Cour d'appel de Nancy, 1ère chambre, 6 janvier 2020, n° 18/02675

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Nancy, 1re ch., 6 janv. 2020, n° 18/02675
Juridiction : Cour d'appel de Nancy
Numéro(s) : 18/02675
Décision précédente : Tribunal de grande instance d'Épinal, 24 septembre 2018, N° 16/01329
Dispositif : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS


COUR D’APPEL DE NANCY

Première Chambre Civile

ARRÊT N° /2020 DU 06 JANVIER 2020

Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 18/02675 – N° Portalis DBVR-V-B7C-EIMP

Décision déférée à la Cour : jugement du Tribunal de Grande Instance d’EPINAL, R.G.n° 16/01329, en date du 25 septembre 2018,

APPELANTE :

SA SOGESSUR, prise en la personne de son représentant légal pour ce domicilié au siège social sis […]

Représentée par Me D E de la SCP E-MARCHETTI, avocat au barreau d’EPINAL, substituée par Me Valentine GUISE, avocat au barreau de NANCY

INTIMÉS :

Madame Z Y

née le […] à […]

domiciliée […]

Représentée par Me Alain BEGEL de la SCP BEGEL GUIDOT BERNARD JUREK, avocat au barreau d’EPINAL

Monsieur B X

né le […] à […]

domicilié […]

Représenté par Me Barbara VASSEUR de la SCP VASSEUR PETIT, avocat au barreau de NANCY

SARL DGRG, prise en la personne de son représentant légal pour ce domicilié au siège social sis […]

Représentée par Me Aude PERRIN de la SCP FOUNES-PERRIN, avocat au barreau d’EPINAL

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l’article 786 du Code de Procédure Civile, l’affaire a été débattue le 4 novembre 2019, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Madame Nathalie CUNIN-WEBER, Présidente de chambre, et Monsieur Yannick FERRON, Conseiller,

chargé du rapport,

Greffier, lors des débats : Madame Céline PERRIN ;


Copie exécutoire délivrée le à

Copie délivrée le à


Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Madame Nathalie CUNIN-WEBER, Présidente de chambre,

Monsieur Yannick FERRON, Conseiller,

Monsieur Claude SOIN, Conseiller,

A l’issue des débats, le Président a annoncé que l’arrêt serait rendu par mise à disposition au greffe le 6 janvier 2020, en application de l’article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,

ARRÊT : contradictoire, rendu par mise à disposition publique au greffe le 6 janvier 2020, par Madame PERRIN, Greffier, conformément à l’article 450 alinéa 2 du Code de Procédure Civile ;

signé par Madame CUNIN-WEBER, Président, et par Madame PERRIN, Greffier ;

FAITS ET PROCÉDURE :

Durant l’année 2007, B X a acheté une résidence secondaire située à […]. À la suite de cet achat, M. X a découvert que la maison était attaquée par un champignon 'la mérule’ et il a eu recours à la société à responsabilité limitée (SARL) DGRG – Devis Gratuits Résultats Garantis, spécialisée pour son traitement.

Le devis émis par la société a été accepté par M. X le 3 août 2008.

Lors de l’exécution des travaux, l’entreprise a informé M. X qu’elle était dans l’obligation de couper une partie du plancher du rez de chaussée située derrière la porte d’entrée.

Le 27 février 2009, Mme Y, agent immobilier s’est rendue dans la résidence secondaire dans le cadre de son activité professionnelle à la demande de M. X afin d’estimer le bien pour le vendre et prendre des photographies. Ce dernier, ne pouvant assister à la visite, lui a remis les clés de la maison.

En pénétrant dans l’habitation, immédiatement après avoir ouvert la porte d’entrée, Mme Y a fait une chute de plusieurs mètres en passant par le trou pratiqué dans le plancher.

Par ordonnance du 22 octobre 2009, le juge des référés du tribunal de grande instance d’Épinal a ordonné une expertise médicale de Mme Y ainsi qu’une expertise comptable de son activité professionnelle et a condamné M. X et l’assureur de ce dernier, la société Sogessur, à lui payer d’une indemnité provisionnelle de 50000 euros.

