Cour d'appel de Lyon, 6ème chambre, 5 octobre 2017, n° 15/09360

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Lyon, 6e ch., 5 oct. 2017, n° 15/09360
Juridiction : Cour d'appel de Lyon
Numéro(s) : 15/09360
Décision précédente : Tribunal de grande instance de Bourg-en-Bresse, 18 novembre 2015, N° 10/02647
Dispositif : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Sur les parties

Texte intégral

R.G : 15/09360 Décision du

Tribunal de Grande Instance de BOURG EN BRESSE

Au fond

du 19 novembre 2015

RG : 10/02647

ch n°

LE I X

LE I B

LE I C

C/

Z

Y

ASSURANCES BANQUE POPULAIRE IARD

U V

CAISSE PRIMAIRE D’ASSURANCE MALADIE DE L’AIN

MUTUELLE DE L’EST – LA BRESSE ASSURANCES

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE LYON

6e Chambre

ARRET DU 05 Octobre 2017

APPELANTS :

Mme X LE I

née le […] à […]

[…]

[…]

Représentée par la SCP JACQUES AGUIRAUD ET PHILIPPE NOUVELLET, avocat au barreau de LYON

Assistée de Me Jean-Michel GRANDGUILLOTTE, avocat au barreau de LYON

M. B LE I

né le […] à […]

[…]

[…]

Représenté par la SCP JACQUES AGUIRAUD ET PHILIPPE NOUVELLET, avocat au barreau de LYON

Assisté de Me Jean-Michel GRANDGUILLOTTE, avocat au barreau de LYON

Mme C LE I

née le […] à […]

[…]

[…]

Représentée par la SCP JACQUES AGUIRAUD ET PHILIPPE NOUVELLET, avocat au barreau de LYON

Assistée de Me Jean-Michel GRANDGUILLOTTE, avocat au barreau de LYON

INTIMEES :

Mme J Z

née le […] à […]

[…]

[…]

Représentée par la SCP PIERRE ARNAUD, BRUNO CHARLES REY, avocat au barreau de LYON

Assistée de Me PAROVEL, avocat au barreau de l’Ain

U V

[…]

[…]

Représentée par la SCP PIERRE ARNAUD, BRUNO CHARLES REY, avocat au barreau de LYON

Assistée de Me PAROVEL, avocat au barreau de l’Ain

Mme F Y

née le […] à […]

[…]

[…]

Représentée par la SELARL SERFATY VENUTTI CAMACHO & CORDIER, avocat au barreau de l’Ain

ASSURANCES BANQUE POPULAIRE IARD

[…]

[…]

Représentée par la SELARL VITAL-DURAND ET ASSOCIES,

avocat au barreau de LYON

Assistée de Me Q, avocat au barreau de l’Ain

CPAM DE L’AIN

[…]

[…]

défaillante

LA MUTUELLE DE L’EST – LA BRESSE ASSURANCES

[…]

[…]

Représentée par la SELARL SERFATY VENUTTI CAMACHO & CORDIER, avocat au barreau de l’Ain

* * * * * *

Date de clôture de l’instruction : 10 Janvier 2017

Date des plaidoiries tenues en audience publique : 19 Septembre 2017

Date de mise à disposition : 05 Octobre 2017

Audience tenue par N O, président et Catherine CLERC, conseiller, qui ont siégé en rapporteurs sans opposition des avocats dûment avisés et ont rendu compte à la Cour dans leur délibéré,

assistés pendant les débats de Martine SAUVAGE, greffier

A l’audience, N O a fait le rapport, conformément à l’article 785 du code de procédure civile.

Composition de la Cour lors du délibéré :

— N O, président

— Michel GAGET, conseiller

— Catherine CLERC, conseiller

Arrêt réputé contradictoire rendu publiquement par mise à disposition au greffe de la cour d’appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l’article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,

Signé par N O, président, et par Martine SAUVAGE, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

* * * *

FAITS, PROCÉDURE ET DEMANDES DES PARTIES

Le 30 septembre 2008, X Le I a été victime d’une chute de cheval alors qu’elle se promenait en compagnie d’un autre cavalier, Romain AB, dans l’impasse d’Herbevache sur la commune de Reyrieux (Ain).

Cette chute serait en rapport avec la présence de deux chiens sur le chemin suivi par les cavaliers.

Grièvement blessée, X Le I a été hospitalisée en urgence et il a été diagnostiqué un coma de glasgow 6, une ottoragie gauche et un déficit hémicorporel droit.

Par actes d’huissiers de justice des 1er, 7 et 9 juillet 2010, X le I a fait assigner devant le tribunal de grande instance de Bourg en Bresse :

— J Z, propriétaire d’un chien,

— F Y, propriétaire d’un autre chien,

— La Mutuelle de l’Est – La Bresse Assurances, en qualité assureur en responsabilité civile de F Y,

— et la caisse primaire d’assurance maladie de l’Ain.

Par acte d’huissier de justice du 16 septembre 2010, la Mutuelle de l’Est – La Bresse Assurances et F Y ont appelé en cause la SA Assurances Banque Populaire Iard en qualité d’assureur en responsabilité civile de Mme Y.

La U-V est intervenue volontairement à la procédure en qualité d’assureur de Mme Z.

Par ordonnance du 16 décembre 2010, le juge de la mise en état a notamment ordonné une expertise médicale de X Le I, confiée au docteur A, et l’a déboutée de sa demande de provision.

Le docteur A a établi son rapport définitif en date du 24 avril 2013, dans lequel il a décrit d’importantes séquelles neurologiques et neuropsychiques justifiant un déficit fonctionnel permanent de 45 %.

