Cour d'appel de Nîmes, 1ère chambre, 23 avril 2020, n° 18/01827

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Nîmes, 1re ch., 23 avr. 2020, n° 18/01827
Juridiction : Cour d'appel de Nîmes
Numéro(s) : 18/01827
Décision précédente : Tribunal d'instance d'Alès, 19 avril 2018, N° 11-17-0053
Dispositif : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée

Sur les parties

Texte intégral

ARRÊT N°

N° RG 18/01827 -

N° Portalis DBVH-V-B7C-G7OD

SL – NR

TRIBUNAL D’INSTANCE D’ALES

20 avril 2018

RG:11-17-0053

X

Y

C/

S.A.R.L. TUCO ENERGIE

S.A. BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE

Grosse délivrée

le

à

COUR D’APPEL DE NÎMES

CHAMBRE CIVILE

1re chambre

ARRÊT DU 23 AVRIL 2020

APPELANTS :

Monsieur Z X

né le […] à […]

[…]

[…]

Monsieur B-C Y

né le […] à […]

[…]

[…]

Représentés par Me Marion DELER, Postulant, avocat au barreau de NIMES

Représentés par Me Karine LEBOUCHER, Plaidant, avocat au barreau de MONTPELLIER

INTIMÉES :

La SARL TUCO ENERGY, exerçant sous l’enseigne TUCO ENERGIE, inscrite au RCS de NANTERRE sous le n°514 315 522, prise en la personne de son représentant légal, demeurant ès qualités en son siège sis

[…]

[…]

Représentée par Me Frédéric MANSAT JAFFRE de la SELARL MANSAT JAFFRE, Postulant, avocat au barreau de NIMES

Représentée par Me Mayeul DE SAINT-SEINE, Plaidant, avocat au barreau de PARIS

BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE,

SA immatriculée au RCS de PARIS sous le n° 542 097 902, venant aux droits de la banque SYGMA suite à fusion absorption, agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux en exercice domciliés en cette qualité en son siège sis

[…]

[…]

Représentée par Me Laure REINHARD de la SCP RD AVOCATS & ASSOCIES, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de NIMES

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :

M. B-Christophe BRUYERE, Président,

Mme Elisabeth TOULOUSE, Conseillère,

Mme Séverine LEGER, Conseillère,

GREFFIER :

Mme Maléka BOUDJELLOULI, Greffière, lors des débats et du prononcé de la décision.

DÉBATS :

À l’audience publique du 10 Mars 2020, où l’affaire a été mise en délibéré au 23 Avril 2020,

Les parties ont été avisées que l’arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour d’appel.

ARRÊT :

Arrêt contradictoire, prononcé et signé par M. B-Christophe BRUYERE, Président, publiquement, le 23 Avril 2020, par mise à disposition au greffe de la Cour.

EXPOSE DU LITIGE

Le 20 février 2014, M. Z X et M. B-C Y ont conclu un contrat avec la Sarl Tuco Energy (exerçant sous l’enseigne Tuco Energie) portant sur l’acquisition et l’installation à leur domicile de panneaux photovoltaïques en intégration au bâti et d’un chauffe-eau thermodynamique pour un montant total de 31 000 euros.

Le financement de ces travaux a été réalisé au moyen d’un prêt souscrit auprès de la société Sygma devenu la Sa Bnp Paribas Personal Finance.

Par actes des 20 et 24 janvier 2017, M. Z X et M. B-C Y ont fait assigner la Sa Bnp Personal Finance et la Sarl Tuco Energy devant le tribunal d’instance d’Alès afin d’obtenir la nullité des contrats souscrits fondée sur la violation des dispositions régissant le démarchage à domicile.

Par jugement réputé contradictoire du 20 avril 2018, le tribunal d’instance d’Ales a :

— dit n’y avoir lieu à ordonner, avant dire droit, la suspension de l’exécution du crédit

— déclaré la juridiction compétente pour statuer sur le présent litige

— dit que le contrat de vente et d’installation de panneaux photovoltaïques et le contrat de prêt qui lui est accessoire sont soumis aux dispositions du code de la consommation

— débouté M. Z X et M. B-C Y de l’intégralité de leurs demandes

— condamné in solidum M. Z X et M. B-C Y à payer à la Sarl Tuco Energy la somme de 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile

— condamné in solidum M. Z X et M. B-C Y à payer à la Sa Bnp Paribas Personal Finance, venant aux droits de la Sygma Banque la somme de 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile

— débouté les parties de toutes autres demandes différentes, plus amples ou contraires au présent

dispositif

— condamné in solidum M. Z X et M. B-C Y aux dépens

— dit n’y avoir lieu à exécution provisoire.

