Cour d'appel de Paris, 4e chambre, 28 mai 2003, n° 2001/15311

  • Responsabilité au titre de l'art. l. 713-5 cpi·
  • Atteinte à la marque de renommée·
  • Similarité des produits·
  • Déchéance de la marque·
  • Imprécision du libellé·
  • Contrefaçon de marque·
  • Validité de la marque·
  • Déchéance partielle·
  • Produits opposés·
  • Intérêt à agir

Chronologie de l’affaire

Commentaire0

Augmentez la visibilité de votre blog juridique : vos commentaires d’arrêts peuvent très simplement apparaitre sur toutes les décisions concernées. 

Sur la décision

Référence :
CA Paris, 4e ch., 28 mai 2003, n° 01/15311
Juridiction : Cour d'appel de Paris
Numéro(s) : 2001/15311
Publication : GAZ PAL, 265-267, 23-24 septembre 2005, p. 12-30, note d'Emmanuel Arnaud ; Annales de la propriété industrielle artistique et littéraire, 2, 2003, p. 253-257 ; PIBD 2003, 776, III-602
Décision(s) liée(s) :
  • Tribunal de grande instance de Paris, 21 mars 2001
  • 2000/04096
  • Cour de cassation, 12 juillet 2005
  • M/2003/17640
Domaine propriété intellectuelle : MARQUE
Marques : MUST ; PEDIMUST
Numéro(s) d’enregistrement des titres de propriété industrielle : 1546417 ; 99792561
Classification internationale des marques : CL01 ; CL02 ; CL03 ; CL04 ; CL05 ; CL06 ; CL07 ; CL08 ; CL09 ; CL10 ; CL11 ; CL12 ; CL13 ; CL14 ; CL15 ; CL16 ; CL17 ; CL18 ; CL19 ; CL20 ; CL21 ; CL22 ; CL23 ; CL24 ; CL25 ; CL26 ; CL27 ; CL28 ; CL29 ; CL30 ; CL31 ; CL32 ; CL33 ; CL34 ; CL35 ; CL36 ; CL37 ; CL38 ; CL39 ; CL40 ; CL41 ; CL42
Liste des produits ou services désignés : Chaussures destinées aux professionnels de la santé / vêtements de luxe
Référence INPI : M20030384
Télécharger le PDF original fourni par la juridiction

Sur les parties

Texte intégral

COUR D’APPEL DE PARIS

4è chambre, section A

ARRET DU 28 MAI 2003

(8 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : 2001/15311 Pas de jonction

Décision dont appel : Jugement rendu le 21/03/2001 par le TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE de PARIS 3 1re Ch. RG n° : 2000/04096 Date ordonnance de clôture : 24 Mars 2003 Nature de la décision : CONTRADICTOIRE Décision : CONFIRMATION

APPELANT : S.A. CARTIER prise en la personne de ses représentants légaux ayant son siège […] 75002 PARIS représenté par la SCP MOREAU, avoué assisté de Maître P. C, Toque D109, Avocat au Barreau de PARIS

INTIME : S.A.R.L. OXYPAS prise en la personne de ses représentants légaux, ayant son siège Quai Voltaire Prolongé 34110 FRONTIGNAC représenté par la SCP ROBLIN-CHAIX DE LAVARENE, avoué assisté de Maître C. H, Toque E1219, Avocat au Barreau de PARIS

COMPOSITION DE LA COUR : Lors des débats : Monsieur CARRE-PIERRAT et Madame MAGUEUR, Magistrats chargés du rapport, ont entendu les plaidoiries, les avocats ne s’y étant pas opposés. Ils en ont rendu compte à la Cour dans son délibéré.

Lors du délibéré : PRESIDENT : Monsieur Alain CARRE-PIERRAT CONSEILLER : Madame Marie-Gabrielle MAGUEUR

CONSEILLER : Madame Henriette SCHOENDOERFFER

DEBATS : A l’audience publique du 2 avril 2003

GREFFIER : Lors des débats et du prononcé de l’arrêt : Madame Jacqueline VIGNAL

ARRET Prononcé publiquement par Monsieur CARRE-PIERRAT, Président, lequel a signé la minute avec Madame VIGNAL, greffier présent au prononcé de l’arrêt.