La société Sogessur a fait appel de l’ordonnance et par arrêt du 20 décembre 2010, la Cour d’Appel

de Nancy a confirmé l’ordonnance dans toutes ses dispositions.

L’expert médical a déposé son rapport concluant à l’absence de consolidation de l’état de santé de Mme Y.

Par ordonnance du 28 septembre 2011, le juge des référés du tribunal de grande instance d’Épinal a ordonné le retour du dossier à l’expert médical et a alloué une nouvelle indemnité provisionnelle à hauteur de 25000 euros.

L’expert médical a déposé son rapport le 12 avril 2012 et l’expert comptable le 12 novembre 2013.

Par actes délivrés les 13, 17 et 25 mai 2016, Mme Y a assigné devant le tribunal de grande instance d’Épinal, M. X, la SA Sogessur et le Régime Social des Indépendants Lorraine en liquidation de son préjudice corporel.

Par acte délivré le 16 septembre 2016, la SA Sogessur a assigné en intervention forcée

la SARL DGRG.

Les deux instances ont fait l’objet d’une jonction lors de la mise en état du 12 décembre 2016.

Le Régime Social des Indépendants Lorraine régulièrement assigné par acte d’huissier remis à personne, n’a pas comparu et ne s’est pas constitué.

Par jugement réputé contradictoire du 25 septembre 2018, le tribunal de grande instance d’Épinal, sous le bénéfice de l’exécution provisoire, a :

— déclaré le jugement commun au Régime Social des Indépendants Lorraine ;

— déclaré le jugement opposable à la SA Sogessur ;

— débouté la SA Sogessur de son appel en garantie de la société DGRG ;

— débouté la société DGRG de sa demande en dommages et intérêts pour procédure abusive à l’encontre de la SA Sogessur ;

— condamné la SA Sogessur à garantir M. X de toutes les condamnations en principal, intérêts et frais mis à sa charge dans le cadre de la réparation du préjudice subi par Mme Y ;

— fixé le préjudice subi par Mme Y à la somme totale de 116723,49 euros au regard du détail suivant :

Postes de préjudice

Part revenant à Mme Y

Frais divers

414 euros

Frais divers : assistance par tierce personne 3000 euros Perte de gains professionnels actuels

[…]

Incidence professionnelle

9451,09 euros

DFT

7358,40 euros

Souffrances endurées

[…]

Préjudice esthétique temporaire

1500 euros

DFP

[…]

Préjudice d’agrément

1000 euros

Préjudice esthétique permanent

[…]

Préjudice sexuel

1000 euros

— condamné M. X in solidum avec la SA Sogessur à payer à Mme Y la somme de 116723,49 euros ;

— dit que les provisions régulièrement versées s’imputent sur le règlement de cette somme ;

— débouté Mme Y du surplus de ses demandes ;

— débouté la SA Sogessur du surplus de ses demandes ;

— condamné M. X in solidum avec la SA Sogessur à payer à Mme Y la somme de 1500 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile ;

— condamné la SA Sogessur a payer à la société DGRG la somme de 1500 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile ;

— condamné M. X in solidum avec la SA Sogessur, aux entiers dépens de l’instance.

Pour statuer ainsi, le tribunal a, tout d’abord, relevé que l’ordonnance de référé du 22 octobre 2009 ayant fait l’objet d’un appel et d’un arrêt rendu par la cour d’appel de Nancy le 2 décembre 2010 et celle du 28 septembre 2011 sont des décisions provisoires qui n’ont pas d’autorité de chose jugée au principal et de conséquence sur le fond du litige.