Par déclaration du 15 mai 2018, M. Z X et M. B-C Y ont interjeté appel de cette décision.

Dans leurs dernières conclusions notifiées par voie électronique le 21 février 2020 auxquelles il sera renvoyé pour un plus ample exposé de ses prétentions et moyens, les appelants demandent à la cour :

—  In limine litis, de constater vu les articles 902, 908 et 911 du code de procédure civile, que les consorts X/Y ont signifié dans les délais légaux la déclaration d’appel et les

conclusions d’appelants à la société Tuco Energy et en conséquence, de dire que la procédure d’appel initiée par les consorts X/Y est parfaitement régulière, la déclaration d’appel valable et que les conclusions d’appelants sont recevables.

— Au fond, de confirmer la décision déférée en ce qu’elle a dit que les contrats étaient soumis aux dispositions du code de la consommation relative au démarchage à domicile et de l’infirmer en ce qu’elle les a déboutés de toutes leurs demandes.

Ils demandent ainsi à la cour, statuant à nouveau, d’ordonner la nullité du contrat de vente conclu entre Tuco Energy et les Consorts X/Y au titre de la violation des lois régissant le démarchage à domicile, d’ordonner la nullité consécutive du contrat de prêt affecté conclu entre les Consorts X/Y et sur les conséquences au titre des restitutions, de condamner la Sa Bnp Paribas Personal Finance à restituer toutes sommes d’ores et déjà versées par les Consorts X/Y au titre de l’emprunt souscrit, de dire que la Sa Bnp Paribas Personal Finance fera son affaire du remboursement du capital directement entre les mains de la société Tuco Energy, de constater les fautes imputables à la Sa Bnp Paribas Personal Finance, de priver la Sa Bnp Paribas Personal Finance de fait de tout droit à remboursement contre les Consorts X/Y s’agissant du capital, des frais et accessoires versés entre les mains de la société Tuco Energy.

Ils demandent également à la cour de condamner solidairement les sociétés Tuco Energy et la Sa Bnp Paribas Personal Finance à prendre en charge le coût des travaux de dépose des panneaux photovoltaïques, et de remise en état des existants, soit la somme de 7 139 euros selon devis de dépose, de débouter les sociétés Bnp Paribas Personal Finance et Tuco Energy de toutes leurs demandes, fins et conclusions et de condamner solidairement les intimées à leur payer la somme de 3 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, outre le paiement des entiers dépens.

Ils soutiennent essentiellement que :

— la déclaration d’appel est parfaitement valable et les conclusions d’appelants sont parfaitement recevables ;

— le droit de la consommation doit être appliqué au cas d’espèce et que le défaut des mentions prescrites par ce code entraîne la nullité du contrat principal ainsi que, conséquemment, la nullité du contrat de crédit affecté ;

— le charge de la preuve repose sur la Sa Bnp Paribas Personal Finance, qui ne démontre à aucun moment que les Consorts X/Y auraient eu connaissance des irrégularités affectant la rédaction du contrat de vente et l’entachant de nullité, ce dès la signature du bon de commande et qu’en l’état de cette connaissance, ils auraient choisi de ne pas en tenir compte et d’exécuter le contrat ;

— dès qu’ils ont eu connaissance des causes de nullité, les consorts X/Y n’ont jamais manifesté leur intention de réparer ces nullités bien au contraire ;

— la Sa Bnp Paribas Personal Finance est à l’origine de multiples fautes contractuelles qui la privent du droit de demander le remboursement du capital aux Consorts X/Y ; que la Sa Bnp Paribas Personal Finance a libéré les fonds entre les mains de la société Tuco Energy, alors même que la prestation n’était pas achevée, et qu’elle n’avait donc pas le droit de se départir des fonds; qu’elle a en outre débloqué les fonds sur la base de documents signés par un seul des co-emprunteurs ;