Vu l’appel interjeté par la société CARTIER du jugement du tribunal de grande instance de Paris du 21 mars 2001 qui a :

- rejeté l’exception de nullité de la marque « MUST »,
- déclaré la société OXYPAS recevable à agir en déchéance de marque pour les seuls produits : vêtements, y compris les bottes, les souliers et les pantoufles,
- prononcé la déchéance partielle de la marque « MUST » № 1.546.417, enregistrée le 12 mai 1989, renouvelée le 21 avril 1999, pour les seuls produits de la classe 25 suivants : « les bottes, les souliers et les pantoufles » et ce, avec effet au 28 décembre 1996,
- dit que sur réquisition du greffier ou de l’une des parties, le présent jugement passé en force de chose jugée sera transmis à l’INPI pour inscription au registre national des marques,
- débouté les parties de toute prétention plus ample ou contraire,
- condamné la société CARTIER à payer à la société OXYPAS la somme de 20.000 F sur le fondement de l’article 700 du nouveau Code de procédure civile,

Vu les dernières écritures signifiées le 3 mars 2003 par lesquelles la société CARTIER, poursuivant l’infirmation du jugement entrepris en ce qu’il l’a débouté de son action en contrefaçon et condamné sur le fondement de l’article 700 du nouveau Code de procédure civile, demande à la Cour de :

- dire que la marque « PEDIMUST » № 99 792 561 constitue la contrefaçon de la marque « MUST » №1.546.417 dont elle est titulaire et propriétaire,
- subsidiairement, dire que le dépôt de la marque « PEDIMUST » engage la responsabilité civile de la société OXYPAS par application de l’article L.713-5 du CPI ou de l’article 1382 du Code civil,
- déclarer nulle la marque « PEDIMUST » № 99 792 561,

— faire défense à la société OXYPAS de faire usage de la dénomination « PEDIMUST » pour désigner des chaussures, sous astreinte définitive et non comminatoire de 1.000 euros par infraction constatée, à l’expiration d’un délai d’un mois suivant la signification de l’arrêt à intervenir,
- condamner la société OXYPAS à lui payer la somme de 23.000 euros à titre de dommages-intérêts,
- l’autoriser à faire publier par extrait l’arrêt à intervenir, dans trois journaux ou périodiques de son choix, aux frais de la société OXYPAS, le coût total des publications pouvant atteindre la somme totale H.T. de 15.000 euros et ce, au besoin à titre de complément de dommages-intérêts,
- condamner la société OXYPAS à lui verser la somme de 10.000 euros sur le fondement de l’article 700 du nouveau Code de procédure civile,

Vu les dernières conclusions signifiées le 31 janvier 2003 aux termes desquelles la société OXYPAS sollicite la confirmation du jugement déféré sauf en ce qu’il a déclaré irrecevable sa demande en nullité de la marque « MUST » et sa demande en déchéance s’agissant des produits suivants : "produits hygiéniques… instruments et appareils chirurgicaux, médicaux… vêtements… laboratoires", demandant à la Cour de :

— prononcer la nullité partielle de la marque « MUST » №1.546.417 pour les produits et services suivants : « produits hygiéniques… instruments et appareils chirurgicaux, médicaux… vêtements… laboratoires »,

— prononcer la déchéance des droits de la société CARTIER sur la marque « MUST » №1.546.417 pour défaut d’exploitation en ce qu’elle protège les produits et services suivants : « produits hygiéniques… instruments et appareils chirurgicaux, médicaux… vêtements, y compris les bottes, les souliers et les pantoufles, lacets… maisons de repos et de convalescence, pouponnières… salons de beauté… laboratoires », à compter du 28 décembre 1996,
- condamner la société CARTIER à lui verser la somme de 15.000 euros à titre de dommages-intérêts pour procédure abusive,
- l’autoriser à faire procéder à la publication de l’arrêt à intervenir dans trois journaux ou revues de son choix, aux frais de la société CARTIER, le coût global des publications ne pouvant excéder la somme de 15.000 euros HT,
- condamner la société CARTIER à lui verser la somme de 10.000 euros sur le fondement de l’article 700 du nouveau Code de procédure civile,