Ensuite, s’agissant de la responsabilité de la société DGRG, le tribunal a rappelé que la société était tenue d’une obligation de sécurité découlant de l’article 1787 du code civil mais qu’en l’espèce, il n’est pas établi qu’elle ait commis de faute, les juges ayant retenu une attestation d’un salarié qui précise que sur le danger du trou était signalé par une affiche. Le tribunal a ainsi estimé que la SARL DGRG ne pouvait être appelée en garantie par la SA Sogessur et que seul M. X était responsable du dommage subi par Mme Y. Le tribunal a aussi rejeté la demande d’indemnisation pour procédure abusive de la société en raison du défaut de preuve sur l’intention de nuire de la société Sogessur.

Sur la responsabilité de M. X, le tribunal a relevé que ce dernier reconnaît sa responsabilité et en raison de son assurance multirisques dont il a règlé régulièrement les primes, la SA Sogessur est tenue de la garantie de toutes les condamnations prononcées, en principal, intérêts et frais.

Ainsi, sur la base du rapport d’expertise judiciaire qui établi que Mme Y a présenté une fracture tassement de L1 et L2 associée à un tassement du calcaneum avec fracture de l’astragale sans déplacement et une fracture de la malléole interne par traitement orthopédique, le tribunal a procédé à la liquidation des préjudices de Mme Y et a accordé les sommes de :

—  414 euros pour les frais de vêtements et d’appareil photo mais il a rejeté l’indemnisation des frais de déplacement ;

—  9451 euros pour l’incidence professionnelle en raison de l’état sequellaire de Mme Y et notamment de ses difficultés pour se chausser, ce qui a des conséquence dans l’exercice de son activité professionnelle ;

—  738,40 euros au titre du DFT en retenant un taux de 24 euros et selon les périodes définies par l’expertise : un DFT total du 27 février au 30 juin 2009 ; à hauteur de 50% du 1er juillet au 31 décembre 2009 ; 35% du 1er janvier au 30 juin 2010 puis un taux de 20% du 1er juillet au 27 février 2011 ;

— […] pour les souffrances endurées évaluées à 4/7 par l’expert judiciaire ;

— […] pour le DFP évalué à 15% avec un point de 1570 pour une personne de 56 ans ;

—  1000 euros au titre du préjudice d’agrément en raison de la perte d’activité en raison de ses difficultés de chaussage et de 1000 euros au titre du préjudice sexuel en raison de son hypersensibilité au niveau du dos et sa peur dans la réalisation de l’acte sexuel.

Le tribunal a également accordé une indemnisation à Mme Y au titre de la tierce personne, des gains professionnel actuels, du préjudice esthétique temporaire et futur, dont les fondements et les quantum ne sont pas discutés à hauteur d’appel.

In fine, le tribunal a précisé que M. X et la SA Sogessur sont condamnés in solidum à indemniser l’entier préjudice de Mme Y, sans que M. X ne puisse déduire le montant de la franchise contractuelle de 137 euros restant à sa charge.

Par déclaration reçue au greffe de la cour, sous la forme électronique, le 18 novembre 2018, la SA Sogessur a relevé appel de ce jugement.

Au dernier état de la procédure, par conclusions reçues au greffe de la cour sous la forme électronique le 7 février 2019, auxquelles il est renvoyé pour plus ample exposé des prétentions et moyens, la SA Sogessur demande à la cour de :

A titre principal,

— infirmer le jugement en date du 25 septembre 2018 en ce qu’il a jugé que la société DGRG n’avait commis aucune faute dans la survenance de l’accident dont a été victime Mme Y ;

— confirmer sur le quantum des sommes allouées au titre de son indemnisation ;

— condamner la société DGRG à garantir elle et M. X de toutes condamnations prononcées à leur encontre eu égard à la faute commise par la société DGRG qui a seule concouru au préjudice subi par Mme Y ;

— condamner la société DGRG à lui régler la somme de 131258,49 euros ;

A titre subsidiaire :

— infirmer le jugement en ce qu’il n’a pas tiré les conséquences de l’absence de faute de la dite société quant à la responsabilité de la victime, qui a commis une faute d’imprudence et dont le droit à indemnisation devra être limité à 50% :

— condamner Mme Y à lui régler la somme de 58361,75 euros ;

— condamner toute partie succombante à lui verser la somme de 3500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens dont distraction au profit de Maître D E conformément aux dispositions des articles 696 et suivants du code de procédure civile.

