Cour d'appel de Lyon, Chambre sociale a, 18 décembre 2019, n° 17/01506

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Lyon, ch. soc. a, 18 déc. 2019, n° 17/01506
Juridiction : Cour d'appel de Lyon
Numéro(s) : 17/01506
Décision précédente : Conseil de prud'hommes de Lyon, 25 janvier 2017, N° F15/03261
Dispositif : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Sur les parties

Texte intégral

AFFAIRE PRUD’HOMALE

RAPPORTEUR

N° RG 17/01506 – N° Portalis DBVX-V-B7B-K4AO

Société IPSO INSTITUT PRIVE DE PROTHESE DENTAIRE DU SUD OUEST

C/

X

APPEL D’UNE DÉCISION DU :

Conseil de Prud’hommes – Formation de départage de LYON

du 26 Janvier 2017

RG : F15/03261

COUR D’APPEL DE LYON

CHAMBRE SOCIALE A

ARRET DU 18 Décembre 2019

APPELANTE :

Société ACADÉMIE D’ART DENTAIRE venant aux droits de la société IPSO LYON

[…]

[…]

Me Gaël SOURBE de la SCP BAUFUME ET SOURBE, avocat postulant au barreau de LYON,

Me Laurence NOYE, avocat plaidant au barreau de PARIS

INTIMEE :

D X

[…]

[…]

[…]

Me Olivia LONGUET, avocat au barreau de LYON substitué par Me Edouard NEHMAN, avocat au barreau de LYON

DEBATS EN AUDIENCE PUBLIQUE DU : 22 Octobre 2019

Présidée par G H, président et , conseiller, magistrats rapporteurs (sans opposition des

parties dûment avisées) qui en ont rendu compte à la Cour dans son délibéré, assistés pendant les débats de E F, greffier

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

— G H, présidente

— Evelyne ALLAIS, conseiller

— Nathalie ROCCI, conseiller

ARRET : CONTRADICTOIRE

rendu publiquement le 18 Décembre 2019 par mise à disposition au greffe de la cour d’appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l’article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,

Signé par G H, présidente, et par E F, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

* * * *

Suivant contrat de travail à durée indéterminée soumis à la convention collective des prothésistes dentaires en date du 1er mars 2005, Mme D X a été embauchée par la société IFOSUPD ( INSTITUT DE FORMATION SUPERIEUR EN PROTHESE DENTAIRE) en qualité de secrétaire comptable. Il a été stipulé que son horaire mensuel moyen était de 132 heures.

Trois avenants au contrat ont été souscrits en vertu desquels :

— le 1er septembre 2006, la société IFOSUPD a décidé d’octroyer à Mme X une prime mensuelle, dont le montant était calculé en fonction du nombre d’élèves, et d’augmenter le taux horaire brut de sa rémunération

— le 1er septembre 2009, les dispositions de la convention collective des prothésistes dentaires et des personnels de laboratoires de prothèses dentaires ont cessé de s’appliquer, le contrat de travail a été soumis à la convention collective de l’enseignement privé hors contrat et il a été attribué à Mme X le niveau de classification suivant : catégorie I, échelon 2, indice 318, ainsi qu’une augmentation de sa rémunération, l’octroi d’une prime de 600 euros deux fois par an, liée à ses prises de fonctions comptables allégeant les honoraires de l’expert-comptable, et un treizième mois au mois de décembre de chaque année

— le 31 juillet 2014, la société a proposé à Mme X, compte-tenu de ses responsabilités, de bénéficier du statut cadre, du titre de gestionnaire et de l’indice 'fonction n° 42 gestion administrative et financière, gestion administrative et juridique du personnel', entraînant une rémunération mensuelle de 2.445, 96 euros à laquelle devait s’ajouter au mois de décembre un treizième mois et une mensualisation de la prime administrative (100 euros bruts par mois).

