Cour d'appel de Lyon, 6ème chambre, 19 décembre 2019, n° 18/06364

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Lyon, 6e ch., 19 déc. 2019, n° 18/06364
Juridiction : Cour d'appel de Lyon
Numéro(s) : 18/06364
Décision précédente : Tribunal d'instance de Villefranche-sur-Saône, 25 juin 2018, N° 11-17-0611
Dispositif : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée

Sur les parties

Texte intégral

N° RG 18/06364 – N° Portalis DBVX-V-B7C-L5FS

décision du

Tribunal d’Instance de VILLEFRANCHE SUR SAONE

au fond

du 26 juin 2018

RG :11-17-0611

X

SA FILIA MAIF

C/

B C

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE LYON

6e Chambre

ARRET DU 19 Décembre 2019

APPELANTS :

M. A X

né le […] à […]

Mme D E épouse X

née le […] à […]

[…]

69220 SAINT H I

SA FILIA MAIF

[…]

[…]

[…]

Représentés par Me Roger TUDELA de la SAS TUDELA ET ASSOCIES, avocat au barreau de LYON

INTIMES :

M. Z B C

né le […] à […]

Mme J SA K L M épouse B C

née le […] à […]

[…]

[…]

Représentés par Me Laurent DUZELET, avocat au barreau de VILLEFRANCHE-SUR-SAONE

* * * * * *

Date de clôture de l’instruction : 03 Septembre 2019

Date des plaidoiries tenues publiquement : 26 Novembre 2019

Date de mise à disposition : 19 Décembre 2019

Composition de la Cour lors des débats et du délibéré:

— Dominique BOISSELET, président

— Catherine CLERC, conseiller

— Karen STELLA, conseiller

assistée pendant les débats de Jessica LICTEVOUT, greffier

A l’audience, Dominique BOISSELET, président, a fait le rapport, conformément à l’article 785 du code de procédure civile.

Arrêt Contradictoire rendu publiquement par mise à disposition au greffe de la cour d’appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l’article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,

Signé par Dominique BOISSELET, président, et par Jessica LICTEVOUT, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

* * * * *

FAITS, PROCÉDURE ET DEMANDES DES PARTIES

Le 23 juillet 2013, les époux X ont acquis des époux B C une maison d’habitation, située à Saint H I (Rhône) pour le prix de 248.000 euros.

La maison est un pavillon de plein pied édifié par l’entreprise B C Frères pour la maçonnerie et livré brut le 30 novembre 2011 à M. B C, professionnel du bâtiment, qui a fait les travaux d’aménagement.

Le 20 octobre 2014, les époux X ont constaté d’importantes fuites au niveau de la salle de bains et ont informé leur assureur Filia-MAIF qui a mandaté l’entreprise AAD Phénix.

Le 27 octobre 2014, l’entreprise AAD Phénix a diagnostiqué une fuite du flexible d’alimentation d’eau chaude de la baignoire et préconisé son changement intégral ainsi que l’assèchement des cloisons et du sol de la salle de bains.

M. B C, informé par les acquéreurs, a procédé lui-même au remplacement du flexible en novembre 2014 mais a refusé de financer les travaux consécutifs au dégât des eaux, chiffrés par l’expert mandaté par Filia-MAIF à 2.946,13 euros ttc outre 480,70 euros pour les frais de recherche de fuite.

En dépit de la réparation, une nouvelle fuite est survenue et le montant des réparations a été chiffré par Filia-MAIF à 5.175,50 euros, soit 4.471,28 euros vétusté déduite.

Filia-MAIF a versé à ses assurés une indemnité de 3.990,58 euros.

En octobre 2015, les époux X ont signalé à leur assureur un nouveau dégât des eaux.

Le 10 février 2016, l’entreprise AAD Phénix, de nouveau mandatée par Filia-MAIF, ne constate pas d’anomalie dans le réseau sanitaire mais préconise la reprise du placo-plâtre de la salle de bains pour le rendre hydrofuge, la reprise des joints silicone de l’évier de la cuisine et le remplacement du syphon de l’évier.

