Cour d'appel de Montpellier, 1° chambre section b, 12 octobre 2010, n° 10/00217

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Montpellier, 1° ch. sect. b, 12 oct. 2010, n° 10/00217
Juridiction : Cour d'appel de Montpellier
Numéro(s) : 10/00217
Décision précédente : Tribunal de grande instance de Béziers, 29 novembre 2009
Dispositif : Délibéré pour mise à disposition de la décision

Texte intégral

COUR D’APPEL DE MONTPELLIER

1° Chambre Section B

ARRET DU 09 NOVEMBRE 2010

Numéro d’inscription au répertoire général : 10/00217

Décision déférée à la Cour : Jugement du 30 NOVEMBRE 2009

TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE BEZIERS

N° RG 08/2315

APPELANTE :

SA Y P, anciennement D P, prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié ès qualité au siège social

XXX

XXX

représentée par la SCP SALVIGNOL – GUILHEM, avoués à la Cour

assistée de Me DEGRYSE loco Me Annie RUIZ-ASSEMAT, avocat au barreau de BEZIERS

INTIME :

Monsieur G B

né le XXX à XXX

de nationalité Française

XXX

XXX

représenté par la SCP NEGRE – PEPRATX-NEGRE, avoués à la Cour

assisté de Me Yves SINSOLLIER, avocat au barreau de NARBONNE

ORDONNANCE DE CLOTURE DU 07 Octobre 2010

COMPOSITION DE LA COUR :

L’affaire a été débattue le 12 OCTOBRE 2010, en audience publique, Madame M N ayant fait le rapport prescrit par l’article 785 du Code de Procédure Civile, devant la Cour composée de :

Monsieur Guy DESAINT DENIS, Président

Madame Gisèle N, Conseiller

Monsieur Claude ANDRIEUX, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier, lors des débats : Madame Myriam RUBINI

ARRET :

— CONTRADICTOIRE.

— prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de Procédure Civile ;

— signé par Monsieur Guy DESAINT DENIS, Président, et par Madame Myriam RUBINI, Greffier, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS ET PROCEDURE

De l’année 1999 à l’année 2004, M. G B, I J, a contracté 6 prêts auprès de la BANQUE DUPUY DE Z, tous garantis par une assurance garantie décès invalidité auprès de la Société D P devenue Y P.

Le certificat individuel d’affiliation d’assurance établi après la souscription du dernier des dits prêts, avec acceptation de l’adhésion par l’assureur datée du 20 août 2004, fait mention d’un pourcentage assuré de 100%;

Le 6 septembre 2006, M. G B a été victime d’un accident de travail en chutant dans une piscine en construction. Il a subi des lésions de la main droite nécessitant trois interventions au bloc opératoire, une immobilisation totale de ce membre dans une attelle et une prise en charge médicamenteuse.

Une expertise médicale amiable a été confiée au Docteur K A, médecin conseil de l’assureur, qui a conclu que l’arrêt de travail consécutif à l’accident du travail du 6 septembre 2007 donné lieu à trois blocs au Fonzilane et à un traitement antalgique et anti-inflammatoire ainsi qu’une rééducation fonctionnellement toujours en cours du fait de l’existence d’une fissuration de l’os trapèzecompliquée d’un syndrome algodystrophique de la main droite, soins qui étaient toujours en cours lors de l’examen du 13 mars 2007. Il retenait une incapacité professionnelle totale jusqu’au 13 mars 2007, une incapacité temporaire partielle à compter du 13 mars 2007, avec un taux d’incapacité fonctionnelle de 15% et

professionnelle de 90%, l’arrêt de travail n’étant plus médicalement justifié selon l’expert depuis le 13 mars 2007.

Par lettre du 15 mai 2007, la Société D P a indiqué qu’à la suite de cet examen médical révélant un taux d’incapacité globale de 27,16%,. il n’avait plus droit à l’indemnisation contractuelle et qu’elle cessait donc tout règlement à compter du 13 mars 2007.