— la Banque Bnp Paribas Personal Finance, dont le préposé était également celui de la société

Tuco Energy, avait connaissance de la nullité du bon de commande ;

— en ayant octroyé un crédit abusif, puisque sans même se soucier de la capacité de remboursement de l’emprunteur, ni de son information quant au crédit, la Sa Bnp Paribas Personal Finance sera ainsi déchue du droit aux intérêts ;

— les Consorts X/Y justifient d’un préjudice évident, n’ayant pas été mis en mesure de se dégager d’un démarchage ruineux.

Dans ses dernières conclusions notifiées par voie électronique le 20 novembre 2018 auxquelles il sera également renvoyé, la Sarl Tuco Energy demande à la cour de :

In limine litis :

— dire caduque la déclaration d’appel de M. X et M. Y ;

— dire irrecevables les conclusions d’appelants de M. X et M. Y.

Sur le fond,

A titre principal :

— débouter M. X et M. Y de leurs demandes de nullité du contrat de vente conclu le 20 février 2014 avec la Sarl Tuco Energy ;

— débouter M. X et M. Y de leur demande d’annulation du contrat de crédit affecté conclu le 20/2/2014 avec la Sa Bnp Paribas ;

— débouter M. X et M. Y de toutes leurs autres demandes;

— confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions.

A titre subsidiaire :

— débouter M. X et M. Y de leur demande de condamnation de la Sarl Tuco Energy de prendre en charge la dépose des matériels selon le devis fourni en pièce n°17 ;

— prendre acte que la Sarl Tuco Energy réalisera elle-même les travaux et opérations nécessaires;

— prendre acte que la Sarl Tuco Energy se rapprochera spontanément de Messieurs X et Y pour convenir avec eux d’un calendrier d’intervention ;

— dire que la Sa Bnp Paribas n’a pas commis de faute dans le déblocage des fonds ;

— condamner M. X et M. Y à restituer à la Sa Bnp Paribas les fonds prêtés.

En toutes hypothèses :

— débouter M. X et M. Y de l’intégralité de leurs demandes.

— condamner in solidum M. X et M. Y à 2 000 euros au titre des frais irrépétibles, ainsi qu’aux entiers dépens.

Elle soutient notamment que :

— n’ayant pas constitué avocat avant le 25 septembre 2018, les consorts X-Y auraient dû lui signifier leurs conclusions d’appelants avant le 15 septembre 2018 et que cela n’a pas été fait;

— elle a fourni aux consorts X-Chzel toutes les informations requises pour appréhender précisément les biens et services convoités, et pour procéder à un choix éclairé ; que la surface des panneaux solaires, leur poids, leur marque, leur fabricant ne sont pas des informations visées par le texte de l’article L.121-23 ancien du code de la consommation ;

— la mention du délai de livraison figurant dans le bon de commande de la Sarl Tuco Energy est parfaitement valide ;

— le formulaire de rétractation inséré dans les Conditions Générales de Vente contient toutes les mentions requises par l’article R.121-3 du code de la consommation ;

— les consorts X-Y se sont abstenus de se rétracter dans le délai légal, ont volontairement exécuté le contrat de vente et ont réceptionné l’ouvrage sans réserve, comme l’atteste le procès-verbal de fin de travaux du 22 avril 2014 ;

— le contrat de vente n’est pas affecté de nullité.

— le contrat de crédit affecté est lui aussi parfaitement valide.

Dans ses dernières conclusions notifiées par voie électronique le 24 février 2020 auxquelles il sera également renvoyé, la Sa Bnp Paribas Personal Finance venant aux droits de la Banque Sygma demande à la cour d’accueillir son appel incident et de réformer la décision entreprise en ce qu’elle a jugé applicables les dispositions du code de la consommation et par conséquent, de débouter les consorts X-Y de l’intégralité de leurs demandes.

Subsidiairement, en cas d’application des dispositions du code de la consommation, elle demande à la cour de confirmer la décision entreprise en ce qu’elle a jugé n’y avoir lieu à prononcer l’annulation des contrats et en ce qu’elle a débouté les consorts X-Y de l’intégralité de leurs demandes.

