Cour d'appel de Paris, Pôle 5 - chambre 1, 1er février 2012, n° 10/05322

  • Atteinte à la dénomination sociale·
  • Fonction d'indication d'origine·
  • Nom d'un personnage de fiction·
  • Utilisation dans une publicité·
  • Atteinte au nom commercial·
  • Atteinte au nom de domaine·
  • Détournement de clientèle·
  • Usage à titre de marque·
  • Fonctions de la marque·
  • Contrefaçon de marque

Chronologie de l’affaire

Résumé de la juridiction

Le film publicitaire contesté constitue une libre adaptation du conte de Perrault et met en scène le personnage du Petit Poucet. Il ne fait usage à aucun moment de la dénomination Petit Poucet pour désigner le produit financier dont il assure promotion. Le produit en cause est clairement identifié par l’adjonction des mots Avance premiers Salaires. Il en est de même de l’annonceur qui apparaît clairement. Il n’y a pas usage à titre de marque, mais référence explicite à un personnage appartenant au domaine public. La contrefaçon n¿est donc pas réalisée. Les faits de concurrence déloyale ne sont pas davantage établis. Les offres en cause, qui ont des dénominations différentes, exclusives de tout risque de confusion, ne répondent pas aux mêmes besoins, l’une permettant à de jeunes étudiants de recevoir un don pour le financement d’un projet de création d¿entreprise, l’autre proposant à de jeunes actifs un prêt remboursable pour s’installer dans la vie.

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Sur la décision

Référence :
CA Paris, pôle 5 - ch. 1, 1er févr. 2012, n° 10/05322
Juridiction : Cour d'appel de Paris
Numéro(s) : 10/05322
Publication : Propriété industrielle, 4, avril 2012, p. 41-42, note de Pascale Tréfigny-Goy ; GAZ PAL, 239-243, 26-30 août 2012, p. 15-16, note de Maxime Chaminade ; PIBD 2012, 959, IIIM-244
Décision précédente : Tribunal de grande instance de Paris, 2 février 2010, N° 09/17692
Décision(s) liée(s) :
  • Tribunal de grande instance de Paris, 3 février 2010, 2009/17692
Domaine propriété intellectuelle : MARQUE
Marques : PETIT POUCET
Numéro(s) d’enregistrement des titres de propriété industrielle : 3287001 ; 3440939
Classification internationale des marques : CL09 ; CL16 ; CL35 ; CL36 ; CL38 ; CL39 ; CL41 ; CL42
Référence INPI : M20120045
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Texte intégral

COUR D’APPEL DE PARIS ARRET DU 01 FEVRIER 2012

Pôle 5 – Chambre 1 (n° , 5 pages) Numéro d’inscription au répertoire g énéral : 10/05322

Décision déférée à la Cour : Jugement du 03 Février 2010 Tribunal de Grande Instance de PARIS RG n° 09/17692

APPELANTE S.A.S. PETIT POUCET, agissant poursuites et diligences de son représentant légal. […] 75006 PARIS représentée par la SCP NARRAT PEYTAVI, avoués à la Cour assistée de Maître Séverine G, avocat au Barreau de Paris (J 150)

INTIMEES SA BPCE, prise en la personne de ses représentants légaux […] 75013 PARIS

SA EURO RSCG C&CO, prise en la personne de ses représentants légaux […] 92150 SURESNES représentées par la SCP LAGOURGUE ET OLIVIER, avoués à la Cour assistées de Maître Gaëlle B, avocat au barreau de PARIS (T 01) plaidant pour la SCP BCTG ET ASSOCIES, avocats associés

COMPOSITION DE LA COUR : L’affaire a été débattue le 07 Décembre 2011, en audience publique, devant la Cour composée de : Monsieur Didier PIMOULLE, Président Madame Brigitte CHOKRON, Conseiller Madame Anne-Marie GABER, Conseillère qui en ont délibéré