Sur assignation en référé à la requête de M. B, une expertise judiciaire médicale a été ordonnée par ordonnance du Président du Tribunal de grande instance de BEZIERS en date du 29 janvier 2008.

L’expert judiciaire le Docteur E C a déposé son rapport le 27 mai 2008 établissant : une incapacité temporaire totale du 6 septembre 2006 au 30 mars 2008 avec un taux d’incapacité temporaire partielle fonctionnelle de 15% et un taux d’incapacité temporaire professionnelle de 100% ; une incapacité permanente partielle fonctionnelle de 8% et une incapacité permanente partielle professionnelle de 20% ; une consolidation à la date du 30 mars 2008.

L’expert judiciaire indiquait qu’avant le 11 décembre 1998, M. B présentait une luxation du pouce droit traitée chirurgicalement par mise en place d’une broche le 19 novembre 1991, luxation qui n’a pas été déclarée dans les questionnaires qu’il a remplis.

Par acte d’huissier du 10 juillet 2008, M. B a fait citer D pour voir homologuer le rapport d’expertise et se voir allouer 46.508 €, subsidiairement 45.000 € de dommages-intérêts pour manquement de l’assureur à son devoir de conseil et d’information.

Par le jugement entrepris en date du 30 novembre 2009, le Tribunal de grande instance de BEZIERS : Rejette la demande principal de M. B fondée sur l’obligation contractuelle de garantie de la compagnie Y P Déclare la Compagnie Y P contractuellement responsable de son manquement au devoir de conseil et d’information à l’égard de l’assuré ; En conséquence condamne la compagnie Y P à payer à M. B la somme de 45.000 € à titre de dommages-intérêts, outre 1.500 € sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile ; Dit n’y avoir lieu à exécution provisoire de la décision déférée.

Par déclaration du 11 janvier 2010, la Société Y P a interjeté appel à l’encontre de cette décision. Dans ses dernières conclusions du 7 octobre 2010 l’appelante demande à la Cour de : Infirmer le jugement déféré ; Dire et juger que le contrat d’assurance souscrit le 10 décembre 1998 par M. B avec D devenu Y P, est nul sur le fondement de l’article L. 113-8 du Code des assurances ; En conséquence dire et

juger que Y P conservera l’intégralité des primes versées par M. B à titre de dommages-intérêts ; Condamner M. B à verser à la compagnie Y P les primes échues et non encore payées avant l’annulation du contrat ; Condamner M. B à restituer un total de 9.869,36 € au titre des sommes versées par la Compagnie D, devenue Y P, dans le cadre de l’exécution du contrat d’assurance en date du 11 décembre 2008 ; A titre subsidiaire : Infirmer le jugement au niveau de la responsabilité de Y P de son manquement au devoir de conseil et d’information à l’égard de M. B et statuant à nouveau : Constater que D devenue Y P a parfaitement rempli son devoir de conseil et d’information ; Juger en conséquence que Y P n’est pas responsable contractuellement envers M. X, et ne doit lui verser aucune somme à titre de dommages-intérêts ; Confirmer en revanche le jugement en ce qu’il a rejeté la demande de M. B fondée sur l’obligation contractuelle de garantie de la compagnie Y P ; En tout état, infirmer en ce que le jugement a condamné Y P à payer à M. B la somme de 1500 € au titre de l’article 700 du Code de procédure civile ; Condamner M. B à lui payer à ce titre 2000 €.

M. G B, intimé, demande à la Cour dans ses dernières conclusions du 28 septembre 2010 de : Sur la nullité des contrats d’assurance, constater qu’Y P informée en 2007 d’un antécédent médical déclaré, a manifesté son consentement au maintien de l’assurance, spécialement en continuant à percevoir les primes ; dire qu’Y ne peut demander ultérieurement la nullité du contrat ; Constater que la mauvaise foi de M. B n’est pas démontré, rejeter la demande de nullité des contrats d’assurance ; Sur le devoir de conseil et d’information de l’assureur, confirmer le jugement sur l’allocation de la somme de 46.508,04 € à titre de dommages-intérêts avec intérêts au taux légal à compter de la délivrance de l’assignation ; Sur l’obligation contractuelle de garantie, infirmer le jugement, homologuer le rapport d’expertise judiciaire, condamner Y P à payer la somme de 46.508,40 € + intérêt au taux légal à compter de la délivrance de l’assignation en référé correspondant à toutes les échéances et leurs accessoires au titre des 6 contrats de prêt pour la période du 13 mars 2007 au 30 mars 2008 ; il sollicite en outre 3.000 € au titre de l’article 700 du Code de procédure civile.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur les dispositions de l’article L. 113-8 du Code des assurances