Plus subsidiairement, dans le cas où la cour prononcerait l’annulation des contrats, elle demande à la cour de dire qu’elle n’a commis aucune faute et que les consorts X et Y ne justifient pas de l’existence d’un préjudice et d’un lien de causalité et en conséquence de les condamner solidairement à lui rembourser la somme de 31 000 euros correspondant au capital prêté, sous déduction des échéances réglées, outre les intérêts au taux légal à compter de la mise à disposition des fonds et de les débouter de toute autre demande, fin ou prétention.

A titre infiniment subsidiaire, elle demande à la cour de condamner la société Tuco Energy à payer à la Sa Bnp Paribas Personal Finance la somme de 31 000 euros correspondant au capital prêté, de débouter les consorts X-Y de toute autre demande, fin ou prétention.

En tout état de cause, elle demande à la cour de condamner la partie succombant à lui payer une indemnité à hauteur de 2 000 euros, sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, outre lesentiers dépens de première instance et d’appel.

Elle soutient essentiellement que :

— il ressort des factures de revente produites aux débats par la partie adverse que les consorts X-Y ont produits 6151 Wc pour l’année 2014/2015 et 5172 Wc pour l’année 2015/2016, à chaque fois pour une consommation personnelle égale à 0 Wc, ce qui justifie d’écarter les dispositions du code de la consommation ;

— le bon de commande comprend bien l’ensemble des mentions obligatoires ;

— les conditions générales de vente étaient parfaitement lisibles et compréhensibles, peu important la taille des caractères utilisés ;

— l’installation a bien été effectuée et elle fonctionne parfaitement ; les emprunteurs ont signé le certificat de livraison dans lequel ils reconnaissent que les travaux ont bien été réalisés et sollicitent que le prêteur verse les fonds au vendeur ; qu’ils ont réglé les échéances du crédit, qu’ils ont utilisé l’installation pendant plusieurs années avant de soulever toute difficulté ;

— aucune faute ne peut être retenue à l’encontre du prêteur.

La procédure a été clôturée par ordonnance du 12 novembre 2019 à effet différé au 25 février 2020 et l’affaire a été fixée à l’audience du 10 mars 2020 et mise en délibéré par mise à disposition au greffe de la décision le 23 avril 2020.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la procédure :

La Sarl Tuco Energy demande à la cour de relever d’office la caducité de la déclaration d’appel de MM. X et Y sur le fondement des dispositions de l’article 911 du code de procédure civile au moyen tiré de l’absence de signification des conclusions d’appelant dans le délai légal de quatre mois depuis la déclaration d’appel soit avant le 15 septembre 2018 dans la mesure où la société Tuco énergie n’a constitué avocat que le 25 septembre 2018.

Elle sollicite également l’irrecevabilité des conclusions d’appelant.

L’article 911 du code de procédure civile impose sous peine de caducité de la déclaration d’appel la signification des conclusions d’appelant au plus tard dans le mois suivant les délais prévus pour conclure aux parties qui n’ont pas constitué avocat.

En l’espèce, la déclaration d’appel étant en date du 15 mai 2018, les appelants devaient remettre leurs conclusions au greffe dans le délai de trois mois prévu par l’article 908 du code de procédure civile, soit avant le 15 août 2018.

Ayant été destinataires par le greffe le 18 juin 2018 d’un avis de la cour d’avoir à signifier leur déclaration d’appel à la société Tuco Energy dans le délai d’un mois en l’absence de constitution d’avocat par celle-ci, les appelants justifient avoir procédé à la signification de la déclaration d’appel par acte d’huissier du 20 juin 2018 remis à étude.

Les appelants justifient par ailleurs avoir transmis leurs conclusions par voie électronique le 30 juillet 2018, soit dans le délai fixé par l’article 908 du code de procédure civile et avoir procédé à leur signification à la société Tuco Energy par acte d’huissier remis à étude le 6 septembre 2018, soit avant le terme fixé en l’espèce au 15 septembre 2018 en application des dispositions de l’article 911 du code de procédure civile.

Les délais de procédure ayant été strictement respectés par les appelants, la déclaration d’appel n’encourt aucune caducité et les conclusions d’appelant n’encourent aucune

irrecevabilité.