La société IFOPSUD a été rachetée le 20 janvier 2015 par la société IPSO LYON appartenant au groupe IPSO ACADEMIE D’ART DENTAIRE.

Le 24 février 2015, la société IPSO LYON a rédigé un avenant au contrat de travail qu’elle a proposé à la signature de Mme X.

Le 6 mars 2015, Mme X a été placée en arrêt de travail, le motif médical mentionné sur l’avis

initial d’arrêt de travail étant le suivant : 'psycho'.

Mme X a déposé une déclaration d’accident du travail.

Par décision du 9 juin 2015, la caisse primaire d’assurance maladie du Rhône a notifié à Mme X son refus de prendre en charge l’accident déclaré le 6 mars 2015 dans le cadre de la législation relative aux risques professionnels, refus confirmé par décision de la commission de recours amiable en date du 21 mars 2016.

Par lettre du 17 mars 2015, Mme X a indiqué à la société X que l’avenant qui lui avait été transmis avait déjà été mis en application par le retrait d’une partie de ses tâches et fixait une durée du travail supérieure à sa durée contractuelle, assortie d’une baisse de rémunération, et qu’elle refusait ces modifications.

Le 2 avril 2015, la société IPSO LYON a répondu à Mme X que la modification de sa durée de travail et de sa rémunération constituait effectivement une modification de son contrat de travail qui nécessitait son accord exprès et qu’elle se réservait sur le fait de pouvoir maintenir son contrat dans les conditions que souhaitait cette dernière.

Le 18 mai 2015, la société IPSO LYON a informé Mme X qu’elle avait pris la décision de renoncer à sa proposition de modification de son contrat de travail pour motif économique.

Par requête en date du 5 août 2015, Mme D X a saisi le conseil de prud’hommes de LYON en lui demandant de prononcer la résiliation judiciaire de son contrat de travail aux torts de la société IPSO LYON et de condamner cette société à lui verser une indemnité de licenciement et des dommages et intérêts pour licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse.

A la suite de deux visites de reprise des 22 octobre et 9 novembre 2015, le médecin du travail a déclaré Mme X inapte à son poste de travail.

Le 3 décembre 2015, Mme X a été convoquée à un entretien préalable à un éventuel licenciement fixé au 15 décembre 2015, auquel elle ne s’est pas présentée.

Le 21 décembre 2015, la société IPSO LYON a prononcé le licenciement de Mme X pour inaptitude et absence de possibilité de reclassement.

Au dernier état de la procédure devant le conseil de prud’hommes, Mme X a demandé qu’à titre subsidiaire, il soit dit que son inaptitude était d’origine professionnelle et de condamner la société IPSO LYON à lui verser, outre l’indemnité compensatrice de préavis et des dommages et intérêts, un solde d’indemnité spéciale de licenciement, et, qu’ à titre infiniment subsidiaire, il soit dit que le licenciement était sans cause réelle et sérieuse pour manquement à l’obligation de reclassement. Elle a demandé également la condamnation de la société IPSO LYON à lui payer un solde de prime de treizième mois pour l’année 2015 et un rappel de salaire pour la période de septembre 2014 à décembre 2015.

Par jugement en date du 26 janvier 2017, le conseil de prud’hommes a :

— prononcé la résiliation judiciaire du contrat de travail de Mme X aux torts de la société IPSO LYON 'à la date du jugement'

— condamné la société IPSO LYON à verser à Mme D X les sommes suivantes :

• 8.360,43 euros à titre d’indemnité compensatrice de préavis, outre 836,04 euros à titre de congés payés afférents

• 40.000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

• 656,32 euros à titre de rappel de salaire, outre 65,63 euros à titre de congés payés afférents pour la période de septembre 2014 à décembre 2015

— débouté Mme X de ses demandes en paiement d’un solde d’indemnité spéciale de licenciement et d’un solde de prime de treizième mois 2015

— fixé la rémunération moyenne mensuelle brute de Mme X à la somme de 2.786,81 euros

