Cour d'appel de Lyon, 12 janvier 2016, n° 14/02518

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Lyon, 12 janv. 2016, n° 14/02518
Juridiction : Cour d'appel de Lyon
Numéro(s) : 14/02518
Décision précédente : Tribunal de grande instance de Lyon, 2 février 2014, N° 13/02574

Texte intégral

R.G : 14/02518

Décision du

Tribunal de Grande Instance de LYON

Référé

du 03 février 2014

RG : 13/02574

S.A.R.L. LA VIA FERRATA

C/

SOCIETE POUR LA PERCEPTION DE LA REMUNERATION EQUITABLE – SPRE

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE LYON

8e chambre

ARRET DU 12 JANVIER 2016

APPELANTE :

S.A.R.L. LA VIA FERRATA

représentée par ses dirigeants légaux

XXX

BP86

XXX

Représentée par la SELARL LAFFLY & ASSOCIES-LEXAVOUE LYON, avocats au barreau de LYON (toque 938)

Assistée de la SCP BOISSON ET ASSOCIES, avocat au barreau de CHAMBERY

INTIMEE :

SOCIETE POUR LA PERCEPTION DE LA REMUNERATION EQUITABLE – SPRE

représentée par ses dirigeants légaux

XXX

XXX

Représentée par Me Sandrine MOLLON, avocat au barreau de LYON

XXX

Assistée de la SELARL ARILLE ET ASSOCIÉS, avocats au barreau de PARIS

* * * * * *

Date de clôture de l’instruction : 05 Octobre 2015

Date des plaidoiries tenues en audience publique : 03 Novembre 2015

Date de mise à disposition : 08 Décembre 2015 prorogé au 12 Janvier 2016, les parties ayant été avisées.

Composition de la Cour lors des débats et du délibéré :

— Claude MORIN, président

— Z A, conseiller

— Catherine ZAGALA, conseiller

assistés pendant les débats de Marine DELPHIN-POULAT, greffier

A l’audience, Z A a fait le rapport, conformément à l’article 785 du code de procédure civile.

Arrêt contradictoire rendu publiquement par mise à disposition au greffe de la cour d’appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l’article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,

Signé par Claude MORIN, président, et par Marine DELPHIN-POULAT, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

* * * *

EXPOSE DU LITIGE

La S.A.R.L. LA VIA FERRATA exploite, pendant la saison d’hiver, dans la station de ski de COURCHEVEL, un restaurant italien/pizzeria depuis plusieurs années.

Le 27 avril 2011, elle a rempli un bordereau de déclaration annuelle auprès de la SOCIÉTÉ POUR LA PERCEPTION DE LA RÉMUNÉRATION ÉQUITABLE (SPRE) en demandant l’application du forfait applicable aux établissements générant des recettes annuelles inférieures à 153.000 €, en indiquant qu’elle ne diffusait de la musique attractive que 15 jours par an, sans toutefois préciser le montant de ses recettes.

Le 07 mars 2012, un agent assermenté de la SPRE a visité l’établissement «LA VIA FERRATA» où il a constaté la présence de matériel de sonorisation avec DJ et la diffusion de musique de style électro-lounge, diffusée à un niveau sonore supérieur à un simple fond sonore, et considéré que cet établissement pouvait être considéré comme restaurant à ambiance musicale, soumis à la rémunération équitable prévue à l’article L.214-1 du code de la propriété intellectuelle.

Au vu de ces constatations et après avoir réclamé vainement à la S.A.R.L. LA VIA FERRATA les justificatifs comptables de ses recettes, la SPRE a procédé, le 24 avril 2012, à une facturation d’office et l’a mise en demeure d’avoir à justifier ses recettes et à régler la rémunération équitable.

Par courrier en réponse du 10 mai 2012, la S.A.R.L. LA VIA FERRATA a contesté cette facturation d’office en expliquant qu’elle n’avait diffusé de la musique d’ambiance que du 26 décembre au 12 janvier, ainsi que trois ou quatre jours début mars 2012 en raison de la présence d’une importante clientèle russe.