Sur l’application des dispositions du code de la consommation :

La banque conteste l’application des dispositions du code de la consommation au contrat de vente signé par les parties le 20 février 2014 retenue par le premier juge en excipant de la nature de l’installation photovoltaïque acquise qui avait pour objet la revente totale d’électricité à Erdf avec une puissance supérieure à 3kWc en arguant de la nature commerciale de la revente d’énergie dès lors que le dispositif ne permettait aucune consommation personnelle.

Les appelants se prévalent de leur côté de la qualité de consommateurs eu égard aux modalités de signature du bon de commande dans le cadre d’un démarchage à domicile et contestent avoir agi dans le cadre d’une activité professionnelle en dépit de la revente de l’intégralité de l’électricité produite par l’installation en arguant de l’absence de destination professionnelle du prêt et de l’achat simultané d’un chauffe-eau thermodynamique et d’un pack led destinés à leur consommation personnelle.

Il ressort du bon de commande que les consorts X/Y se sont porté acquéreurs d’une installation photovoltaïque d’une puissance de 4 500 Wc constituée de 18 modules solaires d’une puissance de 250 Wc ainsi que d’un chauffe-eau thermodynamique pour production d’eau chaude sanitaire d’une capacité de 250 litres et d’un pack led.

C’est à tort que la banque considère que l’achat du chauffe-eau thermodynamique ne constitue que l’accessoire du contrat principal portant sur l’installation photovoltaïque et ne saurait ainsi déterminer l’application des dispositions du code de la consommation au moyen tiré de ce que tant la puissance de l’installation que sa finalité tendant à la revente totale de l’électricité caractérisent un acte de commerce alors que le bon de commande doit être analysé dans sa globalité.

Or, il découle du bon de commande que les consorts X/Y ont acquis une installation photovoltaïque qui, bien qu’excédant le seuil de 3000 Wc correspondant à la moyenne de consommation électrique d’un particulier, ont également fait l’acquisition d’un chauffe-eau aux fins de production d’eau chaude sanitaire destinée à leur usage personnel et ce alors que le contrat de crédit affecté ne mentionne aucune destination professionnelle du prêt, ce qui permet ainsi d’exclure la qualification d’un acte de commerce et de retenir l’application des dispositions du code de la consommation.

La décision déférée sera donc confirmée sur ce point.

Sur la nullité du contrat de vente :

- Sur l’irrégularité du bon de commande :

Les appelants se prévalent de la nullité du bon de commande fondée sur la violation des dispositions de l’article L121-23 du code de la consommation au moyen tiré de l’absence de désignation précise de la nature et des caractéristiques des marchandises, aucune indication n’étant fournie sur la marque, le fabricant, les références techniques et le prix unitaire des panneaux.

Ils excipent également de l’absence de mention d’un délai clair et non équivoque de livraison.

Les intimées concluent toutes deux à la régularité du bon de commande et sollicitent la confirmation de la décision du premier juge en ce que les informations fournies dans le

contrat ont permis aux acquéreurs d’appréhender l’étendue des prestations offertes ainsi que la nature et les qualités des produits vendus.

Il ressort de l’examen du bon de commande que la description de l’installation photovoltaïque comporte sa puissance de 4 500 Wc, le nombre de modules solaires constitué de 18 panneaux, et leurs caractéristiques générales s’agissant de modules monocristallins d’une puissance de 250 Wc. Ces éléments, bien que désignant effectivement les biens commandés, ne procèdent pas à une désignation suffisamment précise de la nature et des caractéristiques des biens telle qu’exigée par l’article L121-23 du code de la consommation en l’absence d’indication de la marque des panneaux, du fabricant, des références techniques et de leur prix unitaire, éléments indispensables pour permettre au consommateur d’avoir une connaissance précise de l’engagement souscrit.

Par ailleurs, le bon de commande ne comporte aucune indication sur les caractéristiques précises du chauffe-eau thermodynamique, la seule mention de sa contenance de 250 litres à l’exclusion de toute autre précision étant insuffisante.

Le bon de commande mentionne par ailleurs une clause générale indiquant que 'l’installation interviendra u plus tard dans les quatre mois suivant la signature du bon de commande’ mais ne comporte aucune mention de date certaine.