Greffier, lors des débats : Mademoiselle Sabine D

ARRET :
- contradictoire
- rendu par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

- signé par Monsieur Didier PIMOULLE, président et par Gilles DUPONT, greffier

Vu l’appel relevé le 11 avril 2010 par la société PETIT POUCET (SAS), du jugement contradictoire en date du 3 février 2010, par lequel le tribunal de grande instance de

Paris statuant dans le litige l’opposant à la société BPCE (SA) et à la société EURO RSCG (SA), l’a déboutée de toutes ses prétentions ;

Vu les dernières conclusions de la société appelante, signifiées le 13 septembre 2011 ;

Vu les dernières conclusions des sociétés BPCE et EURO RSCG, intimées, signifiées le 25 août 2011 ;

Vu l’ordonnance de clôture prononcée le 11 octobre 2011 ;

SUR CE, LA COUR

Considérant qu’il est expressément renvoyé, pour un exposé complet des faits de la cause et de la procédure, au jugement entrepris et aux écritures, ci-dessus visées, des parties ;

Qu’il suffit de rappeler que la société PETIT POUCET, exerçant depuis 2002 une activité de conseil et d’assistance (en particulier au plan administratif et au plan financier) aux jeunes diplômés désireux de créer une entreprise, et organisant chaque année, en partenariat avec la société CAISSES d’EPARGNE, ci-après GCE, filiale de la BPCE (groupe BANQUES POPULAIRES-CAISSES d’EPARGNE) le concours 'PETIT POUCET', destiné à sélectionner les projets auxquels elle apportera son parrainage, est titulaire des marques françaises verbales françaises 'PETIT POUCET’ n°043287001 et n°063440939, respecti vement déposées le 21 avril 2004 et le 17 juillet 2006 pour désigner notamment les services de financement, ainsi que des noms de domaine 'petitpoucet.fr’ et 'petitpoucet.com’ ;

Qu’ayant découvert, le 18 octobre 2009, le lancement par la société BPCE d’une campagne publicitaire, conçue par la société EURO RSCG, destinée à promouvoir, au moyen d’un spot télévisuel sur le thème du conte de PERRAULT, 'LE PETIT POUCET', une offre de crédit ciblant les jeunes actifs , elle a, dans ces circonstances, assigné à jour fixe, suivant actes des 25 et 26 novembre 2009, les sociétés BPCE et EURO RCCG devant le tribunal de grande instance de Paris aux griefs de contrefaçon de ses droits de marque et de concurrence déloyale ;

Que le tribunal, par le jugement dont appel, a retenu que l’usage incriminé du signe 'PETIT POUCET’ est fait exclusivement par référence au personnage du conte de PERRAULT et non à titre de marque appelée à désigner des produits et services, que par ailleurs, un tel usage est exempt de tout risque de confusion dans l’esprit du consommateur et a, en conséquence, débouté la société PETIT POUCET de ses demandes ;

Sur la contrefaçon,

Considérant que la société PETIT POUCET, appelante, persiste à soutenir que la dénomination PETIT POUCET n’est pas exclusivement utilisée par la société BPCE par référence au personnage du conte de PERRAULT mais pour identifier une offre de crédit proposée aux jeunes actifs de moins de 28 ans ; qu’en toute hypothèse, le

produit de financement concerné est perçu du public et désigné par le public comme 'l’offre PETIT POUCET’ ce dont il résulte que l’usage contesté est fait à titre de marque et que l’atteinte à ses droits de marque sur le signe 'PETIT POUCET’ est caractérisée ;

Que les sociétés BPCE et EURO RSCG, intimées, maintiennent qu’elles n’ont pas fait usage de la dénomination 'PETIT POUCET’ à titre de marque, c’est-à-dire pour identifier un service ou un produit mais à titre de désignation nécessaire du personnage, ainsi dénommé, du conte de PERRAULT, et que la référence, dans l’œuvre publicitaire incriminée, à un personnage de la littérature tombé dans le domaine public, n’est pas constitutive de contrefaçon des marques invoquées et ne saurait être interdite ;