Par jugement en date du 19 novembre 2015, le tribunal de grande instance de Bourg en Bresse a :

— mis hors de cause la SA Assurances Banque Populaire Iard ;

— dit que la responsabilité de Mme Z et de Mme Y ne saurait être retenue à l’égard de X Le I sur le fondement de l’article 1385 du code civil ;

— rejeté l’intégralité des demandes de X Le I, de ses parents B et AK Le I, ainsi que de la caisse primaire d’assurance maladie de la Loire, subrogeant dans ses droits la caisse primaire d’assurance maladie de l’Ain ;

— dit n’y avoir lieu à déclarer le jugement commun et opposable à la caisse primaire d’assurance maladie de l’Ain ;

— condamné X Le I, B Le I et C Le I aux entiers dépens de l’instance, dont distraction au profit de Me Parovel, de la SELARL P Q et de la SELARL R S, en application de l’article 699 du code de procédure civile ;

— condamné X Le I à verser, au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile, la somme de 1.200 euros à F Y et la Mutuelle de l’Est – La Bresse Assurances et la somme de 1.200 euros à la SA Assurances Banque Populaire Iard ;

— dit n’y avoir lieu d’ordonner l’exécution provisoire du jugement ;

— rejeté toutes autres dermandes plus amples ou contraires.

X Le I, B Le I et C Le I ont relevé appel de cette décision par déclaration reçue au greffe de la cour le 8 décembre 2015.

En leurs dernières conclusions du 17 novembre 2016, X Le I, B Le I et C Le I, demandent à la cour de réformer le jugement de première instance en toutes ses dispositions et :

— juger que Mmes Y et Z engagent leur responsabilité à l’égard de la victime sur le fondement de l’article 1385 du code civil,

— condamner Mme Z, sa compagnie d’assurance U-V, Mme Y et sa compagnie d’assurance La Bresse Assurances, in solidum, à réparer l’entier préjudice de Mme Le I

— condamner les mêmes à verser à Mme Le I, Ies indemnités suivantes, poste par poste, sous réserve du recours subrogatoire de I’organisme social

Préjudices corporels de la victime directe

au titre des préjudices patrimoniaux temporaires

— dépenses de santé actuelles 1.651,33 euros

créance de l’organisme social mémoire

— frais divers

— dépenses diverses 233,47 euros

— honoraires docteur D 1.100,00 euros

— frais de déplacement 8.968,42 euros

— tierce personne temporaire 11.160,00 euros

— pertes de gains professionnels actuels 5.327,10 euros

au titre des préjudices patrimoniaux permanents

— dépenses de santé futures 10.994,31 euros

— assistance par tierce personne 245.269,94 euros

— perte de gains professionnels futurs 296.209,88 euros

— incidence professionnelle 100.000 euros

au titre des préjudices extra-patrimoniaux temporaires

— déficit fonctionnel temporaire 15.183,75 euros

— souffrances endurées 25.000,00 euros

au titre des préjudices extra-patrimoniaux permanents

— déficit fonctionnel permanent 158.850,00 euros

— préjudice d’agrément 30.000,00 euros

— préjudice esthétique permanent 4.000,00 euros

— préjudice sexuel 25.000,00 euros

Préjudices matériels de la victime directe 14.823,71 euros

Préjudices des victimes par ricochet

préjudice moral et d’accompagnement des époux Le I 10.000,00 euros chacun

en toute hypothèse,

— condamner les défenderesses in solidum à la somme de 7.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;

— déclarer le jugement commun et opposable à la caisse primaire d’assurance maladie de l’Ain, organisme social de Mme Le I ;

— 'ordonner l’exécution provisoire de la décision à intervenir'

— condamner les mêmes aux entiers dépens de l’instance, avec droit de recouvrement direct au profit de Me Aguiraud.

Par dernières conclusions du 7 novembre 2016, la Mutuelle de l’Est – La Bresse Assurances et F Y demandent à la cour de :

à titre principal,

— débouter les consorts Le I de l’intégralité de leur appel,

— confirmer purement et simplement le jugement dont appel en ce qu’il a

— dit que la responsabilité de Mme Y ne saurait être retenue à l’égard de Mme Le I sur le fondement de l’article 1385 du code civil,

— rejeté l’intégralité des demandes des consorts Le I, ainsi que de la caisse primaire d’assurance maladie de la Loire,

— condamné X Le I à verser aux concluantes la somme de '2 500 euros’ sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;

y ajoutant,

— condamner les consorts Le I à payer, en cause d’appel, la somme de 2.500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

à titre subsidiaire et dans l’hypothèse d’une mise en oeuvre de la responsabilité de Mme Y,

— fixer les éléments des préjudices de Mme Le I de la manière suivante :

— sur l’assistance à tierce personne à 129.814,60 euros

— sur la perte des gains professionnels futurs à 162.920,36 euros

— sur l’incidence professionnelle à 30.000 euros

— sur le déficit fonctionnel temporaire total et partiel, sur la base de 20 euros par jour

— pour les souffrances endurées, la somme de 20 000 euros maximum

— pour le déficit fonctionnel permanent, la somme de 103.229 euros

— pour le préjudice d’agrément, la somme de 10.000 euros

— pour le préjudice esthétique la somme de 2.500 euros maximum ;

— débouter Mme Le I de sa demande d’indemnisation pour le préjudice sexuel ;

— débouter Mme Le I de sa demande au titre des frais de gardiennage des chevaux

— débouter les époux Le I de leur demande à titre de dommages et intérêts pour leur préjudice moral ;

— réduire à de plus justes proportions les réclamations de Mme Le I ;

— condamner X Le I à payer aux concluantes, la somme de 2.500 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux entiers frais et dépens de l’instance.

