Cour d'appel de Montpellier, 15 décembre 2009, n° 09/00514

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Montpellier, 15 déc. 2009, n° 09/00514
Juridiction : Cour d'appel de Montpellier
Numéro(s) : 09/00514
Décision précédente : Tribunal de grande instance de Montpellier, 15 décembre 2008

Sur les parties

Texte intégral

COUR D’APPEL DE MONTPELLIER

3e CHAMBRE CORRECTIONNELLE

ARRET N°

DU 15/12/2009

XXX

GN/CW

prononcé publiquement le Mardi quinze décembre deux mille neuf, par la troisième Chambre des appels correctionnels, par Madame X, en application des dispositions de l’article 485 dernier alinéa du code de procédure pénale.

et assisté du greffier : Mademoiselle Y

qui ont signé le présent arrêt

en présence du ministère public près la Cour d’Appel

sur appel d’un jugement du Tribunal de Grande Instance de MONTPELLIER du 16 DECEMBRE 2008


COMPOSITION DE LA COUR, lors des débats et du délibéré :

Présidente : Madame X

Conseillers : Madame Z

Madame A


présents lors des débats :

Ministère public : Monsieur B

Greffier : Madame C


PARTIES EN CAUSE DEVANT LA COUR :

PREVENU

F N

née le XXX à XXX, de nationalité bulgare, demeurant C/0 Me O P – Ul.Bratia Petkovi 1 – BG 4400 XXX

Libre

Prévenue, appelante

Non comparante

Ayant pour avocat Maître O P, avocat au barreau de PAZARDZHIK

LE MINISTERE PUBLIC, appelant


RAPPEL DE LA PROCEDURE :

Par jugement contradictoire sur opposition en date du 16 décembre 2008, le Tribunal Correctionnel de MONTPELLIER, saisi par opposition du 15 juin 2006, a :

— sur l’action publique reçu N F en son opposition et mis à néant le jugement du 15 juin 2006

et a déclaré N F coupable :

* d’avoir à MONTPELLIER, NANTES et sur le territoire national, entre le 1er Janvier 2000 et le 29 Novembre 2002 et depuis temps non prescrit:

— tiré profit ou partagé les produits de la prostitution ou reçu les subsides de jeunes femmes de nationalité bulgare, et notamment de H I, H J, S T, llyana V, W AA, Valentina ITSOVSKA, Iordanka NIKOLOVA, AH AI, de L MITOVA, H J, H AE, H K, L M ; avec ces circonstances que les faits ont été commis à l’égard de plusieurs personnes,

infraction prévue par les articles 225-7 AL.1 3°, 225-5 du Code pénal et réprimée par les articles 225-7 AL.1, 225-20, 225-21, 225-24, 225-25 du Code pénal

* d’avoir à MONTPELLIER, NANTES et sur le territoire national, entre le 1er Janvier 2000 et le 29 Novembre 2002 et depuis temps non prescrit:

— tiré profit ou partagé les produits de la prostitution ou reçu les subsides de jeunes femmes de nationalité bulgare, et notamment de H I, H J, S T, llyana V, W AA, Valentina ITSOVSKA, Lordanka NIKOLOVA, AH AI, de L MITOVA, H J, H AE, H K, L M ; avec ces circonstances que les faits ont été commis par plusieurs personnes agissant en qualité d’auteurs ou de complices sans qu’elles constituent une bande organisée,

infraction prévue par les articles 225-7 AL.1 9°, 225-5 du Code pénal et réprimée par les articles 225-7 AL.1, 225-20, 225-21, 225-24, 225-25 du Code pénal

* d’avoir à MONTPELLIER, NANTES et sur le territoire national, entre le 1er Janvier 2000 et le 29 Novembre 2002 et depuis temps non prescrit:

