Cour d'appel de Metz, 1ère chambre, 1er décembre 2016, n° 16/01763

  • Provision·
  • Mise en état·
  • Ordonnance·
  • Marc·
  • Sociétés·
  • Expert·
  • Trouble·
  • Responsabilité·
  • Juge·
  • Immeuble

Commentaire0

Augmentez la visibilité de votre blog juridique : vos commentaires d’arrêts peuvent très simplement apparaitre sur toutes les décisions concernées. 

Sur la décision

Référence :
CA Metz, 1re ch., 1er déc. 2016, n° 16/01763
Juridiction : Cour d'appel de Metz
Numéro(s) : 16/01763
Dispositif : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Sur les parties

Texte intégral

Minute n° 16/00499

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE
FRANÇAIS

R.G : 16/01763

X, Y

C/

Z

COUR D’APPEL DE METZ

1eRE CHAMBRE CIVILE

ARRÊT DU 01 DECEMBRE 2016

APPELANTS :

Monsieur A X

XXX

XXX

Représenté par Me Stéphane FARAVARI, avocat au barreau de METZ

Madame B Y épouse X

XXX

XXX

Représentée par Me Stéphane FARAVARI, avocat au barreau de METZ

INTIMÉE :

Madame C Z

XXX

XXX

Représentée par Me A
ZACHAYUS, avocat au barreau de METZ

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU
DÉLIBÉRÉ :

PRÉSIDENT : M. HITTINGER, Président de
Chambre

ASSESSEURS : Madame STAECHELE, Conseiller

Madame BOU, Conseiller qui a fait le rapport.

GREFFIER PRÉSENT AUX DÉBATS : Madame D SAHLI

DATE DES DÉBATS : Audience publique du 06 Octobre 2016

L’affaire a été mise en délibéré pour l’arrêt être rendu le 01 Décembre 2016.

EXPOSE DU LITIGE

Par acte authentique du 29 mars 2012, A X et son épouse B Y ont acquis un appartement ainsi qu’un plateau à aménager se trouvant dans les combles d’un immeuble situé 5 rue des Huilliers à Metz.

En mai 2012, ils ont confié la réalisation de travaux d’aménagement à l’EURL FL Rénovation et ont mandaté la société Case Factory en qualité de maître d’oeuvre.

Le 3 novembre 2012, un mur pignon extérieur s’est écroulé sur une cheminée contiguë, provoquant d’importants dommages dans l’immeuble.

Par ordonnance du 23 avril 2013, le juge des référés du tribunal de grande instance de Metz, saisi par la société Le Palais Marocain exploitant un restaurant situé en rez de chaussée de l’immeuble et la société d’assurances Areas à l’encontre de diverses parties dont A X, a ordonné une expertise confiée à Marc Santolini.

Se plaignant aussi de désordres causés par le sinistre, C Z, propriétaire d’un appartement situé au 3e étage de l’immeuble, a assigné A X devant le même juge qui, par ordonnance de référé du 1er octobre 2013, a ordonné une autre expertise confiée également à
Marc Santolini.

Par acte d’huissier du 30 avril2014, C Z a assigné les époux X devant le tribunal de grande instance de Metz pour obtenir, au visa de l’article 1382 du code civil, l’indemnisation de ses préjudices.

Les époux X ont, par actes d’huissier des 19, 22 et 23 septembre 2044, appelé en intervention forcée la SCP Noel Nodee Lanzetta en qualité de mandataire à la liquidation judiciaire de la société
FL Rénovation, la société Entreprise André
Obringer et la société MMA Assurances, assureur de FL
Rénovation.

Les procédures ont été jointes.

Par requête enregistrée le 5 mai 2015, la société MMA IARD a saisi le juge de la mise en état aux fins de voir ordonner un retour du dossier à Marc Santolini, expert désigné suivant ordonnance du 1er octobre 2013, avec mission de dissocier les désordres dénoncés par C Z.