SUR CE, LA COUR

- Sur l’exception de nullité partielle de la marque « MUST » №1.546.417

Considérant que la société OXYPAS soulève la nullité de la marque « MUST » sur le fondement de l’article 2 de l’arrêté du 31 janvier 1992, en ce qu’elle désigne les produits suivants : "produits hygiéniques, instruments et appareils chirurgicaux et médicaux, vêtements et laboratoires'', au motif que l’imprécision des termes choisis ne permet pas aux tiers d’identifier avec certitude les produits ou services protégés par ce signe ;

Considérant que la société CARTIER n’oppose à la société OXYPAS que les droits qu’elle détient sur la marque « MUST » pour les produits suivants : vêtements, y compris les bottes, les souliers et les pantoufles" ;

Que la société OXYPAS titulaire de la marque « PEDIMUST » pour désigner des chaussures destinées aux professionnels de la santé ne justifie pas d’un intérêt légitime à poursuivre, à titre reconventionnel, la nullité de la marque « MUST » pour des produits autres que ceux qui lui sont opposés ; qu’en outre, elle ne justifie pas de l’exercice d’une activité dans le domaine de la santé en dehors de l’achat et de la vente d’articles chaussants destinés aux professionnels de la santé ;

Considérant que la marque « MUST » ayant fait l’objet d’un renouvellement, selon déclaration du 21 avril 1999, les dispositions de l’arrêté du 31 janvier 1992 sont applicables à cet enregistrement ;

Considérant que l’article 2 de ce texte prévoit que rémunération des produits ou services auxquels s’applique la marque peut résulter soit de la désignation individuelle de chacun des produits ou services, soit de l’énumération de la catégorie à laquelle ils appartiennent. Dans ce dernier cas, les termes employés doivent permettre à toute personne d’en délimiter le contenu de façon immédiate, certaine et constante ;

Considérant que l’énumération de la catégorie des vêtements, dans laquelle le déposant a inclus les bottes, les souliers et les pantoufles, permet de déterminer avec suffisamment de précision les produits couverts par la marque ;

Qu’il s’ensuit que le jugement doit être confirmé en ce qu’il a rejeté le grief de nullité ;

- Sur la déchéance partielle de la marque « MUST » №1.546.417

Considérant que pour les mêmes motifs que ceux ci-dessus exposés, la société OXYPAS ne justifie pas d’un intérêt légitime à soulever la déchéance des droits de la société CARTIER sur la marque « MUST » pour les produits autres que les vêtements, y compris les bottes, les souliers et les pantoufles ;

Considérant que si la société CARTIER justifie, par les catalogues versés aux débats, exploiter la marque « MUST » pour désigner des foulards et des ceintures, produits qui constituent, comme l’ont relevé à juste titre les premiers juges, des effets vestimentaires et non de simples accessoires de mode, elle ne rapporte pas la preuve d’un usage de ce signe pour les bottes, souliers et pantoufles ;

Que la marque doit, aux termes de l’article L.714-5 alinéa 1 du CPI, être exploitée pour chacun des produits visés dans l’enregistrement, sans que son usage pour des produits similaires permette d’échapper à l’exception de déchéance ;

Qu’il s’ensuit que le jugement doit être confirmé en ce qu’il a prononcé la déchéance partielle de la marque « MUST » pour les bottes, souliers et pantoufles, et ce avec effet au 28 décembre 1996 ;

- Sur la contrefaçon de la marque « MUST »

Considérant que la société CARTIER prétend que la marque TEDIMUST« , dont est titulaire la société OXYPAS, reproduit intégralement la marque »MUST« , qui en constitue l’élément distinctif, que les chaussures sont des produits similaires aux vêtements et qu’en raison de la notoriété de la marque »MUST« , le public peut être amené à croire que la marque TEDIMUST » est une déclinaison de la marque première ;