Par dernières conclusions du 29 octobre 2016, J Z et la U-V demandent à la cour de :

— constater que Mme Le I n’établit pas l’implication du chien Atlas appartenant à Mme Z à l’occasion de l’accident dont elle a été victime ;

— constater, si tant est que la cour retenait l’intervention du chien Atlas, que ne se trouve pas plus établi son rôle actif dans la survenance de l’accident ;

— constater, enfin, que l’acceptation des risques par Mme Le I a pour effet d’exclure son droit à indemnisation ;

— en conséquence, confirmer la décision entreprise, au besoin par substitution de motif

à titre extrêmement subsidiaire, ramener à de plus justes proportions les demandes

excessives des consorts Le I ;

en tout état de cause, condamner Mme Le I et ses parents à verser à Mme Z et U V la somme de 2500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

condamner les consorts Le I aux entiers dépens de première instance et d’appel, ces derniers distraits au profit de la SCP Arnaud-Rey, avocat.

Par dernières conclusions du 26 octobre 2016, la SA Assurances Banque Populaire Iard demande à la cour de confirmer purement et simplement le jugement déféré dans l’ensemble de ses dispositions.

A titre principal, lui donner acte qu’elle conteste devoir sa garantie à Mme Y, 'qui ne justifie pas bénéficier de la couverture de son assurée’ ;

— dire que la compagnie Assurances Banque Populaire Iard devra être mise hors de cause ;

à titre subsidiaire,

— constater, en tout état de cause, qu’il n’existe aucun présomption de causalité entre le fait des chiens et la chute de Mme Le I consacrant la responsabilité des propriétaires de chiens,

— juger que Mme Le I a nécessairement accepté les risques d’une chute en montant son cheval lors de la promenade durant laquelle l’accident a eu lieu ;

— débouter la requérante de l’ensemble de ses demandes ;

titre très subsidiaire,

— déclarer ses offres satisfactoires ;

— rejeter les demandes des victimes par ricochet ;

— condamner Mme Le I, ou qui mieux le devra, à lui payer en cause d’appel la somme de 3.000 euros en indemnisation de ses frais de défense, en application de l’article 700 du code de procédure civile ;

— condamner la même au entiers dépens, dont distraction au profit de la SELARL Vital Durand & Associés, avocats au barreau de Lyon.

La caisse primaire d’assurance maladie de l’Ain n’a pas constitué avocat.

La déclaration d’appel lui a été régulièrement signifiée le 21 janvier 2016 à la requête des appelants.

Les dernières conclusions des consorts Le I lui ont été signifiées le 22 novembre 2016.

Les dernières conclusions de la SA Assurances Banque Populaire Iard lui ont été signifiées le 3 novembre 2016.

L’ordonnance de clôture a été rendue le 10 janvier 2017.

Il est expressément renvoyé aux dernières conclusions des parties pour l’exposé exhaustif de leurs moyens et prétentions.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la mise hors de cause de la SA Assurances Banque Populaire Iard

La compagnie Assurances Banque Populaire Iard était l’assureur multirisques habitation de W AA, qui serait le compagnon de F Y, selon contrat à effet du 14 août 2007 résilié au 5 juin 2008.

Le tribunal a retenu que F Y ne justifiait pas qu’elle résidait de manière habituelle au domicile de W AA en septembre 2008.

En appel, aucune partie ne formule de demande à l’encontre de cet assureur, dont il convient donc de confirmer la mise hors de cause.

Sur les circonstances de l’accident

Il est constant que l’accident est survenu en l’absence de tout témoin visuel et Mme Le I n’a pas conservé le souvenir de sa chute.

Pour autant, celle-ci n’est pas survenue dans des circonstances indéterminées :

Il résulte, en effet, du procès-verbal d’enquête, que les chevaux de M. AB et Mme Le I se déplaçaient au pas, venant de quitter le poney club de Reyrieux tout proche.

Les cavaliers venaient du chemin d’Herbevache avant de tourner sur leur droite dans l’impasse du même nom.

Romain AB, dont rien ne permet de mettre en doute les déclarations faites aux enquêteurs, a indiqué que son cheval précédait celui de Mme Le I. Après avoir fait une vingtaine de mètres dans l’impasse d’Herbevache, deux gros chiens qui jouaient ensemble se sont soudain mis à courir vers les cavaliers.

Le cheval de M. AB s’est emballé, est parti au galop en ressortant de l’impasse et a fini par se prendre les pieds dans une clôture, provoquant la chute de son cavalier dans le chemin d’Herbevache.

Durant cet épisode, M. AB, qui essayait de maîtriser son cheval, n’a manifestement pas pu prêter attention à Mme Le I et n’a pas vu sa chute.

Mme Le I a été retrouvée allongée dans le chemin d’Herbevache, ce qui induit que son cheval, comme celui de M. AB, est reparti en arrière en quittant l’impasse.

F Y et AC E, dont les déclarations aux enquêteurs ne sont pas non plus sujettes à caution, se promenaient dans l’impasse, dans le même sens que celui suivi par les cavaliers.

Elles étaient accompagnées du chien de Mme Y, de race Landseer, qui a été rejoint par un autre chien. Tous deux s’amusaient ensemble sur le talus et faisaient des allers et retours dans l’impasse.

