Cour d'appel de Paris, Pôle 5 - chambre 8, 22 mars 2011, n° 08/12744

  • Comptable·
  • Sociétés·
  • Mission·
  • Cabinet·
  • Intérêt de retard·
  • Honoraires·
  • Pénalité·
  • Déclaration·
  • Voyage·
  • Remboursement

Chronologie de l’affaire

Commentaire0

Augmentez la visibilité de votre blog juridique : vos commentaires d’arrêts peuvent très simplement apparaitre sur toutes les décisions concernées. 

Sur la décision

Référence :
CA Paris, pôle 5 - ch. 8, 22 mars 2011, n° 08/12744
Juridiction : Cour d'appel de Paris
Numéro(s) : 08/12744
Décision précédente : Tribunal de commerce de Paris, 10 juin 2008, N° 2007002779

Sur les parties

Texte intégral

Grosses délivrées RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 5 – Chambre 8

ARRÊT DU 22 MARS 2011

(n° , pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : 08/12744

Décision déférée à la Cour : Jugement du 11 Juin 2008 -Tribunal de Commerce de PARIS – RG n° 2007002779

APPELANTS

I J en la personne de Maître K L, ès qualités de mandataire à la liquidation judiciaire de la S.A. A ASSOCIES

ayant son siège XXX

XXX

représentée par la SCP MONIN D AURIAC DE BRONS, avoués à la Cour

assistée de Me Agnès MARAUX BENOIT et de Me Christophe AYELA, Avocats au barreau de PARIS, toque L009

I J en la personne de Maître K L, ès qualités de mandataire à la liquidation judiciaire de la SA A VOYAGES

ayant son siège XXX

XXX

représentée par la SCP SCP MONIN D AURIAC DE BRONS, avoués à la Cour

assistée de Me Agnés MARAUX BENOIT et de Me Christophe AYELA, Avocats au barreau de PARIS, toque L009

Monsieur P-Q D

XXX

XXX

représenté par la SCP SCP MONIN D AURIAC DE BRONS, avoués à la Cour

assisté de Me Agnés MARAUX BENOIT et de Me Christophe AYELA, Avocats au barreau de PARIS, toque L009

INTIMÉE

S.A.R.L. C & ASSOCIES

prise en la personne de ses représentants légaux

ayant son siège XXX

XXX

représentée par Me Nadine CORDEAU, avoué à la Cour

assistée de Me Jérémie LEGUAY, Avocat au barreau de PARIS, toque P82

substituant Me VATIER

COMPOSITION DE LA COUR :

L’affaire a été débattue le 14 Février 2011, en audience publique, devant la Cour composée de :

Madame Nicole MAESTRACCI, Présidente

Madame Marie-Paule MORACCHINI, Conseillère

Madame G H, Conseillère

qui en ont délibéré

Un rapport a été présenté à l’audience dans les conditions prévues à l’article 785 du code de procédure civile.

Greffier, lors des débats : Mme Marie-Claude HOUDIN

ARRÊT :

— contradictoire

— rendu publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

— signé par Madame Nicole MAESTRACCI, présidente et par Mme Marie-Claude HOUDIN, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Monsieur et Madame D ont fondé et dirigé depuis 1988, le groupe A, composé de la SA A ASSOCIES, la SARL A VOYAGES et la SARL DEUX B CREATION.

En 1996, le groupe a fait appel à la SARL C, cabinet d’expertise comptable, pour une mission de révision des comptes qui n’a fait l’objet d’aucune formalisation.

En 1999, un contrôle fiscal a entraîné un rappel de Z sur les exercices antérieurs et a conduit à la découverte d’erreurs comptables et fiscales. Un nouveau cabinet d’expertise comptable, le cabinet E F, a alors été chargé de réaliser un audit et d’arrêter les comptes 1999.

Par ordonnance du 5 avril 2002, le juge des référés a désigné un N chargé de déterminer la mission confiée au cabinet C et la manière dont elle a été exécutée de 1996 à 1999. Celui-ci a déposé son rapport le 31 octobre 2003.

C’est dans ces conditions que le 3 janvier 2007, les sociétés du groupe A ont assigné la SARL C aux fins d’obtenir la réparation du préjudice résultant des manquements à ses obligations contractuelles.