— ordonné à la société IPSO LYON de remettre à Mme X les documents de fin de contrat ( attestation Pôle emploi, certificat de travail, reçu pour solde de tout compte) rectifiés à compter de la notification du jugement, sans astreinte

— ordonné, en application de l’article L1235-4 du code du travail, le remboursement à Pôle emploi dans la limite de trois mois

— ordonné l’exécution provisoire de la condamnation à payer les dommages et intérêts, à hauteur de la somme de 20.000 euros

— condamné la société IPSO LYON à payer à Mme X la somme de 1.500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile

— condamné la société IPSO LYON aux dépens de l’instance.

La société IPSO LYON a interjeté appel de ce jugement, le 24 février 2017.

Dans ses dernières conclusions notifiées le 13 septembre 2017, la société IPSO LYON demande à la cour :

à titre principal,

— d’infirmer le jugement sauf en ce qu’il a rejeté les demandes de Mme X en paiement d’un solde d’indemnité spéciale de licenciement et d’un solde de prime de treizième mois

à titre subsidiaire,

— de ramener la condamnation en paiement de dommages et intérêts pour rupture abusive à une juste proportion

— de condamner Mme X à lui payer la somme de 2.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux dépens.

Dans ses dernières conclusions notifiées le 2 septembre 2019, Mme D X demande à la cour :

— de confirmer le jugement en ses dispositions relatives à la résiliation judiciaire du contrat de travail, à l’indemnité compensatrice de préavis et aux congés payés afférents, au rappel de salaire, à la fixation de sa rémunération moyenne et à la remise des documents de fin de contrat

— de l’infirmer sur le montant des dommages et intérêts alloués et, statuant à nouveau, de condamner la société IPSO à lui payer la somme de 45.000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

à titre subsidiaire,

— de dire que son inaptitude est d’origine professionnelle et que son licenciement est sans cause réelle et sérieuse

— de condamner la société ACADEMIE D’ART DENTAIRE venant aux droits de la société IPSO à lui payer les sommes suivantes :

• 8.360,43 euros à titre d’indemnité compensatrice de préavis, outre 836,04 euros à titre de congés payés afférents

• 45.000 euros à titrre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

• 6.342,08 euros au titre du solde de l’indemnité spéciale de licenciement

à titre infiniment subsidiaire,

— de dire que son licenciement est sans cause réelle et sérieuse au motif que la société IPSO a manqué à son obligation de reclassement

— de condamner la société ACADEMIE D’ART DENTAIRE venant aux droits de la société IPSO à lui payer les sommes suivantes :

• 8.360,43 euros à titre d’indemnité compensatrice de préavis, outre 836,04 euros à titre de congés payés afférents

• 45.000 euros à titrre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

— d’infirmer le jugement qui l’a déboutée de sa demande en paiement de solde de prime de treizième mois

— de condamner la société ACADEMIE D’ART DENTAIRE venant aux droits de la société IPSO à lui payer la somme de 2.132,14 euros bruts à titre de solde de prime de treizième mois

— d’assortir la remise des documents de finde contrat d’une astreinte de 50 euros par jour de retard 'à compter du jugement à intervenir'

— en tout état de cause, de condamner la société ACADEMIE D’ART DENTAIRE venant aux droits de la société IPSO à lui payer la somme de 4.000 euros au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux dépens.

Conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile, la cour se réfère, pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, à leurs conclusions visées ci-dessus.

L’ordonnance de clôture a été rendue le 26 septembre 2019.

SUR CE :

Sur la demande de résiliation judiciaire

Lorsqu’un salarié introduit une action en résiliation judiciaire du contrat de travail et est par la suite licencié, le juge doit au préalable statuer sur la demande de résiliation et n’apprécie le bien fondé du licenciement que s’il ne fait pas droit à la demande de résiliation judiciaire.