Au dernier état de la procédure, par conclusions reçues au greffe de la cour sous la forme électronique du 6 mai 2019, auxquelles il est renvoyé pour plus ample exposé des prétentions et moyens, Mme Y demande à la cour de :

— confirmer le jugement en ce qu’il a condamné M. X in solidum avec la SA Sogessur à payer à Mme Y les sommes de :

. 3000 euros au titre de l’assistance par tierce personne ;

. […] au titre de la perte de gains professionnels actuels ;

. 1500 euros au titre du préjudice esthétique temporaire ;

. 1500 euros au titre du préjudice esthétique permanent.

— infirmer le jugement en ce qu’il l’a déboutée du surplus de ses demandes, soit :

. en fixant son préjudice au titre des frais divers à la somme de 414 euros, alors qu’il était demandé la somme de 2971 euros ;

. en fixant son préjudice au titre de l’incidence professionnelle à la somme de 9451,09 euros alors qu’il était demandé la somme de […] ;

. en fixant son préjudice au titre du déficit fonctionnel temporaire à la somme de 7358,70 euros alors qu’il était demandé la somme de 8332,20 euros ;

. en fixant son préjudice au titre des souffrances endurées à la somme de […] alors qu’il était demandé la somme de […] ;

. en fixant son préjudice au titre du préjudice d’agrément à la somme de 1000 euros alors qu’il était demandé la somme de 8000 euros ;

. en fixant son préjudice sexuel à la somme de 1000 euros alors qu’il était demandé la somme de […] ;

. en condamnant M. X in solidum avec la SA Sogessur à lui payer la somme de 116723,49 euros alors qu’il était demandé la somme de 221633,20 euros ;

— il a fixé son préjudice au titre du déficit fonctionnel permanent à la somme de […] ;

— il a condamné M. X in solidum avec la Sogessur à lui payer la somme de 1500 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile alors qu’il était demandé la somme de 6000 euros ;

Statuant de nouveau sur ces points,

— fixer son indemnisation :

— au titre des frais divers à la somme de 2971 euros ;

— au titre de l’incidence professionnelle à la somme de […] ;

— au titre du déficit fonctionnel temporaire à la somme de 8332,20 euros ;

— au titre des souffrances endurées à la somme de […] ;

— au titre du déficit fonctionnel permanent à la somme de […] ;

— au titre du préjudice d’agrément à la somme de 8000 euros ;

— au titre préjudice sexuel à la somme de […] ;

— condamner M. X in solidum avec la SA Sogessur à lui payer la somme de 222683,20 euros en quittance et deniers selon le détail suivant :

Préjudices patrimoniaux temporaires ( avant consolidation)
Dépenses de santé actuelles

MÉMOIRE

Frais divers

2971 euros

Préjudices patrimoniaux permanents (après consolidation)
Assistance à une tierce personne 3000 euros Incidence professionnelle

[…]

Pertes de gains professionnels

[…]

Préjudices extra patrimoniaux temporaires ( avant consolidation)
DFT

8332,20 euros

Souffrances endurées

[…]

Préjudice esthétique temporaire

1500 euros

Préjudices extra patrimoniaux temporaire (après consolidation)
DFP

[…]

Préjudice d’agrément

8000 euros

Préjudice esthétique permanent

1500 euros

Préjudice sexuel

[…]

TOTAL

222683,20 euros

— condamner M. X in solidum avec la SA Sogessur à lui payer la somme de 6000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, à titre d’indemnité de première instance,

Y ajoutant,

— condamner M. X in solidum avec la SA Sogessur à lui la somme de 6000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, à titre d’indemnité à hauteur d’appel ainsi qu’aux entiers dépens d’appel et de première instance.