Par jugement du 11 juin 2008, le tribunal de commerce de Paris a débouté la société A de toutes ses demandes et l’a condamnée à payer à la SARL C la somme de 5.000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

Par déclaration du 26 juin 2008, la société A ASSOCIES, la SARL A VOYAGES, la SARL DEUX B CREATION et Monsieur P-Q D, dirigeant de ces sociétés, ont interjeté appel de ce jugement.

Par décision de son associé unique en date du 12 novembre 2009, la société DEUX B CREATION a fait l’objet d’une dissolution à la suite de son absorption par la société A ASSOCIES.

Par deux jugements datés du 18 octobre 2010, le tribunal de commerce de Paris a prononcé la liquidation judiciaire de la SA A ASSOCIES et de la SAS A VOYAGES et désigné la I J en qualité de mandataire liquidateur.

Par conclusions signifiées le 8 novembre 2010, la I J, en la personne de Maître K L, ès qualités, et Monsieur D demandent à la cour de réformer le jugement du 11 juin 2008, de constater que le cabinet C a failli à ses obligations contractuelles dans l’exécution de sa mission générale de vérification des comptes des sociétés A ASSOCIES, A VOYAGES et DEUX B CREATION au titre des exercices 1996 et 1999, en conséquence de le condamner à payer :

— aux appelants, la somme de 44.743 € au titre du remboursement des honoraires versés pour les exercices 1998 et 1999,

— au profit de la société A ASSOCIES, les sommes de 123.451 € au titre des pénalités et intérêts de retard supportés au titre de la Z, de 45.734 € au titre des frais et honoraires fiscaux consécutifs au redressement, de 95.595 € au titre des frais financiers, de 78.743 € au titre des frais comptables liés à l’apurement de la situation pour les exercices 1998 et 1999,

— au profit de la société DEUX B CREATION, la somme de 27.320 € pour les pénalités et intérêts de retard supportés au titre de la Z, ainsi que le montant du redressement d’IS pour l’année 1998,

— la somme de 648.855 € au titre du remboursement des pertes résiduelles supportées par la société A ASSOCIES pour l’exploitation de son investissement réalisé au Canada, effectué sur la base de situations comptables et de trésorerie erronées,

— à la liquidation judiciaire des sociétés appelantes, la somme de 30.000 € de dommages et intérêts en réparation du préjudice moral et commercial subi, ainsi que la somme de 20.000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

— à Monsieur D, la somme de 1 € en réparation du préjudice moral subi .

Par conclusions signifiées le 8 février 2011, la SARL C ET ASSOCIES demande à la cour de confirmer le jugement déféré en ce qu’il a débouté les sociétés appelantes de toutes leurs demandes et les a condamnées au versement de la somme de 5.000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, de faire droit à son appel incident et de les condamner à lui payer la somme de 12.000 € à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive, en tout état de cause, de les condamner à lui verser la somme de 5.000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

SUR CE

Sur les manquements reprochés à la société C

Le tribunal a essentiellement retenu pour débouter les appelants de leur demande principale qu’aucune faute ne pouvait être reprochée à l’intimée, les erreurs commises dans les déclarations de Z étant entièrement dues à une mauvaise application des textes réglementaires par la société A, sans intervention directe du cabinet C qui a attiré, dans le cadre de sa mission, l’attention de son client sur le risque pris.

Les appelants soutiennent :

— qu’en l’absence de lettre de mission, les obligations de l’N comptable doivent répondre aux normes édictées par l’Ordre Supérieur des Experts Comptables qui fixent un programme de travail standard,

— que l’intimée savait que le service comptable des sociétés du groupe n’avait pas la compétence requise pour établir le bilan ou vérifier l’exactitude des déclarations imposées,

— que Madame X, collaboratrice du cabinet C, était présente au sein du groupe plusieurs jours par semaine,

— qu’il doit être tiré toutes les conséquences du fait que le cabinet C a refusé de communiquer à l’N certaines pièces et notamment 'les fiches de temps',

— qu’il existe en conséquence un faisceau d’indices démontrant que la mission confiée au cabinet C était une mission de type classique de vérification des comptes annuels, comportant une assistance en matière d’établissement des déclarations de Z, et une obligation de conseil qui aurait dû le conduire à dénoncer les irrégularités au dirigeant et à imposer des mesures de régularisation appropriées.