Aux termes de l’article 1184 ancien du code civil applicable au présent litige, la condition résolutoire est toujours sous entendue dans les contrats synallagmatiques, pour le cas où l’une des deux parties ne satisfera point à son engagement. Dans ce cas, le contrat n’est point résolu de plein droit. La partie envers laquelle l’engagement n’a point été exécuté, a le choix ou de forcer l’autre à l’exécution de la convention lorsqu’elle est possible, ou d’en demander la résolution avec dommages et intérêts. La

résolution doit être demandée en justice et il peut être accordé au défendeur un délai selon les circonstances.

Il appartient au salarié qui sollicite la résiliation judiciaire de rapporter la preuve de manquements suffisamment graves de l’employeur à ses obligations contractuelles pour empêcher la poursuite du contrat de travail et ainsi justifier la rupture à ses torts.

Mme X reproche à la société IPSO :

1) les pressions exercées sur elle et la surcharge de travail qu’elle a subie

2) la modification unilatérale de son contrat de travail

3) le défaut de paiement de sa prime de treizième mois

4) le versement d’une rémunération inférieure à celle qui était contractuellement prévu

5) la remise d’une attestation POLE EMPLOI erronée.

premier grief

Mme X fait valoir que, du jour au lendemain, à compter du 20 janvier 2015, elle a reçu les instructions de cinq personnes, les directeur et directrices des Académies d’art dentaire de Paris, Bordeaux, Aix en Provence, la directrice générale du groupe et le directeur prospective et développement du groupe, alors qu’elle gérait auparavant 84 élèves de la société IFOPSUD, qu’elle a alerté à plusieurs reprises son employeur sans qu’aucune réponse sérieuse ne soit apportée à ses craintes, que Mme Y du cabinet d’expertise COFINGEC reprenant la comptabilité dont elle avait la charge, par courriel du 20 janvier 2015, a sollicité d’elle un travail considérable à effectuer pour l’établissement des paies, que, lors d’une visite du 2 mars 2015, le médecin du travail a constaté la dégradation de son état de santé et qu’elle a subi un arrêt de travail à compter du 6 mars 2015 'pour syndrôme anxio-dépressif réactionnel à des problèmes professionnels, type harcèlement’ayant entraîné son licenciement pour inaptitude le 21 décembre 2015.

La société IPSO conteste le bien-fondé de ce grief en faisant valoir que Mme X a été rassurée sur ses compétences et sur le fait qu’elle avait toute sa place dans cette nouvelle société, que M. Z avait été missionné pour l’accompagner et l’aider dans cette période de transition,que de nombreuses tâches ont été exercées par d’autres pour ne pas la surcharger, que le nombre de courriels et de tâches à traiter entre la mi-janvier et le 6 mars n’a rien d’extraordinaire, ni d’anormal, que, pour la partie comptable, il s’agissait de transmettre des données et non de les exécuter et que les demandes faites concernaient principalement le transfert d’informations et de nouveaux outils de travail, tâches qui relevaient de ses fonctions.

A l’appui de ce grief, Mme X produit essentiellement des courriels, dont le nombre, le contenu et les horaires d’envoi ne permettent pas à eux seuls de caractériser des pressions et une surcharge de travail, en l’absence au surplus de tout élément de comparaison avec les années précédentes.

La société IFOSUPD ayant été reprise par la société IPSO LYON qui disposait d’une autre organisation, il n’apparaît pas anormal que, dans un premier temps, il ait fallu mettre en place des procédures et des méthodes de travail différentes nécessitant une période d’adaptation et des ajustements, ce qui coïncide avec l’envoi des courriels dont se plaint Mme X, contemporains du rachat de l’entreprise ou ayant suivi immédiatement ce rachat (20 janvier 2015, 4 mars 2015).

Il résulte par ailleurs des courriels de Mme Z, directrice de l’Académie d’art dentaire de

PARIS, datés de février et début mars 2015, qu’elle propose à Mme X de la guider ou de l’aider à accomplir ses tâches.