Celle-ci a conclu principalement au rejet de la demande, subsidiairement à la possibilité de formuler des dires à l’expert, et a sollicité la condamnation solidaire des époux X à lui payer une provision de 50 000 euros à valoir sur l’indemnisation de son préjudice ainsi que la condamnation in solidum des époux X et de la société MMA IARD à lui payer la somme de 1 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux dépens.

Les époux X ont acquiescé à la demande de retour du dossier à l’expert.

Par ordonnance du 13 mai 2016, le juge de la mise en état a ordonné le retour du dossier à Marc
Santolini, expert désigné suivant ordonnance du 1er octobre 2013, et a condamné solidairement les époux X à payer à
C Z une provision de 50 000 euros à valoir sur l’indemnisation de son préjudice, ainsi que la somme de 600 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile. Le juge de la mise en état a dit que les dépens de l’incident suivraient le sort du principal et a renvoyé la cause à une audience de mise en état ultérieure.

Pour statuer ainsi, le juge de la mise en état a retenu que le principe de la demande d’indemnisation de C Z n’était pas discuté au fond par les époux X, que l’expert avait chiffré le seul préjudice matériel à 77 477 + 4999,28 euros TTC et que si les époux X discutaient certains postes dans leurs premières conclusions, la provision de 50 000 euros sollicitée n’était pas sérieusement contestable en son quantum.

Par déclaration de leur avocat faite le 6 juin 2016 au greffe de la cour d’appel de Metz, les époux
X ont relevé appel de cette ordonnance à l’encontre de C
Z.

Par ordonnance du 13 juin 2016 rendue au visa de l’article 905 du code de procédure civile et de l’urgence, le conseiller de la mise en état a fixé les plaidoiries au 6 octobre 2016 et dit que la clôture interviendrait lors de cette audience.

Par conclusions de leur avocat du 2 septembre 2016, les époux X demandent à la Cour de:

'Recevoir l’appel de Monsieur et Madame X et le dire bien fondé.

Infirmer l’ordonnance entreprise et statuant à nouveau :

Débouter Madame Z de l’ensemble de ses demandes, les rejeter.

Condamner Madame Z aux entiers frais et dépens d’instance et d’appel ainsi qu’à payer à Monsieur et Madame X une somme de 1 500 au titre de l’article 700 du CPC'.

Les époux X font valoir que C Z ne produit aucune pièce au soutien de ses demandes, ce qui justifie leur rejet conformément aux articles 9 et 132 du code de procédure civile.

Ils contestent par ailleurs leur responsabilité et relèvent que par ordonnance du 2 août 2016, le juge des référés, saisi d’une demande de provision similaire de la part de la société Le Palais Marocain, a considéré que leur mise en cause était non fondée et prématurée.

Par conclusions de son avocat du 29 septembre 2016, C Z demande à la Cour de recevoir l’appel mais de le dire mal fondé, de le rejeter, de confirmer l’ordonnance entreprise, de condamner les époux X à lui payer la somme de 2 400 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile et de les condamner solidairement aux dépens.

C Z indique produire ses pièces en même temps que ses conclusions et en déduit qu’il n’y a pas lieu à application des dispositions des articles 9 et 132 du code de procédure civile.

Elle explique fonder sa demande sur le trouble excédant les inconvénients normaux du voisinage qui engage la responsabilité des époux X en leur qualité de maîtres d’ouvrage des travaux à l’origine des dégradations de son bien, ajoutant qu’il s’agit d’une responsabilité de plein droit. Elle note d’ailleurs que dans leurs conclusions au fond, les époux
X ne contestaient pas leur responsabilité.