L’intimée réplique :

— qu’elle ne peut être tenue que des missions qui lui ont été confiées et qu’en l’espèce, les appelants ne rapportent la preuve, ni qu’elle était investie d’une mission en matière fiscale, ni qu’elle était chargée d’établir et de déposer les déclarations fiscales,

— qu’il ressort clairement de l’organigramme du groupe que la responsabilité opérationnelle de l’établissement de ces déclarations incombait au service comptable composé de deux personnes dont Monsieur Y qui a justement été licencié, le 17 novembre 1999, pour faute lourde au motif qu’il n’avait pas établi certaines déclarations fiscales, notamment de Z,

— que dans le courrier adressé le 21 mars 2000 qui informe le cabinet C de ce licenciement, Monsieur D fait état des 'graves erreurs commises par le directeur administratif et financier’ sans mettre en cause la responsabilité du cabinet d’expertise comptable,

— que Madame X n’a jamais eu la responsabilité d’établir les déclarations de Z, ne les a jamais signées mais a seulement accepté d’effectuer 'des prestations ponctuelles’ de rédaction de déclarations non signées (sur la base de données établies par le service comptable interne),

— que les attestations produites ne permettent pas de conclure que Madame X était présente plusieurs jours par semaine,

— que le groupe était doté d’un service comptable tout à fait compétent ainsi qu’en atteste le CV et le montant du salaire versé à Monsieur Y, que la comparaison entre ce salaire et le montant des honoraires versés au cabinet, ne peuvent suffire à déterminer l’étendue de la mission,

— que, dès lors, elle était dégagée de toute obligation d’information et de conseil en ce domaine, et qu’en tout état de cause, elle avait attiré l’attention du directeur administratif et financier sur les anomalies constatées ainsi qu’en témoignent les différentes notes de travail communiquées qui proposaient en outre des solutions, qu’elle a d’ailleurs appris que ces retards de déclaration et de paiement étaient une pratique courante de la société qui subvenait ainsi à ses besoins de trésorerie, que les dirigeants étaient donc parfaitement informés des risques encourus.

Il n’est pas contesté que des erreurs ont été commises dans l’établissement des déclarations fiscales relatives à la Z et à l’impôt sur les sociétés.

S’agissant de la société A, les montants déclarés à l’administration fiscale pour les années 1996, 1997, 1998 et 1999 étaient très inférieurs aux montants réels, ce qui a entraîné un redressement de 4.877.698 F, des pénalités à hauteur de 528.215 F et des intérêts de retard de 281.576 F.

Pour la société DEUX B CREATION, les déclarations de Z ont été adressées avec retard pour un montant erroné et il en a été de même pour l’impôt sur les sociétés au 30 juin 1998. Le redressement s’est élevé à 95.822 F pour l’impôt sur les sociétés et à 623.522 F pour la Z, des pénalités étant réclamées à hauteur de 4.383 F et des intérêts de retard à hauteur de 79.003 F.

S’il est constant qu’aucune lettre de mission n’a été établie par le cabinet d’expertise comptable, celui-ci reconnaît avoir été chargé d’une mission de 'présentation des comptes annuels ' au sein du groupe A, pour les années 1996 à 1999. Il produit 17 factures d’honoraire qui portent les mentions : 'mission de révision des comptes', 'établissement de bilan', ' intervention sur les comptes’ et 'mise à jour juridique annuel’ (pièce n°2 de l’intimée). Le dire adressé le 30 septembre 2003 à l’N par M N O, à la demande du conseil de l’intimée, fait référence pour définir la mission de 'présentation des comptes’ confiée à la société C, aux normes professionnelles éditées par le Conseil Supérieur de l’Ordre des experts-comptables, qui sont ainsi rappelées :

'1. Examen des taux de Z appliqués par l’entreprise et des modalités de récupération de Z,

2. Rapprochement du chiffre d’affaires avec déclarations de Z

3. Contrôle global de la Z à récupérer

4. Justification des soldes

5.Rapprochement des pièces justificatives pour: taxes foncière, taxe professionnelle…

6. Contrôle de l’IS avec bordereau d’avis. '

Il s’ensuit qu’au regard des normes sus-visées, auxquelles l’intimée se réfère, la mission de présentation des comptes annuels comporte une mission de supervision et de contrôle global des déclarations de Z et de l’impôt sur les sociétés ainsi que des sommes qui figurent au bilan à ce titre.

