Cour d'appel de Montpellier, 1° chambre b, 22 mai 2018, n° 16/00534

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Montpellier, 1° ch. b, 22 mai 2018, n° 16/00534
Juridiction : Cour d'appel de Montpellier
Numéro(s) : 16/00534
Décision précédente : Tribunal de grande instance de Montpellier, 16 décembre 2015, N° 14/03722
Dispositif : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée

Sur les parties

Texte intégral

Grosse + copie

délivrées le

à

COUR D’APPEL DE MONTPELLIER

1° Chambre B

ARRET DU 22 MAI 2018

Numéro d’inscription au répertoire général : 16/00534

Décision déférée à la Cour : Jugement du 17 DECEMBRE 2015

TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE MONTPELLIER

N° RG 14/03722

APPELANTE :

SAS CUCINE STBO (RCS 534 538 491) agissant poursuites et diligences de son représentant légal domicilié au siège social,

[…]

[…]

représentée par Me Denis BERTRAND, avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat postulant et plaidant

INTIMES :

Monsieur X Y

né le […] à […]

de nationalité Française

[…]

[…]

représenté par Me Marie Camille PEPRATX NEGRE de la SCP ERIC NEGRE, MARIE CAMILLE PEPRATX NEGRE, avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat postulant

assisté de Me Sonia PEREZ, avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat plaidant

Madame D Y

née le […] à […]

de nationalité Française

[…]

[…]

représentée par Me Marie Camille PEPRATX NEGRE de la SCP ERIC NEGRE, MARIE CAMILLE PEPRATX NEGRE, avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat postulant

assistée de Me Sonia PEREZ, avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat plaidant

ORDONNANCE DE CLOTURE DU 27 Février 2018

COMPOSITION DE LA COUR :

L’affaire a été débattue le 20 MARS 2018, en audience publique, Madame Chantal RODIER, Conseiller ayant fait le rapport prescrit par l’article 785 du Code de procédure civile, devant la cour composée de :

Monsieur Georges TORREGROSA, Président de chambre

Madame Chantal RODIER, Conseiller

M. Christian COMBES, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier, lors des débats : Mme E F

L’affaire mise en délibéré au 7 MAI 2048 a été prorogée au 22 MAI 2018.

ARRET :

— contradictoire

— prononcé par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de procédure civile ;

— signé par Monsieur Georges TORREGROSA, Président de chambre, et par Mme E F, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

Le 8 février 2014, Monsieur et Madame X et D Y se rendaient à la foire exposition de Nîmes. Le jour même, ils signaient un bon de commande n° 2545 correspondant au bon détaillé n° 855/20, établi par la société STBO Cucine, pour une cuisine Tea Atma, couleur noisette, vernis brillant, sur socle alu, pour un montant total de 14'000 € TTC, assistance et pose incluses, avec un paiement comptant de 5 000 €, et un règlement complémentaire de 9'000 € à la mise à disposition.

Par lettre recommandée du 31 mars 2014, les époux Y, faisaient valoir auprès de l’Eurl STBO Cucine leur mécontentement que l’entreprise ne dispose pas d’un magasin et indiquaient «'nous sommes au regret d’annuler notre rendez-vous de métrés programmés le jeudi 3 avril et d’annuler notre commande, en vertu de l’absence de métrés et de l’arrêt de la Cour de cassation du 25 mars 2010, se fondant sur les articles L. 421-1 et L. 421-2 du code de la consommation. Nous vous prions également de nous rembourser dans les 10 jours le montant de l’acompte de 5'000 € versé en foire le 8 février 2014 et encaissé le 13 février.'»

L’Eurl STBO Cucine leur répondait par lettre recommandée du 4 avril 2014, en leur rappelant le caractère ferme et définitif de leur commande et refusant l’annulation comme la rupture de contrat.

Par lettre recommandée du 24 avril 2014, les époux Y, sous la plume de leur conseil, mettaient en demeure l’Eurl Cucine STBO de procéder sous quinzaine au règlement de la somme de 5000 € correspondant à l’acompte versé le 8 février sur la foire de Nîmes.