Un nouveau rapport d’expertise du 25 octobre 2016 chiffre les travaux à 5.879,06 euros en valeur à neuf et recherche de fuite comprise, soit 5.060,23 euros.

Le 24 novembre 2016, la Filia-MAIF a versé aux époux X une indemnité de 4.933,63 euros.

Les réclamations adressées par l’assureur aux époux B C par courriers des 10 juin 2015, 14 septembre 2015, 16 janvier 2017, 8 mars 2017 et 20 juillet 2017 sont restées sans suite.

Par acte d’huissier de justice du 21 septembre 2017, les époux X et la SA Filia-MAIF ont fait assigner les époux B C à comparaître devant le tribunal d’instance de Villefranche sur Saône pour les voir condamner au paiement des sommes suivantes :

— à la Filia-MAIF, subrogée dans les droits des époux X : 6.203,09 euros correspondant aux sommes versées aux propriétaires à la suite des deux dégâts des eaux,

— aux époux X, 1.648,27 euros correspondant aux sommes restantes à leur charge comprenant les indemnités différées et les franchises,

— aux époux X, 1.000 euros au titre du préjudice de jouissance des différentes parties de leur maison inaccessible à la suite des dégâts des eaux,

— aux époux X, 1.000 euros à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive,

— à la Filia-MAIF, 1.500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Par jugement en date du 26 juin 2018, le tribunal d’instance de Villefranche sur Saône a :

— débouté les époux X et la Filia-MAIF de leurs entières demandes,

— condamné les époux X et la Filia-MAIF, in solidum, à payer aux époux B C la somme de 1.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

— condamné les époux X et la Filia-MAIF, in solidum, aux dépens.

Les époux X et la Filia-MAIF ont relevé appel de cette décision par déclaration reçue au greffe de la Cour le 11 septembre 2018.

En leurs dernières conclusions du 8 février 2019, les époux X et la SA Filia-MAIF demandent à la Cour ce qui suit, au visa des articles 1792 et suivants et 1231-1 du code civil:

— réformer le jugement rendu par le tribunal d’instance de Villefranche sur Saône en date du 26 juin 2018 en ce qu’il a :

* débouté les époux X et la Filia-MAIF de leurs entières demandes ;

* condamné les époux X et la Filia-MAIF in solidum à payer aux époux B C la somme de 1.000 euros, sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile;

* condamné les époux X et la Filia-MAIF in solidum aux dépens.

et statuant à nouveau,

à titre principal,

— juger que la responsabilité des époux B C est clairement établie au regard des dispositions des articles 1792 et suivants du code civil en ce que la maison établie de leur main présente d’importants problèmes d’infiltration d’eau fragilisant la structure de la maison et compromettant ainsi la solidité de l’ouvrage ;

— juger qu’en vertu des dispositions précitées, la responsabilité des époux B C est engagée de plein droit ;

à titre subsidiaire,

— juger que la responsabilité des époux B C peut être recherchée sur le fondement contractuel conformément à l’article 1231-1 du code civil compte-tenu de la mauvaise application des travaux effectués et plus particulièrement du choix des matériaux ;

en tout état de cause,

— constater l’action subrogatoire de la compagnie d’assurance Filia-MAIF en ce que cette dernière a désintéressé ses sociétaires suite aux différents dégâts ;

par conséquent,

— condamner les époux B C à payer à la Filia-MAIF, subrogée dans les droits des époux X, la somme de 6.203,09 euros correspondante aux sommes versées aux propriétaires suite aux deux dégâts des eaux ;

— condamner les époux B C à payer aux époux X la somme de 1.648,27 euros correspondant aux sommes restantes à leur charge comprenant les indemnités différées et les franchises ;

— condamner les époux B C à payer aux époux X la somme de 1.000 euros au titre du préjudice de jouissance des différentes parties de leur maison inaccessible à la suite des dégâts des eaux ;

— condamner les époux B C à payer aux époux X la somme de 1.000 euros au titre de dommages et intérêts pour résistance abusive ;

— condamner les époux B C à payer à la Filia-MAIF la somme de 1.500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

— débouter les époux B C de leurs demandes fins et conclusions ;

— condamner les mêmes aux entiers dépens de première instance et d’appel, ces derniers étant distraits au profit de la SAS Tudela & Associés, avocats, sur son affirmation de droit.