Selon les dispositions de l’article L. 113-8 du Code des assurances, 'le contrat d’assurance est nul en cas de réticence ou de fausse déclaration intentionnelle de la part de l’assuré, quand cette réticence ou cette fausse déclaration change l’objet du risque ou en

diminue l’opinion pour l’assureur, alors même que le risque omis ou dénaturé par l’assuré a été sans influence sur le sinistre.'

En l’espèce, il a été établi lors de l’expertise amiable réalisée en 2007 par le Docteur A, médecin conseil de la Société D P et lors de l’expertise judiciaire effectuée en 2008 par le Docteur C, en présence du Docteur A, que M. G B présentait un antécédent médical : une luxation du pouce gauche survenue lors d’un match de football en 1997 qu’il n’a pas déclaré lors de la souscription des contrats d’assurances dans les formulaires de santé qu’il lui a été demandé de remplir.

M. G B n’est pas fondé à invoquer les dispositions de l’article L. 113-4 alinéa 3 du Code des assurances qui concerne une aggravation survenue en cours de contrat : la luxation du pouce datant de l’année 1997 et étant ainsi antérieure à l’adhésion à l’ensemble des contrats d’assurance concernés par la procédure, il n’y a pas pour l’assureur d’impossibilité de se prévaloir du défaut de déclaration de l’accident dans les formulaires de santé ; il n’y a pas eu de sa part de manifestation de son consentement au maintien de l’assurance en continuant à encaisser les primes d’assurance sans majoration en 2007 et les années suivantes, après avoir été informé de cet antécédent lors des opérations d’expertise.

En revanche, M. G B invoque à juste titre la présomption de bonne foi dont il bénéficie, qui n’est pas sérieusement combattue par l’assureur en l’espèce : l’ancienneté de trente ans de cet événement, tout comme le caractère véniel de cet antécédent non déclaré par le souscripteur des contrats d’assurance, ne permettent pas de constater qu’il aurait sciemment caché cette information à l’assureur ; en outre, la compagnie d’assurances qui après l’information qu’elle a obtenue lors des expertises, a continué à percevoir les primes sans majoration et n’a pas invoqué ce moyen de nullité en procédure en première instance, ne rapporte la preuve qui lui incombe que si elle l’avait connu lors de la souscription des contrats, cet antécédent aurait changé la nature du risque assuré ou en aurait diminué l’opinion pour l’assureur.

Il n’y a pas lieu d’ordonner la production des questionnaires de santé dès lors que le défaut de déclaration dans les dits questionnaires a été constaté et explicité par les experts et que la Cour dispose d’éléments d’appréciation suffisants pour statuer sur les conditions d’application de l’article L. 113-8 du Code des assurances.

En conséquence, la Société Y P est déboutée de sa demande en annulation des contrats d’assurance sur le fondement des dispositions de l’article L. 113-8 du Code des assurances, et avec elle de sa demande en restitution de la somme de 9.869,36 € versée en exécution des contrats d’assurances.

Sur l’obligation à garantie

M. G B a conclu auprès de la Banque DUPUY de PARSEVAL six prêts dont le remboursement a été assuré par la souscription d’une police d’assurance auprès de la Société D P devenue Y P garantissant le décès et l’incapacité à 100%.

Au terme de la notice accompagnant les contrats d’assurance souscrits par M. G B, il a été convenu que les prestations sont versées en fonction du calcul du taux d’incapacité globale calculée selon un tableau croisant le taux d’incapacité professionnelle et le taux d’incapacité fonctionnelle fixés médicalement.