L’Eurl STBO Cucine y répondait par lettre recommandée du 9 mai 2014, demandant l’exécution du contrat.

Aucun arrangement amiable n’était trouvé.

Par acte d’huissier en date du 3 juin 2014, complété par conclusions, les époux Y ont fait délivrer assignation à l’Eurl Cucine STBO, aux fins d’obtenir, sous le bénéfice de l’exécution provisoire':

—  à titre principal, la nullité du contrat pour vice du consentement, absence de métrés et violation des dispositions des règles de démarchage, et en conséquence, le remboursement de l’acompte de 5 000 €, avec intérêts au taux légal,

—  à titre subsidiaire, la résolution du contrat avec la restitution de l’acompte de 5 000 €, outre intérêts au taux légal,

—  très subsidiairement, la restitution de l’acompte,

—  en toute hypothèse, outre la restitution de l’acompte, sa condamnation au paiement de:

* la somme de 6 000 € à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive,

* celle de 3 000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

* des dépens.

L’Eurl STBO Cucine concluait au débouté des demandes et à leur condamnation au paiement de':

— la somme de 9 000 € au titre du solde dû,

— celle de 1 500 € pour procédure abusive,

— celle de 2 500 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens.

Par jugement contradictoire en date du 17 décembre 2015, le tribunal de grande instance de Montpellier a':

Prononcé la résolution du contrat,

Condamné l’Eurl STBO Cucine à payer à Monsieur X Y et Madame D Y':

— la somme de 5 000 € en remboursement de l’acompte, avec intérêts au taux légal à compter du 8 février 2014,

— celle de 6 000 € à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive,

— celle de 3 000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

Condamné l’Eurl STBO Cucine aux dépens,

Dit n’y avoir lieu à exécution provisoire,

Rejeté les autres demandes.

APPEL

La SAS STBO Cucine a relevé appel de ce jugement par déclaration en date du 22 janvier 2016.

L’ordonnance de clôture a été rendue le 27 février 2018.

*****

Vu les dernières conclusions de la SAS STBO Cucine en date du 24 novembre 2017, auxquelles il est expressément référé pour complet exposé des motifs et du dispositif';

*****

Vu les dernières conclusions des époux Y’en date du 5 décembre 2016 auxquelles il est expressément référé pour complet exposé des motifs et du dispositif';

*****

SUR CE

Sur la demande principale en nullité du contrat':

Les époux Y soutiennent qu’ils seraient victimes de man’uvres dolosives et mensongères de la part de la société STBO Cucine, en ce que le vendeur aurait faussement affirmé l’existence d’un magasin, laquelle serait une condition déterminante de leur engagement, et que leur consentement en aurait été vicié.

Ils soutiennent également la nullité du contrat pour absence de métrés et violation des dispositions des règles de démarchage.

L’appelante qui produit des photos d’un panneau d’affichage de l’enseigne figurant sur son stand dans les foires démontre que celui-ci indique seulement': «'bureau d’études et de décoration – STBO Cucine – […].'»

C’est donc vainement que des man’uvres dolosives sont invoquées, les époux Y étant défaillants dans la charge de la preuve qui leur incombe sur ce point. Ils ne produisent en effet aucun dépliant ou document commercial pouvant tromper les clients sur l’existence d’un magasin, alors que l’entreprise s’intitule elle-même bureau d’études.

En outre, ainsi que le fait observer l’appelante, on comprend mal que le critère d’achat principal des intimés puisse être d’acheter en magasin, alors qu’ils se sont rendus sur une foire, et ont payé pour cela un droit d’entrée de 10'€, d’autant qu’il existe, de façon non contestée, 14 vendeurs de cuisine, visitables gratuitement, installés dans un rayon de 3 kilomètres dans la zone ville active à Nîmes.