Aucune suite n’ayant été donnée à la mise en demeure, la SPRE, par acte d’huissier du 30 octobre 2012, a fait assigner la S.A.R.L. LA VIA FERRATA et madame X Y, sa gérante, devant le juge des référés du tribunal de grande instance de LYON pour les voir condamner in solidum au paiement provisionnel de la somme de 13.517,82 € correspondant à la rémunération équitable due pour la période du 1er février 2010 au 30 juin 2013 et pour voir condamner sous astreinte la société à lui remettre les justificatifs comptables exigés.

Par ordonnance du 30 février 2014, le juge des référés a :

— condamné la S.A.R.L. LA VIA FERRATA à payer à la SPRE la somme provisionnelle de 13.517,82 € au titre de la rémunération équitable pour la période du 1er février 2010 au 30 juin 2013, avec intérêts au taux légal à compter du 19 juin 2013, capitalisés en application de l’article 1154 du code civil à compter du 12 novembre 2013,

— ordonné à la S.A.R.L. LA VIA FERRATA de remettre à la SPRE, dans les 15 jours de la signification de la décision et sous astreinte de 100 € par jour de retard, la copie certifiée conforme par un expert-comptable ou un comptable agréé des bilans, comptes de résultats, déclarations fiscales effectuées au titre de la taxe sur le chiffre d’affaires, grand livre et, le cas échéant, les relevés de caisse horodatés ventilant les recettes entre les jours et heures de diffusion de musique et ceux durant lesquels il n’en est pas diffusé,

— débouté la SPRE du surplus de ses demandes, y compris sa demande provisionnelle en paiement à l’encontre de madame X Y,

— condamné la S.A.R.L. LA VIA FERRATA aux dépens ainsi qu’au paiement de 500 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

Le 26 mars 2014, la S.A.R.L. LA VIA FERRATA a interjeté appel de cette décision en intimant la SPRE.

L’appelante demande à la cour :

— d’infirmer l’ordonnance querellée en raison d’une contestation sérieuse,

— de condamner la SPRE aux dépens ainsi qu’au paiement de 3.000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

Elle fait valoir qu’elle n’exerce qu’une activité de restaurant italien et seulement pendant la saison d’hiver, du 15 décembre au 15 avril, qu’il n’existe dans son établissement ni discothèque ni piste de danse et qu’il est seulement diffusé de la musique d’ambiance douce, de manière exceptionnelle, pour les convives du restaurant.

La SOCIÉTÉ POUR LA PERCEPTION DE LA RÉMUNÉRATION ÉQUITABLE (SPRE) demande de son côté à la cour :

— de confirmer partiellement l’ordonnance querellée et y ajoutant :

— de condamner in solidum la S.A.R.L. LA VIA FERRATA et madame X Y à lui payer, au titre de la rémunération équitable pour la période des droits du 1er février 2010 au 28 février 2015, en application du barème bar et/ou restaurant à ambiance musicale, la somme de 26.798,66 € TTC, avec intérêts au taux légal à compter des mises en demeure du 19 juin 2013 et capitalisation de ces intérêts,

— de condamner la S.A.R.L. LA VIA FERRATA à lui communiquer, sous astreinte de 250 € par jour de retard, passé le délai de quinzaine à compter de la signification de la décision à intervenir, les pièces comptables suivantes, certifiées conformes par un expert-comptable ou un comptable agréé : copie des bilans des exercices et des bilans intermédiaires pour les exercices non clôturés, copie des comptes de résultats détaillés, copie de liasses fiscales, copie du grand livre, copie du livre de caisse et le cas échéant des relevés de caisse horodatés ventilant les recettes entre les jours et les heures de diffusion de musique attractive et les jours et les heures durant lesquelles il n’en est pas diffusé, ce du 1er février 2010 au 31 décembre 2013,

— de condamner in solidum la S.A.R.L. LA VIA FERRATA et madame X Y à lui payer la somme de 2.500 € à titre de dommages et intérêts provisionnels, ainsi que la somme de 5.000 € en application de l’article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens.