Considérant qu’en vertu de l’article L.713-1 du Code de la propriété intellectuelle l’enregistrement de la marque confère à son titulaire un droit de propriété sur cette marque pour les produits et services qu’il a désignés ;

Et que selon l’article L 713-2 du même Code Sont interdits, sauf autorisation du propriétaire: a) La reproduction, l’usage ou l’apposition d’une marque, (…), ainsi que l’usage d’une marque reproduite, pour des produits identiques à ceux désignés dans l’enregistrement; b) (…) ;

Mais considérant que l’exercice du droit conféré par les articles précités n’est autorisé, à la lumière de l’article 5 de la Directive 89/104 du Conseil de l’Union européenne, que dans les cas où l’usage du signe par un tiers porte atteinte ou est susceptible de porter atteinte aux fonctions de la marque et notamment à sa fonction essentielle qui est de garantir aux consommateurs l’identité d’origine du produit ou du service désigné par la marque en lui permettant de distinguer, sans confusion possible, ce produit ou service de ceux qui ont une autre provenance ;

Considérant qu’il ressort en l’espèce des constatations auxquelles la cour s’est livrée, que le film publicitaire attaqué constitue une libre adaptation du conte de PERRAULT 'LE PETIT POUCET’ et met en scène le célèbre personnage, présent dans l’imaginaire collectif, du PETIT POUCET, retrouvant ses parents, quelques années après avoir été abandonné, et leur montrant fièrement, au volant d’une belle voiture, qu’il est parvenu à s’établir dans la vie grâce à l'Avance Premiers Salaires de la Banque Populaire ;

Que force est de relever, à l’instar du tribunal, que le film ne fait usage, à aucun moment, de la dénomination PETIT POUCET pour désigner le produit financier dont il fait la promotion; que, bien au contraire, en faisant dire au personnage du PETIT POUCET : Grâce à la Banque Populaire, j’ai pu obtenir l’Avance Premiers Salaires et en faisant apparaître dans ses derniers plans les logos AVANCE 1ers SALAIRES et BANQUE POPULAIRE, le film identifie clairement le produit en cause par le signe AVANCE 1ers SALAIRES et l’annonceur comme étant la BANQUE POPULAIRE ;

Considérant que l’affiche publicitaire, dérivée du film publicitaire, montrant en photo le personnage du film et indiquant en gros plan 'Le petit poucet s’en sort grâce à l’Avance Premiers Salaires’ n’utilise pas davantage la dénomination

'PETIT POUCET’ pour identifier le produit financier, objet de la publicité en cause, lequel est explicitement désigné par la dénomination 'Avance Premiers Salaires’ ;

Considérant que la société PETIT POUCET ajoute que, dans les faits, l’offre de crédit Avance Premiers Salaires serait perçue, connue et désignée par le public comme 'l’offre PETIT POUCET’ ;

Qu’elle en veut pour preuve que les demandes de renseignements 'sur l’offre Petit Poucet’ adressées par mail à la Banque Populaire obtiennent réponse ;

Or considérant que la BPCE est étrangère à la formulation des demandes de renseignements invoquées qui ne sont pas de nature à établir à sa charge un usage à titre de marque du signe PETIT POUCET étant à cet égard observé que les réponses apportées par la BPCE à ces demandes d’informations ne soulèvent aucune critique de la part de la société appelante ;

Considérant que la société appelante fait encore grief à la société BPCE d’avoir réservé le signe PETIT POUCET à titre de mot-clé dans le système de référencement GOOGLE ADWORDS, destiné à faire apparaître un message publicitaire sur son offre de crédit ;