Au dernier état de la procédure, par conclusions reçues au greffe de la cour sous la forme électronique du 25 juillet 2019, auxquelles il est renvoyé pour plus ample exposé des prétentions et moyens, M. X demande à la cour, au visa des articles 1134 et 1147 du code civil, de :

— confirmer purement et simplement le jugement rendu par le tribunal de grande instance d’Épinal le 25 septembre 2018 en ce qu’il a condamné la société Sogessur à le garantir des condamnations prononcées à son encontre ;

— débouter Mme Y de son appel incident et confirmer les montants accordés en première instance ;

si la Cour faisait droit, partiellement ou totalement, à l’appel incident de Mme Y,

— condamner la société Sogessur à le garantir de toutes nouvelles condamnations en principal, intérêts et frais qui pourraient être mises à sa charge ;

— donner acte à de ce qu’il s’en remet à la sagesse de la cour concernant les demandes de la Société Sogessur tendant à l’infirmation du jugement ;

En tout état de cause,

— condamner la société Sogessur à lui payer une somme de 2500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile pour la procédure d’appel ;

— condamner la Société Sogessur à payer l’intégralité des frais et dépens de la procédure.

Au dernier état de la procédure, par conclusions reçues au greffe de la cour sous la forme électronique du 15 juillet 2019, auxquelles il est renvoyé pour plus ample exposé des prétentions et moyens, la SARL DGRG demande à la cour de :

— débouter purement et simplement de son appel la société Sogessur ;

— débouter Mme Y de son appel incident ;

— confirmer la décision entreprise ;

Y ajoutant,

— condamner la SA Sogessur à payer à la SARL DGRG la somme de 5000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile à hauteur d’appel ;

— condamner la SA Sogessur aux entiers dépens.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Vu les écritures déposées le 7 février 2019 par la société Sogessur, le 6 mai 2019 par Mme Y, le 25 juillet 2019 par M. X et le 15 juillet 2019 par la société DGRG auxquelles la Cour se réfère expressément pour un plus ample exposé de leurs prétentions et moyens ;

Vu la clôture de l’instruction prononcée par ordonnance du 24 septembre 2019 ;

Sur l’appel principal

La société Sogessur, assureur de M. X, a formé appel principal à l’encontre de la SARL DGRG et de Mme Y en ce que la décision déférée a jugé que la société DGRG n’avait commis aucune faute dans la survenance de l’accident dont a été victime Mme Y ;

elle sollicite la condamnation de la société DGRG à la garantir ainsi que son assuré

M. X, de toutes condamnations prononcées à leur encontre eu égard à la faute commise par la société DGRG qui a seule concouru au préjudice subi par Mme Y ; subsidiairement elle sollicite la condamnation de la société DGRG à lui régler la somme de 131258,49 euros ;

En revanche, elle ne conteste pas le quantum des sommes allouées au titre de l’indemnisation des premiers juges ;

La société Sogessur entend mettre en cause la responsabilité de la société DGRG, entreprise spécialisée dans le traitement de la 'mérule’ qui est intervenue dans la maison secondaire de son assuré M. X à sa demande, le 12 septembre 2008, tel que celà résulte de la facture acquittée du 19 septembre 2008 (2990 euros) ainsi que des déclarations des employés de cette société ;

l’accident de Mme Y, causé par une chute dans la maison de M. X dépourvue de plancher dans sa partie entrée, est survenu le 27 février 2009 ;

ce fait n’est pas contesté et résulte des déclarations corrélées de Mme Y et de M. X ;

C’est en se fondant sur l’obligation de sécurité découlant de l’article 1787 du code civil, que la société Sogessur entend obtenir la garantie sollicitée ;

elle impute ainsi à la société DGRG une faute de ce qu’en ne prenant aucune mesure de signalement et de sécurisation par la mise en place de garde corps, d’un plancher provisoire ou encore de panneaux d’avertissement, elle est seule responsable du dommage survenu ;

La société DGRG conteste toute obligation de cette nature après le chantier et ajoute que l’état du sol ne permettait pas de poser un plancher provisoire ou toute autre solution au demeurant non commandée ; elle fait état de la mise en place d’un panneau de mise en garde lorsqu’elle a quitté le chantier dont elle n’est plus gardienne au moment de la chute.