Elle fait valoir :

— que la S.A.R.L. LA VIA FERRATA exploite un bar-restaurant à ambiance musicale ainsi qu’il résulte du rapport de son agent assermenté, du site Internet de l’appelante et de plusieurs forums spécialisés,

— que la décision réglementaire du 05 janvier 2010, prise en application des articles L.214-1 et L.214-4 du code de la propriété intellectuelle, fait obligation aux exploitants de bars ou restaurants à ambiance musicale de fournir à la SPRE tout justificatif comptable et fiscal des éléments nécessaires au calcul de la rémunération équitable et que la S.A.R.L. LA VIA FERRATA n’a jamais satisfait à cette obligation,

— que madame X Y, en décidant de diffuser des phonogrammes du commerce sans régler la rémunération équitable, en violation des dispositions légales pénalement sanctionnées, alors qu’elle est un professionnel du secteur et qu’elle est coutumière du non paiement de la rémunération équitable, commet une faute personnelle d’une gravité telle qu’elle est détachable de ses fonctions sociales et qu’elle engage sa propre responsabilité en application de l’article 1382 du code civil,

— que la SPRE subit un préjudice moral résultant de l’atteinte à son activité et à sa mission légale et du trouble même causé à son fonctionnement par l’infraction pénale commise par la S.A.R.L. LA VIA FERRATA et sa gérante, en toute connaissance de cause.

MOTIFS DE LA DECISION

Attendu que l’article 809 alinéa 2 du code de procédure civile permet au juge des référés d’accorder une provision au créancier lorsque l’existence de l’obligation n’est pas sérieusement contestable ou d’ordonner l’exécution de l’obligation, même lorsqu’il s’agit d’une obligation de faire ;

Attendu que la SOCIÉTÉ POUR LA PERCEPTION DE LA RÉMUNÉRATION ÉQUITABLE (SPRE) a pour mission de percevoir, auprès des établissements qui diffusent publiquement des phonogrammes à des fins commerciales, une rémunération au profit des artistes-interprètes et des producteurs de phonogrammes, en application des articles L.214-1 à L.214-5 du code de la propriété intellectuelle ;

Que le calcul de cette rémunération équitable varie selon le type d’établissement et la place qu’occupe dans son activité la diffusion de musique, selon un barème qui s’applique notamment aux bars/restaurants à ambiance musicale ;

Que ces établissements ont deux obligations, d’une part, de fournir à la SPRE tous justificatifs comptables et fiscaux nécessaires au calcul de la rémunération équitable et d’autre part, de régler cette rémunération égale à 1,65% de l’ensemble des recettes brutes H.T de l’établissement, avec un forfait lorsqu’elles sont inférieures à 153.000 € H.T ;

Que lorsque les établissements ne déclarent pas ces recettes annuelles, la SPRE est en droit de facturer d’office, sur la base du dernier chiffre d’affaires connu ou avec un minimum de 580 € H.T par mois, le montant de la rémunération ;

Attendu en l’espèce que la diffusion de musique attractive est une composante essentielle de l’activité de la S.A.R.L. VIA FERRATA, comme le révèle son site Internet qui met en avant une «musique allant crescendo au fil de la nuit pour une atmosphère de charme et de fête» et «à partir de 23 heures, l’ambiance lounge pour des soirées qui se prolongent jusqu’à 2 heures du matin», et aussi les forums des sites spécialisés en ligne qui portent sur des visites effectuées sur toute la saison d’hiver, et notamment au mois de février, en évoquant «la musique à fond dès 20 heures», le «dîner accompagné d’un DJ» ou encore «DJ en fin de repas qui a su mettre l’ambiance qu’il fallait» ;

Que le procès-verbal de l’agent assermenté de la SPRE, précité du 07 mars 2012, et un nouveau procès-verbal du 08 janvier 2015 qui relève l’existence d’un poste DJ au fond de l’établissement avec de la musique diffusée grâce à des enceintes au plafond dans tout l’établissement à un niveau sonore élevé, confirment la fréquence et l’importance de la diffusion musicale pendant la saison d’activité de l’établissement ;