C’est Mme X elle-même qui indique qu’il lui arrivait auparavant de travailler pendant les vacances scolaires, tandis qu’à l’attestation du 6 février 2015, dont elle est la rédactrice, dans laquelle elle déclare demander à ses employeurs, M. et Mme A, à travailler la semaine du 16 au 20 février pour surcharge de travail dans l’intérêt de l’école, la directrice générale, Mme A répond le même jour qu’elle est d’accord, mais que cette semaine ( sous-entendu de congés) sera à rattraper à une date qui ne perturbera pas le fonctionnement de l’école, ce qui vient confirmer le caractère temporaire de cette période d’adaptation, puisqu’il était clair que la semaine serait compensée.

A l’issue de la visite périodique du 2 mars 2015, le médecin du travail a émis l’avis suivant: 'apte temporaire' et a précisé 'à revoir dans un mois pour rééavaluation', ce qui signifie qu’il a jugé Mme X apte à exercer ses fonctions.

Au vu de ces éléments, étant en outre observé que Mme X a été placée en arrêt de travail le 6 mars 2015, six semaines seulement après le 20 janvier 2015, date de reprise de l’activité par la société IPSO, et quatre jours après l’avis d’aptitude du médecin du travail, la réalité des pressions et de la surcharge de travail alléguées n’est pas établie.

deuxième grief

Mme X reproche à la société IPSO d’avoir modifié son contrat de travail en lui proposant un avenant qui avait pour conséquence de modifier ses fonctions, car elle devenait secrétaire administrative et comptable, alors qu’elle exerçait les tâches de gestionnaire, et de bouleverser sa durée de travail et sa rémunération, puisque la durée hebdomadaire du travail passait de 32 heures à 35 heures et que sa rémunération brute était réduite à 30.000 euros par an payable en douze mois, soit 2.500 euros par mois avec suppression des primes administrative et d’ancienneté, ce qui correspondait à une baisse de plus de 11 % corrélative à une augmentation du temps de travail de 15 %.

Toutefois, Mme X a refusé cet avenant et la société IPSO a admis qu’elle ne pouvait imposer à sa salariée une telle modification qui n’a dès lors jamais été suivie d’effet.

Le fait que la société IPSO ait décidé de retirer à Mme X les tâches de saisie des factures et d’établissement des bulletins de paie, qui ne peuvent être définies comme des responsabilités mais plutôt comme des charges, tâches qu’elle effectuait précédemment, pour les confier à son cabinet d’expertise-comptable, ne caractérise pas une modification du contrat de travail, dans la mesure où il n’existait pas de définition précise des tâches attribuées à Mme X, tant dans le cadre de sa fonction de secrétaire administrative et comptable antérieure au 31 juillet 2014, que dans celle de gestionnaire à compter de cette date, la société IPSO démontrant du reste que la fonction de gestionnaire ne figure pas dans la classification de la convention collective de l’enseignement privé hors contrat.

Ce grief n’est en conséquence pas établi.

troisième grief

Mme X soutient que l’avenant au contrat de travail signé le 31 juillet 2014 ne prévoit pas de réduction de la prime en cas de suspension du contrat de travail, de sorte que que la société IPSO est redevable à son égard d’un solde de prime.

La société IPSO fait valoir que Mme X a bien été indemnisée durant ses arrêts de travail sur une base tenant compte du treizième mois versé en 2014 et que la prime a été proratisée sur la

période du 1er janvier 2015 au 6 mars 2015.

Mme X a reçu la partie proratisée de la prime à la date du versement de son solde de tout compte, soit postérieurement à son licenciement, de sorte qu’elle ne peut se prévaloir, à l’appui de sa demande en résiliation judiciaire de son contrat de travail, d’un manquement de l’employeur de ce chef, puisque le contrat était déjà rompu.

quatrième grief

Mme X fait valoir qu’à la suite de l’avenant du 31 juillet 2014, sa rémunération est passée de 2.404,94 euros par mois à 2.445,96 euros par mois, mais qu’elle a continué à être rémunérée à hauteur de 2.404,94 euros par mois jusqu’à la fin de la relation contractuelle.