Mais considérant que la société OXYPAS a déposé le 18 mai 1999 la marque TEDIMUST" №99 792 561 pour désigner des chaussures ; que par déclaration inscrite au registre national des marques, le 22 mai 2000, elle a limité le dépôt de la marque aux chaussures destinées aux professionnels de la santé ;

Considérant que sont similaires, les produits qui, en raison de leur nature ou de leur destination, peuvent être attribués par la clientèle à la même origine ; que si les chaussures sont, comme les vêtements, destinés à l’habillement et à la parure et peuvent être vendus dans les mêmes magasins, les chaussures à usage professionnel visées dans l’enregistrement de la marque TEDIMUST« ne sont pas susceptibles d’être confondues avec les vêtements exploités sous la dénomination »MUST" qui évoque pour le public le luxe et le raffinement, ni même d’être associés à ceux-ci en raison de l’emploi auquel elles sont spécifiquement réservées ;

Qu’en l’absence de similarité entre les produits couverts par les signes en présence, il n’y a pas lieu de comparer ceux-ci ;

Que le grief de contrefaçon doit donc être rejeté ;

- Sur l’application de l’article L.713-5 du CPI et de l’article 1382 du Code civil

Considérant que la société CARTIER soutient qu’en faisant choix de la dénomination MUST pour composer la marque TEDIMUST« , la société OXYPAS a manifesté sa volonté de se glisser dans son sillage pour profiter de manière indue de la notoriété de la marque »MUST" et de son pouvoir évocateur ;

Considérant que la société OXYPAS ne conteste pas la renommée dont jouit la marque « MUST » ;

Mais considérant que l’article L.713-5 du CPI, qui instaure une exception au principe de la spécialité, doit être interprété restrictivement ; qu’il ne permet de faire sanctionner que l’emploi par un tiers d’un signe identique à la marque jouissant d’une renommée mais non l’utilisation d’un signe voisin par sa forme ou les évocations qu’il suscite ;

Considérant en l’espèce que si la marque « MUST » est totalement reprise dans la dénomination « PEDIMUST », précédée du préfixe « PEDI », elle constitue avec lui un néologisme doté d’un pouvoir évocateur distinct de l’anglicisme que la société CARTIER a promu au rang des marques notoires ;

Que l’action engagée par la société CARTIER sur le fondement de l’article L.713-5 du CPI doit être rejetée ;

Considérant que l’article L.713-5 du CPI instaurant une action spécifique en responsabilité, les dispositions de l’article 1382 du Code civil ne peuvent être invoquées utilement, s’agissant des mêmes faits ;

Qu’il s’ensuit que le jugement entrepris sera confirmé en ce qu’il a débouté la société CARTIER de l’ensemble de ses demandes ;

- Sur les autres demandes

Considérant que la société CARTIER a pu de bonne foi se méprendre sur la portée des droits attachés à la marque « MUST » de sorte que la demande de dommages-intérêts pour procédure abusive formée par la société OXYPAS doit être rejetée ;

Que la mesure de publication sollicitée par la société OXYPAS n’apparaît pas justifiée ;

Considérant en revanche que les dispositions de l’article 700 du nouveau Code de procédure civile doivent bénéficier à la société OXYPAS, la somme complémentaire de 10.000 euros devant lui être allouée à ce titre ;

Que la solution du litige commande de rejeter la demande formée par la société CARTIER sur ce même fondement ;

PAR CES MOTIFS Confirme en toutes ses dispositions le jugement entrepris ;

Y ajoutant,

Condamne la société CARTIER à verser à la société OXYPAS la somme complémentaire de 10.000 euros sur le fondement de l’article 700 du nouveau Code de procédure civile ;

Rejette le surplus des demandes ;

Condamne la société CARTIER aux dépens qui pourront être recouvrés conformément à l’article 699 du nouveau Code de procédure civile.

Extraits similaires
highlight
Extraits similaires
Extraits les plus copiés
Extraits similaires
Inscrivez-vous gratuitement pour imprimer votre décision
Cour d'appel de Paris, 4e chambre, 28 mai 2003, n° 2001/15311