En effet l’appelante est tiers au contrat d’entreprise, ce qui exclut le fondement allégué, la société DGRG n’étant débitrice d’aucune obligation de sécurité envers la société Sogessur ;

cette dernière ne peut fonder sa demande en garantie que sur la responsabilité délictuelle de celle-ci ;

or compte-tenu du délai de cinq mois survenu entre les travaux et l’accident, elle ne démontre pas l’existence d’une faute telle que les travaux n’auraient pas été 'sécurisés’ pendant leur déroulement ;

ensuite, le chantier terminé, elle n’a plus d’obligation envers qui que ce soit, la maison étant sous la responsabilité de M. X, mandant de Mme Y dans la mission de l’évaluation de sa maison ; par conséquent ses prétentions seront écartées ;

Quant à la demande de la société Sogessur portant sur une faute prétendument commise par la victime, justifiant la limitation de son préjudice à la moitié, l’appelante ne démontre en aucune manière du bien fondé de ces prétentions, qui sont contredites par les déclarations de son propre assuré, qui reconnaît avoir omis d’avertir la victime de l’état du plancher, lorsqu’il lui a remis les clés pour se rendre dans sa maison ;

par conséquent ce moyen ne peut être valablement retenu ;

Sur l’appel incident

Il sera donné acte à Mme Y de l’absence de contestation de sa part sur les postes d’indemnisation suivants : assistance par tierce personne, perte de gains professionnels actuels, préjudice esthétique temporaire et préjudice esthétique permanent ;

En outre ni l’appelante, ni M. X ne se prononcent sur l’appel incident de Mme Y, si ce n’est en sollicitant globalement la confirmation du jugement déféré quant au montants d’indemnisation précédemment retenus ;

Aussi les postes contestés par Mme Y seront examinés successivement :

— frais divers : indemnisée à hauteur de 414 euros, l’appelante réclame 2971 euros ; elle justifie en effet avoir exposé des frais de déplacement et notamment 3366 km pour se rendre aux 187 séances chez le kinésithérapeute justifiées (pièce 7), chez le médecin traitant et aux deux expertises ; ce poste sera dès lors retenu ;

— incidence professionnelle : indemnisée à hauteur de 9451,09 euros, Mme Y réclame une somme de […] en faisant état d’une progression ralentie de sa carrière à 56 ans (date de la consolidation), une pénibilité au travail nécessitant la conduite d’un véhicule ainsi que des séquelles psychologiques ;

tel que relevé par les premiers juges le déficit fonctionnel permanent a été fixé à 15% par l’expert ;

outre les difficultés de chaussage, Mme Y qui exerce le métier d’agent immobilier ressent à l’évidence une pénibilité à l’exercice de son travail qui nécessite de nombreux déplacements en voiture ;

cependant le calcul des premiers juges a d’ores et déjà prise en compte l’incidence professionnelle en la rapportant aux pertes pendant l’arrêt de travail ainsi qu’en la calculant par application de l’indice de capitalisation ;

Mme Y n’est pas fondée à cet égard, à calculer ce préjudice par application de la totalité du taux du déficit fonctionnel permanent sur les pertes annuelles capitalisées, son déficit fonctionnel permanent étant par ailleurs indemnisé ;

par conséquent ce chef de demande sera écartée ;

— déficit fonctionnel temporaire : indemnisée à hauteur de 7358,40 euros, l’appelante réclame la somme de 8332 euros en se fondant sur une indemnité de 27 euros par heure, alors que les premiers juges en ont retenu une somme de 24 euros ;

il y a lieu de rappeler à cet égard que la base habituelle de cette indemnisation est 'égale à la moitié du S.M. I.C. (750 € par mois ou 25 € par jour)' ; par conséquent ce montant sera retenu et l’appel de Mme Y sera partiellement validé, à hauteur de 7715 euros ;