Son irrégularité est ainsi pleinement établie en l’état de ces seuls éléments et justifie l’annulation du contrat de vente sans qu’il soit nécessaire d’examiner les autres moyens de nullité soulevés par les appelants.

La décision déférée sera donc infirmée.

- Sur l’incidence de la nullité relative :

Les intimées opposent le caractère relatif de la nullité du contrat de vente et entendent se prévaloir de la confirmation de la nullité découlant de l’exécution volontaire du contrat par les consorts X/Y sur le fondement des dispositions de l’article 1338 du code civil dans son ancienne rédaction en se fondant sur l’exécution volontaire du contrat alors que les conditions générales contenaient la reproduction des dispositions de l’article L121-23 du code de la consommation de sorte que les acquéreurs pouvaient se convaincre de la nullité alléguée qu’ils ont volontairement couverte.

Il est constant qu’en application des dispositions de l’ancien article 1388 du code civil, la confirmation tacite d’une nullité relative ne peut découler de la seule exécution volontaire du contrat et suppose la connaissance du vice et l’intention de le réparer.

Elle ne peut ainsi résulter que d’une manifestation de volonté non équivoque de renoncer à s’en prévaloir.

La signature par l’acquéreur d’une attestation de fin de travaux est insuffisante à établir cette manifestation de volonté qui ne peut non plus découler du seul fait que les conditions générales du bon de commande portaient la reproduction intégrale des dispositions de l’article L121-23 du code de la consommation.

En l’espèce, s’il est établi que les consorts X/Y ont effectivement volontairement exécuté le contrat en s’étant abstenu de faire usage de la faculté de rétractation qui leur était offerte, en ayant signé l’attestation de fin de travaux le 22 avril 2014 puis obtenu le raccordement au réseau Erdf à partir du 16 octobre 2014 et procédé à la revente d’électricité et au règlement des échéances du prêt, il n’est cependant pas démontré que les acquéreurs

avaient connaissance des vices affectant le contrat de vente qu’ils avaient signé de sorte que l’exécution volontaire des obligations découlant du contrat n’a pas été effectuée en parfaite connaissance du vice et avec l’intention de le réparer.

Il est au contraire établi que les consorts X/Y se sont prévalu d’une demande d’annulation du bon de commande fondée sur les irrégularités l’affectant dès qu’ils ont pris connaissance du vice par lettre recommandée avec accusé de réception adressée à la société Tuco énergy le 6 décembre 2016, demande également transmise le même jour à l’établissement de crédit.

Ce moyen sera en conséquence rejeté et le contrat de vente sera par conséquent annulé.

Sur la nullité subséquente du contrat de crédit :

Aux termes des dispositions de l’article L311-32 du code de la consommation dans sa rédaction résultant de la loi du 1er juillet 2010 applicable au contrat signé par les parties, le contrat de crédit est résolu ou annulé de pleine droit lorsque le contrat en vue duquel il a été conclu est lui-même judiciairement résolu ou annulé de plein droit.

L’annulation du contrat de crédit subséquente au contrat principal de vente entraîne en principe la remise en état antérieur devant se matérialiser par la restitution par l’emprunteur des fonds prêtés, l’établissement de crédit devant restituer les mensualités réglées au titre du prêt.

Les appelants arguent cependant de fautes commises par la banque de nature à la priver de son droit à obtenir le remboursement du capital prêté.

Sur la faute de la banque dans le déblocage des fonds :

Les appelants arguent d’une double faute de la banque de nature à la priver de son droit au remboursement des sommes prêtées en excipant de l’absence de vérification par le prêteur de la régularité du contrat de vente non conforme aux dispositions du code de la consommation et de l’absence de vérification préalable de l’exécution complète du contrat avant le déblocage des fonds.

Il est en effet constant que dans l’hypothèse d’un contrat de vente signé dans le cadre d’un démarchage à domicile, il appartient au prêteur de vérifier la régularité du contrat de vente avant de procéder au déblocage des fonds. En l’espèce, il est établi que le bon de commande était manifestement irrégulier en ce qu’il ne précisait pas suffisamment les caractéristiques des biens vendus ni les modalités de livraison desdits biens. En procédant à la remise des fonds en dépit des irrégularités apparentes du contrat de vente, la banque a ainsi commis une faute.