A hauteur d’un enclos qui borde l’impasse, tournant la tête pour surveiller les chiens, Mme Y a aperçu la tête d’un cheval. Elle avait précédemment aperçu les chevaux dans le chemin au niveau du centre équestre.

Mme E s’est retournée et a aperçu aussi furtivement les chevaux.

Mme Y a rappelé les chiens et les a enfermés dans l’enclos tandis que Mme E partait en direction des cavaliers pour leur dire qu’ils pouvaient passer.

L’impasse d’Herbevache comporte un coude qui, de la position de Mmes Y et E, ne leur permettait pas de voir les cavaliers lorsque les chevaux ont fait demi-tour vers le chemin. Elles n’ont donc pas pu assister à la chute de Mme Le I.

Selon le plan des lieux établi par les services de la gendarmerie, ce coude ne permettait pas, lorsque les cavaliers étaient au début de l’impasse, qu’ils voient les chiens sur le talus. Ces deux chiens de grosse taille, débouchant du talus en courant en direction des chevaux, ont manifestement affolé celui de M. AB, quand bien même ils ne se sont pas approchés à moins de dix mètres des chevaux et n’ont montré aucune agressivité, selon l’attestation de Mme E.

Quant à la chute de Mme Le I, cavalière confirmée et de très bon niveau (niveau 'galop 7"), sa chute ne peut s’expliquer que par l’emballement de son propre cheval, soit du fait des chiens, soit du fait du cheval de M. AB lui-même affolé par les chiens.

Etant observé que M. AB est aussi un cavalier confirmé et du même niveau que la victime.

Les déclarations respectives de M. AB, Mme Y et Mme E AD quant aux positions respectives des cavaliers, des promeneuses et des chiens, ces derniers étant bien entre les cavaliers et les promeneuses avant d’être rappelés par Mme Y.

Les témoignages de F Y et AC E montrent qu’elles ont eu, toutes deux simultanément, conscience que l’agitation des deux chiens était de nature à présenter un danger pour les chevaux :

Mme Y explique qu’après avoir aperçu la tête d’un cheval, elle a rappelé les chiens et les a enfermés dans un parc clôturé. Elle ajoute : 'J’ai dit à AC qu’elle pouvait dire aux cavaliers qu’ils pouvaient passer'.

Mme E : 'Au niveau d’une maison qui fait l’angle, j’ai aperçu furtivement les chevaux, en une fraction de seconde, je les ai perdus de vue.

Du coup, F a rappelé les chiens et les a rentrés dans l’enclos.

J’ai dit à F que je redescendais pour leur dire qu’ils pouvaient passer, car les chiens n’étaient plus là, l’espace était libre. Je ne sais pas si F m’a entendu car elle était plus haut'.

AE G, directrice du poney-club de Reyrieux, a d’ailleurs indiqué que le chien Atlas (de Mme Z) avait déjà coursé les chevaux et sa propriétaire le rentrait habituellement lorsque les chevaux passaient.

Sur la participation du chien Atlas de J Z

Les déclarations de Mme Y sont explicites quant au fait que le second chien est bien Atlas, propriété de Mme Z, que Mme Y connaît tous deux visiblement :

'A ce moment là, Atlas nous a rejoints au moment où nous passions devant la maison de J'.

La maison de Mme Z étant effectivement située au début de l’impasse d’Herbevache, précédant l’enclos où les chiens ont été enfermés par Mme Y.

Mme E a, quant à elle, donné une description de l’animal 'un autre chien noir', 'une espèce de labrador' qui correspond à celle du chien Atlas donnée par Mme G 'un chien noir avec une tache blanche dans le cou, type croisé labrador'.

Au demeurant, Mme E a confirmé que c’était bien le chien Atlas qui était dehors.

Il est ainsi établi que c’est bien le chien de Mme Z qui accompagnait celui de Mme Y.

Sur les responsabilités

L’article 1385 (devenu 1243) du code civil dispose que le propriétaire d’un animal, ou celui qui s’en sert, pendant qu’il est à son usage, est responsable du dommage que l’animal a causé, soit que l’animal soit sous sa garde, soit qu’il fût égaré ou échappé.

Ce texte édicte une présomption de responsabilité du propriétaire et/ou gardien de l’animal dont le comportement actif ou passif a causé l’accident.

Il ne saurait être discuté que le chien de Mme Y était bien sous sa garde et celui de Mme Z, bien qu’accompagnant provisoirement le premier, est resté sous la garde effective de sa propriétaire.

Le texte précité ne subordonne pas l’engagement de la responsabilité du gardien de l’animal au caractère anormal du comportement de celui-ci, il suffit que celui-ci ait joué un rôle actif dans la survenance du dommage.

Il importe donc peu que les chiens, courant dans le chemin, n’aient pas eu un comportement exceptionnel ou inhabituel et, en particulier, n’aient pas montré une quelconque agressivité à l’encontre des chevaux, ni ne se soient trouvés en état de divagation, au sens pénal du terme.

Contrairement à ce qu’a retenu le premier juge, le rôle actif des chiens dans la réalisation du dommage est démontré, soit que la vue des chiens courant ait apeuré le cheval de Mme Le I, soit que celui-ci se soit affolé sous l’effet de l’emballement du cheval de M. AB qui le précédait.

En effet, dans la seconde hypothèse, le comportement pertubateur du premier cheval étant la résultante de la course des chiens, il existe bien un lien de causalité entre celle-ci et l’emballement du cheval de la victime.

Par ailleurs, la jurisprudence rappelle qu’hors le cas de situations particulières, telles que les compétitions sportives, la victime ne saurait se voir opposer son acceptation des risques.