— souffrances endurées : indemnisée à hauteur de […], la victime réclame une somme de […] ;

l’expert a retenu un taux de 4/7, compte-tenu des lésions dorsales initiales ainsi que des atteintes aux pieds ; elle a du porter un corset rigide pendant une période continue de 6 semaines ; elle a dû subir de très nombreuses séances de kinésithérapie (187) ainsi qu’un suivi psycho thérapique pendant 6 mois ;

ainsi son indemnité sera portée à la somme de 12000 euros ;

— déficit fonctionnel permanent : indemnisée à hauteur de la somme de […], elle réclame la somme de […] ; ce montant est celui qui résulte du calcul des premiers juges ; il sera par conséquent validé ;

— préjudice d’agrément : indemnisée à hauteur de la somme de 1000 euros, elle en réclame 8000 euros ;

il résulte de l’expertise que Mme Y pratiquait des activités sportives de loisir comme la randonnée et le ski et que ses difficultés de chaussage l’handicapent à cet égard ; elle a remplacé ces activités par la natation ; ce poste de préjudice sera compte-tenu de son âge et de la fréquence des activtés (loisirs) limitée à la somme de 2500 euros, le jugement déféré étant infirmé sur ce point ;

— préjudice sexuel : indemnisée à hauteur de 1000 euros, elle en réclame […] ;

cependant les premiers juges ont d’ores et déjà retenu, l’existence d’une hypersensibilité du dos ainsi

que de l’appréhension à la survenue de douleurs lors de l’acte ;

l’indemnisation des premiers juges sera validée à cet égard ;

Le jugement déféré n’est pas infirmé s’agissant de l’obligation à garantie de la société Sogessur envers son assuré M. X, en ce compris pour les nouvelles indemnisations accordées à Mme Y ;

Sur l’article 700 du code de procédure civile et les dépens

La société Sogessur partie appelante perdante, devra supporter les dépens à l’exception de M. X intimé ; en outre la société Sogessur sera seule condamnée à payer à Mme Y la somme de 2500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, en sus de la somme déjà allouée en première instance ;

de même la société Sogessur sera seule condamnée à payer à la société DGRG la somme de 2500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ; en revanche la société Sogessur ainsi que M. X, son assuré, seront déboutés de leur propre demande de ce chef.

PAR CES MOTIFS :

LA COUR, statuant par arrêt contradictoire prononcé publiquement par mise à disposition au greffe,

Infirme le jugement déféré uniquement sur l’appel incident de Mme Y au titre des postes frais divers, déficit fonctionnel temporaire, souffrances endurées, déficit fonctionnel permanent et préjudice d’agrément ;

Statuant à nouveau sur les chefs de décision infirmés et y ajoutant,

Condamne in solidum la société Sogessur et B X à payer à Z Y les sommes suivantes :

—  2971 euros (deux mille neuf cent soixante et onze euros) au titre des frais divers,

—  7715 euros (sept mille sept cent quinze euros) au titre du déficit fonctionnel permanent,

—  12000 euros (douze mille euros) titre des souffrances endurées,

— […] (vingt trois mille cinq cent cinquante euros) au titre du déficit fonctionnel temporaire,

—  2500 euros (deux mille cinq cents euros) au titre du préjudice d’agrément ;

Déboute la société Sogessur de son appel principal tant à l’égard de la société DGRG que de Madame Y ;

Condamne la société Sogessur à payer à Z Y la somme de 2500 euros (deux mille cinq cents euros) au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

Condamne la société Sogessur à payer à la société DGRG la somme de 2500 euros (deux mille cinq cents euros) au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

Déboute la société Sogessur et M. X de leur demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

Condamne la société Sogessur aux entiers dépens d’appel.

Le présent arrêt a été signé par Madame CUNIN-WEBER, Présidente de la première chambre civile de la Cour d’Appel de NANCY, et par Madame PERRIN, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Signé : C. PERRIN.- Signé : N. CUNIN-WEBER.-

Minute en douze pages.

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Textes cités dans la décision

  1. Code de procédure civile
  2. Code civil
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Cour d'appel de Nancy, 1ère chambre, 6 janvier 2020, n° 18/02675