En outre, en application des dispositions de l’article L311-31 du code de la consommation, les obligations de l’emprunteur ne prenant effet qu’à compter de la livraison du bien ou de la fourniture de la prestation, la banque se devait de veiller à l’accomplissement de l’intégralité de la prestation avant de procéder au déblocage des fonds.

Dans l’hypothèse d’un engagement solidaire, les co-obligés se représentent mutuellement de sorte qu’il est indifférent que les consorts X/Y n’aient pas tous deux signé l’attestation de fin de travaux.

La banque est cependant mal fondée à se prévaloir de l’exécution complète de l’opération financée en arguant de la réception des travaux sans réserve par les emprunteurs alors que le

bon de commande prévoyait l’installation photovoltaïque incluant expressément la prise en charge des démarches administratives par la société Tuco énergy, l’installation complète et le raccordement au réseau Erdf et que le procès-verbal de fin de travaux signé le 22 avril 2014 n’était pas suffisamment précis en ce qu’il ne visait que les travaux d’installation photovoltaïque et ballon d’eau chaude thermodynamique et ne permettait ainsi pas à la banque de se convaincre de l’exécution complète de l’intégralité des prestations stipulées au contrat principal de vente.

Les appelants justifient d’ailleurs l’inexécution de l’intégralité de la prestation à la date du déblocage des fonds en produisant la fiche de visite technique renseignée par Erdf le 20 mai 2014 et la lettre attestant de la mise en service de l’installation photovoltaïque le 16 octobre 2014, soit six mois après le déblocage des fonds réalisé par la banque.

Les fautes de la banque sont ainsi caractérisées sans qu’il soit nécessaire d’examiner les autres moyens développés par les appelants.

- Sur le préjudice :

Il est désormais acquis que la faute du prêteur n’est pas suffisante pour le priver de sa créance de restitution et qu’il appartient à l’emprunteur de rapporter la preuve d’un préjudice actuel et certain.

La banque soutient que le préjudice allégué par les consorts X/Y n’est pas caractérisé et ne pourrait en tout état de cause consister qu’en la perte d’une chance de n’avoir pas contracté et ne saurait être fixé au montant du capital prêté dans la mesure où les travaux ont bien été réalisés, que l’installation est en état de fonctionnement et permet la revente d’électricité à Erdf depuis plusieurs années, ce qui est effectivement attesté par les factures annuelles de revente d’électricité à Erdf versées aux débats pour l’année 2014/2015 d’un montant de 1 718,59 euros et pour l’année 2015/2016 d’un montant de 1 447,80 euros.

La banque conclut à juste titre qu’elle ne saurait être tenue pour responsable de l’absence de rentabilité de l’investissement réalisé dans la mesure où en sa qualité d’établissement dispensateur de crédit, son obligation de conseil et de mise en garde ne porte que sur l’adaptation du crédit accordé aux capacités financières de l’emprunteur, à propos duquel les éléments de l’espèce permettent d’écarter toute faute de la banque au regard de la fiche de solvabilité signée par les emprunteurs attestant de ressources mensuelles du couple d’un montant de 2865 euros pour des mensualités de crédit de 305,86 euros.

Les appelants ne rapportent pas la preuve alléguée du caractère partiellement inefficace de l’installation photovoltaïque qu’ils considèrent constituer un investissement ruineux alors que les factures annuelles de revente d’électricité à Erdf attestent d’une production d’électricité de 6151 kWh pour la période du 16 octobre 2014 au 15 octobre 2015 et de 5 172 kWh pour la période du 16 octobre 2015 au 15 octobre 2016, ce dont il découle qu’ils ne rapportent pas la preuve du préjudice allégué.

Les consorts X/Y sont par conséquent défaillants dans la preuve d’un préjudice actuel et certain découlant de la faute de la banque dans le déblocage des fonds de sorte qu’il n’y pas lieu de priver cette dernière de sa créance de restitution des fonds prêtés.