La société IPSO explique que Mme X, qui établissait elle-même les bulletins de salaire, y compris le sien, a omis de modifier le montant de sa rémunération mensuelle à compter d’août 2014 et qu’elle-même a continué à établir les bulletins sur cette même base à compter de janvier 2015.

Il apparaît ainsi que l’absence de versement du différentiel de salaire consécutif à l’augmentation résulte d’une erreur matérielle antérieure à l’arrivée de la société IPSO.

Le grief n’est dès lors pas constitué.

cinquième grief

Mme X expose qu’elle a dû adresser le 3 janvier 2016 une lettre recommandée avec accusé de réception à la société IPSO pour obtenir ses documents de fin de contrat et que l’attestation POLE EMPLOI était erronée sur deux points, qu’elle a dû solliciter une attestation rectifiée, ce qui lui a causé un préjudice puisque cela a retardé son inscription auprès de POLE EMPLOI.

Or, comme le fait justement observer la société IPSO, d’une part le document a été rectifié, d’autre part, il s’agit d’un document de fin de contrat.

Aucune faute dans l’exécution du contrat de travail ne peut dès lors être alléguée.

En conséquence, Mme X ne démontrant pas l’existence de manquements de l’employeur, c’est à tort que le conseil de prud’hommes dont le jugement sera infirmé sur ce point, a accueilli la demande en résiliation judiciaire du contrat de travail.

Sur le licenciement

Mme X soutient que son inaptitude est la conséquence du comportement fautif de l’employeur.

Elle verse aux débats des documents médicaux, notamment le certificat du docteur B, médecin psychiatre, en date du 10 avril 2015, attestant que son état de santé nécessite un arrêt de travail au titre de l’accident du travail du 6 mars 2015 qui a entraîné un syndrôme psychotraumatique compliqué de dépression et de phobies, celui du docteur C, médecin psychiatre, daté du 17 mars 2016 qui atteste qu’elle bénéficie d’un suivi psychiatrique régulier bi-mensuel depuis le 12 octobre 2015, date de sa première consultation à son cabinet et qu’elle présente un état de décompensation anxio-dépressive réactionnelle qui aurait débuté en mars 2015, et le certificat médical d’un médecin généraliste daté du 18 mars 2016 attestant qu’elle est sous antidépresseurs et anxiolytiques depuis le 6 mars 2015.

Or, il a été dit ci-dessus qu’aucun manquement n’était démontré à l’encontre de la société IPSO.

Dans ces conditions, l’inaptitude n’est pas d’origine professionnelle et la demande en paiement d’un solde d’indemnité spéciale de licenciement n’est pas fondée et doit être rejetée.

En l’absence de lien entre une faute commise par l’employeur et l’inaptitude de Mme X, sa demande tendant à voir dire que le licenciement est sans cause réelle et sérieuse pour un tel motif sera rejetée.

L’article L1226-2 du code du travail dispose que lorsque, à l’issue des périodes de suspension du contrat de travail consécutives à une maladie ou un accident non professionnel, le salarié est déclaré inapte par le médecin du travail à reprendre l’emploi qu’il occupait précédemment, l’employeur lui propose un autre emploi approprié à ses capacités, que cette proposition prend en compte les conclusions écrites du médecin du travail et les indications qu’il formule sur l’aptitude du salarié à exercer l’une des tâches existantes dans l’entreprise, que l’emploi proposé est aussi comparable que possible à l’emploi précédemment occupé, au besoin par la mise en oeuvre de mesures telles que mutations, transformations de postes de travail ou aménagement du temps de travail.

Ainsi, si le médecin du travail a constaté l’inaptitude physique d’un salarié, l’employeur est tenu de lui faire des propositions de reclassement loyales et sérieuses dans la limite des postes disponibles.