Si véritablement l’existence d’un magasin avait été une condition déterminante de leur engagement, les époux Y n’auraient pas signé un bon de commande ferme à la foire.

Le fait que le terme magasin soit mentionné dans les conditions générales de vente, applicables à plusieurs sociétés de la branche, ne peut être à lui seul constitutif d’un dol, d’autant que le mot magasin ne figure aucunement sur le bon de commande qu’ils ont signé, lequel fait au contraire apparaître de façon évidente, conformément aux indications du stand, qu’il s’agit d’un bureau d’études et de décoration sans référence à un quelconque magasin.

Le fait que le bon de commande soit numéroté 2545 et que le descriptif détaillé soit numéroté 855/20 ne génère aucune ambiguïté, dès lors que ces deux documents sont en réalité établis à la même date et que le premier se réfère expressément au numéro du second.

Enfin, le bon de commande a été émis par Monsieur A, gérant, lequel démontre dès lors le contrôle qu’il exerce sur ses préposés. Peu importe que Monsieur B, vendeur avec lequel ils ont eu l’entretien en foire, ait été son agent commercial plutôt que son salarié.

Le fait que Monsieur B se soit présenté à leur domicile à la suite de leur commande en foire n’est pas de nature à modifier les conditions de conclusion du contrat. Dès lors, ils ne peuvent se prévaloir des dispositions du code de la consommation afférentes au démarchage à domicile.

Les moyens tendant à la nullité du contrat seront donc en voie de rejet et le jugement confirmé sur ces points.

Sur la demande subsidiaire de résolution du contrat':

En application des dispositions de l’article 1184 du code civil, la condition résolutoire est toujours sous-entendue dans les contrats synallagmatiques pour le cas où l’une des deux parties ne satisferait point à son engagement.

Il s’évince des articles L. 111-1 1° et L. 111-4 du code de la consommation, que le professionnel doit communiquer au consommateur, de manière lisible et compréhensible, les caractéristiques essentielles du bien ou du service, avant que le

consommateur ne soit lié par un contrat de vente de biens ou de fourniture de services, et qu’en cas de litige, il appartient au professionnel de rapporter la preuve qu’il a exécuté ses obligations.

Pour prononcer la résolution du contrat le premier juge a retenu que le plan n’était pas fourni alors même que':

— le bon de commande indique selon plan fourni par le client

— le premier courrier de la société STBO Cucine indique «'votre commande a donc un caractère ferme et définitif, établi sur des côtes précises de votre cuisine communiquées par votre soin et contrôlé visuellement par Monsieur B lors de son passage en bon professionnel'»

En cause d’appel, la société STBO Cucine produit certes un «'plan'» en pièce n° 2, portant la mention «'bon pour implantation, 08/02/2014'» avec la signature non contestée de Monsieur Y.

Cependant, ce prétendu «'plan'», incomplet et imprécis ne peut constituer un document contractuel suffisant à établir la rencontre des volontés contractuelles, dans la mesure où il ne s’agit là que de montrer l’agencement possible des différents éléments de la cuisine dans un espace où':

— ni la longueur ni la largeur de la cuisine ne sont expressément mentionnées';

— la largeur des trois fenêtres et les espaces entre les fenêtres ne sont pas mesurés';

— ce «'plan'» prétendument établi à l’échelle de 1/20, soit un centimètre pour 20 centimètres, comporte plusieurs erreurs, et notamment, alors par exemple qu’un espace déterminé comme représentant 90 centimètres devrait correspondre à 4,5 centimètres, celui-ci correspond en réalité à 4,7 centimètres sur le croquis.

En réalité, ce prétendu plan, qui n’est qu’un croquis au crayon à papier, ne sert qu’à démontrer comment pourraient être agencés des éléments dont les largeurs sont respectivement de 60, 30, 15, 90, 45 et 65 cm.