Les appelants se prévalent également d’un défaut de vigilance de la banque dans le choix de son partenaire commercial en soutenant que la société Tuco énergy était un intermédiaire de crédit au sens des dispositions de l’article L 311-1. 3° du code la consommation, ce dont la preuve n’est cependant pas rapportée au regard des seuils fixés par l’article R519-2 du code monétaire et financier excluant cette qualité dans l’hypothèse où le nombre total des crédits

octroyés par leur intermédiaire n’excède pas 30 opérations ou 300 000 euros.

En toute hypothèse, ils entendent se prévaloir du non respect des dispositions de l’article L 311-8 du code de la consommation en arguant de l’absence de remise de la fiche d’information distincte imposée dans l’hypothèse où le crédit est proposé sur un lieu de vente et de l’absence de justificatif de la formation dispensée par la banque à la société Tuco énergy mais ce texte n’est sanctionné que par la déchéance du droit aux intérêts prévue par l’article L311-48 alors applicable de sorte que ce moyen ne saurait entraîner la perte de la banque à sa créance de restitution du capital prêté.

M. Z X et M. B-E Y seront ainsi solidairement condamnés à rembourser à la la Sa Bnp Paribas Personal Finance la somme de 31 000 euros correspondant au montant du capital prêté, sous déduction des échéances déjà réglées, avec intérêts au taux légal à compter de la présente décision.

Sur la demande afférente à la dépose des panneaux :

Si les consorts X/Y sont bien fondés à solliciter en son principe la dépose des panneaux installés sur la toiture eu égard à la nullité du contrat de vente leur imposant de restituer l’intégralité du matériel acquis et financé, la banque ne saurait être tenue d’assumer le coût financier de la dépose, cette obligation ne pesant que sur le prestataire de services, soit sur la société Tuco Energy.

Il appartiendra à la société Tuco Energy de prendre en charge la dépose de l’intégralité des matériels fournis de sorte que les appelants seront déboutés de leur demande de condamnation de cette société au paiement de la somme de 7 139 euros selon devis de dépose réalisé le 9 février 2017 par une société tierce.

Sur les autres demandes :

Les parties succombant partiellement en leurs prétentions, il sera fait masse des dépens de première instance et d’appel, lesquels seront supportés par parts égales par chacune d’entre elles soit à hauteur du tiers.

L’équité commande en l’espèce de ne faire aucune application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile au regard de la succombance partielle de chacune des parties qui seront respectivement déboutées de leur prétention à ce titre.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant par arrêt contradictoire rendu par mise à disposition au greffe et en dernier ressort,

Déclare l’appel et les conclusions d’appelant recevables ;

Confirme la décision déférée en ce qu’elle a dit que le contrat de vente et d’installation de panneaux photovoltaïques et le contrat de prêt sont soumis aux dispositions du code de la consommation ;

Infirme la décision déférée pour le surplus ;

Statuant à nouveau,

Prononce la nullité du contrat de vente conclu entre la société Tuco Energy et M. Z

X et M. B-E Y et du contrat de crédit affecté conclu avec la Banque Sygma aux droits de laquelle vient la Sa Bnp Paribas Personal Finance ;

Dit que la banque a commis une faute lors du déblocage des fonds ;

Constate que MM. X et Y ne subissent pas de préjudice en lien avec la faute imputable à la banque ;

Condamne solidairement M. Z X et M. B-E Y à payer la Sa Bnp Paribas Personal Finance la somme de 31 000 euros au titre du capital restant dû dont devra être déduit le montant des échéances déjà réglées, le solde portant intérêts légaux à compter de la présente décision ;

Condamne la Sarl Tuco Energy à procéder à ses frais aux travaux de dépose des matériels fournis et à la remise en l’état antérieur ;

Rejette toute autre demande plus ample ou contraire ;

Déboute les parties de leur prétention respective au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

Fait masse des dépens de première instance et d’appel et dit qu’ils seront supportés par parts égales entre les consorts X/Y, la Sarl Tuco Energy et la Sa Bnp Personal Finance, soit à hauteur du tiers pour chacune.

Arrêt signé par M. BRUYERE, Président et par Mme BOUDJELLOULI, Greffière.

LA GREFFIÈRE, LE PRÉSIDENT,

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Cour d'appel de Nîmes, 1ère chambre, 23 avril 2020, n° 18/01827