— tiré profit ou partagé les produits de la prostitution ou reçu les subsides de jeunes femmes de nationalité bulgare, et notamment de H I, H J, S T, llyana V, W AA, Valentina ITSOVSKA, Lordanka NIKOLOVA, AH AI, de L MITOVA, H J, H AE, H K, L M ; avec ces circonstances que les faits ont été commis à l’égard d’une personne incitée à se livrer à la prostitution à son arrivée sur le territoire national,

infraction prévue par les articles 225-7 AL.1 4°, 225-5 du Code pénal et réprimée par les articles 225-7 AL.1, 225-20, 225-21, 225-24, 225-25 du Code pénal

et en répresion l’a condamnée à la peine de 3 ans d’emprisonnement.

APPELS :

Par acte au greffe en date du 17 décembre 2008, N F a interjeté appel à titre principal des dispositions pénales de ce jugement.

Par acte au greffe en date du 17 décembre 2009, le Ministère Public a formé appel incident à son encontre.

DEROULEMENT DES DEBATS :

A l’appel de la cause à l’audience publique du 27 OCTOBRE 2009 Madame la Présidente a constaté l’absence du prévenu, puis a fait le rapport prescrit par l’article 513 du code de procédure pénale.

La prévenue est absente.

Maître O P pour Mme F N a déposé des conclusions par courrier, lesquelles ont été visées par la présidente et la greffière, mentionnées par cette dernière aux notes d’audience et jointes au dossier.

Le Ministère Public a été entendu en ses réquisitions.

A l’issue des débats, la Cour a mis l’affaire en délibéré et Madame la Présidente a averti les parties que l’arrêt serait prononcé à l’audience publique du 15 DÉCEMBRE 2009.

LES FAITS

Au mois d’avril 2000, les services du commissariat de police de MONTPELLIER constataient l’apparition d’une activité de prostitution exercée par des ressortissantes bulgares originaires de la région de PAZARDZHIK et de D.

Ces jeunes femmes, âgées d’une vingtaine d’années, exerçaient leur activité durant quelques mois à MONTPELLIER avant de l’abandonner ou de partir l’exercer ailleurs. Une vingtaine de prostituées bulgares avaient ainsi travaillé, avec en permanence 4 à 6 prostituées en activité sur le boulevard du Jeu de Paume et le boulevard Gambetta. Bien qu’elles s’en défendent, ces prostituées s’accueillaient mutuellement. Elles résidaient aux mêmes adresses à MONTPELLIER.

Courant 2001, des opérations de surveillance mettaient en évidence un groupe d’individus domiciliés à LA GRANDE MOTTE gravitant autour des prostituées. Parmi ces personnes, Q R, conducteur d’un véhicule BMW immatriculé 8488 ZK 34, paraissait jouer un rôle particulier.

Q R entretenait une relation de couple avec H I. Cette dernière exerçait la prostitution en lien avec ses deux colocataires H J et S T. Fin août 2001 les trois prostituées quittaient la ville de MONTPELLIER pour aller se prostituer à NANTES.

Deux autres prostituées bulgares, U V et W AA, arrivaient peu de temps après. Elles travaillaient au même endroit et occupaient le même appartement. Dans la foulée, Q R entretenait une nouvelle relation avec W AA. Ces deux jeunes femmes disparaissaient à leur tour fin 2001.

Par la suite, de nouvelles prostituées bulgares arrivaient et prenaient le relais des précédentes.

En raison du caractère manifestement organisé de ce phénomène nouveau de prostitution, une enquête était diligentée aux fins d’identifier les personnes susceptibles d’exercer une activité de proxénétisme.

L’enquête mettait en évidence l’implication de Q R qui fera l’objet de poursuites pour proxénétisme et qui sera condamné.

Elle révélait par ailleurs que les prostituées expédiaient des sommes importantes au moyen de mandats WESTERN UNION adressés en BULGARIE.