L’intimée est d’autant moins fondée à prétendre que les déclarations de Z étaient en dehors de sa mission, que le 6 mars 1998, elle a adressé à Monsieur Y, comptable du groupe A, un courrier lui signalant que 'le contrôle de Z d’A pour les trois exercices non prescrits’ se termine par un total de Z non déclarée de 1.473.967 € et lui proposant une procédure 'pour régulariser la situation..' Cette préoccupation de la société C à l’égard de la déclaration de Z est d’ailleurs confirmée par une note de travail établie par elle, le 24 mars 1999, aux termes de laquelle il est indiqué que la Z n’a toujours pas été régularisée pour un montant de 1.473.967 €.

S’il n’est pas établi, contrairement à ce que soutient l’appelant, que Madame X, N-comptable, ait signé elle-même les déclarations de Z déposées en novembre 2007, les signatures apposées sur celles-ci restant non identifiées, il n’est pas contesté, ainsi que l’intimée le reconnaît elle-même, que celle-ci est intervenue dans l’élaboration de ces déclarations, sans que la société C puisse sérieusement prétendre, comme elle tente de le faire, qu’elle s’est contentée de recopier les chiffres qui lui étaient fournis par le comptable de la société, sans opérer aucune vérification.

Enfin, la cour relève que les constatations de l’N, selon lesquelles la comparaison entre la qualification professionnelle insuffisante du service comptable de l’entreprise, et l’importance des honoraires consentis à la société d’expertise comptable mettaient en évidence une 'intervention importante (de celle-ci) au sein du groupe EXPLORATION’ ne sont pas utilement contredites. Même si ce constat ne peut suffire à établir l’étendue de sa mission, il permet de corroborer les éléments précédemment relevés ainsi que les deux attestations qui confirment la présence régulière et soutenue de Madame X au sein du groupe A.

La cour observe enfin que les fiches de temps qui auraient permis à la société C d’établir la réalité et le contenu des prestations fournies par sa collaboratrice, notamment celles relatives à l’établissement des déclarations de Z, et dont il n’a jamais été contesté qu’elles existaient, n’ont pas été versées aux débats malgré les demandes répétées de l’N.

Ces éléments convergents établissent que la mission de 'présentation des comptes’ confiée à la société C était une mission de supervision générale qui incluait le contrôle de la régularité des déclarations fiscales.

Il s’ensuit que, même s’il n’est pas démontré que l’intimée avait pour mission d’établir elle-même toutes les déclarations fiscales, elle avait l’obligation de procéder aux investigations et rapprochements nécessaires à sa mission de contrôle, ce qu’elle ne démontre pas avoir fait, se contentant de contester l’existence de toute mission à elle confiée dans le domaine fiscal.

Il résulte de ce qui précède qu’elle avait l’obligation de signaler aux dirigeants de la société les irrégularités constatées et de proposer les solutions susceptibles d’y remédier.

La société C ne peut s’exonérer de cette obligation d’information et de conseil en prétendant que les décalages dans le règlement de la Z étaient une pratique courante et ancienne de la société. En effet, à le supposer établi, ce constat aurait dû au contraire conduire le cabinet d’expertise comptable à attirer l’attention des dirigeants sur le risque qu’ils prenaient à laisser perdurer une telle pratique.

L’intimée, qui prétend avoir alerté à plusieurs reprises la société sur les irrégularités constatées, ne le démontre pas. En effet, le courrier du 6 mars 1998 sus-visé n’a été adressé qu’au responsable du service comptable. La note de travail du 24 mars 1999 est restée un document interne au cabinet d’expertise comptable. Enfin, la seule note adressée à Monsieur D, dirigeant du groupe, l’a été, le 17 mars 2000, soit postérieurement au contrôle fiscal et ne fait, à aucun moment, état d’alertes antérieures.