En l’espèce, les deux cavaliers se promenant au pas dans une voie normalement ouverte au passage de chevaux, n’ont pas pris de risques particuliers de nature à exonérer les gardiennes des chiens de leur responsabilité résultant de la présomption édictée par l’ancien article 1385 du code civil.

En effet, contrairement à ce que plaident les intimées, le fait que les cavaliers aient précédemment remarqué la présence des chiens dans l’impasse et qu’ils se soient néanmoins engagés dans celle-ci ne constitue pas une prise de risque particulière.

Au demeurant, sauf à imaginer que chacun devrait renoncer à toute promenade du seul fait de la présence de chiens pouvant avoir un comportement perturbateur, l’acceptation des risques normaux de la part d’un cavalier ne s’étend pas à la rencontre avec deux gros chiens non tenus en laisse et courant en direction des chevaux, en provenance d’un talus en surplomb non visible, situation qui a accentué l’effet de surprise et de peur au moins pour le premier cheval.

En réalité, il appartient bien aux gardiens des chiens de faire en sorte qu’ils n’effraient pas les animaux ou les personnes rencontrés sur la voie publique, ce que Mme Y avait d’ailleurs parfaitement appréhendé en décidant spontanément d’enfermer les chiens en attente du passage des chevaux.

Enfin, il n’est allégué d’aucune faute de la victime de nature à réduire son droit à indemnisation. Ainsi qu’il a été dit, les chevaux étaient au pas et Mme Le I avait un niveau de compétence hippique l’autorisant à monter sa jument ; en outre, elle portait un casque.

Les deux chiens ayant concouru à la même action dommageable, Mmes Y et Z sont responsables in solidum de ses conséquences.

Dans ces conditions, le jugement doit être infirmé, Mme Le I étant fondée à obtenir la réparation intégrale de son préjudice à la charge des propriétaires et gardiennes des deux chiens, Mmes Y et Z, ainsi que de leurs assureurs respectifs, la Mutuelle de l’Est – Bresse Assurances et la U-V, garantissant leur responsabilité civile.

Sur le préjudice de X Le I

A titre préliminaire, il est précisé que, parmi les intimées tenues à indemnisation, seules la Mutuelle de l’Est – la Bresse Assurances et son assurée Mme Y ont formulé des observations précises sur certains chefs de préjudice, la U-V et Mme Z se bornant à conclure, de manière indéterminée, à la réduction des 'demandes excessives’ de Mme Le I.

Pour la clarté du propos, les premières sont désignées ci-après comme étant 'les intimées'.

L’appréciation des différents postes de préjudices sera faite selon les conclusions du docteur A qui n’appellent aucune contestation des parties.

Pour les indemnités déterminées par capitalisation, il sera fait application du barème 'Gazette du Palais mars 2016" (taux 1,04 %), qui repose sur des critères actualisés prenant en considération les tables d’espérance de vie les plus récentes publiées par l’INSEE et un taux d’intérêt de 1,04 % inférieur à ceux des précédents barèmes mais tenant compte de l’évolution du coût de la vie et de l’inflation.

A – Préjudices patrimoniaux temporaires

1 – Dépenses de santé actuelles – Frais médicaux restés à charge de la victime

Il s’agit en fait de frais afférents à des factures d’ostéopathe et de psychologue, ainsi que des dépenses liées à l’appareillage auditif.

Les pièces versées aux débats justifient la demande présentée à hauteur de 1.651,33 euros.

[…]

a – Dépenses diverses

Les frais réclamés à hauteur de 233,47 euros sont justifiés et non contestés par les intimées.

b – Frais d’assistance du médecin conseil

Il est justifié de la facturation du docteur H en qualité de médecin conseil pour l’assistance de Mme Le I aux opérations d’expertise, pour un montant total de 1.100 euros.

c – Frais de déplacement

Mme Le I expose que ses parents se sont rendus tous les jours à son chevet durant son hospitalisation à Lyon (hôpital AF AG) puis à Saint Genis Laval (hôpital AH AI), depuis leur domicile de Monthieux, puis l’ont convoyée pour les nombreux examens, séances de soins (kinésithérapie, orthophonie, psychothérapie), réunions d’expertise… Cela principalement avec son véhicule.

Elle calcule de ce chef 26.147 kms parcourus ces six dernières années et réclame une indemnité de 8.968,42 euros basée sur un coût de 0,343 euros du km.

Les intimées soutiennent que Mme Le I ne peut pas revendiquer l’indemnisation de frais exposés par sa famille et qu’elle ne justifie pas que c’est son véhicule Renault Mégane qui a été utilisé (pas de factures d’entretien périodique ou de révision).

Mme Le I verse aux débats des éléments disparates listant les déplacements effectués mais ne justifie effectivement pas les avoir pris intégralement à sa charge.

A tout le moins, il est peu plausible et, en tout cas, aucunement justifié que les parents de Mme Le I aient circulé à bord de son propre véhicule – et à ses frais pour le carburant – pour la visiter sur ses lieux d’hospitalisation.

Il y a lieu de retrancher les kms parcourus pendant les séjours hospitaliers, soit 1.380 + 2.070 = 3.450 kms.

Pour le surplus, à défaut de justificatifs, on peut admettre raisonnablement que Mme Le I a pris à sa charge la moitié des trajets, ce qui détermine l’indemnité comme suit :

26.147 – 3.450 = 22.697 kms

22.697 / 2 = 11.348,50 kms

11.348,50 x 0,343 = 3.892,54 euros. d – Frais de tierce-personne antérieure à la consolidation médico-légale

Mme Le I sollicite une indemnité de 11.160 euros correspondant à une aide de 6 heures par semaine pendant 124 semaines sur la base d’un tarif horaire de 15 euros.