L’organisme G détectaient des flux suspects d’un montant total de 245.000 € versés d’octobre 2000 à décembre 2001, correspondant généralement à des sommes rondes d’environ 17.000 francs.

Quelques rares prostituées bulgares pouvaient être entendues :

AB AC déclarait gagner 3.000 € par mois et adresser de l’argent à des personnes de sa famille mais elle se taisait lorsqu’on lui posait des questions plus précises quant aux destinataires des sommes envoyées.

AD AC affirmait ne pas avoir de proxénète ; et affirmait que les 26.950 € avait été envoyés en Bulgarie à des amis proches.

L’examen des flux financiers démontrait que les prostituées dissimulaient l’existence de proxénètes prélevant le bénéfice de leur activité.

En effet, il résultait du tableau de synthèse établi par les enquêteurs que :

— certains bénéficiaires de mandats recevaient des fonds de plusieurs prostituées

— que certaines prostituées adressaient des fonds à plusieurs destinataires

— la localisation de surcroît des prostituées et de leurs proxénètes dans les villes de PAZARDZHIK et de D était incompatible avec une arrivée fortuite et inorganisée sur le territoire national comme l’affirmaient les jeunes femmes.

Au vu de ces éléments, le magistrat instructeur décernait mandat d’arrêt à l’encontre de plusieurs (13) ressortissants bulgares qui, au vu de l’origine et du montant des mandats perçus apparaissaient être destinataires des produits de la prostitution dans un cadre concerté.

Parmi elles, N F demeurant à E avait reçu 80.000 francs de L MITOVA en plusieurs mandats WESTERN UNION à la Banque Bulgare Unie à des dates rapprochées : le 16/01/2001, le 23/01/2001, le 8/02/2001 : 16.000 francs français.

Elle déclarait d’abord n’avoir jamais reçu d’argent en provenance de France. Confrontée à l’existence de ces versements, elle affirmait que ceux-ci correspondaient à de l’argent économisé par son mari et des amis travaillant dans le bâtiment en France. Cependant elle était incapable de citer les noms des expéditeurs ni l’adresse de son mari à l’étranger (CRI page 199 tome 2).

Elle soutenait ne pas connaître L MITOVA ni aucune des prostituées et particulièrement H AE qui lui aurait adressé 237.000 francs.

Elle disposait de deux comptes bancaires un en euros, l’autre en leva bulgare.

Il apparaissait que L M avait également faits des versements à AF AG, à AH AI, à AM AN AO (mari de la précédente), ces ressortissants recevaient d’autres virements en provenance de France par des jeunes femmes bulgares.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la recevabilité des appels

Les appels formés le 17 décembre 2008 par le conseil de la prévenue au greffe du tribunal et par le Ministère Public sont recevables en la forme.

Sur la nature de l’arrêt

Madame F N a, par courrier du 1er février 2008 (B7M), donné pouvoir à son conseil M. P O pour la représenter dans la procédure correctionnelle jusqu’à son terme devant la Cour d’Appel le cas échéant et pour recevoir les significations.

Maître P O a fait parvenir à la Cour des conclusions et demandé au nom de sa cliente ni présente ni représentée que l’affaire soit jugée.

La Cour statuera par arrêt contradictoire à signifier en application de l’article 411 du code de procédure pénale.

Sur l’action publique

Par conclusions régulièrement déposées le conseil de Madame F N demande :

— en la forme, l’annulation du jugement pour défaut de motivations en application de l’article 6 de la CEDH car le tribunal n’aurait pas répondu aux conclusions du conseil

— au fond, la relaxe pour insuffisances et impertinence des preuves à charge (pas d’aveu, un train de vie incompatible avec les faits reprochés)

— la relaxe au motif allégué de ce que l’audition de madame F l’aurait été en qualité de témoin simple alors qu’elle aurait dû n’être entendue que comme un témoin assisté en application des dispositions des articles 113-1 et suivants du code de procédure pénale.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur le défaut de motivation du jugement

Au regard du grief tiré de l’article 6 de la CEDH, la Cour ne trouve pas matière à annuler le jugement critiqué dont les mentions et énonciations associées aux notes d’audience suffisent à fonder la décision critiquée.