Il résulte de ce qui précède que la société C a commis des manquements de nature à engager sa responsabilité contractuelle de sorte que le jugement sera réformé de ce chef .

Sur le préjudice

Les appelants soutiennent, sur le fondement des articles 1147 et 1149 du code civil, que le lien de causalité entre les fautes sus-visées et le préjudice subi est établi, notamment, que les pénalités et intérêts de retard sur le rappel de droits sont directement imputables à la société C, qu’il en est de même du recours à des conseils extérieurs fiscaux ou comptables et des mesures engagées par le groupe pour pallier l’insuffisance de trésorerie, que l’ensemble de ces défaillances a porté atteinte à l’image des dirigeants dans leurs rapports avec l’administration et avec les tiers prestataires ou clients, ce qui justifie l’allocation de dommages et intérêts.

Ils prétendent en outre que ces erreurs, qui ont conduit à dégager une trésorerie excédentaire, ont également induit en erreur les dirigeants du groupe qui ont procédé à des investissements pour lesquels ils n’avaient pas la capacité financière adéquate (investissement immobilier au Canada du montant de la trésorerie excédentaire).

Ils estiment en conséquence être fondés à demander :

— le remboursement des prestations comptables du cabinet C ainsi que celui des pénalités et intérêts de retard supportés par le groupe au titre de la Z,

— le remboursement des frais et honoraires exposés en vue d’assurer l’apurement de la situation fiscale,

— le surcoût financier lié aux intérêts versés par A ASSOCIES aux banques OBC et B dans le cadre des procédures DAILLY mises en place pour assurer le règlement du moratoire accordé par le Trésor public,

— le remboursement du surcoût des prestations comptables demandées au cabinet E F en décembre 1999,

— le remboursement des pertes subies du fait de l’investissement immobilier au Canada,

— des dommages et intérêts pour préjudice moral et commercial,

soit, pour A ASSOCIES, la somme de 1.045.702 €, pour A VOYAGES la somme de 16.465 €, pour la société DEUX B CREATION la somme de 32.274 €, enfin, pour Monsieur D la somme de 1 €.

L’intimée réplique que les appelants ne démontrent pas l’existence d’un quelconque préjudice dès lors :

— que les pénalités et intérêts de retard dus à l’administration fiscale ne constituent pas un préjudice indemnisable dans la mesure où il s’agissait d’une pratique courante des appelantes,

— que la demande de remboursement des honoraires n’est pas fondée puisque ceux-ci sont liés à la mission de révision comptable pour laquelle aucune faute ne lui est reprochée,

— que s’agissant du remboursement des prestations comptables et fiscales effectuées entre 1999 et 2001, les appelantes n’apportent pas la preuve que celles-ci sont liées à la réparation d’une faute commise par l’intimée,

— qu’il n’y a pas lieu de mettre à sa charge le coût des intérêts versés aux banques dans le cadre de la procédure Dailly, le recours à cette procédure relevant d’un choix de gestion qui incombe aux dirigeants,

— qu’il en est de même pour le choix de l’investissement au Canada, la méthode comptable suivie ne pouvant avoir eu aucun impact sur cette décision.

Sur les pénalités et intérêts de retard dus à l’administration fiscale

Il résulte de ce qui précède que les pénalités et intérêts de retard dus à l’administration fiscale sont liés aux manquements commis par l’intimée dans sa mission de supervision générale des comptes.

Il doit cependant être tenu compte, pour apprécier le préjudice imputable à la société C, des fautes commises par Monsieur Y, comptable du groupe, qui a été licencié pour avoir conservé, sans les ouvrir, 25 lettres émanant du Trésor public et avoir omis de procéder à certains règlements d’impôts et de charge.

Il n’y a pas lieu par ailleurs de condamner l’intimée à rembourser le montant du redressement infligé au titre de l’impôt sur les sociétés dès lors que celui-ci aurait dû en tout état de cause être payé par la société DEUX B CREATION.

