attendu par ailleurs que, pour assurer la défense de ses intérêts devant la cour, l’intimée a été contrainte d’exposer des frais non inclus dans les dépens qu’il paraît équitable de laisser, au moins pour partie, à la charge de la société appelante ;

qu’il convient dès lors de condamner la société EXAPROBE à payer à Madame Y une indemnité de 1.500 € en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;

Attendu enfin que la société EXAPROBE , qui ne voit pas aboutir ses prétentions devant la cour, ne peut obtenir l’indemnité qu’elle sollicite sur le fondement du même article et supporte la charge des entiers dépens ;

PAR CES MOTIFS :

La cour, statuant contradictoirement par arrêt mis à disposition des parties après que ces dernières aient été préalablement avisées dans les conditions prévues à l’article 450 alinéa 2 du code de procédure civile et après en avoir délibéré conformément à la loi,

INFIRME le jugement rendu le 17 juin 2013 par le conseil de prud’hommes de Lyon en ce qu’il a condamné la société EXAPROBE à payer à Madame C Y la somme de 13.000,00 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et pour le préjudice subi du fait de la violation de son casier personnel,

et statuant à nouveau,

CONDAMNE la société EXAPROBE à payer à Madame C Y la somme de 13.000,00 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

DÉBOUTE Madame C Y de sa demande de dommages et intérêts pour violation de son casier personnel ;

CONFIRME pour le surplus le jugement déféré en toutes ses autres dispositions;

Y ajoutant,

CONDAMNE la société EXAPROBE à payer à Madame C Y la somme de 1.500,00 € (MILLE CINQ CENTS EUROS) en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile en cause d’appel,

DÉBOUTE la société EXAPROBE de sa demande présentée sur le fondement du même article et

LA CONDAMNE aux entiers dépens d’instance et d’appel.

Le Greffier, Le Président,

Evelyne FERRIER Jean-Charles GOUILHERS

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