Mais considérant qu’il ressort de la pièce qu’elle produit aux débats que le message publicitaire en cause figure dans la rubrique 'lien commercial', nettement séparée de la colonne des résultats naturels de la recherche, sous le titre souligné 'Banque Populaire', et reprend le slogan de l’affiche publicitaire précédemment évoquée : 'Le petit poucet s’en sort grâce à l’Avance Premiers Salaires’ ;

Que force est de relever que le lien commercial contesté, outre qu’il identifie parfaitement l’annonceur et qu’il présente clairement le produit promu comme provenant de l’annonceur, ne fait usage du signe PETIT POUCET que pour désigner le personnage du conte de PERRAULT, le produit promu étant lui désigné par la dénomination 'Avance Premiers Salaires’ ; qu’il ne génère, en conséquence, aucun risque de confusion entre le produit promu par l’annonceur et les produits ou services couverts par la marque PETIT POUCET et ne caractérise ainsi aucune atteinte à la fonction essentielle de la marque à savoir la fonction d’indication d’origine ;

Considérant qu’il suit de l’ensemble de ces observations que les sociétés BPCE et EURO RSCG n’ont pas utilisé le signe PETIT POUCET à titre de marque mais par référence explicite au personnage, appartenant au domaine public, du conte de PERRAULT ;

Qu’il s’ensuit, par confirmation du jugement entrepris, que la contrefaçon n’est pas établie et que les demandes formées de ce chef seront rejetées ;

Sur la concurrence déloyale,

Considérant qu’il résulte des développements qui précèdent que l’utilisation faite par les sociétés BPCE et EURO RSCG du signe PETIT POUCET n’est pas de nature à

porter atteinte, par la création d’un risque de confusion, aux dénomination sociale, nom commercial et nom de domaine de la société PETIT POUCET ;

Considérant que la société appelante invoque par ailleurs, pour justifier de la déloyauté de la BPCE, le partenariat établi dans le cadre du concours PETIT POUCET et fait enfin grief à la société BPCE d’avoir voulu capter sa clientèle d’étudiant ;

Mais considérant que seule la CNE (Caisse nationale des Caisses d’épargne) est liée à la société PETIT POUCET dans le cadre du partenariat en cause, qu’en toute hypothèse, la clause interdisant à chacune des parties de faire usage des signes distinctifs de l’autre partie, ne saurait être interprétée comme interdisant aux sociétés BPCE et EUROS RSCG toute référence au conte de Perrault que la société appelante ne saurait s’approprier, qu’enfin, l’utilisation du personnage du PETIT POUCET pour assurer la promotion d’un produit financier est exclusive de toute intention maligne de la part de la société BPCE qui justifie que la publicité contestée s’inscrit dans une série de campagnes publicitaires pour la promotion de ses produits financiers toutes déclinées sur le thème des contes de PERRAULT à raison de leur caractère populaire et de leur ancrage dans l’imaginaire collectif ;

Considérant enfin que la société appelante n’est pas fondée, au regard du principe de la liberté du commerce et de l’industrie, à prétendre s’approprier le public des jeunes étudiants ou des jeunes actifs ; que force est de relever au surplus que les offres en cause, outre que leur dénomination différente est exclusive de tout risque de confusion, ne répondent pas aux mêmes besoins, celle de la société PETIT POUCET permettant à des jeunes étudiants, sélectionnés par concours, de recevoir un don d’argent pour le financement d’un projet de création d’entreprise, celle de la BPCE proposant aux jeunes actifs de moins de 28 ans un prêt remboursable pour s’installer dans la vie ;

Que le jugement sera encore confirmé en ce qu’il a rejeté les demandes au fondement de concurrence déloyale ;

Qu’il sera fait droit en équité, aux demandes formées au titre des dispositions de l’article 700 du Code de procédure civile ;

PAR CES MOTIFS,

Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions,

Condamne la société PETIT POUCET aux dépens de la procédure d’appel qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l’article 699 du Code de procédure civile et à payer à chacune des sociétés intimées une indemnité de 10.000 euros au titre des frais irrépétibles.

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