Le quota de 6 heures et la période retenue, du 15 novembre 2008, date du retour à domicile, au 1er avril 2011, date de la consolidation, sont conformes au conclusions du docteur A.

En l’absence de rémunération d’une tierce personne extérieure à la famille, le taux horaire de 15 euros ne fait pas débat, de sorte qu’il y a lieu d’allouer l’indemnité réclamée.

3 – Perte de gains professionnels actuels

A l’époque de l’accident, X Le I était employée en qualité de conseillère clientèle, en contrat à durée indéterminée et avec le statut de cadre, au sein de la banque HSBC.

Sa rémunération comprenait différentes primes en plus du salaire de base et elle justifie, par les pièces versées aux débats, de pertes de revenus à hauteur de 5.327,10 euros pendant la période précédent la consolidation.

Elle est ainsi fondée en sa demande indemnitaire, dont elle donne un chiffrage rigoureux qui n’est pas contesté.

4 – Récapitulatif des préjudices patrimoniaux temporaires :

1.651,33 + 233,47 + 1.100,00 + 3.892,54 + 11.160,00 + 5.327,10 = 23.364,44 euros.

B – Préjudices patrimoniaux permanents

1 – Dépenses de santé futures

Mme Le I doit porter un appareillage auditif à l’oreille gauche pour lequel l’expert conclut à la nécessité d’un remplacement tous les six mois.

La demande indemnitaire est valablement fondée sur le barème de capitalisation 'Gazette du Palais 2016" . Eu égard à l’âge de la victime (42 ans) à la date du premier renouvellement à prévoir (2020), l’indemnité calculée par Mme Le I à hauteur de 6.296,94 euros est justifiée.

A cela s’ajoute le remplacement des piles toutes les quatre semaines, pour un montant de 4.697,37 euros justement calculé sur la capitalisation au même barème à partir de l’âge de la victime au premier remplacement (37 ans en 2015).

Il y a lieu d’allouer à la victime l’indemnité totale réclamée pour 10.994,31 euros.

2 – Assistance par tierce-personne

Le docteur A retient que les séquelles neuropsychologiques portent, outre sur la mémoire, sur les fonctions exécutives comportementales et sur les fonctions langagières avec séquelles d’aphasie.

L’expert conclut à des besoins en tierce personne non spécialisée pour stimulation et guidance, du fait du syndrome dysexécutif comportemental dont souffre la victime.

Cela à hauteur de 6 heures par semaine, de manière pérenne.

Mme Le I présente le devis d’une association prestataire, pour un prix horaire de 20,55 euros par semaine. Elle formule une demande distinguant la période écoulée jusqu’à fin février 2016 avec un prix horaire de 15 euros et la période postérieure avec le prix horaire de 20,55 euros, soit 513,75 euros par mois.

Les intimées répondent que Mme Le I ne justifie pas avoir fait appel à l’association prestataire, de sorte qu’il y aurait lieu de ne retenir que le prix de 15 euros pour l’avenir, et emploient un autre barème de capitalisation.

Effectivement, Mme Le I ne justifie pas avoir encore eu recours aux services de l’association, ce qui peut s’expliquer par le fait qu’elle n’a perçu aucune indemnisation à ce jour. Elle est cependant en droit de faire appel à une association prestataire pour le futur, ce qu’elle indique vouloir faire dès que l’indemnisation le lui permettra.

Pour la période écoulée depuis la consolidation, du 1er avril 2011 au 1er octobre 2017 (78 mois), il est retenu le taux de 15 euros avec une moyenne de 24 heures par mois, soit 24 x 15 x 78 = 28.080 euros.

Pour la période à venir, il convient de capitaliser l’indemnité en fonction de l’âge de 39 ans atteint par la victime au jour du présent arrêt.

Sur la base du prix mensuel de 513,75 euros, soit 6.165 euros par an, l’indemnité capitalisée se détermine comme suit : 6.165 euros x 35,746 = 220.374,09 euros.

Il revient donc à Mme Le I une indemnité globale de 28.080 + 220.374,09 = 248.454,09 euros.

3 – Perte de gains professionnels futurs

Mme Le I a été placée en invalidité catégorie I à partir du 1er avril 2011. Travaillant à temps partiel à 70 %, elle subit une perte de rémunération de 30 %.

Sa perte de revenus n’est pas contestée par les intimées, le différentiel entre la demande de l’appelante et leur proposition ne tenant qu’à l’emploi d’un barème différent.

Il convient de faire droit à la demande de Mme Le I, exactement calculée sur la base du barème de capitalisation 'Gazette du Palais 2016" après déduction de la pension d’invalidité, soit l’allocation de la somme de 296.209,88 euros.

4 – Incidence professionnelle

Mme Le I expose que, dans son activité professionnelle de conseillère clientèle de la banque HSBC, elle obtenait, avant son accident, d’excellents résultats la mettant en bonne place dans les classements internes de l’entreprise, de sorte qu’elle avait des perspectives de promotion professionnelle.

Son état physique postérieur à l’accident a conduit à la rétrograder dans un poste d’attachée commerciale, de moindre importance, et elle subit une importante dévalorisation au sein de son agence.

Les séquelles décrites par le docteur A sont, sans discussion possible, de nature à entraîner une pénibilité accrue dans l’exercice de l’activité professionnelle de la victime et sa dévalorisation au sein de l’entreprise, dès lors que son activité comportait un aspect primordial de relation avec la clientèle aujourd’hui obérée par ces séquelles physiques et neuro-psychologiques.