Seules les recherches de reclassement compatibles avec les conclusions du médecin du travail émises au cours de la visite de reprise peuvent être prises en considération pour apprécier le respect par l’employeur de son obligation de rechercher à son salarié un reclassement avant de le licencier éventuellement pour inaptitude.

Cette obligation de reclassement s’impose à l’employeur, et à défaut, le licenciement est privé de cause réelle et sérieuse.

Aux termes de la lettre de licenciement, la société IPSO informe Mme X que malgré les prescriptions très restrictives du médecin du travail, elle a entamé des recherches en vue d’un reclassement au sein de l’entreprise en tenant compte de ces prescriptions, de son niveau de formation initial, de la nature des emplois de sa petite structure et des éventuelles possibilités d’aménagement de poste, qu’elle a élargi ces recherches au niveau du groupe auquel elle appartient, qu’elle avait un poste de secrétaire comptable qui s’ouvrait à IPSO PARIS, qu’elle a préalablement demandé l’avis du médecin du travail pour savoir si ce poste pouvait convenir au regard de son état de santé, mais que le médecin du travail avait jugé qu’elle ne pouvait pas occuper ce poste.

Mme X soutient qu’aucun poste de reclassement ne lui a été proposé alors que le registre d’entrée et de sortie du personnel de la société IPSO BORDEAUX permet d’identifier un poste d’assistante pédagogique et administrative,pourvu le 9 novembre 2015, qui aurait pu lui être proposé, le fait que ce poste ait été pourvu sous le régime d’un contrat de professionnalisation ne résultant que d’un choix de la société et que, dans le cadre de son obligation de reclassement, la société IPSO aurait dû rechercher un emploi disponible approprié à ses capacités.

A l’issue de la seconde visite de reprise du 9 novembre 2015, le médecin du travail a confirmé son premier avis d’inaptitude en date du 22 octobre 2015 et émis l’avis suivant: 'inapte à la reprise du poste de gestionnaire. L’état de santé ne permet pas d’envisager de tâche ou de poste existant à ce jour dans l’entreprise. Etude de poste le 10 novembre 2015.'

La société IPSO LYON justifie des réponses négatives que lui ont envoyé les Académies d’art dentaire d’AIX EN PROVENCE et de BORDEAUX le 23 novembre 2015 en réponse à sa demande de reclassement pour Mme X.

Dans sa lettre du 23 novembre 2015, l’Académie d’art dentaire de PARIS a indiqué qu’elle avait besoin d’embaucher une secrétaire assistante administrative au sein de son école à MONTROUGE.

Le même jour, la société IPSO LYON a écrit au médecin du travail pour lui demander si le poste ainsi proposé était compatible avec l’état de santé de Mme X.

Le médecin du travail a répondu le 24 novembre 2015 que l’état de santé de Mme X ne lui permettait pas d’occuper le poste de secrétaire assistante administrative au sein de l’école située à MONTROUGE.

En ce qui concerne le poste revendiqué par Mme X situé à BORDEAUX, il apparaît qu’il a été pourvu au moyen d’un contrat de professionnalisation le 9 novembre 2015, si bien qu’il n’était pas disponible au moment où la société IPSO était tenue de commencer sa recherche de reclassement, soit à la date du second avis d’inaptitude.

Dès lors, la société IPSO démontre qu’aucun poste compatible avec l’état de santé de Mme X n’était disponible dans le groupe, tandis que le médecin du travail, après étude de poste, avait précisé qu’il n’y avait pas de poste susceptible d’être proposé à Mme X dans la société IPSO LYON.

La société IPSO LYON ayant rempli ses obligations en matière de recherche de reclassement, la demande de Mme X tendant à voir dire que son licenciement est sans cause réelle et sérieuse sera rejetée.