Elle fait valoir que l’ordonnance du 2 août 2016 lui est inopposable car ladite décision n’a pas au principal l’autorité de chose jugée et car elle n’est pas partie au litige ayant donné lieu à cette décision. Elle note au demeurant que le juge des référés a accordé une somme provisionnelle à valoir sur l’indemnisation des préjudices de la société Le
Palais Marocain mais qu’il a seulement retenu que les demandes formulées au titre des appels en garantie étaient prématurées.

Enfin, elle observe que le montant de la provision allouée par le premier juge n’est pas contesté et l’estime fondé au regard du rapport d’expertise.

MOTIFS DE L’ARRET

Sur la provision

Il résulte de l’article 771 alinéa 3 du code de procédure civile que le juge de la mise en état est, jusqu’à son dessaisissement, seul compétent, à l’exclusion de toute autre formation du tribunal, pour accorder une provision au créancier lorsque l’existence de l’obligation n’est pas sérieusement contestable.

Il est de principe que nul ne doit causer à autrui un trouble anormal de voisinage.

La responsabilité des troubles anormaux de voisinage n’est pas subordonnée à l’existence d’une faute mais est une responsabilité objective, sans faute.

A ce titre, la responsabilité du maître de l’ouvrage, qui cause du fait des travaux qu’il fait effectuer un trouble excédant les inconvénients normaux du voisinage, est engagée au vu du principe précité.

En l’espèce, pour justifier de sa demande, C Z produit plusieurs pièces énumérées dans un bordereau de pièces communiquées du 29 septembre 2012, dont le rapport d’expertise judiciaire de Marc Santolini dans le cadre de l’ordonnance du 1er octobre 2013.

C Z verse ainsi des éléments de preuve au soutien de sa prétention. En l’absence de contestation par les époux X postérieure à la date des conclusions et du bordereau de pièces de
C Z quant à la production et à la communication de ces pièces, celles-ci sont présumées avoir été régulièrement produites aux débats conformément à l’article 132 du code de procédure civile.

Il résulte de ces pièces, en particulier du rapport d’expertise susvisé, que le 3 novembre 2011, le mur de pignon réalisé par l’entreprise FL Rénovation s’est effondré, entraînant une cheminée et détruisant une partie du plancher des combles en cours de réalisation.
L’expert a noté que le sinistre a provoqué des désordres dans l’appartement de C Z situé au 3e étage qui venait d’être rénové et qu’en particulier, le plancher de séparation entre le 3e et le 4e étage s’est effondré. Il a estimé que le mur de pignon n’était pas autostable en phase provisoire sur la hauteur réalisée pour le projet avant la mise en oeuvre de la charpente bois et que les efforts de vent n’ont pas manqué de provoquer son effondrement, un vent de 20 km/h étant suffisant à cet effet suivant l’élancement de la paroi et la hauteur par rapport au sol supérieur. Il a notamment relevé que les travaux de rénovation devaient être repris en totalité, chiffrant le coût des travaux de réhabilitation à 77 477 euros TTC outre 4 999,28 euros TTC au titre de la maîtrise d’oeuvre pour la réfection de l’appartement. Il a aussi retenu que C Z n’a pu profiter de son bien depuis le sinistre et que la durée des travaux pouvait être estimée à deux mois.

Le lien de causalité entre les travaux effectués par l’entreprise FL Rénovation et les dommages subis par C Z est ainsi clairement établi et n’est d’ailleurs pas en lui-même remis en cause par les époux X. Au regard de la nature et de l’intensité de ces dommages qui ont rendu totalement inhabitable l’appartement de C Z aménagé comme logement, ces désordres

s’analysent incontestablement en des troubles persistants et graves qui caractérisent des troubles anormaux de voisinage.