Tenant compte de l’espoir raisonnable de promotion dans la profession bancaire qui était celui de Mme Le I, âgée de seulement 30 ans au jour de l’accident, l’incidence professionnelle de ses séquelles sera réparée par une indemnité de 60.000 euros.

5 – Récapitulatif des préjudices patrimoniaux permanents

10.994,31 + 248.454,09 + 296.209,88 + 60.000,00 = 615.658,28 euros

C – Préjudices extrapatrimoniaux temporaires

1 – Déficit fonctionnel temporaire total

Le déficit fonctionnel temporaire a été total du 30 septembre 2008 au 31 août 2009, soit pendant 335 jours.

Mme Le I sollicite une indemnité calculée sur la base journalière de 25 euros tandis que les intimées soutiennent qu’elle doit être réduite à 20 euros.

Conformément à la jurisprudence habituelle de la cour de céans, il sera indemnisé sur la base journalière de 23 euros, soit 335 x 23 = 7.705 euros.

2 – Déficit fonctionnel temporaire partiel

— déficit fonctionnel temporaire à 50 % du 1er septembre 2009 au 31 mai 2010, soit 272 jours : 272 x 23 x 50 % = 3.128 euros

— déficit fonctionnel temporaire à 45 % du 1er juin 2010 au 31 mars 2011, soit 303 jours : 303 x 23 x 45 % = 3.136,05 euros

— total : 3.128 + 3.136,05 = 6.264,05 euros.

[…]

Compte tenu des souffrances décrites et de la cotation de 5/7 retenue par le docteur A, l’indemnité réparatrice de ce préjudice est fixée à 20.000 euros.

4 – Récapitulatif des préjudices extrapatrimoniaux temporaires

7.705,00 + 6.264,05 + 25.000,00 = 33.969,05 euros

D – Préjudices extrapatrimoniaux permanents

1 – Déficit fonctionnel permanent

Au vu de la description des séquelles par l’expert et du taux de 45 % qu’il a retenu, et tenant compte de l’âge de la victime à la date de consolidation (33 ans), ce poste de préjudice sera réparé par une indemnité de 119.250 euros.

2 – Préjudice d’agrément

L’expert conclut que le préjudice d’agrément existe de manière évidente pour l’équitation.

Mme Le I fait valoir que, propriétaire de plusieurs chevaux, elle montait au moins une fois par semaine et pratiquait des compétitions avec un niveau d’excellence (galop 7).

Les intimées répondent qu’elle ne justifie pas de participation à des compétitions officielles depuis l’année 2000 mais participait à des épreuves d’élevage. Elles soutiennent qu’elle reste licenciée à la fédération française d’équitation en 2016 et continue l’élevage de chevaux.

Même si Mme Le I poursuit une activité dans le milieu de l’équitation, ses séquelles sont de nature à lui interdire la monte des chevaux qu’elle pratiquait depuis l’âge de huit ans (1986), ce qui constitue un préjudice d’agrément certain justifiant une indemnité de 15.000 euros.

3 – Préjudice esthétique permanent

Le docteur A retient un préjudice esthétique coté 2/7 pour les 'modifications de l’habitus extérieur de la victime' et une cicatrice minime au coude droit.

Ces modifications ne sont pas précisées par l’expert mais semblent se rapporter aux différentes observations faites dans son rapport à l’occasion de l’inspection et de l’examen général.

Ce poste de préjudice sera justement réparé par une indemnité de 2.500 euros.

[…]

L’expert a conclu qu’en l’état, il n’existe pas de préjudice sexuel mais que, dans l’avenir, il existera du fait de l’apragmatisme frontal dont souffre Mme Le I.

Les intimées font valoir qu’il n’y a pas de préjudice de procréation.

Mme Le I fait état d’éléments d’ordre psychologique (perte de sa construction affective mari-enfant) qui ne saurait caractériser un préjudice sexuel puisque son état n’exclut pas une vie de couple et la procréation.

Le préjudice sexuel, constitué par une perte de libido, n’est pas avéré au regard du fait qu’avant l’accident, selon ses déclarations à l’expert, Mme Le I n’avait eu aucune vie sexuelle, donnant la priorité à sa vie professionnelle.

Les conclusions de l’expert se fondent sur une recherche hypothétique de relation sexuelle future qui ne constitue pas un préjudice certain, d’autant qu’elle n’est jamais évoquée dans les doléances rédigées par la victime retranscrites dans le rapport d’expertise. Il n’y a pas lieu à indemnité de ce chef.

5 – Récapitulatif des préjudices extrapatrimoniaux permanents

119.250 + 15.000 + 2.500 = 136.750 euros

E- Préjudices matériels

1 – Effets personnels

L’indemnité totale de 1.318 euros réclamée pour les équipements de la cavalière et du cheval endommagés dans l’accident ne fait pas débat, au regard des justificatifs produits.

2 – Frais de soins de la jument

La jument 'Romanne de Jansane’ montée par Mme Le I s’est blessée le jour de l’accident. Les factures des soins vétérinaires versées aux débats ne sont pas contestées, de sorte qu’il est fait droit à la demande indemnitaire de 2.865,24 euros.

[…]

Mme Le I expose qu’elle est propriétaire de plusieurs chevaux dont elle assurait le dressage qui nécessitait une présence quotidienne qu’elle n’a pas pu assurer pendant sa longue période de convalescence. Elle a été contrainte de faire héberger la jument Romanne de Jansane et ses poulains.