Compte tenu de ces éléments, la société C sera condamnée à payer au titre des pénalités et intérêts de retard les sommes de 80.000 € pour la société A et 8000 € pour la société DEUX B CREATION.

Sur le remboursement des honoraires versés au cabinet C pour les exercices 1998 et 1999

Il n’est pas contesté que la société C a effectué les missions de révision comptable qui lui étaient confiées de sorte qu’il n’y a pas lieu au remboursement des honoraires versés.

Sur le remboursement des frais et honoraires exposés par A ASSOCIES en vue d’assurer l’apurement de la situation fiscale

L’appelant produit deux factures d’honoraire d’un avocat fiscaliste pour avis et conseils pour les années 1999 à 2001. Aucun élément ne permet d’établir que ces prestations sont la conséquence des manquements commis par la société C. Les appelants seront en conséquence déboutés de leur demande de ce chef.

Sur le surcoût financier lié aux intérêts versés par A aux banques OBC et B dans le cadre des procédures DAILLY

Les appelants produisent un décompte des intérêts dus par A ASSOCIES dans le cadre d’une procédure DAILLY sans établir que ce crédit et les frais qui en résultent sont la conséquence des manquements reprochés à la société C. Leur demande sera en conséquence rejetée.

Sur le remboursement des prestations comptables exposées auprès du cabinet E F

Les appelants produisent une facture datée du 27 décembre 1999 correspondant à des prestations d’audit et des notes d’honoraire correspondant à l’externalisation du responsable administratif de décembre 1999 à mars 2000.

S’il est établi que le groupe A a dû exposer des frais pour rétablir sa comptabilité, une partie des prestations dont il est demandé le remboursement correspond à des travaux qui auraient dû en tout état de cause être engagés par le groupe A. Il sera en outre tenu compte du fait que la société C n’est pas responsable de la totalité des désordres constatés.

Elle sera en conséquence condamnée au paiement de la somme de 20.000 € à ce titre.

Sur les autres préjudices

Les appelants ne démontrent pas que l’investissement réalisé au Canada, qui constitue un choix stratégique des dirigeants, soit la conséquence des manquements reprochés à la société C.

Ils ne rapportent pas davantage la preuve du préjudice moral et commercial dont ils entendent obtenir réparation.

Enfin, Monsieur D ne démontre pas avoir subi un préjudice personnel résultant d’une atteinte à son honorabilité en lien avec les fautes commises par la société C.

Ces demandes seront en conséquence rejetées.

Sur la demande de dommages et intérêts pour procédure abusive

Compte tenu de la solution donnée au litige, la société C ne peut prétendre que la procédure engagée par les appelants soit abusive. Elle sera donc déboutée de sa demande à ce titre.

Sur les demandes fondées sur l’article 700 du code de procédure civile

Il apparaît équitable de condamner la société C à verser la somme de 5.000 € sur ce fondement. Celle-ci sera en revanche déboutée de sa demande formée à ce titre.

PAR CES MOTIFS,

Infirme le jugement déféré,

Statuant à nouveau,

Condamne la société C à verser à la I J, en la personne de Maître K L, ès qualités de mandataire à la liquidation judiciaire des sociétés A ASSOCIES et A VOYAGES, la somme de 108.000 € à titre de dommages et intérêts,

Condamne la société C à verser à la I J, en la personne de Maître K L, ès qualités de mandataire à la liquidation judiciaire des sociétés A ASSOCIES et A VOYAGES, la somme de 5.000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

Rejette toutes autres demandes des parties,

Condamne la société C aux dépens qui comprendront les frais d’expertise et pourront être recouvrés selon les modalités prévues par l’article 699 du code de procédure civile.

LE GREFFIER LA PRESIDENTE

M. C HOUDIN N. MAESTRACCI

Chercher les extraits similaires
highlight
Chercher les extraits similaires
Extraits les plus copiés
Chercher les extraits similaires
Collez ici un lien vers une page Doctrine

Textes cités dans la décision

  1. Code de procédure civile
  2. Code civil
Inscrivez-vous gratuitement pour imprimer votre décision
Cour d'appel de Paris, Pôle 5 - chambre 8, 22 mars 2011, n° 08/12744