Que la S.A.R.L. LA VIA FERRATA ne peut sérieusement contester devoir la redevance applicable aux établissements à ambiance musicale prévue par les dispositions légales et réglementaires ;

Attendu que la SPRE a calculé le montant de la rémunération équitable pour la période des droits du 1er février 2010 au 31 décembre 2011 en application du régime transitoire prévu par les articles 8 et 6 de la décision réglementaire du 05 janvier 2010, et pour la période des droits du 1er janvier 2012 au 28 février 2015 en appliquant le minimum d’office mensuel de 580 € H.T, faute pour le redevable d’avoir déclaré et justifié de ses recettes, conformément à l’article 2 de la décision réglementaire du 05 janvier 2010 ;

Que la somme de 26.798,66 € T.T.C actualisée par la SPRE devant la cour n’apparaît pas sérieusement contestable et qu’il convient donc de faire droit à la demande de provision à hauteur de ladite somme ;

Attendu par ailleurs qu’il y a lieu, à l’instar du premier juge, d’ordonner à la S.A.R.L. LA VIA FERRATA, sous astreinte de 100 € par jour de retard, de communiquer à SPRE la copie certifiée conforme par un expert-comptable ou par un comptable agréé des bilans et comptes de résultat détaillés, déclarations fiscales effectuées au titre de la taxe sur le chiffre d’affaires, grand livre, livres de caisse et le cas échéant les relevés de caisse horodatés ventilant les recettes entre les jours et heures de diffusion de musique attractive et les jours et heures durant lesquels il n’en est pas diffusé, sauf pour les exercices du 1er février 2011 au 31 décembre 2012, cette obligation n’étant pas davantage contestable en application de l’article 7 de la décision réglementaire du 05 janvier 2010 ;

Attendu en revanche qu’en l’absence d’éléments concrets et précis du préjudice, tant matériel que moral invoqués par la SPRE, il n’y a pas lieu dans le cadre de ce référé d’allouer à l’intimée des dommages et intérêts ;

Attendu que la SPRE demande incidemment devant la cour la condamnation personnelle de madame X Y, gérante de la S.A.R.L. LA VIA FERRATA, au paiement de la somme provisionnelle de 26.698,66 € TTC in solidum avec ladite société ;

Qu’il apparaît cependant que madame X Y n’a pas été intimée par la S.A.R.L. LA VIA FERRATA et que la SPRE n’a pas régularisé d’appel provoqué à son encontre, de sorte que cette demande, non recevable devant la cour, se heurte à une contestation sérieuse ;

Que l’ordonnance de référé sera confirmée en ce qu’elle a rejeté la demande, par substitution des motifs de la cour à ceux des premiers juges ;

Attendu que la S.A.R.L. LA VIA FERRATA supportera les entiers dépens ; qu’il convient d’allouer à la SPRE la somme de 1.500 € en application de l’article 700 du code de procédure pénale en sus de l’indemnité allouée sur le même fondement par l’ordonnance querellée ;

PAR CES MOTIFS

Confirme l’ordonnance querellée sauf sur le montant de la créance de la SPRE à l’égard de la S.A.R.L. LA VIA FERRATA au titre de la rémunération équitable qui doit être actualisée,

Statuant à nouveau de ce chef :

Condamne la S.A.R.L. LA VIA FERRATA à payer à la SPRE la somme provisionnelle de 26.798,66 € TTC au titre de la rémunération équitable à payer pour la période du 1er février 2010 au 28 février 2015, avec intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 19 juin 2013 sur la somme de 13.077,82 € et à compter des conclusions notifiées par la SPRE devant la cour pour le surplus,

Dit que les intérêts seront capitalisés par année entière dans les conditions prévues par l’article 1154 du code civil,

Y ajoutant :

Condamne la S.A.R.L. LA VIA FERRATA à payer à la SPRE la somme de 1.500 € en application de l’article 700 du code de procédure civile,

Condamne la S.A.R.L. LA VIA FERRATA aux dépens d’appel qui seront recouvrés conformément à l’article 699 du code civil par ceux des mandataires des parties qui en ont fait la demande.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT

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