Par dernières conclusions du 17 mai 2019, les époux B C demandent à la Cour ce qui suit, au visa des articles 1792 et 1147 ancien du Code civil :

— juger que les dommages allégués par les époux X ne relèvent pas de la garantie décennale des époux B C ;

— juger que la preuve d’une faute contractuelle des époux B C n’est pas rapportée ;

par conséquent,

— confirmer en toutes ses dispositions le jugement rendu par le tribunal d’instance de Villefranche sur Saône en date du 26 juin 2018 en ce qu’il a débouté les époux X et leur assureur Filia-MAIF de l’intégralité de leurs demandes et les a condamnés à verser aux époux B C la somme de 1.000,00 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;

— condamner in solidum les époux X et la Filia-MAIF à verser aux époux B C la somme de 2.000,00 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;

— condamner les époux X et la Filia-MAIF aux entiers dépens distraits au profit de la SELARL PBO Avocats Associés, avocat, sur son affirmation de droit.

L’ordonnance de clôture a été rendue le 3 septembre 2019.

Il est expressément renvoyé aux dernières conclusions des parties pour l’exposé exhaustif de leurs moyens et prétentions.

MOTIFS DE LA DÉCISION

A titre préliminaire, la Cour observe que les parties ne produisent pas l’acte de vente authentique du 23 juillet 2013 mais une simple attestation du notaire, de sorte que les clauses de la vente relatives à la garantie décennale des constructeurs vendeurs et à la garantie des vices cachés ne sont pas soumises au débat.

1 / Sur le sinistre constaté en octobre 2014

Il résulte des dispositions des articles 1792 et 1792-1.2°du code civil que la personne qui vend après achèvement un ouvrage qu’elle a construit ou fait construire, réputée constructeur de l’ouvrage, est présumée responsable des dommages qui compromettent sa solidité ou qui, l’affectant dans ses éléments constitutifs ou l’un de ses éléments d’équipement, le rendent impropre à sa destination.

Il ressort du rapport de l’entreprise AAD Phénix que le dégât des eaux trouve sa cause dans le percement du flexible d’alimentation d’eau chaude de la baignorire balnéo. Ce flexible étant masqué par le coffrage de la baignoire, la fuite a perduré en dégradant le doublage cloison, l’isolation en laine de verre et les plinthes carrelées dans une chambre.

Par ailleurs, les constatations du cabinet d’expertise Eurexo, mandaté par l’assureur le 25 mars 2015, dans son rapport du 19 mai 2015, ne sont pas contestées par les époux B C.

Etant précisé que la Filia-MAIF justifie que les époux B C ont été convoqués à une réunion d’expertise du 23 avril 2015 en versant aux débats l’accusé de réception de la lettre recommandée avec demande d’avis de réception, signé à une date non précisée.

Le premier juge a relevé que ce flexible est détachable de la construction et a d’ailleurs été remplacé par M. B C. Il n’en constitue pas moins un élément d’équipement au sens des dispositions précitées et son percement a effectivement rendu l’ouvrage impropre à son usage par les écoulements d’eau qui ont progressivement dégradé les cloisons et l’isolation. L’humidité permanente qui en résulte rend effectivement le bâtiment impropre à sa destination.

Il importe peu que les dégâts causés par la fuite d’eau n’aient pas compromis la solidité de la construction. C’est par une erreur d’appréciation que le premier juge a écarté la responsabilité décennale du constructeur au motif que les dégradations induites par la fuite ont affecté des équipements, revêtements de sol et murs, dont la dégradation ne compromettait pas la solidité de l’ouvrage.

L’expert a déterminé un préjudice total de 4.694,80 euros sur lequel l’assureur a versé aux époux X une indemnité de 3.990,58 euros après déduction d’une somme de 15 % (704,22 euros) au titre de la vétusté, selon quittance subrogatoire du 14 septembre 2015.