Le Docteur C a retenu dans son rapport d’expertise judiciaire qu’après l’accident du 6 septembre 2006, M. B a subi une incapacité temporaire professionnelle de 100 % jusqu’au 30 mars 2008, le taux d’incapacité temporaire fonctionnel étant fixé à 15%. Selon le barème contractuel de l’incapacité globale, le taux résultant du tableau 'à double entrée’ croisant le taux d’incapacité professionnelle et le taux d’incapacité fonctionnelle, ressortit à 27,16 % d’incapacité.

En conséquence, le jugement est confirmé en ce qu’il a par des motifs que la Cour adopte, à bon droit rejeté la demande de paiement de M. B dans la mesure où son taux d’incapacité globale est inférieur à 33%, le minimum prévu aux contrats pour en bénéficier.

Sur le devoir de conseil et d’information de l’assureur

Il ressort des pièces du dossier que M. G B, I J, a souscrit de 1999 à 2004 six contrats d’assurances auprès de la Société D P devenue la S.A. Y P en garantie des six prêts qu’il avait souscrits auprès de la BANQUE DUPUY DE Z et qui donnaient lieu à des remboursements mensuels d’un montant global supérieur à 4.000 €.

Or, il résulte de l’application de ces contrats d’assurance telle que ci-dessus décidée, emportant rejet de la demande de garantie de M. B, qu’ils ne garantissaient pas une incapacité professionnelle de 100 % mais une incapacité globale faisant intervenir également le taux d’incapacité fonctionnelle.

Compte tenu du nombre de contrats souscrits par M. G B, se rapportant tous aux répercussions d’un accident sur son activité professionnelle, l’assuré était en droit de penser être garanti de manière complète en cas d’arrêt de son activité professionnelle.

Il appartenait donc à la compagnie d’assurances, au titre de son devoir de conseil, de l’informer qu’il n’était pas garanti en fonction de la seule incapacité professionnelle et d’attirer son attention sur les modalités de calcul du taux d’incapacité globale compte tenu de l’activité professionnelle exercée.

L’assureur, en vertu de son obligation de conseil, était tenu d’éclairer l’assuré sur l’adéquation des risques couverts à sa situation personnelle sans pouvoir se satisfaire de la seule remise d’une notice, d’autant que dans chaque certificat d’assurances M. B reportait l’incapacité de 100% couverte, alors même qu’en réalité l’incapacité globale qu’il souscrivait ne permettait pas une telle prise en charge totale.

Il résulte de ces constatations qu’en l’espèce la S.A Y P a manqué à l’égard de M. B à son devoir de conseil et d’information.

M. G B justifie avoir été contraint de régler avec ses deniers personnels toutes les échéances des prêts souscrits pour la période du 13 mars 2007 au 30 mars 2008 inclus, date de la consolidation de ses blessures .

Ainsi, par adoption des motifs du premier Juge qui ne sont pas sérieusement remis en cause devant la Cour, il y a lieu de déclarer la S.A. Y P contractuellement responsable sur le fondement de l’article 1147 du Code civil à hauteur de la somme de 45.000 € telle que sollicitée par M. B en réparation du préjudice qu’il a subi.

En conséquence, le jugement est confirmé en toutes ses dispositions.

L’équité commande d’allouer à M. G B une somme complémentaire de 1.500 € sur le fondement des dispositions de l’article 700 du Code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

REÇOIT l’appel interjeté par la S.A. Y P,

Le DIT mal fondé,

REJETTE la demande en annulation des contrats d’assurances sur le fondement des dispositions de l’article L. 113-8 du Code des assurances,

CONFIRME le jugement entrepris en toutes ses dispositions,

CONDAMNE la S.A. Y P à payer à M. G B la somme de 1.500 € sur le fondement des dispositions de l’article 700 du Code de procédure civile,

REJETTE toutes autres demandes des parties,

CONDAMNE la S.A. Y P aux dépens avec droit de recouvrement direct conformément aux dispositions de l’article 699 du Code de procédure civile.

LE GREFFIER LE PRESIDENT

GB/MR

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