Or, ce croquis ne permet aucunement de s’assurer que les éléments dont les largeurs exprimées en centimètres sont de 60 + 30 + 60 + 60 + 15 + 90 + 60 + 65, pourraient être agencés dans la longueur de la cuisine, soit le mur comportant les trois fenêtres, dès lors qu’on ignore totalement la longueur de cette pièce dans laquelle ils sont sensés s’encastrer.

En outre, à aucun moment ne sont étudiées les contraintes que peuvent représenter les fenêtres dans leur hauteur, ainsi que d’éventuelles contraintes de plomberies relatives aux arrivées et évacuations d’eau.

On comprend dès lors que l’appelante n’ait pas produit ce croquis qui n’est aucunement susceptible d’avoir une valeur de métrés.

Enfin, il ressort du propre courrier recommandé du 9 mai 2014 de l’appelante que les rendez-vous pour établir le métré de la cuisine, prévus le 27 mars puis le 3 avril, ont été annulés par les époux Y.

En définitive, ainsi que l’a retenu le premier juge, lors de l’acceptation de la commande par Monsieur et Madame Y, la société STBO Cucine, qui supporte la charge de la preuve en application de l’article L. 111'4 du code de la consommation, n’établit pas qu’elle avait pris les mesures ou contrôlé visuellement de cotes fournies par ceux-ci. Elle ne pouvait ainsi leur communiquer les caractéristiques essentielles du bien et du service fourni, et par conséquent, elle n’établit pas avoir exécuté son obligation d’information et de conseil prévu par l’article L 111-1 du code de la consommation.

C’est donc à bon droit que le premier juge a prononcé la résolution judiciaire du contrat et condamné la société STBO Cucine au remboursement de l’acompte de 5 000 € versé le 8 février 2014, avec intérêts au taux légal à compter de cette date.

Le moyen de l’appelante sera donc en voie de rejet et le jugement sera donc confirmé sur ce point et, par conséquent, également sur le rejet de ses demandes.

Sur la demande de dommages et intérêts pour résistance abusive et la demande réciproque de dommages et intérêts pour procédure abusive':

La carence probatoire de la société STBO Cucine au regard des dispositions l’article L. 111'4 du code de la consommation n’est pas en elle-même constitutive d’un abus de droit.

En effet, si cette société s’est affranchie du formalisme que lui imposent les dispositions du code de la consommation, elle en supporte les conséquences par la résolution du contrat.

Pour autant, cette légèreté blâmable ne caractérise pas sa mauvaise foi, l’accord de volonté intervenu sur un croquis imprécis ne suffisant pas à caractériser la mauvaise foi de l’entreprise.

Le jugement sera donc infirmé en ce qu’il a octroyé aux époux Y des dommages et intérêts sur le fondement de la résistance abusive.

L’appelante qui succombe pour l’essentiel verra sa demande réciproque de dommages et intérêts en voie de rejet.

Sur les autres demandes':

Le jugement sera confirmé sur les frais irrépétibles et les dépens.

Au regard de la somme importante de 3 000 € allouée au titre des frais irrépétibles par le premier juge, il n’y a pas lieu de l’augmenter par une somme complémentaire en cause d’appel. La demande des intimés sera donc en voie de rejet.

L’appelante qui succombe pour l’essentiel supportera les dépens de l’appel, avec application pour les intimés qui le demandent des dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

Vu les dispositions de l’article 1184 du code civil et des articles L. 111-1 1° et L. 111-4 du code de la consommation,

Vu les pièces produites,

LA COUR, statuant par arrêt contradictoire et mis à disposition au greffe,

CONFIRME le jugement en toutes ses dispositions, sauf en celle relative à la condamnation de la société STBO Cucine au paiement de dommages et intérêts pour résistance abusive,

Et statuant à nouveau de ce chef infirmé,

Déboute les époux Y de leur demande de dommages et intérêts pour résistance abusive,

Y ajoutant,

Dit n’y avoir lieu à application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile en cause d’appel,

Condamne la société STBO Cucine aux dépens qui seront recouvrés selon les modalités de l’article 699 du même code.

Le greffier, Le président,

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