Au surplus les appels de la prévenue et du Ministère Public donnent à la Cour toute latitude d’appréciation au regard des éléments retenus dans la prévention et à ceux contenus dans les conclusions produites par la défense.

Sur le grief allégué d’une irrégularité de l’interrogatoire de Madame F N

Aucun élément ne permet d’invalider l’interrogatoire de Madame N F en qualité de témoin alors qu’il a été effectué le 3 juin 2004 par M. AK AL, juge d’instruction du Bureau national des Investigations à Sofia dans le cadre de l’entraide judiciaire ; entendue selon les règles judiciaires bulgares , elle a été avisée des charges de proxénétisme qui lui sont reprochés, et d’autres droits (prendre des notes, faire des corrections, faire des objections au procès-verbal, ne pas répondre à certaines questions…).

Sur la pertinence des preuves

Les faits sont établis par les constatations régulières des procès-verbaux des enquêteurs, par les déclarations des prostituées, par l’enquête de G qui ont démontré l’importance des flux suspects d’un montant de 245.000 euros entre octobre 2000 et décembre 2001 provenant des prostituées bulgares à destination de ressortissants bulgares résidant dans les villes de PAZARDJIK et de D.

Les infractions de proxénétisme sont caractérisées particulièrement à l’encontre de Madame F N qui ne peut pas contester avoir perçu plusieurs virements pour un montant de 80.000 francs en provenance d’une prostituée bulgare en France – quel que soit le destinataire postérieur de ces sommes d’argent, quand bien même n’auraient-elles pas laissé de traces en écritures dans ses comptes ou qu’elle dispose d’un train de vie modeste.

Cependant en l’absence de détails quant aux virements qu’elle aurait reçus de H I, cet élément ne sera pas retenu à sa charge.

Sous réserve de cette observation, c’est donc par une juste appréciation des faits et des circonstances de la cause que les premiers juges ont à bon droit retenu Madame F N dans les liens de la prévention ; qu’il convient donc de confirmer le jugement déféré sur la déclaration de culpabilité, mais que pour tenir compte des observations faites quant au montant des sommes obtenues, et pour mieux prendre en compte la personnalité de la prévenue, il convient de modifier la peine prononcée par les premiers juges en condamnant la prévenue à la peine de 15 mois d’emprisonnement.

La nécessité d’assurer l’exécution de la peine conduit à maintenir les effets du mandat d’arrêt délivré le 5 avril 2005.

PAR CES MOTIFS :

LA COUR, statuant publiquement par arrêt contradictoire à signifier à l’égard de F N, en matière correctionnelle, après en avoir délibéré conformément à la loi ;

EN LA FORME :

Reçoit les appels jugés réguliers.

AU FOND :

Confirme le jugement sur la déclaration de culpabilité,

L’infirme sur la peine et statuant à nouveau,

Condamne Madame F N à la peine de 15 mois d’emprisonnement.

Maintient les effets du mandat d’arrêt délivré le 5 avril 2005.

Dit que la condamnée sera soumise au paiement du droit fixe de procédure d’un montant de 120 Euros prévu par l’article 1018 A du Code Général des Impôts.

Informe la condamnée que le montant du droit fixe de procédure sera diminué de 20% si elle s’en acquitte dans le délai d’un mois à compter de la signification du présent arrêt.

Le tout conformément aux articles visés au jugement et au présent arrêt et aux articles 512 et suivants du code de procédure pénale.

Ainsi jugé et prononcé à l’audience publique les jours, mois et an susdits ; le présent arrêt a été signé par la Présidente et le greffier présents lors de son prononcé.

LE GREFFIER, LA PRÉSIDENTE,

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