Le jugement sera infirmé en ce qu’il a condamné la société IPSO LYON à payer à Mme X une indemnité compensatrice de préavis et une indemnité de congés payés afférents et des dommages et inétrêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Le jugement sera également infirmé par voie de conséquence en ce qu’il a ordonné le remboursement à POLE EMPLOI des indemnités de chômage versées à la salariée, l’article L1235-4 du code du travail ne s’appliquant pas, en tout état de cause, en cas de résiliation judiciaire du contrat de travail.

Sur les demandes en paiement d’un complément de salaire et d’un solde de prime de treizième mois

Il convient de confirmer le jugement qui a condamné la société IPSO à verser à Mme X la somme 656,32 euros à titre de rappel de salaire pour la période de septembre 2014 à décembre 2015, outre 65,63 euros à titre de congés payés afférents, la société IPSO n’établissant pas qu’il faudrait déduire de cette somme des primes indûment versées.

En ce qui concerne la prime de treizième mois, il ne ressort pas des stipulations de l’avenant du 1er septembre 2009 qui l’a instituée qu’il s’agit d’une gratification annuelle soumise à l’exigence de la présence de la salariée dans l’entreprise, laquelle ne serait pas dûe en cas de suspension du contrat de travail.

En conséquence, c’est à tort que le conseil de prud’hommes a rejeté la demande en paiement d’un solde de la prime présentée par Mme X.

Il convient de condamner la société ACADEMIE D’ART DENTAIRE venant aux droits de la société IPSO à payer à Mme X la somme de 2.132,14 euros bruts sollicitée à ce titre.

Il y a lieu d’ordonner à la société ACADEMIE D’ART DENTAIRE de remettre à Mme X un bulletin de salaire comportant les rappels de salaire et de prime, conformément au jugement confirmé sur ce point et au présent arrêt, sans qu’il soit nécessaire d’assortir cette obligation d’une astreinte.

Compte-tenu de la solution apportée au litige, chacune des parties conservera la charge de ses dépens de première instance et d’appel.

Le jugement sera donc infirmé en ce qu’il a condamné la société IPSO LYON aux droits de laquelle se trouve la société ACADEMIE D’ART DENTAIRE aux dépens et à payer à Mme X une indemnité de procédure.

Il convient de rejeter les demandes fondées sur l’article 700 du code de procédure civile en première instance et en cause d’appel.

PAR CES MOTIFS:

Statuant publiquement par arrêt mis à disposition au greffe et contradictoirement :

INFIRME le jugement, sauf en ce qu’il a condamné la société IPSO LYON aux droits de laquelle se trouve désormais la société ACADEMIE D’ART DENTAIRE à payer à Mme D X un rappel de salaire et l’indemnité de congés payés afférents et rejeté la demande en paiement d’un solde d’indemnité spéciale de licenciement

STATUANT à nouveau,

REJETTE la demande en résiliation judiciaire du contrat de travail

REJETTE les demandes subsidiaires tendant à voir dire que l’inaptitude de Mme X est d’origine professionnelle et que son licenciement est sans cause réelle et sérieuse

REJETTE les demandes en paiement consécutives à la rupture du contrat de travail

DIT n’y avoir lieu à ordonner le remboursement des indemnités de chômage à POLE EMPLOI

CONDAMNE la société ACADEMIE D’ART DENTAIRE à payer à Mme D X la somme de 2.132,14 euros bruts à titre de solde de prime de treizième mois pour l’année 2015

Y AJOUTANT,

ORDONNE à la société ACADEMIE D’ART DENTAIRE de remettre à Mme X un bulletin de salaire comportant les rappels de salaire et de prime

DIT que chacune des parties conservera la charge de ses dépens de première instance et d’appel

REJETTE les demandes de la société IPSOS LYON, aux droits de laquelle se trouve la société ACADEMIE D’ART DENTAIRE et de Mme D X fondées sur l’article 700 du code de procédure civile en première instance et en cause d’appel.

Le greffier La Présidente

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Cour d'appel de Lyon, Chambre sociale a, 18 décembre 2019, n° 17/01506