Les époux X ne contestent nullement leur qualité de maîtres de l’ouvrage des travaux à l’origine des désordres. Au demeurant, celle-ci résulte sans équivoque de leurs conclusions datées du 27 août 2014 déposées devant le tribunal de grande instance de
Metz dans le cadre du litige initié à leur encontre par C Z puisqu’il y est mentionné : 'Monsieur et Madame X ont confié la maîtrise d’oeuvre de leur bien à la SARL CASE FACTORY et ont signé un contrat de louage d’ouvrage avec l’EURL FL RENOVATION, actuellement en liquidation judiciaire, le tout en vue d’aménager un appartement dans l’immeuble en litige’ et de leurs conclusions déposées devant la
Cour qui indiquent en page 2 qu’ils ont confié les travaux de rénovation à FL Rénovation.

Quant à l’ordonnance invoquée du 2 août 2016, elle est sans influence au regard du présent litige dès lors que C Z n’y est pas partie et que dans cette décision, le juge des référés n’a pas statué sur une demande de provision de la société Le
Palais Marocain dirigée contre les époux
X. Du reste, ce juge a en réalité condamné l’assureur de la société
FL Rénovation à verser une provision à la société Le Palais Marocain, ce qui démontre qu’il a également jugé comme incontestable le lien de causalité entre les travaux faits par cette société et les dégâts provoqués dans l’immeuble, mais a seulement rejeté les appels en garantie formés par l’assureur de la société FL
Rénovation.

Enfin, force est de constater que les moyens développés par les époux X ne portent que sur le principe de leur condamnation mais non sur le quantum de celle-ci, lequel apparaît au demeurant parfaitement justifié au regard du rapport d’expertise judiciaire qui ne fait l’objet d’aucune critique quant à l’évaluation des dommages.

En considération de ces éléments, l’ordonnance entreprise sera confirmée sur la provision.

Sur le retour du dossier à l’expert

Si, dans leur déclaration d’appel, les époux
X ont indiqué faire appel de la totalité de l’ordonnance du juge de la mise en état, ils ne développent aucune critique à l’encontre de cette décision en ce qu’elle a ordonné le retour du dossier à l’expert et ne concluent qu’au rejet des prétentions de C Z, laquelle n’est pas à l’origine de la demande de retour du dossier à
Marc Santolini.

En conséquence, l’ordonnance entreprise sera de ce chef également confirmée.

Sur les dépens et l’article 700 du code de procédure civile

Aux termes de l’article 696 alinéa premier du code de procédure civile, la partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n’en mette la totalité ou une fraction à la charge d’une autre partie. Selon l’article 772 du même code, le juge de la mise en état peut statuer sur les dépens et les demandes formées en application de l’article 700.

Les époux X succombant au moins pour partie, ils doivent être condamnés aux dépens de première instance, de même qu’à ceux d’appel. Ils seront déboutés de leur demande en application de l’article 700 du code de procédure civile et condamnés à payer sur ce fondement à C Z la somme de 1 500 euros au titre des frais irrépétibles d’appel, le jugement étant confirmé sur ceux de première instance.

PAR CES MOTIFS

LA COUR statuant publiquement et par arrêt contradictoire par mise à disposition au greffe :

CONFIRME l’ordonnance entreprise sauf en sa disposition relative aux dépens qui est infirmée ;

Statuant à nouveau dans cette limite et ajoutant :

CONDAMNE A X et B Y épouse X à payer à C Z la somme de 1 500 euros au titre des frais irrépétibles d’appel ;

DÉBOUTE A X et B Y épouse X de leur demande fondée sur l’article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNE A X et B Y épouse X aux dépens de première instance et d’appel.

Le présent arrêt a été prononcé par sa mise à disposition publique le 01 Décembre 2016, par M. HITTINGER, Président de Chambre, assisté de Madame SAHLI,
Greffier, et signé par eux.

Chercher les extraits similaires
highlight
Chercher les extraits similaires
Extraits les plus copiés
Chercher les extraits similaires

Textes cités dans la décision

  1. Code de procédure civile
  2. Code civil
Inscrivez-vous gratuitement pour imprimer votre décision
Cour d'appel de Metz, 1ère chambre, 1er décembre 2016, n° 16/01763