Les intimées répondent que Mme Le I ne justifie pas de la nécessité de mettre en pension les chevaux qui résidaient sur la propriété des parents avant l’accident.

On observera que le débat ne saurait porter que sur les frais d’entretien de la jument puisque les trois poulains sont nés dans les années qui ont suivi l’accident, ce qui ressort d’un choix de Mme I de procéder à une activité de reproduction, étant de surcroît observé qu’aucun document n’établit une activité similaire antérieure à l’accident.

Concernant l’élevage proprement dit des chevaux de la victime, le rôle de C, mère d’X Le I, n’est pas clairement explicité alors qu’il est indiqué dans le rapport d’expertise qu’elle occupe depuis 2005 un emploi d’éleveur d’équidés non salarié.

Quant à la jument Romanne de Jansane, il est établi que Mme Le I l’a confiée en pension après son accident au centre équestre de Mme G, puis à deux autres centres équestres successifs.

Cette contrainte est bien consécutive à l’incapacité physique de Mme Le I de s’occuper de la jument, pas seulement en termes de nourriture et hébergement, mais aussi d’entraînement, s’agissant d’un cheval de compétition comme l’a précisé Mme G.

Mme Le I est ainsi fondée à obtenir l’indemnisation des frais exposés, justifiés à hauteur de 7.305,47 euros.

4 – Récapitulatif du préjudice matériel

1.318,00 + 2.865,24 + 7.305,47 = 11.488,71 euros

Sur les préjudices de B et C Le I

Les parents de la victime ont subi un préjudice moral évident à raison de la gravité initiale des blessures subies par leur fille qui pouvaient faire craindre le pire, d’autant que le lien familial s’avère étroit :

X Le I qu’elle réside dans leur maison, dans laquelle elle dispose d’un logement indépendant à l’étage. Son père a fait valoir ses droits à la retraite pour l’assister après l’accident.

Les parents ont été conduits à lui apporter leur soutien de manière conséquente, d’abord par les visites pendant ses séjours hospitaliers, ensuite à raison de l’accompagnement quotidien qui n’est que partiellement indemnisé au titre de la tierce personne.

Ces éléments justifient l’allocation d’une indemnité de 3.000 euros pour chacun d’eux.

Sur les demandes accessoires

Les dépens des procédures de première instance et d’appel seront supportés, chacune pour moitié, par les parties tenues à indemnisation, ainsi que les frais irrépétibles exposés par Mme Le I à hauteur de 5.000 euros, lesdites parties conservant la charge de leurs propres frais irrépétibles.

Les frais irrépétibles exposés par la SA Banque Populaire Iard seront mis à la charge des parties qui l’ont inutilement appelée en cause, à savoir de la Mutuelle de l’Est – La Bresse Assurances et Mme Y, à concurrence de 2.000 euros.

PAR CES MOTIFS :

La cour,

Confirme le jugement prononcé le 19 novembre 2015 par le tribunal de grande instance de Bourg en Bresse en ce qu’il a mis hors de cause la SA Assurances Banque Populaire;

Réforme ce jugement en toutes ses autres dispositions et, statuant à nouveau,

Déclare F Y et J Z responsables in solidum de l’accident survenu le 30 septembre 2008 à Reyrieux dont a été victime X Le I ;

Les déclare tenues, in solidum avec les compagnies la Mutuelle de l’Est – La Bresse Assurances et U-V, à réparer les dommages causés à X Le I, ainsi qu’à B Le I et C Le I ;

Condamne in solidum F Y et la Mutuelle de l’Est – La Bresse Assurances, d’une part, et J Z et la U-V, d’autre part, à payer à X Le I les sommes suivantes :

—  23.364,44 euros au titre de ses préjudices patrimoniaux temporaires

—  615.658,28 euros au titre de ses préjudices patrimoniaux permanents

—  33.969,05 euros au titre de ses préjudices extrapatrimoniaux temporaires

—  136.750,00 euros au titre de ses préjudice extrapatrimoniaux permanents

—  11.488,71 euros au titre de son préjudice matériel ;

Dit que le présent arrêt est opposable à la Caisse Primaire d’Assurance Maladie de l’Ain

Condamne in solidum F Y et la Mutuelle de l’Est – La Bresse Assurances, d’une part, et J Z et la U-V, d’autre part, à payer à B Le I la somme de 3.000 euros au titre de son préjudice moral et d’accompagnement ;

Condamne in solidum F Y et la Mutuelle de l’Est – La Bresse Assurances, d’une part, et J Z et la U-V, d’autre part, à payer à C Le I la somme de 3.000 euros au titre de son préjudice moral et d’accompagnement ;

Condamne F Y et la Mutuelle de l’Est – La Bresse Assurances, d’une part, et J Z et la U-V, d’autre part, aux dépens de première instance et d’appel, chacune pour moitié, avec droit de recouvrement direct au profit des avocats qui en ont fait la demande ;

Condamne F Y et la Mutuelle de l’Est – La Bresse Assurances, d’une part, et J Z et la U-V, d’autre part, à payer à X Le I chacune 2.500 euros, soit au total 5.000 euros, sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;

Condamne F Y et la Mutuelle de l’Est – La Bresse Assurances à payer à la SA Assurances Banque Populaire la somme de 2.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;

Déboute les parties de leurs demandes autres ou plus amples.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT

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Textes cités dans la décision

  1. Code de procédure civile
  2. Code civil
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Cour d'appel de Lyon, 6ème chambre, 5 octobre 2017, n° 15/09360