Il en résulte que la Filia-MAIF est fondée à réclamer aux époux B C paiement de la somme de 3.990,58 euros dans le cadre de son action subrogatoire.

Le préjudice des époux X s’établit à 704,22 euros au titre des frais de reprise restés à leur charge et 500 euros en réparation de leur trouble de jouissance.

2 / Sur le sinistre constaté en octobre 2015

Le tribunal a estimé que le rapport d’expertise du cabinet Eurexo, mandaté par la Filia-MAIF, n’a pas été établi contradictoirement, aucune mention n’étant faite de ce que les époux B C auraient été convoqués aux réunions des 15 décembre 2015 et 10 octobre 2016 et qu’il n’est pas justifié du mode de convocation à la réunion du 21 juin 2016.

En l’absence d’autre élément de preuve de l’origine des désordres, le premier juge a estimé que la responsabilité des époux B C ne pouvait pas être retenue sur la seule base d’un rapport non contradictoire établi par le mandataire d’une partie.

Il ressort des termes du rapport Eurexo que l’expert a fait deux réunions 'unilatérales’ les 15 décembre 2015 et 10 octobre 2016, à la différence de la réunion du 21 juin 2016 qu’il qualifie de contradictoire pour avoir convoqué M. B C.

Mais, pas plus que devant le premier juge, les appelants ne justifient de l’effectivité de la convocation des époux B C aux opérations d’expertise. Ils se bornent à produire la copie d’une lettre recommandée avec demande d’avis de réception qui aurait été adressée le 30 mai 2016 à l''entreprise B C Frères' à St H I.

Cette convocation à l’adresse de cette entreprise est inopérante puisqu’elle ne s’adresse pas aux époux B C. Elle est de surcroît incompréhensible dans la mesure où l’expert d’Eurexo avait précisé, dans son premier rapport du 19 mai 2015, que l’entreprise n’était pas concernée par les désordres, n’ayant pas effectué les travaux de plomberie.

Le fait que les époux B C ont été informés par courrier de l’assureur du 11 décembre 2015 de la survenance d’un nouveau sinistre et de l’organisation d’une expertise à laquelle ils devaient être convoqués ultérieurement, ne saurait pallier à cette carence dans le respect des règles du contradictoire de la preuve. Dans ces conditions, le jugement mérite confirmation en ce qu’il a rejeté la demande indemnitaire au titre du sinistre

d’octobre 2015 à défaut de preuve admissible.

3 / Sur les autres demandes

La résistance des époux B C ne peut être qualifiée d’abusive dès lors qu’elle n’est pas totalement infondée eu égard à la carence probatoire des appelants. La demande de dommages et intérêts de ce chef est rejetée.

Le litige trouve sa cause dans la médiocrité de la construction réalisée par les époux B C. Il convient qu’ils supportent les dépens de première instance et d’appel ainsi que les frais irrépétibles exposés par l’assureur à concurrence de 1.500 euros.

PAR CES MOTIFS :

La Cour,

Confirme le jugement prononcé le 26 juin 2018 par le tribunal d’instance de Villefranche sur Saône en ce qu’il a débouté les époux X de leurs demandes au titre du sinistre d’octobre 2015 et au titre de la résistance abusive ;

Réforme le jugement en toutes ses autres dispositions et, statuant à nouveau,

Condamne in solidum les époux Z et J B C à payer à la SA Filia-MAIF les sommes de 3.990,58 euros au titre de son recours subrogatoire et 1.500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;

Condamne in solidum les époux Z et J B C à payer aux époux A et D X les sommes de 704,22 euros en réparation de leur préjudice matériel et 500 euros en réparation de leur trouble de jouissance ;

Condamne in solidum les époux Z et J B C aux dépens de première instance et d’appel, ces derniers avec droit de recouvrement direct au profit de la SAS Tudela & Associés, avocats ;

Rejette le surplus des demandes des parties.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT

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Textes cités dans la décision

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  2. Code civil
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